Forêts millénaires, désert fleuri et cactus géants
A plus de 3 000 m d’altitude, dans des conditions de vie extrêmes, le désert d’Atacama accueille pourtant une flore bien résistante. De nombreux cactus y cohabitent dont le fameux cardón grande, le plus grand des cactus. Son tronc peut atteindre jusqu’à 10 m de hauteur. Et ce n’est pas tout : en moyenne, tous les 5 à 8 ans, le désert se recouvre de millions de fleurs et métamorphose le paysage. Le phénomène du « desierto florido » (désert fleuri) s’explique par l’influence d’El Niño. Ce courant marin chaud produit une hausse de précipitations salvatrices pour le désert le plus aride du monde : ainsi plus de 200 espèces végétales, dont les graines et autres bulbes étaient enfouis sous le sol, fleurissent pour créer un magnifique spectacle de couleurs. Ce phénomène s'observe particulièrement autour de Copiapó, Vallenar et Llanos de Challe (dans la région d'Atacama). Au sud, c’est le vert qui domine au Chili ! Parmi les magnifiques forêts de conifères (sapins, cyprès, cèdres,) et d'alerces (Fitzroya cupressoides), on observera également de beaux arrayanes et l'emblématique pin Araucaria. En Patagonie, certains arbres, comme le mélèze, auraient plus de 3 000 ans ! Résistantes aux étés froids et aux vents violents, les forêts s'étendent jusqu'au sud où elles sont parfois impénétrables, gardiennes d'une flore encore peu connue et étudiée : elles sont dites « primaires » c'est-à-dire dire non touchées et exploitées par l'homme. On y trouve notamment le coigüe, le roble de Chiloé (Nothofagus nitida) et le hêtre de Magellan (Nothofagus betuloides), ainsi que le luma et le canelo.
Des camélidés emblématiques
De la faune chilienne, on connaît surtout l‘emblématique lama, un mammifère qui, en plus d’être exploité pour sa laine et sa viande, fut l’animal de charge des cultures préhispaniques dans les Andes. Mais le lama n’est pas le seul camélidé présent au Chili. Il existe trois autres espèces : la vigogne, l’alpaca et le guanaco. La vigogne est plus petite, plus fine, plus élégante. Impossible à domestiquer, elle vit en groupe d’une douzaine d’individus mené par un seul mâle. On verra paître des vigognes sur les bofedales (sortes de tourbières) du Parc national Lauca, ou alors sur les hauteurs andines autour de San Pedro de Atacama. Le commerce de leur laine réduisit considérablement leur population (on estimait les populations de vigognes à 2 millions d'individus au temps des Incas), mais aujourd’hui le Chili peut fièrement exhiber la réussite de son entreprise de conservation : les vigognes sont légion dans le Nord du pays. Domestiqué, l’alpaga est un peu plus court sur patte que le lama et exhibe une belle fourrure aussi bien blanche que noire ou grise. Le guanaco, enfin, est sauvage ; à peine plus grand que la vigogne, il arbore un beau pelage doré et se balade dans les Andes du nord ou tout au sud, dans la région de Magallanes et en Terre de Feu.
Une faune sauvage et endémique
C’est au Chili que l’on trouve le plus petit des cervidés du monde. Il se distingue en deux espèces : le pudú du nord et celui du sud. Le premier vit au nord de la cordillère des Andes et a un pelage brun foncé orangé sur le cou. Le pudú du sud vit dans les forêts denses de Patagonie et peut monter à de fortes altitudes au-delà de 3 000 mètres. Son pelage le protège davantage du froid et est entièrement brun-roux. Cependant, il reste discret et il est très difficile d'en croiser. L'espèce a été classée comme espèce vulnérable par l’UICN. Vous aurez également peut-être le privilège d'apercevoir un huemul (Hippocamelus bisulcus), ou cerf du Sud andin, un cervidé de taille moyenne (1 m de hauteur pour un poids de 70 kg au mieux) en danger d'extinction. Cette espèce survit encore dans les parcs nationaux chiliens de Torres del Paine ou ceux de la région d’Aisén, mais on trouve aussi des spécimens dans le parc Lauca, au nord près d’Arica.
Ces cervidés cohabitent avec les autres espèces protégées que sont les pumas (le plus grand des félins au Chili, où se trouvent quatre sous-espèces ; on peut les observer avec de la chance un peu partout dans le pays) et les chats sauvages. On rencontrera également plusieurs espèces de renards, comme le renard des Andes (ou renard de Magellan) ou le renard de Darwin. Enfin, dans le parc Lauca, on observera les vizcachas, des rongeurs proches du chinchilla à la tête de lapin et à la queue d’écureuil ! Le pays compte aussi deux espèces de tatous : le quirquincho, que l’on retrouve sur l’Altiplano andin, et le tatou velu de Patagonie, ou pichi, présent en Patagonie argentine.
La faune marine
Les spécimens les plus impressionnants de la faune marine chilienne sont les baleines qui viennent notamment croiser dans les eaux du détroit de Magellan et le long des côtes de la Terre de Feu. Les dauphins ainsi que les manchots, les lions et éléphants de mer habitent les côtes chiliennes sur toute leur longueur, de la Patagonie jusqu’au qu’au nord de Copiapó. Dans le Parc national Francisco Coloane, notamment autour de l’île Carlos III, au sud-ouest de Punta Arenas, on peut observer une colonie de baleines à bosse. On sait depuis peu qu’il existe une colonie d’une centaine de baleines bleues au nord-ouest de Chiloé : ce sont les plus grands mammifères marins à avoir jamais existé, pouvant atteindre 33 m de long pour un poids entre 80 et 160 tonnes ! Enfin, il est possible d’observer sept espèces de baleines en Antarctique : de Minke (Balaenoptera acutorostrata), bleue (Balaenoptera musculus), pygmée (Caperea marginata), rorqual commun (ballena fin ou Balaenoptera physalus), rorqual boréal (ballena sei ou Balaenoptera borealis), à bosse (Megaptera novaeangliae) et franche australe (Eubalaena australis). De couleur noire avec le ventre blanc, les orques peuvent également s’observer au large des côtes. Elles se reconnaissent à leur aileron noir qui dépasse de l’eau. Ces prédateurs, qui se distinguent des baleines par leurs dents, se déplacent souvent en petit groupe de dix. Les grands mâles peuvent mesurer plus de 9,50 m et peser plus de 8 tonnes. On pourra particulièrement les observer entre février et avril, ou aux mois d’octobre-novembre.
Mammifères marins aux similarités assez proches, les phoques et les otaries appartiennent à deux familles différentes : les phoques n’ont pas de pavillon d’oreille et rampent avec leur nageoire plaquée au sol tandis que les otaries ont des oreilles visibles et des nageoires plus grandes. Les éléphants de mer appartiennent à la famille des phoques. Avec leur nez en forme de trompe, les mâles peuvent mesurer jusqu’à 5 m et peser 4 tonnes. La polygamie est joyeusement mise en pratique : le harem d’un mâle peut compter jusqu’à 38 femelles. Pendant la période de mise à bas des femelles, celles-ci ne cessent d’être menacées par les mâles célibataires, qui livrent des combats violents contre les « seigneurs du harem » et tentent d’enlever les nouveau-nés. De la famille des otaries, le lion de mer, aussi appelé otarie à crinière, peuple une bonne partie du littoral. Ils s’alimentent et vivent dans la mer, en revanche, ils se reposent et se reproduisent à terre. C’est un animal pacifique qui a toujours été chassé et massacré : qualifiés « d’ennemis » par les pêcheurs chiliens, ils sont protégés par une interdiction de chasse depuis les années 90 qui oblige l’activité humaine à cohabiter avec les lions de mer.
Les oiseaux
Le manchot de Magellan est l’un des animaux les plus emblématiques du pays. Cet oiseau de mer mesure en moyenne 45 cm et pèse entre 4 et 5 kg. Chaque année, il revient au même nid qui n’est autre qu’un terrier. Les couples, monogames, se forment en septembre, et les œufs sont pondus un mois plus tard... Vers fin janvier, les petits manchots, pesant environ 1 kg, entament leur dure vie de nomade. Ils sont la proie de multiples animaux, comme les renards ou les goélands. Seulement 10 % des petits manchots parviendront au bout de leur première année. En avril, c’est l’heure des grandes migrations vers la haute mer : sous l’eau, le manchot est un virtuose et peut atteindre 25 km/h en pleine course. Parmi les manchots, on trouve également le gorfou, qui se distingue par ses plumes jaunes sur la tête et le manchot de Humboldt.
L’espèce d’oiseau la plus remarquable est le condor, dont l’envergure peut atteindre plus de 3 m en plein vol. Les mâles sont plus grands et sont ornés d’une crête ; contrairement à leurs parents, qui ont le col blanc autour du cou, les jeunes ont le col de couleur grise. Par chance, il est possible d’en apercevoir dans tout le pays, tout au long de la cordillère. En plus du très charismatique condor des Andes, on trouve aussi albatros hurleurs, flamants roses, perruches, hiboux, aigles, faucons, éperviers, oies bernache, perruches, moineaux, ibis, martins-pêcheurs… et même des colibris !
Les flamants s’admirent notamment sur les lagunes du salar d’Atacama ou sur les lagunes de la cordillère des Andes, à l’est de San Pedro. Les plumes du flamant sont de couleur rose foncé, et l’on différencie les espèces notamment sur la couleur de leurs pattes : celles du flamant chilien sont grise et rouge, celles du flamant de James sont roses et celles du flamant andin sont dorées.
En Patagonie ou dans l’extrême nord, on fera connaissance avec le plus grand des oiseaux chiliens : le ñandu. Cette espèce d’autruche peut peser entre 15 et 25 kg.
La nature reprend ses droits
Ecosystème menacé, déforestation, espèces en voie d’extinction… le souci de la conservation est devenu essentiel. Au Chili, il est géré par des organisations gouvernementales (CONAF) et des initiatives privées. De nombreuses zones protégées assurent la préservation de la richesse de la biodiversité du pays. Ainsi, en 2017, le Chili annonçait la création de la plus grande aire marine protégée d’Amérique latine afin de préserver les eaux de l’île de Pâques. Mais la défense de l’environnement a pris une tournure historique en 2021 avec l’annonce d’une nouvelle Constitution pour le pays : l’Assemblée constituante compte introduire dans la Constitution la protection des écosystèmes. En attendant les futures avancées environnementales (en 2023, la nouvelle Constitution avait été rejetée), le pays signe tout de même quelques succès : disparu dans plusieurs zones de Patagonie depuis les années 1990, le puma a fait son grand retour et s’impose aux côtés de nombreuses autres espèces aujourd’hui classées Monument national. Deux espèces de huemuls, cervidé typique des Andes, ont été érigées en monuments nationaux pour éviter leur extinction. Aujourd’hui, plusieurs parcs nationaux essaient d’assurer sa survie, en particulier le Parc national Patagonia et le Parc national Pumalin, créés à l'initiative de l’entrepreneur Douglas Tompkins. Grâce aux partenariats entre Tompkins Conservation et le gouvernement chilien, des millions d’hectares ont pu être protégés au cours des trois dernières décennies. En 2019, La Ruta de los Parques, un sentier de randonnée de 2 800 km a également été inauguré par la Tompkins Conservation : elle représente plus de 90 % du territoire protégé sous la catégorie des Parcs nationaux au Chili, préservant ainsi 11,5 millions d’hectares d’espaces vierges (soit 3 fois la superficie de la Suisse).