Découvrez l'île Maurice : Environnement

Riche d’un patrimoine naturel varié, l’île Maurice est souvent associée à l’image d’un paradis terrestre. Pourtant, la protection de son environnement n’a pas toujours été sa priorité. Et l’est-elle vraiment aujourd’hui ? La déforestation intensive qui eut cours pour la culture de la canne, l’urbanisation galopante au rythme des développements économiques et touristiques, la pollution due aux plastiques et autres déchets ont contribué à la dégradation des milieux. Au même titre que le réchauffement climatique, ils mettent en péril l’environnement d’une île fragile. Si les associations locales sont de plus en plus actives, Maurice souffre d’un manque global d’engagement politique pour faire face aux défis environnementaux. Économie et écologie seraient-elles définitivement incompatibles ? Non, mais il faudra compter sur une prise de conscience écologique des citoyens et sur les acteurs du tourisme pour préserver ce qui peut encore l’être.

Une biodiversité menacée

Sur des îles de la taille de Maurice ou de Rodrigues plus qu’ailleurs, les interactions directes et indirectes du vivant – autrement dit l’environnement – sont à la fois plus rapides et visibles que dans d’autres écosystèmes. Il est évident que depuis l’arrivée récente de l’homme sur l’île, la biodiversité a largement diminué en raison de la déforestation (quasi-disparition de la forêt endémique qui ne représente plus de 2 % du territoire), de la chasse (avec l’exemple de l’emblématique dodo), de l’introduction d’espèces invasives (qui ont participé au déclin de la biodiversité), de l’urbanisation et de la pollution.

Le réchauffement climatique est une autre menace de poids. Par rapport à l'ère pré-industrielle, selon un rapport publié par l'ONU en décembre 2020, la trajectoire que nous suivons actuellement est celle d'un réchauffement de + 3,2 °C d'ici la fin du siècle. Pour Maurice, cela pourrait se traduire par une plus grande fréquence et intensité des événements extrêmes, la montée des eaux et la submersion d'une partie des terres – notamment d’un quart des plages en raison de l’érosion. Le réchauffement et l'acidification des océans affecteraient également la biodiversité, menaçant l'ensemble de la chaîne alimentaire. Le blanchiment des coraux déjà en œuvre est un signal important.

Se pose aussi le problème de l’eau, les réseaux d'assainissement dans l'île étant encore largement insuffisants, au point que la population est soumise une bonne partie de l’année à un système de rationnement – d’où notamment le grand nombre de citernes que l’on peut apercevoir sur les toits des maisons quand on traverse les villes.

L’environnement, un enjeu politique et économique

La gestion des déchets est une autre question centrale. L'île génère plus de 540 000 tonnes de déchets par an pour lesquels aucune gestion acceptable n'est encore en place. A ce jour, Maurice ne dispose que d'un seul centre d'enfouissement des déchets, d'une capacité insuffisante pour traiter l'ensemble des flux et respecter des conditions de salubrité. Le volume de déchets sauvages présent est estimé à plus de 100 000 tonnes annuelles, suscitant la colère des habitants et des touristes. Face à ce problème, le gouvernement a initié une démarche d'économie circulaire. En novembre 2020, a été inaugurée la première déchetterie de l'île. Cinq autres sites devraient ouvrir mais le projet a pris du retard. La nouvelle installation permettra de développer des filières de valorisation matière, notamment pour les biodéchets (compost). Mais il faut aussi éduquer la population au tri et au recyclage, et cela prend du temps...

D'autres initiatives ont vu le jour, comme des opérations de nettoyage des plages et des campagnes de sensibilisation. L'entreprise Food Wise s'engage contre le gaspillage alimentaire et la sous-nutrition, en mettant en relation producteurs d'excédents alimentaires et associations de solidarité. L'initiative Precious Plastic Mauritius développe quant à elle l'upcycling (création d'objets avec des déchets plastiques).

Même s’ils sont encore insuffisants, des efforts ont été également conduits en faveur de la préservation de l’eau et des ressources vitales (les cultures, notamment). Signataire des accords de Paris sur le climat, adhérant à de nombreux programmes internationaux environnementaux, engagé à l’échelle régionale, l’État mauricien semble faire preuve d’une volonté politique de faire de Maurice une destination écoresponsable. Reste qu’une certaine vision du développement économique, soumis à des obligations environnementales trop fortes selon ses promoteurs, a laissé à l’abandon une campagne comme « Maurice, île durable » initiée en 2008. La marée noire de l'été 2020 illustre la situation contradictoire dans laquelle se débat l'île… et le monde. Un vraquier japonais, battant pavillon de complaisance, a échoué dans le récif corallien en déversant une partie de sa cargaison d'hydrocarbure. La gestion de la situation par le gouvernement a été largement critiquée par la population qui a initié un grand mouvement de protestation et surtout de solidarité et d’actions. La crise engendrée a focalisé cette partie du monde sur la nécessité d'agir à toutes les échelles, à l'image de bien des ONG et notamment du mouvement de la jeunesse Fridays for Future.

S’engager !

Tout n’est cependant pas noir dans l’île verte et turquoise. Des actions de protection ont vu et voient de plus en plus le jour, grâce notamment au travail d'ONG qui assurent des missions de préservation des milieux, de réintroduction d'espèces, de recherche mais aussi de sensibilisation des publics. La Mauritian Wildlife Fundation a par exemple initié des programmes de protection de la forêt primaire, et sauvé notamment de l’extinction trois d’espèces d’oiseaux endémiques : la crécerelle, le pigeon des mares et la grosse cateau verte. L'association le Vélo Vert accueille le public dans sa ferme et forme les agriculteurs à l'agroécologie. Parallèlement, plusieurs associations très actives bataillent pour la protection de l’environnement marin : la Reef Conservation Mauritius, la Mauritius Marine Conservation Society, le Mauritius Underwater Group et Eco Sud. Si ces organismes ne sont pas officiellement associés, ils se réunissent de façon régulière pour mener, ensemble, des actions de plus grande envergure comme l’installation de bouées permanentes pour l’ancrage des bateaux au niveau des sites de plongée, la création de récifs artificiels en coulant de vieux bateaux, la mise en place de projets d’études de certaines espèce menacées, etc.

Les actions initiées par la société civile mauricienne se multiplient également. Ainsi que le souligne un article de Média Terre publié en 2019 : « Différents projets-pilotes de développement de l'agriculture raisonnée, agroécologie et permaculture servent de laboratoires aux groupes agroalimentaires locaux. L'abandon planifié de la monoculture cannière offre une réelle opportunité aux productions diversifiées bio, légumes, fruits endémiques, plantes médicinales et aromatiques, huiles essentielles, vanille… cultures à plus forte valeur ajoutée et permettant aussi l'essor d'une consommation plus locavore. Le développement durable passe également par un soutien éthique et solidaire à l'artisanat local. »

Le secteur privé n’est pas non plus en reste grâce, surtout, aux grands groupes hôteliers qui engagent investissements et efforts pour créer les vacances durables de demain. À l’image de l’île Rodrigues, bien plus avancée en terme de protection de l’environnement et déjà sans plastique, des actions sont mises en œuvre pour bannir définitivement le plastique des hôtels et offrir des séjours axés sur la protection de l’environnement et le soutien à l’économie et à la culture locales. Le mouvement Positiv Impact du groupe 100 % mauricien Attitude en est un bel exemple. Financé par l’Union européenne et piloté par la Mauritius Tourism Authority (désormais membre du Global Sustainable Tourism Council), le projet SUS (Sustainable Island Mauritius) devrait aussi aider les réceptifs locaux à innover en matière de développements verts.

Parcs nationaux et zones préservées

La volonté de préserver les richesses de l’île et notamment son patrimoine naturel s’est aussi manifestée par la création, dans les années 1950-1960, d’une dizaine de petites réserves ou domaines protégés, dont la plus importante est le Parc National des Gorges de la Rivière Noire. Situé au sud-ouest de l’île, celui-ci couvre 6 574 ha et recèle la dernière grande forêt indigène de Maurice : Macchabée. Plusieurs chemins de randonnée y sont balisés.

Les autres réserves naturelles concernent surtout de petites îles proches de Maurice, à l’intérieur ou à l’extérieur du lagon. Trois d’entre elles, situées au nord et strictement protégées sans faire l'objet de recherche scientifique, sont inaccessibles au grand public : le Coin de Mire, l’île aux Serpents (qui abrite non des reptiles mais des centaines d’oiseaux de mer) et l'île Ronde qui accueillait encore récemment un programme de réhabilitation et de protection mis en place par le ministère de l’Agriculture et la Mauritian Wildlife Foundation pour ses plantes endémiques, ses deux espèces de serpents non venimeux (le burrowing boa, sans doute disparu, et le keel scale boa, toujours représenté), ses six espèces de lézards et surtout ses centaines de milliers d’oiseaux de mer, dont le pétrel, le fouquet, le paille-en-queue à brin rouge, etc. Entre le Coin de Mire et ces deux îlots se tiennent l’île Plate et l’îlot Gabriel, protégés bien qu’accessibles aux vacanciers en journée.

Côté mer, seules (seulement ?) deux réserves naturelles maritimes ont été créées à l’intérieur du lagon : le parc marin de la Baie aux Tortues au nord-ouest et celui de Blue Bay au sud-est. Ce dernier est le seul à bénéficier d’une protection internationale pour la beauté de ses coraux vivants. Des plongées et excursions en bateau à fond de verre y sont organisées tous les jours.

Les sanctuaires mauriciens de l’écotourisme

Les autres champions toutes catégories de la protection écologique, privés pour la plupart, sont situés dans le sud, plus sauvage que le reste de l'île. Il s'agit de l’île aux Aigrettes (sud-est), de la Vallée de Ferney (sud-est), d’Ebony Forest Reserve (sud, Chamarel) et de Lavilleon Adventure Park (à Chamarel aussi). L'île aux Aigrettes a été transformée en réserve en 1965 et abrite les dernières parcelles de forêt côtière endémique. La vallée de Ferney existe depuis 2007 et rassemble une belle palette de plantes et arbres endémiques et indigènes. Plus récentes, Ebony Forest Reserve et Lavilleon Adventure Park ont ouvert en 2017 et concentrent, entre autres, de belles densités d'ébéniers endémiques de Maurice. Ouvertes à tous, ces réserves sont payantes et leur découverte se fait plutôt en compagnie d'un guide ou sur des sentiers clairement délimités.

Autre protection, celle procurée par l’Unesco. Elle concerne le Morne Brabant, cette montagne basaltique située au sud-ouest de l’île, classée au patrimoine mondial et gérée par Le Morne Heritage Trust Fund. Emblématique et très important aux yeux des Mauriciens, le morne abrite une intéressante biodiversité (plantes endémiques) mais également un paysage culturel lié à l'histoire coloniale de l'île. Des sentiers de randonnée gratuits et ouverts à tous y ont été balisés. Situé au sud, au cœur de la forêt primaire de Macchabée, l'Unesco Biosphère de Bel Ombre, espace naturel forestier unique, ne se visite, elle, que sur autorisation. Elle existe depuis très longtemps mais son accès difficile l’a protégée de tout endommagement ou pillage. Son écosystème intact recèle des arbres et oiseaux endémiques rares.

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