Découvrez l'Autriche : Beaux-Arts (Peinture / Sculpture / Street Art / Photo)

Plus de cent musées vous tendent les bras dans la capitale autrichienne. Vienne saura satisfaire les amateurs d’arts classiques comme les amoureux des courants les plus novateurs. Car l’Autriche, ce n’est pas que l’opéra et les maîtres expressionnistes. Depuis 2015, la foire internationale Viennacontemporary attire les acteurs phares de la scène culturelle. Des centaines de galeries du monde entier participent à l’événement. Son pendant off, Parallel Vienna, s’impose comme un tremplin en proposant une plateforme effervescente. Côté art urbain, les berges du Danube déploient des kilomètres de fresques d’une grande variété dans une ambiance de fête. Cela pour compléter les journées à vagabonder dans les musées d’exception que compte l’Autriche. Comme le temps file quand on est bien entouré, les musées restent ouverts très tard en soirée. Vous êtes tout de même sur la terre d’Egon Schiele et de Gustav Klimt… Émotions garanties !

Classicisme et baroque

La tendance académique qui règne durant des siècles est représentée en peinture par Daniel Gran (1694-1757) et en sculpture par Georg Raphael Donner. Même dans les grandes compositions de Gran, comme celle du plafond du palais Schwarzenberg à Vienne, la simplicité de lecture et les codes du classicisme triomphent. Son chef-d'œuvre demeure la fresque de la coupole de la Bibliothèque impériale, à Vienne. L'influence de maîtres comme Troger puis Maulbertsch, détourne doucement l'école viennoise du modèle offert par Gran.

Le sculpteur Georg Raphael Donner (1693-1743) étudie auprès de Giovanni Giuliani avant de développer un style baroque. Inspiré par la nature et l’Antiquité, il forme de grands noms de la sculpture. Pour l’anecdote, il a été choisi en 2002 pour orner des pièces de monnaie. Dans l’espace public, vous tomberez sans doute sur des œuvres monumentales d’Anton Dominik Fernkorn (1813-1878). Il compte parmi les artistes qui se rebellaient contre les normes picturales. Dans ses statues équestres, il réécrit les codes en exprimant la fougue d’un cheval dressé sur deux pattes comme le montre la statue de l’Archiduc Charles vainqueur de la bataille d’Essling.

Les grands maîtres sont réunis au Kunsthistorisches Museum : Bruegel, Raphaël, Vermeer, Velázquez, Titien et tant d’autres. La surprenante Innsbruck invite à s’imprégner de grandeur au château d’Ambras. Levez le nez, les plafonds ouvragés font écho aux tableaux de Rubens, Velázquez ou encore Van Dyck.

Sécession viennoise

Ce courant regroupe des artistes disparates attachés à promouvoir l’Art nouveau en Autriche. La revue Ver Sacrum (« Printemps sacré ») exprime leur quête révolutionnaire. Le mouvement est financé par la grande bourgeoisie cultivée, dont Karl Wittgenstein, père du philosophe du même nom.

L’année 1897 voit émerger la Sécession viennoise. La société autrichienne refuse alors d’admettre l’affaiblissement de sa puissance. Seule une minorité culturelle perçoit la réalité sociale et politique du moment. En Europe, les conventions picturales volent en éclats, effervescence qui touche aussi Vienne. Plus généralement, l’année 1900 sonne l’heure du modernisme autrichien.

Gustav Klimt (1862-1918) entre à l’École des Arts appliqués à 14 ans. En 1883, il ouvre un atelier et se détache progressivement de l’académisme, sous l’influence de Fernand Khnopff, Arnold Böcklin et Auguste Rodin. En 1886, il décore les escaliers du Burgtheater de Vienne. Grâce au succès remporté par ses fresques du Kunsthistorisches Museum, il reçoit une commande ministérielle pour décorer les trois facultés de l’université de Vienne. Ses peintures allégoriques – La Philosophie, La Médecine et La Jurisprudence – seront achevées en 1908. La Philosophie scandalise la bonne société, qui considère la fresque comme un outrage aux bonnes mœurs. Quatre-vingt-sept professeurs signeront une pétition à l’encontre de Klimt. La Médecine sera détruite en 1945. En 1897, Klimt fonde et dirige la Sécession viennoise, suivi par quarante artistes. Conçu par Olbrich, le bâtiment de la Sécession est inauguré en 1898. A l’occasion de l’exposition Beethoven, il orne le hall de la Sécession d’une monumentale frise décorative illustrant la Neuvième Symphonie. Il s’agit d’une allégorie de l’homme qui, dépassant ses aspects sombres, accède à l’amour parfait. Intéressé par ce qui se passe dans le reste de l’Europe, il organise, en 1903, une immense exposition sur l’impressionnisme. A partir de 1904, il peint des paysages, influencé par Gauguin et Seurat. A sa mort en 1918, Klimt laisse derrière lui plus de 2 500 dessins. Ses toiles mondialement connues, mêlant peinture et dorure, au premier rang desquelles Le Baiser, sont exposées au musée du Belvédère ou au Léopold.

Formé à Vienne, Oskar Kokoschka (1886-1980) s’établit à Berlin où il fréquente les milieux artistiques d’avant-garde, centrés autour de la revue Der Sturm. Après avoir vu une exposition de Kokoschka en 1911, l’archiduc François-Ferdinand déclare : « Cet homme mérite qu’on lui rompe tous les os. » A 22 ans, l’artiste publie son premier roman Les Garçons rêveurs, puis quelques poèmes et drames. En 1912, il entretient une liaison malheureuse avec Alma Mahler, dont il peindra de nombreux portraits. Une série de portraits de cette époque, grimaçants et déformés, révèlent la volonté de l’artiste d’exprimer la psychologie cachée de ses modèles. Grièvement blessé pendant la Première Guerre mondiale, il se consacre de 1919 à 1924 à l’enseignement de la peinture à Dresde. Plus tard, il se réfugie en Angleterre pendant le second conflit mondial et peint des toiles contre l’Anschluss et le fascisme. Reconnu comme un peintre expressionniste majeur, il fonde en 1953 à Salzbourg « l’école du regard ».

Figure majeure de l’expressionnisme, Egon Schiele (1890-1918) connaît une carrière fulgurante. Sa production, fort diverse, explore les techniques du portrait, du paysage, du symbolisme. Son père sombre dans la folie et meurt en 1905, laissant sa famille dans le plus grand dénuement. Malgré l’opposition de son tuteur et oncle, sa mère parvient à présenter Schiele au concours de l’Académie des Beaux-Arts de Vienne, en 1906. Il y est admis comme invité pendant un an, alors qu’un compatriote, un certain Adolf Hitler, en est évincé pour « mauvaise composition ». A 17 ans, sa rencontre avec Klimt marque le début d’une amitié et d’une admiration réciproques. A 19 ans, après trois pénibles années d’apprentissage académique dont il supporte très mal la discipline, Schiele peut enfin suivre sa vocation. Il parvient à survivre grâce au soutien d’un critique d’art influent, Arthur Rœssler, qui convainc les collectionneurs d’acheter ses toiles. Installé à la campagne, il se fait expulser de deux villages à cause de son mode de vie débridé et est même arrêté, en 1912, pour atteinte à la morale et détournement de mineure. Il ne restera que vingt-quatre jours en prison, et sera ainsi auréolé d’une image de martyr. A sa sortie, Schiele s’installe à Vienne et se lie à une fille de bonne famille, qu’il épouse en 1915. Parvenu à éviter les combats de la Grande Guerre, il est affecté à un emploi de bureau dans un camp de prisonniers, puis au Musée royal et impérial de l’armée. Son mariage rend son inspiration plus sereine et semble le libérer de ses démons intérieurs. A la mort de son ami Klimt, en 1918, Schiele devient la coqueluche du Tout-Vienne. Son exposition à la Sécession est un succès. Cette année est celle de la reconnaissance artistique, mais l’euphorie ne dure pas. Son épouse décède. Il lui survivra trois jours et meurt à l’âge de 28 ans. 42 toiles d’Egon Schiele sont exposées au Musée Leopold, dans MuseumsQuartier, parmi des centaines de chefs-d'œuvre de l'art moderne autrichien.

Actionnisme viennois

La politique conservatrice imposée par la bourgeoisie puis par le régime nazi suscite la rébellion. Un groupe d’artistes renoue avec l’esprit de révolte qui animait l'expressionnisme autrichien, représenté par Oskar Kokoschka, Alfred Kubin et Egon Schiele. L'actionnisme viennois se fonde sur un art de la performance et place la réalité au cœur de leurs thématiques. Il regroupe de 1960 à 1971 des artistes majeurs qui prendront ensuite des directions diverses, excepté Hermann Nitsch dont l’œuvre reste intimement liée à ce mouvement. Le manifeste fondateur de l’actionnisme est réalisé par Nitsch, Otto Muehl et Adolf Frohner, alors que les artistes s’emmurent dans une cave en affichant le manifeste Orgue de sang sur la porte. Le mouvement réunit également les peintres Günter Brus et Alfons Schilling, le sculpteur Adolf Frohner, et le photographe et peintre Rudolf Schwarzkogler.

Photographie

Les amateurs de photographie profiteront du World Press Photo de Vienne pour se rendre au Westlicht qui prolonge ainsi son célèbre concours. Une collection d’appareils anciens complète les expositions temporaires. En Autriche, la photo a toujours été considérée comme une discipline artistique. L’Association des photographes d’art, fondée à Vienne en 1881, organise sa première exposition internationale en 1891. Parmi les pionniers du genre, Raoul Hausmann naît en 1886 à Vienne. En 1900, la famille de ce touche-à-tout de génie s’installe à Berlin. En 1917, Il fonde le groupe Dada Berlin et écrit des articles et des poèmes, réalise des collages et fait des dessins. Il participe à la première exposition de photomontages en 1931. Il voyage en France et en Espagne, où il explore les possibilités de la photo tout en lui consacrant des textes théoriques. A la fin de la guerre, il s’installe à Limoges, où il meurt en 1971. Connu comme photographe, ce provocateur disait pourtant : « Je ne suis pas un photographe ». Plus tard, Ernst Haas (1921-1986) se forme tout d’abord à la peinture. Exilé à Zurich, il décide de devenir photographe. Ses reportages montrent le retour des prisonniers de guerre. Après ses premières expositions, il rejoint l’agence Magnum et publie dans Life, Paris Match ou Esquire, avec le soutien de Robert Capa.

Les courants majeurs des XIXe et XXe siècles sont représentés au Musée d’Art moderne de Salzburg. C'est en fait un double lieu qui réunit le Rupertinum (contemporain) et le Mönchsberg. L’art photographique occupe une place de premier plan dans sa collection de 55 000 pièces, qui comprend aussi des sculptures, des peintures et des dessins.

De nos jours

La ville de Linz cache bien son jeu. En plus de son joli centre historique, le Höhenrausch propose un parcours artistique sur les toits de la ville. Tous les ans, un thème est donné aux installations qui font écho aux panoramas format grand angle. Toujours à Linz, le Lentos Kunstmuseum est l’un des plus importants lieux dédiés à l’art moderne et contemporain autrichien avec une collection de 13 000 œuvres, toutes disciplines confondues. Les graffeurs ont cédé à l’attrait des entrepôts du port de Linz. A pied ou en bateau, longez le Mural Harbo jalonné de 200 fresques.

La capitale sait aussi allier art urbain et architecture grandiose. A vélo cette fois, remontez les 17 km du canal du Danube bordés de murs peints. Sur les quais, les fresques alternent avec des stands de restauration, des bars branchés et des tavernes. A noter, la station Spittelau Subway rivalise presque avec les galeries d’art. Dans le quartier tendance de Mariahilf, des œuvres murales s’étalent entre les galeries indépendantes et les boutiques de créateurs. Le passage street art, au cœur du Museumsquartier, est le carrefour de toutes les cultures. C’est l’un des six « passages » qui font office de lieux d’exposition en plein air. A l’intérieur, traquez l’Invader ! Dans le même périmètre, la Kunsthalle Wien présente la diversité de l’art contemporain à travers des concepts scénographiques innovants.

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