La musique traditionnelle
Dès que l’on pense musiques traditionnelle ou folklorique en Slovénie, le nom de l’Avsenik Ensemble (les frères Slavko et Vilko Avsenik) vient immédiatement à l’esprit. Dans les années 1950, la fratrie a modernisé le répertoire folklorique (polka, valse, metlika, tkalecka et toute la musique traditionnelle de Carniole) sous le nom d’Oberkrainer. Gorgé de cuivres et d’accordéon, le genre fait vibrer non seulement les Slovènes, mais aussi le public allemand depuis plus de cinquante ans. Dès lors, d’autres revivalistes du folklore leur ont emboîté le pas comme Katice et ses très beaux chœurs féminins ou des groupes tels que Kurja Koža, Volk Folk, Tolovaj Mataj et Trutamora Slovenica qui utilisent des instruments anciens (cymbalum, ocarina, gudalo, etc.). D’ailleurs, si l’on souhaite entendre de la tamboura – qui comme son nom ne l’indique pas est un luth –, des ensembles comme Tamburaši iz Cirkulan ou Beltinška banda axent leurs compositions autour de l’instrument.
Envie d’entendre sur scène de la musique traditionnelle ? Un rendez-vous incontournable du folklore slovène est Lent, le festival international d’été à Maribor. Installé entre la tour de Jugement et la tour d’Eau au bord de la rivière Drave, il est le plus grand événement en plein air de Slovénie. Au programme, de la musique traditionnelle, bien sûr, mais pas uniquement puisqu’on y entend aussi du jazz ainsi que du classique.
La musique classique
Pour trouver le premier grand nom de la musique classique slovène, il faut remonter au XVIe siècle avec Jakob Petelin Gallus (1550-1591), dit Carniolus. Compositeur de messes, madrigaux et motets, il a laissé une musique sacrale de grande qualité. Le XIXe siècle a quant à lui été marqué par l’influence du romantisme allemand et emmené par deux grands noms : Jurij Mihevec (1805-1885) et Hugo Wolf (1860-1903). Le premier est un chef d’orchestre et pianiste auteur de près de 500 œuvres, aussi considéré comme le père de l’opéra slovène. Le second est un maître du lied romantique, auteur de plus de 200 lieder sur des textes de Möricke, Eichendorff ou Goethe, ainsi que de deux opéras. Au XXe siècle, la musique savante slovène se dynamise. On y croise notamment Marij Kogoj (1895-1956), symbole de l’avant-garde expressionniste des années 1920, ou encore le plus traditionaliste Lucijan Marija Škerjanc. Figurant parmi les compositeurs plus importants de la musique slovène moderne, Škerjanc est un pilier du romantisme local à l’œuvre noire et tempétueuse. Chez les contemporains, citons Primož Ramovš, sérialiste très prolifique qui a œuvré pour le renouveau musical, ainsi que Vinko Globokar, compositeur de musique contemporaine et fabuleux tromboniste franco-slovène qui a complètement renouvelé la technique de l’instrument.
Aujourd’hui, la Slovénie continue de briller sur la scène musicale internationale avec des artistes de renom comme la mezzo-soprano Marjana Lipovšek, le compositeur de musique de chambre et symphonique Vito Žuraj ou encore Marko Letonja, chef d’orchestre à la tête du Philharmonique de Strasbourg de 2012 à 2021. Le pays peut aussi compter sur deux grands orchestres de qualité, l’Orchestre symphonique de la RTV (la radio) et l’Orchestre philharmonique slovène. Avec une histoire de plus trois cents ans (ses origines remontent au tout début du XVIIIe siècle), ce dernier figure parmi les plus anciennes institutions musicales au monde. Quelques noms connus en ont eu la direction au travers des âges comme l’impressionnant chef franco-américain George Pehlivanian ou encore le Strasbourgeois Emmanuel Villaume. L’orchestre réside à la magnifique Slovenska Filharmonija dont le riche passé est palpable. Autre grand lieu du pays pour la musique classique, l’Opéra national slovène. Avec son style néo-Renaissance, cet imposant édifice gorgé d’histoire slovène propose des opéras d’auteurs internationaux et locaux ainsi que des classiques du ballet autant que des œuvres contemporaines. Aussi, il est bon de surveiller la programmation du Cankarjev dom. Ce centre culturel, le plus important de Slovénie, peut accueillir des grands noms du classique tels que Carlos Kleiber, Zubin Mehta, Claudio Abbado, Lorin Maazel, l’Orchestre philharmonique de Vienne ou l’Orchestre symphonique d’Israël. En province, le Théâtre national slovène de Maribor propose des représentations de théâtre (en langue slovène), mais également des ballets et opéras (classiques et modernes, slovènes et internationaux), ainsi que des concerts d’orchestre symphonique. Courant septembre, Maribor organise d’ailleurs un festival avec une programmation toujours bien élaborée, traversant la musique savante du classique au contemporain.
Le rock et le metal
Lorsqu’on apprend qu’un groupe comme Siddharta est capable de remplir les stades du pays, on comprend quelle passion les Slovènes éprouvent pour le rock. Le genre est on ne peut plus populaire – jusqu’à ses extrêmes comme le punk ou metal –, surtout quand il dégage un parfum de vitriol. Le champion toutes catégories dans le domaine est sans conteste le groupe Laibach. Si le nom vous dit quelque chose, c’est parce qu’en 2015, il était le premier groupe étranger à se produire en Corée du Nord. Habituée à la controverse depuis ses origines, Laibach est issu du mouvement artistique des années 1990 Neue Slovenische Kunst qui jouait, souvent à la limite du bon goût, avec l’esthétique fasciste. Des poils à gratter qui ont ouvert la voie à une scène metal plus que fournie.
Symbole de la culture alternative à Ljubljana (et dans le pays), Metelkova est un passage obligatoire. Installé dans une ancienne caserne (derrière la gare) depuis 1991, l’endroit voit se côtoyer une faune bigarrée, artistes divers, plasticiens ou musiciens. L’ambiance est assez unique, un peu berlinoise, et la programmation de ses divers clubs et scènes très bonne. L’autre haut lieu culturel de la capitale est le Kino Šiška. Plus cool, moins punk dans l’esprit, ce centre de culture urbaine très dynamique propose expos, pièces de théâtre, projections et concerts de musique expérimentale, indépendante, pop ou électronique. Erik Truffaz, Yann Tiersen ou encore Goran Bregović sont déjà passés par là. On peut s’y rendre les yeux fermés, on y trouvera toujours quelque chose à son goût. Pour les amateurs de rock, Maribor propose un lieu intéressant avec un penchant pour le metal, Pekarna. Autrement, non loin de Novo Mesto se déroule Rockotocec, un gigantesque festival dédié au genre.
Le jazz
On dirait presque un secret bien gardé tant elle est peu mis en lumière, mais la Slovénie dispose d’une très belle scène jazz avec quelques noms importants dans le circuit actuel. Parmi eux, citons le guitariste Primož Grašič qui a collaboré avec des grands noms comme Toots Thielemans, le saxophoniste Vasko Atanasovski réputé pour ses très belles touches slaves, le bassiste et contrebassiste Žiga Golob plutôt expérimental, Bojan Gorišek aussi connu pour ses interprétations de Satie ou Glass, Milko Lazar et ses belles improvisations au clavecin, ou encore Lado Jakša, clarinettiste un temps collaborateur de Laibach.
Si les grandes villes du pays disposent de scènes très agréables pour le jazz – comme le Gajo Jazz Club à Ljubljana ou le très élégant et bien programmé Jazz Club Satchmo à Maribor –, la Slovénie propose surtout deux beaux festivals dédiés. Le premier, le Jazz Festival Ljubljana, est une institution dans la capitale, qui a dépassé sa soixantième édition, le second est le festival international de Jazz de Cerkno qui convie de grands noms dans une petite ville à chaque fin mai.
La danse
Nul besoin de s’éterniser sur place pour s’en rendre compte : les Slovènes aiment danser. Par-dessus tout, ils aiment leurs danses traditionnelles. En Slovénie, on ne manque jamais une occasion de danser : lors des fêtes de village (les veselica), les mariages et même dans quelques discothèques qui diffusent de la musique traditionnelle. Paradoxalement, étant donné la taille de son territoire, la Slovénie jouit d’une grande richesse de danses. Comme dans beaucoup de pays de la région, la valse et la polka sont très populaires, mais plus singulières à la Slovénie, on trouve la fameuse štajeriš que l’on voit régulièrement et qui se danse en couple, la čardaš, à exécuter aussi à deux et « en miroir », la lender, la sotiš, la mazurka ou encore la zibenšrit. Selon les terroirs, l’influence des voisins italiens, autrichiens, croates ou hongrois est logiquement palpable ici ou là.
Étant donnée son importance dans le patrimoine slovène, la danse s’invite au sein de nombreux événements comme le festival de Ljubljana, une tradition depuis 1953, ou Folkart, le festival international du folklore à Maribor, un événement féerique initié en 1993. D’ailleurs, quiconque de passage à Maribor aux alentours d’octobre ferait le bon choix en se rendant au festival de la Vieille Vigne (Stara Trta) qui célèbre les vendanges avec beaucoup de musique, de vin et (forcément) de danses. Tout aussi typique et atypique, le festival de Musique classique de Radovljica fête le retour vers les vallées des vaches qui paissaient jusqu’alors en altitude avec beaucoup de danses traditionnelles. Un bon moment.