C'est la plus belle des deux rives du lac, ou du moins la plus variée en termes de paysages, mais aussi la plus difficile d'accès. Loiyangalani est la seule bourgade sur la rive Est du Turkana. On l'atteint soit par la route du sud (Maralal, Baragoi, South Horr), soit par le nord (Marsabit, Kalacha, désert de Chalbi, North Horr). Après des heures interminables de pistes souvent défoncées, l'arrivée sur la rive du lac est un moment d'intense émotion tant le décor est somptueux et presque irréaliste. Le Turkana étant en effet le plus grand lac alcalin, mais aussi le plus grand lac permanent en milieu désertique au monde.

Selon la légende Turkana, tout ici, à l'origine, n'était que plaines couvertes d'une herbe verte et grasse. Les hommes y avaient élu domicile pour la beauté de ces prairies. Ils avaient accès à une source d'eau magique, intarissable. Il suffisait de soulever une pierre et l'eau surgissait. Les femmes ne devaient cependant jamais oublier de reboucher l'entrée de la source une fois leur récipient rempli. Seulement, voilà... Un jour, l'une d'elles oublia. Et l'eau coula, coula, se déversa en abondance sur les prairies environnantes jusqu'à les recouvrir entièrement... Voilà pourquoi le lac aurait cette couleur vert jade qui le caractérise...

Loiyangalani est une petite ville, qui ne comptait que 1 000 habitants dans les années 1990. Aujourd'hui, les constructions en dur sont rares, la ville ne s'est guère développée en termes d'infrastructures, mais sa population serait estimée à quelques 30 000 habitants, et la localité prend littéralement des allures de camp de réfugiés. A ceci près que l'habitat traditionnel prédomine. Les communautés autrefois nomades (Turkana, Samburu, Rendille...) se sont sédentarisées, fragilisées par les conflits régionaux et inter-communautaires et les sécheresses répétées. Elles ont trouvé refuge là où l'aide alimentaire internationale leur permet de survivre et où l'eau potable reste accessible.

Au nord de la ville vit (ou survit) l'une des plus petites tribus du Kenya : le peuple El Molos. Ce groupe ethnique de pêcheurs, qui vit ici depuis plus de deux mille ans, compte aujourd'hui à peu près 1 070 individus et perd peu à peu son identité culturelle. L'arrivée des touristes (leur nombre reste toutefois encore très raisonnable...) et surtout la multiplication des mariages avec d'autres ethnies (notamment avec les Turkanas et les Samburus) ont profondément modifié la façon de vivre et les coutumes des El Molos. Le gouvernement en était même venu, pour éviter une disparition totale de la tribu, à accorder une allocation à tout enfant né de deux parents El Molos ! Aujourd'hui, deux villages El Molos subsistent. Il est possible d'aller à leur rencontre, moyennant un petit droit de visite.

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Retour de la pêche - Village El Molo, lac Turkana. Sophie ROCHERIEUX
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