Art et sculpture antiques
L’art antique s’est développé dans un style sobre et élaboré à la fois. Il se caractérise notamment par ses sculptures, l’une des formes qui a le mieux survécu au passage du temps. Trois grands sculpteurs grecs ont marqué le pays : Phidias (vers 490-431 av. J.-C.), Polyclète (Ve siècle av. J.-C.) et Praxitèle (vers 390-330 av. J.-C.).
Élève d’Agéladas d’Argos, Phidias a été chargé par son ami Périclès de la décoration du Parthénon et de la direction de la construction de l’Acropole. Ses œuvres les plus connues sont l’Athéna Promachos (vers 453), bronze de 8 mètres de hauteur placé sur l’Acropole, et l’Apollon de Cassel (vers 460). Son talent s’illustre en particulier dans les statues chryséléphantines (en ivoire et en or) d’Athéna pour le Parthénon et de Zeus pour le temple d’Olympie, dont il ne reste aujourd’hui que des fragments.
Polyclète est un sculpteur et architecte originaire d’Argos, élève d’Agéladas. Ses œuvres obéissent à la théorie des proportions du corps humain qu’il avait énoncée dans son ouvrage le plus important, le Canon (littéralement, « la règle »). La statue du Doryphore, Le Porteur de lance, considérée comme une base du classicisme et Le Diadumène, représentant un athlète se couronnant (conservé au musée d’Athènes), servirent de modèles à ses héritiers. Lysippe n’a-t-il pas appelé le Doryphore « son seul maître » ?
Né à Athènes, Praxitèle a créé avec l’Aphrodite de Cnide (copie antique) un type d’Aphrodite dont l’harmonie des courbes a influencé l’époque hellénistique. Il ne reste de lui malheureusement qu’une seule œuvre : la célèbre statue en marbre représentant Hermès jouant avec l’enfant Dionysos, conçue pour le temple d’Héra à Olympie. Elle se trouve aujourd’hui au musée d’Olympie.
Un autre genre qui a traversé les siècles est bien entendu la mosaïque, considérée comme l’une des formes d’art les plus anciennes du monde. Déjà populaires pour leur résistance dans le monde mésopotamien, avant d’être décoratives, elles ont pu démontrer leur qualité durable plus que de raison. C’est vers le VIIIe siècle avant notre ère que les Grecs s’emparent de cette technique et la modernisent en développant un processus de fabrication beaucoup plus élaboré. L'utilisation d'unités très petites et l’introduction de la géométrie et de la symétrie permettent de faire apparaître des images complexes, véritables chefs-d’œuvre, le plus souvent réalisées au sol. Elles représentent principalement des dieux païens, des hommes ou des animaux et nous en apprennent beaucoup sur la culture et les modes de vie antiques. Pour découvrir les mosaïques et d’autres formes d’art antique, on recommande bien évidemment le Musée archéologique d’Athènes, doté d’une très belle collection.
Art byzantin
L’art byzantin est essentiellement caractérisé par des œuvres et des édifices religieux orthodoxes (églises, monastères, basiliques, fresques, icônes…). Les églises byzantines répondent toujours aux mêmes formes architecturales : un plan en croix grecque avec une coupole centrale. Elles représentent l’univers, la création divine, et sont ornées par des fresques, des mosaïques et des icônes. Dans la religion orthodoxe, l’icône est vénérée comme une image sacrée. Elle est plus qu’une simple représentation, elle est censée incarner un saint ou une divinité. Dans les églises et les foyers, l’icône est sollicitée pour ses miracles et ses pouvoirs de guérison. Rendez-vous au splendide Musée byzantin d’Athènes pour apprécier les trésors de cette civilisation, de ses débuts jusqu’à sa chute en 1453.
Un art moderne foisonnant connecté au continent
Après la période des peintures religieuses datant de l’époque byzantine, les influences se sont multipliées, notamment italiennes. À partir du XIXe siècle, les artistes grecs, très attachés à leur culture et à leur héritage, s’expriment à travers leur histoire. La guerre d'indépendance marque notamment les esprits et suscite des vocations : Theodoros Vryzakis (1814-1878) et Dyonissios Tsokos (1814-1878) ont illustré cette période avec talent, entre portraits et scènes de batailles, très idéalisés.
Les peintres grecs célèbres des XIXe et XXe siècles sont fortement influencés par les écoles de Munich, comme Nikiforos Lytras (1832-1904), Constantinos Volanakis (1837-1907), Nikolaos Gysis (1842-1901), et Georgios Iakovides (1853-1932). Dans le courant du XXe siècle, on laisse peu à peu plus de place et d'influence aux impressionnistes et modernes, la plupart des convaincus de l'école de Munich se tournant vers celle de Paris. On abandonne pour un temps la représentation d'événements historiques pour préférer des paysages de la Grèce remplis de couleurs et de lumière. On sent poindre cette influence chez Périclès Pantazis (1849-1884) ou Nikolaos Lytras (1883-1927), deux figures de l’impressionnisme grec. Petit à petit, différents mouvements postimpressionnistes émergent : fauvisme et expressionnisme, entre autres. Ainsi, Constantinos Maleas (1879-1928), proche du fauvisme, est considéré comme l'un des précurseurs de l'art moderne grec, avec ses paysages du pays dont il présente des interprétations très personnelles. Outre ces évolutions tournées vers l'Occident, les influences byzantines et orientales persistent, notamment dans les arts populaires. Theophilos Hadjimichail (vers 1870-1934) se fait connaître comme peintre naïf dans les années 1930.
En termes de sculpture, on retient Giannoulis Halepas (1851-1938). Né à Tinos, une île qui a une tradition de sculpture sur marbre, Giannoulis Halepas est le plus réputé des sculpteurs grecs de l'époque moderne. Sa mère, pensant que la maladie mentale dont était victime le sculpteur était à l'origine de son art, a malheureusement détruit une partie de ses œuvres. On peut admirer son talent à la Glyptothèque d'Athènes mais aussi en parcourant les allées du Premier cimetière d'Athènes.
Après-guerre, des peintres grecs, comme l'expressionniste George Bouzianis (1885-1959) ou Yannis Tsarouchis (1910-1989), continuent de développer l’art moderne et permettent l’éclosion de styles originaux. Alekos Kontopoulos (1904-1975) est quant à lui le premier artiste moderne ayant introduit l'abstraction dans la peinture grecque. À la fin du XXe siècle, Giorgio De Chirico (1888-1918), un Italien né en Grèce, fonde l'art métaphysique, alors même que Giannis Kounellis (1936-2017) figure parmi les chefs du mouvement Arte Povera et que Takis s’impose comme le grand maître de l’art cinétique (1925-2019). On peut admirer les œuvres de ces artistes à la Pinacothèque nationale d'Athènes.
Du daguerréotype à la photographie contemporaine
Les daguerréotypes ont été mentionnés pour la première fois dans la presse grecque en 1842, trois ans après leur invention en France, tandis que le premier portrait grec a été réalisé un an plus tard. Une dizaine d’années après commencent à s’établir les premiers photographes grecs et la photographie devient très populaire dans les décennies qui suivent. À l’époque, c’est une technique avant d’être un art et les praticiens doivent avant tout répondre aux commandes de leurs clients. La photographie se limite donc principalement au portrait et à la documentation de sites naturels ou de monuments. Au début du XXe siècle, les techniques se simplifient, ce qui provoque une forte augmentation du nombre de photographes professionnels, mais aussi l’apparition d’une photographie amateur. Ces années de trouble politique sont également marquées par l’essor du photojournalisme, un nouveau genre permettant de documenter les guerres dans les Balkans et en Asie Mineure.
Dans les années 1920-1930, un style proprement grec se développe, un pictorialisme singulier influencé par la littérature et l’ethnographie. Elly Seraidari (1899-1998), mieux connue sous le nom professionnel de Nelly’s, active en Grèce de 1924 à 1939, est une figure clé de cette période dite «classique» d’avant-guerre, tout comme Spiros Meletzis (1906-2003). Pendant la guerre et après, Voula Papaioannou (1898-1990), Dimitris Harissiadis (1911-1993) et Kostas Balafas (1920) comptent parmi les photographes les plus reconnus. Papaioannou est une figure particulièrement remarquable. Autodidacte, elle commence la photographie à l’âge de quarante ans et produit pendant deux décennies un corpus extrêmement abouti, permettant à la Grèce de se démarquer sur la scène de la photographie moderne. Son travail documente l’époque de l’occupation et de la guerre civile et est doté d’une forte dimension sociale.
Dans les années 1950, l’intérêt pour la photographie se renouvelle, avec la création de la Greek Photographic Society et la tenue de plusieurs grandes expositions. Néanmoins, le phénomène s’essouffle rapidement face au manque de soutien institutionnel et de professionnalisme, jusqu’à l’apparition d’une « nouvelle photographie grecque » au milieu des années 1970. La création de centres photographiques et de programmes d’études spécialisés permet alors un renouvellement de la scène grecque. Ces nouvelles générations, bien que ne formant pas une école homogène, s’éloignent des clichés visuels grecs (plages ensoleillées et ruines antiques) et explorent leur environnement sous de nouveaux angles, dans ses aspects sociaux, urbains, post-industriels, ou bien simplement d’un point de vue intime. Le pays est aujourd’hui doté d’une culture photographique riche et dynamique, que l’on peut découvrir au Hellenic Center for Photography par exemple, où se tient chaque année le Athens Photo Festival.
Un art contemporain en plein essor
La création contemporaine en Grèce se concentre à Athènes et à Thessalonique. Athènes est devenue, au cours de ces dernières années, l'un des centres d'art contemporain les plus dynamiques et créatifs en Europe. Un réseau d'artistes, de passionnés et de mécènes s'est tissé, fort de ses ramifications à l'international. Les galeries d'art contemporain sont très nombreuses dans le centre d'Athènes, surtout à Kolonaki. Chaque année, divers événements comme Art Athina, la foire internationale d’art contemporain d’Athènes (www.art-athina.gr) ou ADAF, le festival d'Arts numériques (adaf.gr), ponctuent le calendrier. La Biennale d'Athènes a lieu une fois tous les deux ans (athensbiennale.org). Le musée national d'Art contemporain (EMST) n'a ouvert qu'au début des années 2000 et, bloqué par la crise économique, n'a pas pu développer ses collections aussi rapidement que prévu – ce n'est que depuis la Documenta 14 qu'il s'est considérablement rempli, et il vaut vraiment le détour.
En effet, ces dernières années, la ville a été choisie pour accueillir différents événements d’ampleur mondiale qui ont contribué à l’ancrer sur la scène artistique internationale. En 2016, le musée Benaki a été l’hôte de « As one », un programme de sept semaines durant lequel a été présentée la « Méthode Abramovic » en présence de la célèbre performeuse serbe Marina Abramovic. Au printemps 2017, c'est l'exposition allemande Documenta qui décide de s'installer en terres helléniques, pour bénéficier d'une énergie créatrice en contraste avec celle de Kassel, la ville germanique d'origine. En correspondance, les deux villes se targuent d'échanger connaissances et visions du monde. Learning from Athens (Apprendre d'Athènes) est le sous-titre de cette exposition colossale qui mobilise la ville entière pendant près de quatre mois. Le musée national d'Art contemporain, le musée Benaki, l'école des Beaux-Arts, le conservatoire d'Athènes et l'université d'Architecture sont les principaux bâtiments ayant abrité les œuvres, performances, concerts, projections et autres discussions programmés pendant la Documenta. En outre, les parcs de la ville ainsi que ses places centrales ont été partiellement habités par cette vague artistique. À cette occasion, de nombreux artistes contemporains locaux sont mis en valeur, à l’instar de Zafos Xagoraris, pour n’en citer qu’un. Né en 1963, il a étudié à l'école des Beaux-Arts d'Athènes et au Massachusetts Institute of Technology (MIT). Son travail défie les genres artistiques classiques et consiste principalement en des installations publiques, des événements participatifs, des dispositifs visuels ou sonores. La Documenta a donc un impact à long terme sur la scène locale, agissant comme une vitrine et un tremplin de l’art contemporain grec. Néanmoins, de nombreuses oppositions émergent face à cette grande manifestation, jugée contradictoire avec le propos qu’elle est censée soutenir, et ce sont notamment les anarchistes du quartier d’Exarchia qui la critiquent le plus violemment, refusant l'instrumentalisation de la crise économique grecque et de celle des réfugiés, faisant bloc contre « l'intellectualisme », « l'exotisme » et « le post-colonialisme » associés à la Documenta.
En plus des événements majeurs qui ont secoué la ville ces dernières années, de nombreux lieux culturels soutiennent et abritent la création contemporaine. Les centres culturels Onassis/Stegi, la Stavros Niarchos Foundation et le Ileana Tounta Contemporary Art Center sont les plus renommés. AMOQA, le musée des Arts queer (amoqa.net), a ouvert ses portes récemment, encourageant les artistes dont les problématiques sont reliées aux thèmes du corps et de la sexualité, des sujets abordés de manière politique à travers performances, documentaires et débats. Certains petits bars athéniens accueillent également des expositions d'art contemporain éphémères, comme Barrett et TAF à Psirri.
Le street art, symbole de l’énergie rebelle athénienne
Puisque l’origine du mot graffiti provient du grec graphein, qui signifie « écrire », « dessiner » ou « gratter », le street art en Grèce prend tout son sens. La pratique telle que nous la connaissons aujourd’hui a fait un long chemin avant d’arriver à Athènes, où elle jouit depuis quelques années d’une très grande popularité. En effet, Athènes est une ville très colorée et ses murs sont couverts d’affiches, de décorations et de fresques en tous genres. On trouve plusieurs immenses peintures murales, apparues grâce au soutien de la municipalité, notamment à l’occasion des Jeux olympiques de 2004. Nombre d’entre elles ont été réalisées par de jeunes artistes locaux, dont certains sont issus de l’école des Beaux-Arts d’Athènes, l’une des rares écoles à posséder un programme d’études dans cette (in)discipline !
Le street art est ainsi devenu l’un des caractères distinctifs de la ville, se fondant à merveille dans son énergie populaire, rebelle et festive. Des grandes fresques très travaillées aux expressions plus protestataires et spontanées, ces graffitis sont un moyen d’expression publique sans équivalent et font des murs de la ville un véritable lieu de débat. C’est dans les quartiers proches du centre-ville, en particulier à Exarchia, Psyrri, Anafiotika et Gazi, que l’on en retrouve le plus. Bien que ces œuvres puissent disparaître à tout moment, voici quelques pièces iconiques qui devraient durer : les peintures murales réalisées par le collectif brésilien Os Gemeos et la fresque emblématique d’Alexandros Vasmoulakis. Les premières se situent sur les murs de l’ILPAP, le dépôt de bus situé à proximité de la zone archéologique de Kerameikos. Elles se caractérisent par un style très coloré et par des personnages à la peau jaune. La seconde se trouve sur la place principale de Psyrri et se distingue par son aspect très graphique, à mi-chemin entre collage, photographie et peinture.