
L'emblématique Everest fait rêver les alpinistes depuis toujours. Chaque année, de plus en plus de voyageurs, pas forcément expérimentés, se pressent vers le toit du monde. Si en 2010, 200 permis d'ascension furent délivrés, le chiffre grimpe, lui aussi, à 478 en 2023. Une telle surpopulation du sommet vient avec son lot d'inconvénients. Abandon de déchets, d'équipement, d'excréments et même de cadavres, nombreux sont les impacts du tourisme à haute altitude sur l'environnement.
Un tourisme coûteux
L'ascension de l'Everest a récemment profité d'un joli coup de pub de la part du Youtubeur français Inoxtag et de son documentaire "Kaizen". Dans celui-ci, défi personnel et dépassement de soi éclipsent totalement les enjeux de pollution et d'atteinte à la biodiversité soulevés par la pratique. Une problématique de la popularisation du trek est néanmoins ressortie du grand succès de ce documentaire : son aspect pécuniaire.
En effet, gravir l'Everest depuis le Népal a un coût et celui-ci, comme le sommet, est très élevé. Pour une expédition, comptez en moyenne entre 60 000 et 120 000 euros tout compris. Une activité donc pratiquée par une certaine élite. L'ascension, d'abord réservée à une poignée de professionnels, se transforme donc de plus en plus en "tourisme d'altitude", dénoncé par les alpinistes certifiés. Nombre de ces touristes viennent d'ailleurs tenter l'ascension sans avoir les compétences requises pour un tel effort physique, se mettant en danger ainsi que leurs guides. Malheureusement, cocher une case dans sa to-do list n'a pas qu'un coût financier, elle a surtout un coût environnemental conséquent.
L'ascension de l'Everest et son impact sur l'environnement
En 2023, cette publication Instagram du guide Tenzi Sherpa fait vite le buzz. Couvert de déchets, le camp IV, perché à 7 900m d'altitude suscite l'indignation. Matériel d'alpinisme, bouteilles d'oxygène et débris de tentes en plastique jonchent la neige. Le monde découvre ce que les alpinistes savent depuis longtemps : l'Everest est devenu une poubelle.
Des tonnes de déchets solides sur l'Everest
L'ascension étant dangereuse, porter ses déchets rajoute du poids et donc des risques. De nombreux touristes laissent donc beaucoup de choses derrière eux sans se soucier des conséquences. Si cette pratique existe depuis le début des expéditions, la démultiplication de ces dernières impacte de plus en plus la pollution de la montagne. Depuis 2014, le Népal impose aux expéditions une caution de 4000 dollars, qui sera remboursée aux alpinistes redescendant au moins huit kilos de déchets. Une mesure respectée par seulement la moitié des alpinistes.
Sont principalement mis en cause l'insouciance des touristes, ainsi que le manque de surveillance dans les camps hauts. En 2017, alpinistes et sherpas ont redescendu près de 25 tonnes de déchets solides de la montagne, selon une étude du Sagarmatha Pollution Control Committee (SPCC).
Ascension de l'Everest : l'impact sur l'environnement des déchets humains
S'ajoutent à cela 15 tonnes de déchets humains. En effet, touristes et alpinistes font souvent leurs besoins dans les mêmes endroits de la montagne, sans vouloir ramasser derrière eux. En altitude, les excréments ne se décomposent pas. Depuis des décennies, la glace fondant fait ressurgir de nombreux déchets humains, contaminant la neige autour des camps. En plus des odeurs, cela pose un véritable problème sanitaire, la neige étant utilisée pour boire et cuisiner.
L'article à lire pour comprendre pourquoi et comment calculer son empreinte carbone.
Parmi les nouvelles règles imposées par le pays se trouve également l'obligation de descendre les corps des personnes décédées pendant l'expédition, chose qui ne se faisait pas forcément avant. Véritable cimetière à ciel ouvert, l'Everest compterait près de 200 cadavres le long de ses flancs. Certains sont même devenus des points de repères, comme celui que l'on surnomme Green Boots de par la couleur de ses chaussures, reposant à vers les 8460 mètres d'altitude.
Qu'en est-il des sherpas ?
Les sherpas, du peuple du même nom originaire du Tibet, sont les principaux guides et porteurs des expéditions de l'Himalaya. Habitués à la vie en haute montagne, il furent rapidement choisis pour leur condition physique par les Occidentaux désireux de grimper les sommets.
Aujourd'hui encore, ce sont eux qui portent la plupart des équipements des alpinistes et qui les guident. Malgré leurs avantages génétiques en montagne, ils n'en sont pas moins soumis aux risques de chute ou d'avalanche, et le port des charges rajoute à ces risques. Les porteurs perçoivent de faibles salaires compte tenu de leurs conditions de travail. Leur situation se précarise de plus en plus avec le surtourisme alpin. Ils manquent souvent de contrat de travail bien règlementé et d'une assurance médicale décente. En parallèle, le gouvernement népalais a généré un chiffre d'affaires de plus de 4 millions de dollars rien qu'avec la vente des permis d'escalader.