LAC D'OHRID

Ce lac (Охридско Езеро/Ohridsko Ezero, Liqeni i Ohrit) est l’un des plus vieux au monde et le plus profond des Balkans. Propice à la baignade en été (la température de l’eau dépasse alors 23 °C), il s’étend sur 349 km² de part et d’autre de la frontière avec l’Albanie, dont 250 km² en Macédoine du Nord, ce qui en fait le deuxième plus grand lac des Balkans après celui de Shkodra, entre l’Albanie et le Monténégro, qui affiche une superficie de 370 à 530 km² selon les saisons. Mais ce dernier contient à peine 2 millions de mètres cubes d’eau, contre plus de 55 millions de mètres cubes pour le lac d’Ohrid. Bordé par les villes d’Ohrid et de Struga, en Macédoine du Nord, et par celle de Pogradec, en Albanie, le lac d’Ohrid est aussi appelé « lac de Pogradec » en albanais (Liqeni i Pogradecit). Situé à 693 m d’altitude, il offre de magnifiques paysages : il est cerné de montagnes, notamment à l’est, où le mont Galičica (2 254 m d’altitude) le sépare du grand lac Prespa (259 km²). Quant à sa faune et à sa flore, très riches, elles lui valent d’être inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1979 et à la convention de Ramsar sur les zones humides d’importance internationale depuis 2021.

Un vieux cousin du Titicaca. De forme ovale, le lac mesure 30,4 km de longueur du nord au sud et 14,8 km de largeur d’est en ouest. Sa profondeur moyenne est de 155 m avec une profondeur maximale de 288,70 m. C’est presque autant que le lac Léman, entre la France et la Suisse, qui descend jusqu’à - 310 m. Mais c’est très loin du lac Hornindalsvatnet, en Norvège, qui détient le record de profondeur en Europe avec - 514 m. En revanche, le lac d’Ohrid fait partie des plus anciens lacs de la planète avec le lac Titicaca (entre le Pérou et la Bolivie), le lac Baïkal (en Russie), le lac Tanganyika (entre le Burundi, la République démocratique du Congo, la Tanzanie et la Zambie) et la mer Morte (entre Israël, la Cisjordanie et la Jordanie). Tous datent de la même période : ils se sont formés il y a environ quatre millions d’années. Le lac d’Ohrid se distingue aussi par sa géologie et son hydrographie très particulières. Il est en effet creusé dans une roche calcaire dense, qui l'empêche de se vider par le fond. Il est alimenté principalement par le lac Prespa, situé à une altitude plus élevée (853 m) et dont les eaux passent par des galeries naturelles sous le mont Galičica pour ressortir sous forme de sources aux abords du lac d’Ohrid. Les plus importantes de ces résurgences sont situées sur la rive sud-est, autour du monastère Saint-Naum, près de la frontière albanaise.

Des eaux translucides. En passant sous terre, les eaux sont filtrées et ressortent particulièrement claires dans le lac d’Ohrid assurant ainsi une étonnante transparence jusqu’à 22 m de profondeur. Le lac est aussi alimenté par une quarantaine de cours d’eau. Lui-même constitue la principale source du Drin noir, une rivière de 177 km de longueur qui s’écoule depuis Struga (sur la rive nord) pour ensuite passer en Albanie, où elle rejoint le Drin blanc venant du Kosovo pour former le fleuve Drin qui se jette dans la mer Adriatique. Le lac d’Ohrid constitue ainsi le deuxième bassin versant (2 600 km²) de Macédoine du Nord après celui du Vardar (22 000 km²). Pour autant ses eaux s’écoulent très lentement : on estime qu’il leur faut soixante-dix ans pour se renouveler entièrement, contre seulement treize ans pour celles du grand lac Prespa.

Une biodiversité exceptionnelle. Le lac d’Ohrid est sans doute celui au monde le plus riche en termes de biodiversité. Du fait de son ancienneté et de ses propriétés naturelles, il abrite 1 200 espèces animales et végétales, dont un grand nombre sont endémiques, c’est-à-dire qu’elles n’existent qu’ici. On trouve par exemple dix espèces de poissons endémiques. La plus emblématique est la truite d’Ohrid (Salmo letnica), servie dans de nombreux restaurants sous le nom d’ohridska pastrmka (koran en albanais). C’est surtout chez les plantes et les invertébrés que l’endémisme est impressionnant avec une éponge d’eau douce, 12 crustacés, 20 algues, 63 mollusques et 178 petits organismes qui sont complètement uniques au monde. Cet ensemble constitue un vaste garde-manger pour des milliers d’oiseaux qui viennent hiverner ici, en particulier des espèces en danger comme le très rare et imposant pélican frisé, la fuligule nyroca – un joli canard plongeur –, le cormoran pygmée, l’aigle criard ou l’aigle impérial. L’écosystème du lac d’Ohrid est toutefois menacé par l’homme. La forte fréquentation touristique engendre une pollution croissante et presque tous les marais ont été asséchés pour les besoins de l’agriculture. Il ne subsiste désormais plus que le marais de Studenčište (Studenčiško Blato) qui accueille 79 sortes d’oiseaux et une riche variété de vers aquatiques et d’insectes. Mais celui-ci est situé juste au sud-est de la ville d’Ohrid, où les complexes hôteliers sont en plein développement, si bien que le nombre d’oiseaux est en nette diminution. Certaines espèces endémiques de poissons sont en voie de disparition, notamment le sandre d’Ohrid (Salmo ohridanus), localement appelé belvica (belushka en albanais). La pression exercée par l’homme se ressent surtout dans la partie située en Macédoine du Nord. La ville d’Ohrid est la capitale du tourisme national. Comme le pays ne possède pas d’accès à la mer, les plages de la rive orientale sont bondées en été. Cette partie du lac est d’ailleurs surnommée la « Riviera macédonienne ».