Les premières lueurs sourdent sur le vernis de la mer Noire. Le port s'ébroue. Au loin s'élèvent les clameurs polyglottes du séculaire marché de Privoz. Des trains matineux à destination de Kiev, 500 km au nord, mugissent férocement. Odessa s'éveille. Ville que l'impératrice Catherine II voulut occidentale et libre dès sa fondation en 1794, elle n'a jamais réellement été ni russe ni ukrainienne. Le commerce, permis par son port franc et la circulation ininterrompue d'hommes venus des quatre points cardinaux, l'ont faite rayonnante et multiple. Aujourd'hui, ils sont plus d'un million, partagés en 130 nationalités, à insuffler leur caractère aux allées garnies d'arcades, créant une mosaïque ethnique étourdissante dont la gastronomie s'est fait l'ambassadrice. Flânerie cosmopolite dans les couloirs d'une cité chaleureuse et pétillante.

Ville refuge, ville d'artistes

C'est à l'architecte hollandais Franz de Volan qu'Odessa doit son plan en damier. Le long de ses avenues courent des enfilades d'habitations aux façades pastel ocre, bleues ou roses, ponctuées de palais Art nouveau ou néo-Renaissance nimbés d'une once de décadence. Le nez au vent, on évolue dans ce décor pittoresque à l'atmosphère iodée, au gré des rues portant le nom de ceux qu'elles hébergèrent : rue des Albanais, des Juifs ou des Grecs. La cité a de tout temps accueilli parias ou Juifs chassés de Moscou, mais aussi artisans, marchands et marins, pour lesquels elle devint " Odessa-mama ". Ici, chaque maison porte sa légende, son histoire, sombre ou heureuse... et sa cour, où les enfants s'amusent pendant que leurs aïeux font causette.

Miraculeusement épargné par la Seconde Guerre mondiale, le patrimoine d'Odessa fait l'orgueil de ses habitants. Au n° 17 du boulevard des Français trône le centenaire Arc mauritanien d'où part un funiculaire de 1971 vers la plage Otrada, tandis que le Primorski boulevard - image parfaite de style Empire russe du XIXe siècle - longe un bord de mer paresseux, avec à ses extrémités les splendides colonnes sculptées de l'hôtel de ville et le classique Palais du comte Vorontsov de 1828. Entre les deux, l'emblématique escalier Potemkine - immortalisé par le film Le Cuirassé Potemkine (1925), relatant l'insurrection odessite de 1905, déroule ses innombrables marches. La rue Deribasovskaia abrite quant à elle le Passage, galerie marchande édifiée en 1900, auréolée d'une voûte de verre et ornée de moulages baroques, au bout duquel s'étire le Jardin de la ville, son vernissage et ses monuments aux Odessites illustres. C'est que cette ville-carrefour, ouverte sur le monde et aimée de Balzac et Tchekhov, vit naître bien des artistes : le jazzman Leonid Utesoz, les auteurs satiriques soviétiques llf et Petrov (Odessa compte toujours de formidables conteurs de blagues) ou encore Isaac Babel, qui par ses Récits d'Odessa conféra à l'ancien quartier juif de Moldovanka (dont la communauté créa Little Odessa, à New York, dans les années 1970) son aura romantique et canaille. Impossible d'éluder l'imposant Opéra bâti en 1884. Façade de style baroque viennois - de son toit s'élancent deux muses -, les 500 m² de la salle présentent un mélange de styles éclectiques, entre baroque, rococo et Renaissance. Sublime.

Douceur de vivre méridionale

Surnommée la Marseille ukrainienne, Odessa fait montre d'une douceur de vivre toute méditerranéenne. Si les festivals (le Festival international du film d'Odessa notamment), galeries et musées lui assurent un dynamisme culturel inouï, l'été apporte avec lui une délicieuse atmosphère vacancière. On déambule alors entre paisibles parcs et avenues lascives en quête de la fameuse Maison à un Mur, on s'essaie au négoce et à la pratique des langues au Marché Privoz ou Starokonny. On se presse sur les 30 km de plages citadines aussi. Celle d'Arcadia - reliée à celle de Langeron par une rue piétonne et ombragée - ou celle de Tchkalova comptent parmi les plus populaires. Quand vient la nuit, les bords de mer deviennent le territoire des clubbers, distillant de puissantes nappes de musique électronique. De fait, Odessa est réputée à travers toute l'Europe de l'Est pour sa phénoménale nightlife.

Si l'hiver est l'occasion de nombreuses fêtes et que le printemps voit fleurir les acacias, l'automne enrobe la cité d'une lumière douce et dorée, invitant les badauds à s'engouffrer sous terre pour élucider le mystère des catacombes odessites, ou bien à s'attarder au comptoir de cafés désuets. On n'hésitera pas non plus à explorer l'offre gastronomique de la ville, miroir de ses cultures, à la fois grecque, bulgare, française et italienne... La perle de la mer Noire est un condensé de mystères oubliés, qu'à l'occasion les vents ravivent.

 

Infos futées

 

Quand ? C'est un climat continental humide sans saison sèche qui régit la météo d'Odessa. Si les hivers sont plutôt froids, sans passer sous la barre du 0 °C, la ville ne manque pas de charme pour autant. On lui préférera toutefois la saison estivale, période bénie des bains de plage sous un soleil rayonnant, avec des températures autour de 28 °C. Le printemps et l'automne sont tout aussi agréables et la ville est moins peuplée.

 

S'y rendre. Odessa est situé à environ 440 km de la capitale Kiev. Compter 1h de vol.

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Durée. Odessa se visite très bien le temps d'un long week-end, bien que pour en profiter à fond une pleine semaine soit l'idéal. On pourra également lui consacrer une longue étape à l'occasion d'un séjour en Ukraine.

 

Public. De par son histoire et sa douceur de vivre, Odessa est une ville qui convient à toute sorte de public. Amateurs d'histoire et d'architecture, promeneurs nostalgiques, férus de spectacles vivants, vacanciers paresseux, artistes, gourmets, fêtards... On se sent vite comme à la maison !

 

Les plus. Un patrimoine architectural unique et une vie culturelle dynamique.

Une ville cosmopolite aux habitants accueillants.

Une gastronomie plurielle.

 

Les moins. Des températures un peu fraîches en hiver.

La barrière de la langue. La grande majorité des Odessites se débrouillent assez bien en anglais.

 

Utile. Pour préparer au mieux son escapade ukrainienne.

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