SANCTUAIRE DES GRANDS DIEUX

Le Sanctuaire des Grands Dieux s'est sûrement développé à partir de la vénération de divinités chthoniennes, qui précèdent le panthéon des dieux grecs. Le culte de ces déités se référant à un monde souterrain a sûrement été apporté à Samothrace par les colons Phéniciens. La principale déité vénérée ici fut certainement la "Terre Mère" ou "Grande Mère". Au fil des siècles et des colonisations, le Sanctuaire s'ouvrit au culte d'autres divinités, que les archéologues n'ont toujours pas identifiées aujourd'hui - ce qui participe à l'opacité mystérieuse des lieux.

Ce centre d'initiation devint si important que les candidats à l'initiation venaient de tout le monde méditerranéen pour y suivre les rites, puis plus tard pour rendre hommage aux lieux. C'est ainsi que Philippe II de Macédoine rencontra ici sa femme Olympias au cours de leurs initiations respectives, avant qu'ils ne donnent naissance à Alexandre le Grand. Ce qui explique que les dynasties hellénistiques et macédoniennes firent beaucoup d'offrandes au Sanctuaire !

A l'inverse des mystères d'Eleusis, l'initiation était ouverte à tous : adultes, enfants, hommes, femmes, citoyens libres, esclaves, Grecs et non Grecs. Elle passait par trois phases, qui pouvaient avoir lieu en un seul séjour ou être réparties dans le temps. Rien n'est connu de ces trois phases (myesis, telete puis epopteia), le rite étant occulte et les initiés tenus au plus grand secret. Une grande partie des initiations avait probablement lieu la nuit, comme en attestent les nombreux emplacements dédiés aux lanternes retrouvés sur site. Ces rites initiatiques promettaient la protection en mer des initiés et l'accès à un état de plus grande sagesse générale. Ils étaient organisés au cours de la saison de navigation (avril-novembre).

Le Sanctuaire est construit sur un vaste terrain à flanc de colline, où coulaient deux rivières créant trois ensembles. Aujourd'hui, on le visite en commençant par les lieux de vie puis en remontant les lieux de rite jusqu'à l'entrée empruntée par les candidats à l'initiation. Cette visite à rebours peut paraître un peu confuse, d'autant qu'il n'y a aucune indication sur site. Voici quelques repères :

Après la billetterie, on longe d'abord le lit d'une rivière et l'on découvre la zone occidentale du site. Là, vous verrez les restes des bâtiments dédiés à l'hospitalité des visiteurs : chambres et réfectoires sont situés en contrebas de la longue et impressionnante stoa au sud-ouest, qui était fermée par le piédestal de la Nikè où s’élevait la célèbre Victoire de Samothrace, dominant l'ensemble, en surplomb du théâtre.

La partie centrale du site, entre les deux rivières, était dédiée aux rites eux-mêmes. On y admire l’Hiéron, dont la construction qui débute à la fin du IV^e siècle av. J.-C. n'est achevée que 175 ans plus tard. Devant se dresse le Hall des Danseuses Chorales ou Temenos qui abritait des danses rituelles fondamentales dans le processus initiatique. A côté, l’Arsinoeion est le plus grand bâtiment circulaire légué par la Grèce antique. Donation de la reine d’Egypte, Arsinoé (289-285 av. J.-C.), c'était peut-être un lieu de sacrifices.

En surplomb, le Cercle Théâtral où les initiés avançaient certainement dans la nuit noire et étaient soumis à des peurs qu'ils devaient dépasser. Enfin, dans la partie orientale, le Ptolémaion - des propylées majestueux - enjambait la seconde rivière, et menait à l'entrée originelle du site.