Guide de voyage Tchiatoura

De nos jours, c'est un endroit hors du temps et hors du monde, improbable, un chapitre de l'histoire encore bien vivant. La route de Koutaïssi est marquée par  un ancien « pachyderme » de l'industrie lourde sorti tout droit de l’âge d'or de l'époque soviétique. C'est une énorme usine sidérurgique aux cheminées rouillées par le temps, un fantôme d’une époque oubliée. Après l'avoir aperçue, on prend une petite route qui sillonne les plateaux, vers la chaîne du Grand Caucase se dessinant sur l'horizon. La rivière, source de manganèse, aux eaux noires, y a creusé son lit. Un téléphérique miniature  sans âge se balance en grinçant sur son câble qui file vers le sommet de la colline. Trop de vent, il est arrêté pour le moment. Le câble le relie à un bâtiment aux murs jaunes, d'allure coloniale, décrépi par le temps. Le téléphérique conduit vers un plateau apparemment désert.  Tchiatoura, au cœur de la plus industrielle des vallées géorgiennes du Grand Caucase, a tout de la ville minière soviétique vétuste et dévastée par la désindustrialisation. Lors de la deuxième moitié du XIXe siècle, du minerai de manganèse était découvert dans la vallée de la Kvirila On fonda alors Tchiatoura pour loger les ouvriers mineurs, la ville comptant 30 000 âmes en 1989. Les mines étaient exploitées sur les plateaux montagneux environnants. On construisit des téléphériques conduisant vers les hauteurs si les conditions météo le permettaient. À une dizaine de kilomètres, la petite ville de Satchkhere est la patrie de l'homme fort de l'après-Saakachvili, le millionnaire Bidzina Ivanichvili. Elle paraît prospère à côté de Tchiatoura, car l'oligarque y a financé hôpitaux, écoles, stades et autres infrastructures flambant neuves. À proximité de Tchiatoura, ne manquez sous aucun prétexte un site extraordinaire : le pilier de Katskhi. Les mots sont faibles pour décrire ce site exceptionnel. Les moines ne pouvaient trouver mieux pour s'isoler du monde. Imaginez un monastère installé sur un piton karstique, pilier de la terre au sens propre du terme, comme on en voit seulement en Chine du Sud-Ouest ou au Viêt Nam. Le monastère est installé sur ce piton, à une hauteur d'une cinquantaine de mètres, sur une surface de 50 m2, soit de la place pour le bâtiment religieux seul, l'ensemble relié uniquement par une échelle. De quoi être plus près de Dieu et plus loin des hommes, sans interférence, ou presque.