LAC PRESPA

Ce lac (Преспанско Езеро/Prespansko Ezero, Liqeni i Prespës, Μεγάλη Πρέσπα/Megali Prespa) est le deuxième en termes de superficie en Macédoine du Nord, après celui d’Ohrid. C’est une des plus importantes zones ornithologiques d’Europe : ici vivent, séjournent ou nidifient environ 42 % des espèces d’oiseaux recensées sur le continent. D’une surface théorique de 259 km², le lac est partagé entre trois pays. La Macédoine du Nord en possède la plus vaste partie, soit 176,3 km². Le reste se répartit entre l’Albanie (46,3 km²), au sud-ouest, et la Grèce (36,4 km²), au sud.

Grand et petit Prespa. Il existe en fait deux lacs Prespa. Un isthme de 4 km de longueur et de 500 m de largeur sépare le lac Prespa – ou grand lac Prespa – du petit lac Prespa (Мало Преспанско Езеро/Malo Prespansko Ezero, Prespa e Vogël, Μικρή Πρέσπα/Mikri Prespa). Situé au sud, ce dernier s’étend sur 46,8 km². Il se trouve principalement en Grèce avec une petite partie en Albanie (4,3 km²). Formés il y a 1 million d’années, les deux lacs couvrent une superficie totale d’environ 306 km². Ils sont peu profonds : 14 m en moyenne et 48 m au maximum pour le grand lac, 7,7 m en moyenne pour le petit lac. Ils sont reliés entre eux par un canal naturel à travers l’isthme qui se trouve en territoire grec. Ils sont situés à 853 m d’altitude, entre le mont Galičica (2 254 m), à l’ouest, le mont Baba (2 601 m), à l’est, et le Mali i Thatë (« montagne sèche », 2 287 m), en Albanie, au sud, ce qui en fait les plus hauts lacs non glaciaires des Balkans. De part leur position élevée et leur configuration karstique poreuse, les lacs Prespa alimentent en eau le lac d’Ohrid par des souterrains naturels de 7 à 12 km de longueur qui passent sous le mont Galičica.

Îles et biodiversité. Les lacs comptent trois petites îles. Sur le grand lac Prespa se trouvent les îlots de Golem Grad (18 ha), en Macédoine du Nord, et de Maligrad (5 ha), en Albanie, tous deux inhabités. Sur le petit lac Prespa, en Grèce, l’île d’Agios Achillios (80 ha) compte, elle, une vingtaine d’habitants. Le tourisme est peu développé et les rives ne comptent aucune ville, seulement des hameaux et villages. Mais la région est d’une riche biodiversité avec des marais et des roseaux, de nombreuses espèces endémiques de poissons, de crustacées et de plantes végétales aquatiques.

Échassiers et pélicans. Les lacs Prespa sont une des plus importantes haltes en Europe pour les oiseaux migrateurs venant d’Afrique ou du Moyen-Orient. On trouve ici de grands échassiers tels l’aigrette garzette (Egretta garzetta), la grande aigrette (Ardea alba), l’ibis falcinelle (Plegadis falcinellus) ou le bihoreau gris (Nycticorax nycticorax) et des oiseaux pêcheurs comme le cormoran pygmée (Microcarbo pygmeus), le pélican blanc (Pelecanus onocrotalus) ou le pélican frisé (Pelecanus crispus). Ce dernier, très rare sur la planète, est le plus grand des pélicans. Il a fait des lacs Prespa son unique zone de reproduction sur le Vieux Continent. C’est d’ailleurs ici que l’on trouve la plus vaste colonie en Europe de cet oiseau d’une envergure de 3 mètres en moyenne.

Ramsar et Unesco. Les trois zones nationales des deux lacs sont inscrites à la convention de Ramsar sur les zones humides : celle de la Grèce (51 km²) depuis 1975, celle de la Macédoine du Nord (189 km²) depuis 1995 et celle de l’Albanie (151 km²) depuis 2013. Il existe aussi le petit parc naturel d’Ezerani (20 km²), au nord du grand lac, en Macédoine du Nord. Cet ensemble est en outre bordé par quatre parcs nationaux : ceux de Galičica (227 km²) et du Pelister (171 km²), en Macédoine du Nord, le parc national de Prespa (277 km²), en Albanie, et le parc national de Prespa (51 km²), en Grèce. À cela viennent s’ajouter deux zones protégées internationales. En l’an 2000 a été créé le « parc Prespa » entre la Macédoine du Nord, l’Albanie et la Grèce. Celui-ci est géré par la Society for the Protection of Prespa (spp.gr), cofondée en 1990 par le biologiste suisse Luc Hoffmann (1923-2016) et basée dans le village grec d’Agios Germanos, au bord du petit lac Prespa. Et, depuis 2014, les zones des deux lacs Prespa situées en Macédoine du Nord et en Albanie font partie de la « réserve de biosphère transfrontalière d’Ohrid-Prespa » créée par l’Unesco. Celle-ci s’étend sur 4 462 km² entre les deux pays. Elle est notamment gérée par le Prespa Ohrid Nature Trust (pont.org) basé en Allemagne.

Menaces et catastrophe. Malgré toutes les protections mises en œuvre par les trois pays, l’écosystème des lacs Prespa demeure fragile. La surface des deux lacs diminue d’année en année du fait du réchauffement climatique. Plusieurs espèces endémiques sont menacées d’extinction, notamment la truite de Prespa (Salmo peristericus). En 2022, une épidémie brutale de grippe aviaire a causé la mort de plus de 1 700 pélicans frisés, soit environ 60 % de la colonie des deux lacs. C’est une catastrophe pour cette espèce qui comptait jusqu’alors moins de 18 000 individus à travers le monde.

Symbole de rapprochement. Pour terminer sur une note plus positive, il faut souligner que les lacs Prespa ont récemment servi de cadre au rapprochement entre Athènes et Skopje. C’est en effet dans le village grec de Psarades, sur la rive sud du grand lac, que les représentants des deux pays ont signé l’historique accord de Prespa, le 12 juin 2018. Celui-ci a permis à l’ARYM (ancienne République yougoslave de Macédoine) d’être enfin reconnue internationalement sous le nom de « Macédoine du Nord ».