Pays basque
Archéologie. À la croisée des chemins, le Pays basque participe très tôt à la diffusion des idées, dont l’art pariétal. Les premières peintures rupestres du territoire ornent les Grottes d’Isturitz et Oxocelhaya (35 000 av. J.-C.). Une multitude de signes, de dessins de chevaux se mêlent aux gravures dans les galeries profondes. Les fouilles attestent également de la présence des Celtes, déterminants pour la culture locale, puis des Romains qui échouent à imposer leur domination.
Moyen Âge. Au milieu du XIIe siècle, les Basques fondent le Royaume de Navarre pour se prémunir contre les invasions. De nombreux lieux de culte sont construits le long du chemin de Saint-Jacques en Navarre. Le musée diocésain d’art sacré de Bilbao réunit 2 000 pièces datant du XIIe au XXe siècle, ainsi que des vestiges archéologiques.
Après une période romane relativement discrète, l’art s’épanouit au gothique tardif.
Au XVIe siècle, le style Renaissance se développe dans le nord de l'Espagne. Sa tendance ornementale, ou plateresque, conduit au baroque, qui impose ses codes jusqu’au milieu du XVIIIe siècle. En parallèle, un baroque austère se révèle dans la peinture de portraits et reflète les tensions économiques, sociales et religieuses du pays. Il se caractérise par des poses solennelles presque théâtrales, sur des fonds sobres.
Vers l’ère moderne. Renommé pour ses scènes de tauromachie, Ignacio Zuloaga (1870-1945) exécute des portraits d’une force expressive peu commune. Un musée dédié à ce peintre représentatif de la Génération de 98 a été ouvert à Éibar, sa ville natale.
Inutile de chercher la plus riche collection d’art basque ! Le Musée des Beaux-arts de Bilbao présente peintures, gravures et sculptures locales, du XIIe à nos jours : Jorge Oteiza, Zuloaga ou Mari Puri Herreo y côtoient Zurbaran, Goya, Bacon ou encore Delaunay.
Art public. L’identité basque s’exprime dans les rues par tradition. Des fresques parent les villes et villages de toute la région. Direction San Sebastián pour prendre le pouls de la scène locale qui affiche ses revendications politiques de manière créative. Dans le quartier d’Egia et autour de la station Añorga, les graffitis se font plus colorés et ludiques. Sur la côte, la petite ville de Zarautz s’impose comme le point de rendez-vous du street art. Larges fresques et dessins discrets se dispersent à tous les coins de rue.
La sculpture publique s’épanouit à Saint-Sébastien. Parmi les commandes passées à de grands artistes locaux : le Peigne du Vent et l’Hommage à Fleming, signées Eduardo Chillida ; l’acclamée Construction Vide de Jorge Oteiza ; la minimaliste Colombe de la Paix de Nestor Basterretxea, en front de mer.
Aujourd’hui. Le Pays basque se met au diapason des tendances actuelles. Point d’orgue de son ouverture au monde, le musée Guggenheim de Bilbao accueille l’art moderne et contemporain international. Un million de visiteurs admirent tous les ans les sculptures gigantesques qui montent la garde. L’Installation lumineuse de Jenny Holzer adresse des clins d’œil à l’Arc Rouge de Buren qui enjambe le pont voisin. Les Tulipes de Jeff Koons éclosent sur les terrasses tandis que le Pop Galo de Joana Vasconcelos se pavane fièrement. Un programme éclectique complète l’exceptionnelle collection permanente de l’institution.
Plus discrète, la Tabakalera se concentre sur l’avant-garde contemporaine. Des projets multidisciplinaires naissent dans cette manufacture de tabac reconvertie en centre d’art.
Rioja
Premiers temps. Sur la terre du Rioja, les Romains imposèrent leurs usages et fondèrent Calahorra puis Logroño au IIe siècle. Les passionnés accourront au Musée de la romanisation de Calahorra, entouré d’un jardin rempli d’éléments architecturaux. Parmi les sculptures romaines, la Dame Calahorra d’un réalisme saisissant, témoigne d’une grande maîtrise technique. De même, le drapé de la tunique de l’Aphrodite de Calahorra est merveilleusement rendu dans le marbre.
À la chute de Rome, la Rioja passe sous domination wisigothe puis arabe avant d’être incorporée à la Castille en 1073.
Moyen Âge. Située sur la route du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, la Rioja fut au cœur d’un conflit opposant la Navarre et la Castille. Le style roman s’épanouit dans de nombreux édifices religieux, les monastères étant alors des centres culturels majeurs. De splendides sculptures sont visibles dans le chœur de l’église du monastère de Santa María La Real ainsi qu’un retable représentant la figure romane de sainte Marie.
Étape incontournable, les monastères de San Millán de Yuso et de Suso figurent comme des chefs-d’œuvre de l'architecture romane. À Suso, les petites chapelles taillées dans la roche abritent des tombeaux, dont un exemple du XIIe siècle sculpté dans l’albâtre. Au monastère de Yuso, reconstruit dans un style gothique tardif, les bas-reliefs du portail évoquent la bataille de Simancas. Outre les portraits du Salon des Rois, le retable du maître-autel montre huit tableaux du peintre baroque Fray Juan Ricci (1600-1681).
Dans l’église cistercienne de Notre-Dame de Vico, le musée d’Art Sacré conserve sculptures et tableaux anciens parmi ses objets de culte. Le Musée de La Rioja de Logroño permet de survoler toutes les périodes. Son fonds archéologie est complété d’œuvres du Moyen Âge (le retable de Torremuña), de la Renaissance, du baroque et de peintures modernes, en partie léguées par le Prado.
Moderne et contemporain. Fière de son passé, la Rioja n’en est pas moins tournée vers l’avenir. Le Musée Würth d’Agoncillo soutient l’avant-garde autour de la collection de Reinhold Würth. L’art contemporain (Picasso, Louise Bourgeois, Anish Kapoor, Andy Warhol, Joan Miró) rencontre les maîtres anciens (Hans Holbein le Jeune et Lucas Cranach l’Ancien). Le Musée El Torreón de Haro défend également la jeune création, mais il occupe une tour, unique vestige des murs d’enceinte de la ville. Au second étage, les expositions temporaires sont dédiées à la jeune création qui explose depuis les années 1980 à la faveur de mesures de soutien.
Navarre
Premiers temps. Entre les charmants villages qui parsèment la Navarre, les traces des premières installations datées du paléolithique inférieur se découvrent sur les sites de Coscobillo, Urbasa et Viana. L’époque romaine est par ailleurs documentée au Musée archéologique d’Arellano. Le site de la Villa des Muses tire son nom de la mosaïque romaine à l’effigie de neuf déesses. Deux autres mosaïques évoquent le culte de Cybèle et d’Attis. Après la chute de l’Empire romain, la région affronte les Wisigoths et les Francs. Mais alors que les musulmans s’emparent du bassin de l’Ebre en 714, les chrétiens forment un noyau de résistance qui donne naissance à la première dynastie navarraise : les Iñigos. À leur suite, Sancho Garcés III l’Aîné définit au XIe siècle le tracé du Chemin de Compostelle, introduit l’art roman et diffuse sur ses terres la culture de Cluny. S’ensuit une période d’instabilité, entre indépendance et rattachement aux couronnes française, castillane et aragonaise. Le règne de Charles III le Noble (1387-1425) correspond à une phase de prospérité ainsi qu’en témoigne le palais d’Olite.
Moyen Âge. Comme la Rioja, les terres de Navarre abritent une forte concentration de monastères. À partir du XIIIe siècle, le gothique pénètre en Espagne par la Navarre et s'exprime dans l'architecture religieuse, mais aussi dans la peinture et la sculpture.
Le Musée diocésain de la Cathédrale de Pampelune englobe plusieurs périodes. La sculpture de Sainte Marie la Royale et le Christ Crucifié de Juan de Ancheta sont de style roman. Le gothique français est représenté par les reliquaires du Saint Sépulcre et du Lignum Crucis, ayant appartenu à la Couronne de Navarre. Aux précieux objets de culte, s’ajoutent de splendides peintures dont la planche de Peralta, signée Van Dyck, des retables (retable de las Navas, style flamand du XVe siècle) et sculptures.
Dans un cadre champêtre, la légende rencontre l’histoire dans la collection d’art sacré du Musée de Roncevaux. Parmi ses sculptures et ses toiles du roman au gothique mudéjar, citons le Triptyque du Calvaire, de l'école de Bosch, et la Sainte Famille de saint Juanito, signée Luis de Morales.
Le Musée de Tudela regroupe des pièces d’art sacré issues de différentes églises de la ville. Sa collection couvre un large éventail de styles : retables Renaissance, toiles baroques, dont celles de Vicente Berdusán, huiles sur bois comme Le Dernier Jugement attribué à Bosch. La cathédrale abrite également ses chefs-d’œuvre. Le style roman est représenté par une Vierge Blanche en pierre, le gothique par trois retables, la Renaissance par les stalles du chœur signées Esteban de Obray et le baroque par la chapelle Santa Ana et Espíritu Santo
Véritable pont entre le passé et le présent, le Musée de Navarre combine archéologie et beaux-arts. Le site de Leire a livré des mosaïques romaines, dont une représentation du Triomphe de Bacchus. L’art médiéval est évoqué par des chapiteaux romans et des sculptures gothiques. Se retrouvent aussi les artistes contemporains navarrais Julio Martín Caro, Jorge Oteiza, Mariano Royo, Pedro Salaberri, Juan José Aquerreta ou encore Pedro Manterola.
Récemment. Dans les environs de Pampelune, le Musée Oteiza abrite la collection de Jorge Oteiza, sculpteur essentiel du XXe siècle. Sa maison-atelier dessinée par un architecte navarrais contient 1 650 sculptures ainsi qu’un large éventail de dessins et collages. Maintes fois primé, Oteiza entendait évider les formes à travers ses expérimentations esthétiques. Signalons ses Apôtres qui ornent la Basilique d'Arantzazu.
Les sculptures de Rafael Huerta (né en 1929) parsèment la région de Navarre, la première étant sa Sagardo Corazón, à Corella (1958). Plus connu, le Monument Encierro trône dans la vieille ville de Pampelune face aux arènes. Un groupe de 11 jeunes gens est immortalisé au moment crucial où le troupeau est conduit aux arènes. Les jeux d’équilibre entre les taureaux et les personnages forment une composition à la fois solide et dynamique.
Pour les amateurs, le fonds photographique du Musée Université de Navarre rassemble des images du XIXe siècle à nos jours, autour du legs de José Ortiz-Echagüe (1886-1980), l'un des principaux photographes espagnols du XXe siècle. Ouvert à toutes les disciplines, le Centre d’art contemporain de Huarte expose l’art basque et favorise l’émulsion au sein de la jeune scène artistique.
La joie de vivre qui fait le charme de Pampelune éclate sur ses murs, ses volets et les devantures de ses commerces. La zone piétonne se prête tout particulièrement à une chasse au street art. Qu’elles soient humoristiques, nationalistes ou sociales, ces œuvres reflètent le caractère bien trempé des locaux. Sur des façades entières, des animaux sauvages se déploient sous vos yeux. Retrouverez-vous le personnage repris de Guernica qui orne une porte en bois ?