Bastion avancé du massif du Morvan, le mont Beuvray semble veiller sur la ville d'Autun qui s'étend dans la plaine à quelque 20 km de là, en plein coeur de la Bourgogne. Entre collines usées par le temps, affichant leurs belles courbes arrondies, et vallées profondes, le Beuvray dévoile sa vénérable forêt. Et sous la forêt, les vestiges de Bibracte, première capitale des Éduens, se révèlent peu à peu à notre connaissance. C'est cet exceptionnel intérêt archéologique des lieux qui les a tirés de l'oubli. Maintenant doté d'un centre de recherche et d'un musée d'ambition européenne, le site est le moteur d'un projet de développement durable qui s'efforce d'allier gestion paysagère d'excellence et implication des habitants. Il bénéficie à ce titre du label Grand Site de France depuis 2008. Enchanteur et intimiste, le Beuvray invite à la découverte d'une nature fragile que l'homme n'a cessé de remodeler depuis des millénaires au gré des vicissitudes de l'Histoire.

Sous la forêt, une ville abandonnée depuis deux millénaires

Le paysage du mont Beuvray dévoile ses vertes courbes sur le territoire du Haut-Morvan, une montagne pas si haute que ça en fait, puisqu'elle culmine à seulement 901 m au Haut-Folin, à moins de dix kilomètres de là, mais d'une altitude tout de même suffisante pour que les hivers y soient rigoureux et enneigés. Le long des routes qui serpentent entre futaies et bocage, la silhouette discrète du mont n'apparaît que furtivement et ne se laisse reconnaître que par les habitués des lieux. C'est de son sommet que l'on prend la mesure de la singularité du site : c'est un belvédère ouvrant sur les plaines alentour. La succession de bosquets et bouchures avec, de-ci de-là, un hameau ou un étang, sans rien qui vienne polluer la vue, semble constituer un paysage immuable. Inévitablement, on ressent en ces lieux un attachement particulier.

Pour reprendre l'expression de Pierre-Louis Faloci, l'architecte qui a conçu le musée de Bibracte, cette atmosphère particulière s'explique par " l'histoire sourde " du lieu : sa longue et prestigieuse histoire a laissé des traces discrètes mais immanentes dans le paysage, que l'exploration archéologique révèle peu à peu. Car, avant d'être recouvert par une forêt, le mont Beuvray fut le site d'une ville éphémère mais de grand rayonnement, voici un peu plus de deux mille ans. S'il vous est donné la chance de gravir le Beuvray par temps clair, vous comprendrez immédiatement pourquoi des Gaulois choisirent ce lieu : le sentiment de dominer les territoires environnants est particulièrement prégnant ; le regard se perd au-delà des collines, des prés et des bocages pour arriver jusqu'aux volcans d'Auvergne et jusqu'aux sommets enneigés du mont Blanc. Capitale du peuple éduen où Vercingétorix fut confirmé à la tête de la coalition gauloise en 52 avant notre ère et où Jules César acheva la rédaction de son célèbre De Bello Gallico, Bibracte est un lieu de mémoire par excellence, le lieu des plus anciens épisodes que l'on puisse rattacher à l'Histoire de France.

Des fouilles à partir du XIXe siècle

Et pourtant, on avait perdu la mémoire de sa localisation jusqu'à ce qu'un éminent érudit autunois Jacques-Gabriel Bulliot (1817-1902), se rende à l'évidence que Bibracte était bien sur le Beuvray. Bibracte connut ses premières fouilles en 1864 sous l'impulsion de Napoléon III, qui venait de lancer une grande enquête archéologique sur les lieux où César s'était illustré militairement. L'empereur fit donc fouiller à Gergovie et Alésia, mais se contenta de subventionner Bulliot qui, en trente années de recherches assidues, révéla la réalité matérielle des Gaulois de l'époque de la guerre des Gaules : les objets de la vie quotidienne, l'architecture, le cadre urbain en devenir de l'oppidum - ce mot latin d'oppidum étant emprunté à César qui l'utilise constamment pour désigner les principales agglomérations des Gaulois.

À Bulliot succéda pour quelques brèves campagnes de fouilles entre 1897 et 1901, son neveu Joseph Déchelette (1862-1914). Ces années furent déterminantes, non pas par l'ampleur des nouvelles découvertes mais par la publicité que leur fit Déchelette, industriel du textile mais surtout grand savant : son monumental manuel d'archéologie paru en plusieurs tomes entre 1908 et 1914, année de sa mort à la guerre, est la première synthèse consacrée à la préhistoire européenne. Son auteur y démontre que Bibracte est un point d'émergence d'un phénomène urbain de grande ampleur qui précéda la romanisation de la Gaule. Après la mort prématurée de Déchelette, le site retombe dans l'oubli pour de nombreuses décennies, avant que les recherches ne reprennent avec des moyens décuplés dans les années 1980. L'oeuvre de Bulliot et Déchelette est alors poursuivie et largement dépassée. C'est un organisme urbain en mutation permanente qui se révèle sous la truelle de la nouvelle génération d'archéologues, bien plus minutieuse que les pelles et les pioches des terrassiers du XIXe siècle, recrutés dans les villages alentour.

De nouvelles découvertes

Il s'avère que Bibracte est fondée à la toute fin du IIe siècle avant notre ère. La ligne de remparts qui exprime cette fondation, longue de pas moins de sept kilomètres, est rapidement réduite à cinq kilomètres. C'est un fait constant sur le site que les nouvelles constructions sont mises à bas et reconstruites tous les vingt ou vingt-cinq ans. Au fil de ces reconstructions, la marque de Rome s'affirme de plus en plus. Limitée tout d'abord à des objets mobiliers (surtout les innombrables fragments d'amphores), elle investit brutalement le domaine de l'architecture au lendemain de la guerre des Gaules avec la construction d'un ensemble monumental de près de 100 m de côté qui intègre un forum. À la génération suivante, c'est au tour de l'élite locale de se faire construire de grandes demeures sur le modèle romain. La ville continue à se développer jusqu'aux années 20 avant notre ère, avec une population qui se compte certainement en milliers d'habitants : peut-être 5 000, peut-être 10 000. Elle remplit alors certainement le rôle de capitale du peuple éduen, dont le territoire se déploie entre la Saône et l'Allier, soit une situation stratégique qui lui permet de contrôler les principaux axes de communication entre la Méditerranée et les plaines du nord-ouest de l'Europe.

Ménagés par Rome, les Éduens affichent, comme le montrent les fouilles de Bibracte, une volonté particulière d'adhérer au projet impérial. Paradoxalement, cela va rapidement se solder par la décadence de Bibracte : un nouveau site est choisi où est déplacée la capitale, au carrefour de voies importantes et dans une plaine qui permet de déployer un vaste projet d'urbanisme à la romaine. Cette ville portera le nom d'Augustodunum, devenu Autun. L'abandon précoce de Bibracte a du moins fait le bonheur des archéologues. Les ruines de la ville furent en effet très vite ensevelies. Le maintien d'un temple modeste sur le mont à l'époque romaine, plus tard transformé en chapelle, puis l'instauration de foires au XIIIe siècle, enfin la présence d'un monastère franciscain pendant quelques siècles, n'eurent que peu d'impact sur les vestiges du Ier siècle avant notre ère. Il suffit aujourd'hui littéralement de soulever la mousse et les feuilles mortes pour remonter de deux mille ans dans notre Histoire. Cette ville qui ne vécut qu'un siècle occupe les archéologues depuis déjà un siècle et demi et il y a fort à parier qu'ils y poursuivront leurs recherches aussi longtemps qu'on les y autorisera, tant la matière est riche !

 

Infos futées

 

Quand ? Dès l'arrivée des beaux jours pour profiter du mont, toute l'année pour visite le site.

 

S'y rendre. En voiture (autoroute A6 depuis Paris ou Lyon) ou en train (gare d'Autun ou d'Etang-sur-Arroux).

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Utile. Pour préparer au mieux son escapade.

SITE OFFICIEL DE BIBRACTE - MONT BEUVRAY - Plus d'informations sur le site

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