Origines de la culture ghanéenne
Les fouilles archéologiques ont révélé des fragments de poterie en argile datant de 3000 ans. Traditionnellement pratiquée par les femmes au Ghana, la céramique prend la forme de coupes, de lampes à huile, et de récipients divers comme on peut les admirer au National Museum à Accra.
A partir du XIIIe siècle, la civilisation ashanti se développe au Ghana et devient la première communauté des peuples Akans. Les traditions ashanti, dont celles du sous-groupe des Akans, marquent fortement l’art et l’artisanat du Ghana.
Au XVIIIe siècle, apparaissent les symboles Adinkra, vraisemblablement créés par un peuple Akan. Ils ornent tout d’abord la poterie, les objets et les vêtements royaux. Décoratifs, ces signes transmettent un message en relation avec tous les aspects de la vie. Ils sont désormais reproduits à l’aide de tampons, sur des tissus. Le plus courant, le Gye Name, traduit la suprématie de Dieu. Ce répertoire continue d’inspirer les artistes contemporains au point de constituer le langage visuel national.
La femme ashanti occupe une place centrale et à ce titre, prend les décisions au sein du groupe. C’est pourquoi la figure féminine est omniprésente en sculpture. Les poupées en bois sculpté sont glissées sous les pagnes pour accompagner la maternité. Par la suite, ces amulettes servent de jouet à l’enfant. Ces statuettes stylisées aux traits épurés d’une grande élégance séduisent les amateurs d’art.
L’orfèvrerie, sur ces terres riches en or, atteint une rare perfection. Les poids à peser l'or des Akans sont ornés de motifs géométriques qui se retrouvent sur tous les accessoires de mesure de l’or. Les kuduo sont des récipients en cuivre dans lesquels les Akans déposent les offrandes destinées aux divinités et aux ancêtres. Le forowa est un récipient à usage domestique ou religieux. Il se distingue du précédent par l'absence de figurines comme le porc-épic, symbole ashanti. Les insignes royaux akans se composent du bâton de chef, de pendentifs, d'attaches permettant de retenir les sandales sur le coup de pied, de rectangles reliés les uns aux autres pour former une couronne, des poignées d'épées royales.
Peinture moderne
La peinture est importante au Ghana. Les artistes sont exposés dans les halls des grands hôtels, dans les habitations bourgeoises et de plus en plus dans les galeries qui s'ouvrent dans la région d'Accra.
Le goût pour la peinture se retrouve sur les barques colorées des pêcheurs, les tro-tro et les mammys trucks, les enseignes des coiffeurs ou les habitations en terre dans le nord du pays. Si les constructions ashanti sont ocre, les villages du nord se distinguent par des fresques à dessins géométriques, dans les tons brun, jaune et marron qui recouvrent les murs intérieurs.
Depuis la seconde moitié du XXe siècle, des peintres talentueux rayonnent en Afrique et dans le monde entier. Ablade Glover, né en 1934 à Accra, est considéré comme le père de la peinture contemporaine ghanéenne. Son style méticuleux et ses couleurs vives sont aisément reconnaissables. Il est diplômé de l’Université des Sciences et Technologies de Kumasi, dont sont sortis bon nombre de talents ghanéens ; il poursuit sa formation à Londres puis dans l’Ohio. Revenu au pays, il devient directeur des Beaux-Arts de Kumasi. Ses œuvres sont entrées dans les collections d’institutions majeures et à Accra, à l’Ashanti Goldfields Company et à l’Arts Council of Ghana à Accra.
A la tête de l’Artist Alliance Gallery, Ablade Glover participe depuis une petite trentaine d’années à la reconnaissance des artistes ghanéens. Véritable tremplin culturel, ce lieu est une institution ghanéenne. En 1969, la première galerie d’art du Ghana est ouverte par Frances Ademola. A plus de 90 ans, Frances continue d’exposer de jeunes artistes à The Loom, non loin de Circle.
El Anatsui et la sculpture contemporaine
Le plasticien El Anatsui, né en 1944 à Anyako, sort diplômé de l’Université des sciences et technologies Kwame Nkrumah en 1969. Avant tout sculpteur, la figure de proue de la sculpture contemporaine vit désormais au Nigéria. Dans sa jeunesse, il intègre le groupe d’artistes Nsukka, en lien avec l’université Nsukka au Nigeria où il est promu enseignant. C’est à partir de là que sa carrière décolle pour accéder à une renommée internationale.
Dans les années 1980, l’artiste exprime son talent en peinture. Ses formes abstraites et ses couleurs séduisent. L’année 1990 est celle de sa première participation à la Biennale de Venise ; il reviendra en 2006 et 2007. Invité au sommet de Rio en 1992, il réalise pendant les trois semaines que dure la conférence sur l’environnement la sculpture Erosion à partir d’un tronc d’arbre qu’il recouvre de symboles Adinkra. A la fois décoratifs et porteurs de messages, ces signes évoquent des concepts qu’il universalise. Par la suite, El Anatsui expose aux quatre coins du globe. Représentée dans les collections du MoMA à New York, du British Museum à Londres et du Centre Pompidou à Paris, son œuvre obtient le Lion d’Or à la Biennale de Venise de 2015.
El Anatsui utilise des matériaux de récupération : bouchons, râpe à manioc ou plaques d’imprimerie qu’il transforme. Son propos n’est pas pour autant écologique. Selon lui, ces matériaux offrent des possibilités créatrices uniques. Ainsi, ses immenses sculptures métaphoriques, dont ses grandes tentures finement assemblées, sont les plus connues. Ses installations sont construites avec minutie comme ces milliers de capsules métalliques froissées puis liées par du fil de cuivre. El Anatsui s’intéresse très tôt à la céramique et assemble des fragments pour leurs qualités figuratives, fragiles et résilientes. Il propose une lecture du bois remarquable, avec une liberté qui fera école. Il envisage d’établir un atelier au Ghana.
La relève artistique
L’ouverture se poursuit avec notamment Wiz Kudowor, né à Accra en 1957. Son travail, qui puise abondamment dans la mythologie et les signes ancestraux, séduit autant en Asie qu’aux Etats-Unis. Demeurant l’un des artistes préférés du Ghana, il reçoit de son pays des commandes publiques dont la fresque du Kwame Nkrumah Memorial Park, en hommage aux grands dirigeants de la nation. Son art est considéré comme le reflet de l’identité africaine.
Né en 1956 à Sékondi au Ghana, Owusu-Ankomah reprend également les symboles Adinkra mais pour aborder les thèmes de l’identité et du corps en peinture. A l’âge de 23 ans, l’artiste se lance dans une série de voyages en Europe, et choisit de s’installer en Allemagne. Ses influences englobent l’art de la Renaissance, les cultures ancestrales, les idéogrammes chinois et les traditions du continent africain. Il en reprend aussi bien les philosophies que les caractéristiques esthétiques. Son œuvre fascinante, d’une grande richesse et truffée de détails, exige l’attention du spectateur.
La notoriété du peintre Glen Turner a elle aussi franchi les frontières. Parmi les valeurs sûres, Larry Otoo a présenté de nombreuses expositions à l'étranger ; Daniel Mensah, dit Tarrot, un jeune artiste bourré de talent et au sens de l'humour plutôt macabre. Victor Butler et Ato Delquis sont également appréciés par les collectionneurs.
Le sculpteur Kofi Setordji (né en 1957), connu pour avoir dénoncé le génocide rwandais, rencontre le succès à partir des années 1990. Elu sculpteur de l'année, Kofi Setordji travaille aussi bien le bois, le métal, le bronze, la pierre ou la terre cuite. Dans sa ville natale, ses réalisations sont visibles à l'Artists Alliance Gallery.
Scène contemporaine
Que ce soit au Ghana ou à l’étranger, l’art ghanéen contemporain a le vent en poupe. Malgré un cruel manque d’infrastructures, quelques galeries d’art ouvrent leurs portes à Accra.
Mais les artistes comme les galeristes appellent l’État ghanéen à injecter des fonds pour soutenir la création. De nombreux talents choisissent de faire carrière à l’étranger, comme Serge Attukwei Clottey, dont les installations ont été exposées à Coachella ou encore Amoako Boafo. Né en 1984 à Accra, et marqué par les œuvres de l’autrichien Egon Schiele, Amoako Boafo s’est installé à Vienne, où il est devenu en un temps record le deuxième artiste africain le plus coté au monde.
Dans la rue, se perpétue la tradition de la peinture murale qui remonte ici aux peuples primitifs. Redevenu populaire durant la seconde guerre mondiale, l’art public permettait alors aux soldats de poser leur empreinte, de laisser une trace de leur passage à la vue de tous.
Depuis 2011, le Chale Wote Street Art Festival rassemble arts visuels, musique, danse et performance dans les rues de Jamestown à Accra. Le Chale Wote fait la part belle aux échanges internationaux et à la création collective. A travers la Ghana Association of Visual Arts, le gouvernement encourage l’embellissement des rues par le street-art. Le GAVA est particulièrement favorable aux thèmes qui tournent autour de l’identité ghanéenne. L’artiste Moh, Mohammed Awudu de son vrai nom, associe la peinture et le dessin dans ses œuvres gigantesques. Investi dans des causes sociales et humanitaires, Moh crée un pont entre les traditions du Ghana et son avenir sur la scène internationale.
Où découvrir les artistes de demain à Accra ? Direction la Gallery 1957. Lancée par Marwan Zakhem en 2016, la galerie désigne à présent trois espaces distincts. Forte d’un programme de résidence, et présente sur les principales foires professionnelles, elle ouvre résolument la scène actuelle à un public international.
L’Amba Gallery, ouverte par l’homme d’affaires ghanéen Amadu Baba, s’est dotée d’un espace de création et d’enseignement pour mieux servir l’art africain et son public.
Sur Onion avenue, la Gallery Soview offre une plateforme aux talents émergents. Les artistes présentés dans cet espace sont choisis par leur esprit novateur et leur emploi imaginatif des matériaux de récupération. Là où explorer le passé, le présent et le futur de l’Afrique, entre réalisme et optimisme !