La musique traditionnelle
Au Ghana, la tradition musicale est ancrée dans un territoire et varie donc énormément selon les régions. Par exemple, dans le nord du Ghana, la musique est souvent jouée au gyil (ou balafon), instrument de la famille des xylophones. Chez les Ewe, et plus globalement sur l’ensemble de la côte, on trouve des orchestres polyrythmiques (tambours, gongs, cloches, etc) et la musique est souvent associée à une fonction sociale, chez les Akans, est très présente la harpe -luth Seperewa- dont on dit qu’elle « parle » - et la pratique musicale s'inscrit dans la tradition des griots d'Afrique de l’Ouest.
Chez les Akans, il existe également deux formes de danses très impressionnantes et expressives, bien connues des Ghanéens et dont chaque geste comporte une symbolique ou une signification : Kete et Adowa. Les mouvements des mains varient en fonction du contexte et peuvent communiquer des émotions positives selon qu’ils sont pratiqués lors d’un mariage, de fiançailles et de funérailles.
Sur l’ensemble du territoire, l’instrumentation est dominée par les idiophones comme les xylophones, mentionnés précédemment, les gongs, les cloches ou encore le prempensua, un lamellophone installé sur une grosse caisse de bois, mais aussi de nombreuses percussions, comme le tam-tam fréquent en accompagnement des chants, danses ou représentations théâtrales. Dans le nord, il est courant d’utiliser des flûtes en bois sculpté ou faites à partir de tiges de bambou ou de mil.
Une grande figure de la musique traditionnelle ghanéenne est Joseph Kwabena Nketia, un compositeur qui fut non seulement musicien, mais aussi l’auteur de plus de 200 publications d’ethnomusicologie sur les danses et les chants traditionnels de son pays et du continent, dont l’incontournable ouvrage pionnier The Music of Africa, l’amenant souvent à être considéré comme le premier musicologue d’Afrique.
Quiconque voudrait approcher de plus près les chants et danses du Ghana sera ravi d’apprendre que le pays multiplie les occasions. On trouve dans chaque région des événements traditionnels dédiés comme le Festival Kudum à Busua, sur la côte, rendez-vous traditionnel qui s’étale sur une semaine et permet de découvrir le folklore fanti.
Le highlife
Le highlife découle de la palm-wine music dont elle reprend le jeu de guitare (le picking à deux doigts). Le highlife, c’est le totem de la musique, un pilier pour le pays et sa diaspora dans le monde entier. Rien de plus normal lorsque l’on épluche l’ADN du genre, axé autour des structures mélodiques et rythmiques principales de la musique traditionnelle Akan ou de la musique Kpanlogo du peuple Ga - mais jouées avec une orchestration occidentale (des cuivres « jazzy », plusieurs guitares, plus récemment des synthétiseurs).
Les musiques actuelles
La première grande figure ghanéenne moderne - voire avant-gardiste - est Kiki Gyan, merveilleux claviériste, qui officia jeune (dès 15 ans) au sein d’Osibisa (célébrissime groupe d’afro-rock composé de Ghanéens installés à Londres qui connurent un succès monstre en Angleterre dans les années 1970) et enregistra une série d’albums disco devenus cultes de son vivant. Beaucoup moins connu - hormis d’une niche de mélomanes adorant les OVNIS - Ata Tak a connu le succès très récemment pour son œuvre des années 1990, quelque part entre la house, le rap, des sous-genres du highlife et de l’afropop avant l’heure. Fabuleuse et très ghanéenne dans l’âme, l’œuvre d’Ata Tak a été rééditée en 2015 par le label allemand Awesome Tapes From Africa.
Hormis ces deux personnalités hors normes et en avance sur leur temps, le premier vrai mouvement musical moderne du Ghana est évidemment le hiplife qui, comme mentionné précédemment, fut initié par Reggie Rockstone avec son album Makaa Maka!! en 1997. Dans les grandes lignes, le hiplife est du hip-hop écrit en dialecte local ghanéen, surtout l’akan, trempé d’éléments provenant du highlife. Depuis la vague des pionniers - Obrafour, Tinny ou Ex-doe - le hiplife a porté de nombreuses stars ghanéennes, dont Sarkodie, très célèbre même hors de ses frontières et grand représentant de l’Azonto, danse populaire mimant des gestes du quotidien, Richie plus R&B, Tic Tac (désormais « Tic ») plus dancehall et tourné vers la Jamaïque comme Samini.
Autrement, les grandes stars de la musique ghanéenne sont Camidoh, Kiki, King Promise ou MzVee, tous rois et reines de l’afropop ou encore Shatta Wale, grand nom du dancehall ghanéen. Beaucoup des tubes sont produits par Gafacci, le grand faiseur ghanéen de hits afropop.
Mais si le monde musical du Ghana est en ébullition en ce moment, c’est parce que la scène underground d’Accra est en plein essor, portée par de jeunes artistes qui sortent des sentiers battus comme Wanlov The Kubolor, un rappeur roumano-ghanéen connu pour son atypicité, Rvdical The Kid, un beatmaker très soul, Alex Wondergem, rappeur très soul ou encore Ria Boss, chanteuse néo-soul. Mentionnons également Ansah et le collectif All My Cousins, moteur de la génération d’artistes à venir. Enfin, côté électronique, on remarque que la tradition n’est jamais très loin, comme le prouvent DJ Katapila, qui joue la musique Ga comme si c’était de la house, et Linda Ayupuka, qui emmène la musique Frafra vers des territoires expérimentaux téméraires dans une démarche digne d’Ata Tak.
Bien entendu, le meilleur moyen de goûter à cette effervescence artistique est de se rendre dans les « Nite Clubs », lieux de prédilection de la jeunesse d’Accra et des milieux urbains du Ghana où les sound systems crachent le meilleur du hip-hop, highlife, hiplife ou afropop local à très hauts décibels. Autrement, le festival de rue Chale Wote est un excellent rendez-vous réunissant artistes locaux et du monde entier dans des domaines de la musique, la photographie, la danse, la peinture, les graffitis, le cinéma…
Et n’achevons pas sans un mot sur la diaspora ghanéenne qui, depuis le succès d’Osibisa dans le Londres des années 1970, n’en finit plus de faire rayonner le Ghana à l’international. Par exemple, le rappeur Stormzy rend hommage à ses origines ghanéennes en collaborant avec des artistes locaux (Yaw Tog et Kwesi Arthur) et en montant sur la scène du Global Citizen Festival d’Accra en 2022, le rockeur Moses Sumney aborde régulièrement son éducation ghanéenne et sur le dernier album (Ertha) de la chanteuse Tawiah, les sons du Ghana, d'où est originaire sa famille, sont omniprésents. Ghanéens dans le sang, Ghanéens dans le son.