La nature, source de richesses
La réussite de la Malaisie repose sur ses ressources naturelles, notamment le pétrole, l'eau, le bois et le fer. La découverte de réserves pétrolières au début du XXe siècle au large de Bornéo a permis au pays de sécuriser son approvisionnement énergétique et de générer des revenus en devises étrangères. En 2023, le groupe pétrolier Petronas a annoncé un chiffre d'affaires net de près de 9 milliards d'euros, détenant l'exclusivité de l'exploration et de la production dans le pays. En 2022, la Malaisie a exporté près de 500 000 barils de pétrole par jour, principalement vers la Chine. Les données douanières indiquent que la Chine a importé 54 % de pétrole brut en plus de la Malaisie en 2023 par rapport à 2022, soit 1,1 million de barils par jour. Les vastes ressources en eau du pays, avec ses nombreuses rivières, permettent de diversifier l'approvisionnement énergétique grâce à des barrages hydroélectriques répartis à travers le pays, faisant de la Malaisie le premier exportateur d'électricité en Asie du Sud-Est. Un programme de construction de 12 barrages, lancé en 2012 pour l'État de Sarawak, a toutefois suscité des controverses, notamment en raison de la destruction de l'habitat des populations indigènes dans les zones de forêt primaire reculées. Les indigènes du centre de Bornéo ont activement protesté pendant des années contre le projet du barrage de Baram, obtenant finalement gain de cause. Les vastes forêts, en particulier sur l'île de Bornéo, sont intensivement exploitées pour leur bois de construction, recherché pour sa résistance. En 2023, la valeur des exportations de bois et de produits à base de bois en Malaisie s'élevait à environ 4,7 milliards d'euros. Après la déforestation, les zones sont souvent replantées avec des plantations de palmiers à huile. Le long des routes, bordées de palmiers à huile, l'industrie locale transforme les fruits en huile vendue principalement à des fins alimentaires. Malgré cela, la préservation de l'environnement reste une préoccupation marginale. Le secteur réfléchit à valoriser davantage l'hévéa et les palmiers à huile pour limiter la pression sur les forêts naturelles. Actuellement, seules quelques forêts sont exploitées de manière durable, avec une sélection et une extraction soignées des essences recherchées. Sous le sol, les ressources minérales, notamment le fer, sont surexploitées pour répondre à la demande croissante de l'industrie des nouvelles technologies, en particulier pour la production de circuits semi-conducteurs et de circuits imprimés. Ces composants sont ensuite exportés vers la Chine ou la Corée pour être intégrés dans des téléphones, des ordinateurs, des machines-outils, et d'autres équipements.
Les services en renfort
Si l'industrie primaire soutient encore une grande partie de l'économie du pays, il faut regarder du côté de l'économie de services pour débusquer les entreprises les plus profitables. Les nombreuses sociétés malaisiennes œuvrant dans le secteur de la banque et de la finance traduisent la bonne santé globale de l'économie malaisienne, qui affiche un taux de croissance annuel de près de 4 %. Le tourisme est l'autre pari d'aide au développement économique du pays. La Malaisie met en avant sa faune exceptionnelle et la beauté de ses îles pour attirer les touristes. Le pays espère entrer dans le top 10 des pays les plus visités, mais la route est encore longue. Le secteur est en hausse, avec 5,8 millions de touristes au premier trimestre de 2024, une croissance de 32,5% par rapport aux 4,3 millions de l'année précédente a déclaré le ministère du Tourisme, des Arts et de la Culture. La facilitation de l'obtention de visas, ainsi que l'amélioration de l'accessibilité et de la connectivité des vols, sont des éléments clés pour atteindre l'objectif d'attirer 36 millions de touristes et de générer 150 milliards de RM pour la campagne "Visit Malaysia 2026". Le pays investit massivement pour faciliter ces arrivées. De nombreuses liaisons aériennes régionales permettent d'atteindre directement les destinations phares de la péninsule et de Bornéo. Les Chinois, les Indiens, les Coréens du sud et les Australiens arrivent en tête des visiteurs. La proximité géographique, la faune et la flore, mais aussi la gastronomie et la faiblesse – relative – du ringgit font partie des arguments de poids qui attirent les riverains de la mer de Chine. Le tourisme semble être l'un des rares vecteurs qui valorise la diversité des peuples de Malaisie pour en faire un atout.
Le malaise communautaire
Historiquement, les tensions ethniques en Malaisie trouvent leurs racines dans la période coloniale britannique, où la politique de diviser pour mieux régner a exacerbé les différences entre les communautés malaises, chinoises et indiennes. Les Britanniques ont importé une main-d'œuvre chinoise et indienne pour travailler dans les mines et les plantations, ce qui a renforcé les distinctions économiques et sociales. Ces divisions se sont perpétuées après l'indépendance, culminant dans les émeutes raciales du 13 mai 1969, un épisode violent qui a profondément marqué la nation et conduit à l'instauration de la Nouvelle Politique Économique (NEP). Cette politique visait à réduire la pauvreté et à restructurer la société afin de diminuer l'écart économique entre les Malais et les autres communautés, mais elle a également été critiquée pour avoir créé de nouvelles inégalités et tensions.
La Malaisie fait donc aujourd'hui face à un défi majeur : l'unification de son peuple, de manière à ce que chaque habitant se sente pleinement citoyen. Les divisions ethniques et religieuses constituent des obstacles significatifs à cette unité, éloignant les différentes communautés les unes des autres. Les Malais reprochent aux Chinois de monopoliser les richesses et de contrôler l'économie, tandis que les Chinois accusent les Malais de les exclure du paysage politique et social, les reléguant ainsi à un statut de citoyens de seconde zone.
Les décideurs politiques semblent avoir du mal à saisir l'ampleur de ce problème, bien que la nécessité de rapprocher les communautés soit évidente. Le pourcentage de Chinois dans la population malaisienne a chuté, passant de 38 % au moment de l'indépendance en 1957 à 23 % en 2016, avec plus de 2 millions de départs enregistrés durant cette période. Pour encourager le retour des expatriés, le gouvernement a mis en place un programme offrant des réductions d'impôts et de taxes. Toutefois, selon les dernières données de 2023, la proportion de Chinois dans la population malaisienne a continué de diminuer, atteignant environ 21 %, malgré les efforts pour inverser cette tendance. Bien que cette problématique soit souvent abordée à un niveau individuel, elle reste largement taboue sur le plan politique et les réformes politiques pour améliorer l'inclusivité restent timides.
Des progrès à faire en droit des femmes et des personnes LGBTQIA+
En termes de droits des femmes, des enfants et des personnes LGBTQIA+, la Malaisie a encore du chemin à faire et est sous une pression croissante de la part de la communauté internationale à ce niveau. Les personnes LGBTQIA+ subissent une discrimination institutionnalisée, qui va jusqu'au financement des pratiques de conversion pour modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre. Des lois fédérales condamnent sévèrement les relations homosexuelles et la non-conformité de genre, entraînant des arrestations fréquentes. En 2022, Google a retiré une application de "thérapie de conversion" du gouvernement de son Play Store. Des blockbusters tels que "Lightyear" ou "Thor : Love and Thunder" se sont vus interdits suite au refus de Disney de couper des éléments LGBT. Par ailleurs, en août 2022, la Cour d'appel a révoqué un jugement de la Haute Cour de 2021 accordant automatiquement la citoyenneté malaisienne aux enfants de mères malaisiennes et de pères étrangers. En avril 2022, la députée Maria Chin Abdullah a été emprisonnée pour avoir critiqué la sharia. La Malaisie a par ailleurs été critiquée pour ne pas lutter suffisamment contre le mariage des enfants - Selangor et Kedah sont les seuls États à avoir relevé l'âge minimum légal du mariage à 18 ans.