Premiers pas
En 1923, sort le premier film coréen, Promesse d'amour sous la lune. Cependant, le cinéma coréen demeure longtemps dans l'ombre de son voisin japonais. Ecrasé par l'occupant jusqu'à la libération, puis intégralement détruit par la guerre, il est ensuite muselé par les dictatures. Le 7e art coréen est alors principalement réaliste, voir Yu Hyeon-mok et son Une balle perdue (1961), un film noir sur le malaise des anciens soldats après la guerre, qui en est l'expression parfaite. La renaissance intervient dans les années 1980, qui voient apparaître un cinéma plutôt engagé, comme la littérature d’ailleurs, dont il est souvent adapté. Cette renaissance aboutit même à une reconnaissance internationale, surtout à partir des années 1990. On retient, par exemple, le réalisateur coréen Bae Yong-gyun et son film Pourquoi Bodhidharma est-il parti vers l'Orient ? (1989), sur les réflexions et le quotidien de 3 moines, un vieil homme, un trentenaire et une enfant, installés dans un ermitage reculé. Pourquoi Bodhidharma est-il parti vers l'Orient ? est l’un des premiers films coréens primés en Occident, notamment au festival de Locarno, la même année. Les films de Im Kwon-taek marquent également le renouveau du cinéma coréen dans les années 1980. Il réalise Mandala (1980, primé à Berlin), La Mère porteuse (1986, primé au festival de Venise) ou encore Sopyonje (1993), chef-d'œuvre absolu sur une famille de chanteurs de pansori. Le cinéaste remporte un certain succès critique en 2000 et 2003 au festival de Cannes pour ses deux derniers films, les très léchés Le Chant de la fidèle Chunhyang et Ivre de femmes et de peinture.
Les années 1990 et 2000
La fin des années 1990 amène une vague de jeunes réalisateurs novateurs et talentueux. Presque tous sont préoccupés par la vie quotidienne, les difficultés de la vie moderne, et certains expriment l'absurdité de notre condition par des structures élaborées rappelant la Nouvelle Vague. Le réalisateur Hong Sang-soo, l’un des représentants les plus prometteurs de cette période, est plusieurs fois sélectionné dans diverses catégories du festival de Cannes, notamment pour ses films Le Pouvoir de la province du Kangwon (1998) et Conte de cinéma (2005) ou encore Hahaha (2010) qui remporte le Prix dans la section un certain regard. On remarque, chez certains réalisateurs, une envie de retranscrire le réel de manière plus poétique. Parmi ces derniers, citons le très joli Palwolui Christmas (Noël en août) de Hur Jin-ho. L'écrivain et critique Lee Chang-dong, qui fut un temps ministre de la Culture, connaît un grand succès commercial et critique mérité pour ses films Peppermint Candy (2000) et Oasis (2002). Ce dernier revisite l'histoire contemporaine avec un intéressant système de flash-back. En 2004, Old Boy du réalisateur Park Chan-wook reçoit le Grand Prix au Festival de Cannes, marquant la première grande consécration pour le cinéma sud-coréen. Ce film d'une violence toute maniérée, toute chorégraphiée, a sans surprise particulièrement plu au président du jury de cette édition, Quentin Tarantino. Parmi les maîtres dans l’art de la provocation, le réalisateur Kim Ki-duk réussit à renverser l'image saine et fade du cinéma coréen en lui instillant des perles très critiques sur sa société, sur ses mœurs et le conservatisme de ses élites. De ces films crus, durs mais souvent justes, on retient L’île (2000, sélectionné à la Mostra de Venise), Printemps, été, automne, hiver… et printemps (2002) ou plus récemment One on One (2014) et Entre deux rives (2016). Citons également du cinéaste Kim Ki-duk, son film Pieta qui lui permet d’être primé en 2012 comme meilleur réalisateur au festival de Venise.
De nos jours
Ces dernières années, le cinéma sud-coréen se divise entre films grand public très hollywoodiens dans leur facture (mais pas toujours intéressants comme Shiri, JSA, Les amis, et de nombreux films d'espionnage entre les deux Corées) et véritables chefs-d’œuvres de genre. Ce cinéma, probablement le plus prometteur d'Asie, est mené par des réalisateurs comme Bong Joon-ho, cinéaste sud-coréen le plus célèbre de ces cinq dernières années. Bong Joon-ho commence sa carrière au début des années 2000, avec des œuvres comme Barking Dog (2000) ou Memories of Murder (2003), inspiré de l’histoire véridique d’un tueur en série. En 2006, le réalisateur coréen réalise The Host, que les Cahiers du Cinéma placent troisième film le plus important dans leur classement. Deux ans plus tard, il s’associe aux réalisateurs renommés Leos Carax et Michel Gondry pour les besoins du film Tokyo !, long-métrage composé de plusieurs courts plaçant leur intrigue dans la ville éponyme. En 2013, il s’offre un casting très américain (Chris Evans, Tilda Swinton, Ed Harris…) pour les besoins du film Le Transperceneige, adaptation de la bande-dessinée française du même nom. En 2017, son œuvre Okja fait partie des cinq films coréens présents dans la sélection officielle du Festival de Cannes, à côté de The Day After de Hong Sang-soo qui a eu la rare distinction d'avoir deux films présentés pendant le prestigieux festival. La consécration ultime arrive à Bong Joon-ho en 2019, avec le dérangeant Parasite, qui remporte non seulement la Palme d’Or à l’unanimité du jury au festival de Cannes cette année-là, mais également le Golden Globe et le César du meilleur film étranger ainsi que quatre Oscars (dont meilleur réalisateur et meilleur film) en 2020. Le cinéma sud-coréen est donc à surveiller de très près, promettant sans doute de nouvelles œuvres d’une grande finesse et d’une grande qualité.
Au petit écran
Le petit écran sud-coréen n’est pas en reste de programmes de qualité, la plateforme de streaming Netflix donne d’ailleurs une fenêtre importante aux œuvres télévisuelles de Corée. Ainsi, ces dernières années, on remarque des séries comme My First First Love (2019), remake de la série sud-coréenne My First Time. Cette série compte 2 saisons et ravira les fans de K-pop (style de musique asiatique très apprécié des adolescents), puisque son casting comprend la chanteuse Jung Chae-yeon (du groupe DIA) ainsi que Jung Jin-young (du groupe B1A4). Citons aussi les séries Love Alarm (2019), Memories of the Alhambra (2018) ou encore Kingdom (2019). Cette dernière place son intrigue durant la période Joseon de l’histoire de la Corée et allie ainsi un contenu historique à une invasion de zombies. Et last but not least, impossible de ne pas mentionner l'incontournable série Squid Games créée en 2021 par Hwang Dong-hyuk pour Netflix. Avec son concept unique, elle a suscité un engouement mondial, devenant rapidement un phénomène culturel et déclenchant des discussions passionnées sur les inégalités sociales et la nature humaine.