Découvrez Arles : Architecture (et design)

Que ce soit en Camargue ou dans les Alpilles, les habitats ont une caractéristique architecturale commune : les bâtisseurs ont dû composer avec leur environnement pour les édifier. Le vent, l’implacable mistral qui peut se laisser aller à des colères apocalyptiques, a joué un rôle majeur dans les constructions. Si aujourd’hui on n’hésite pas à ouvrir de grandes baies vitrées tous azimuts, les anciens maîtres d’œuvre préféraient, quant à eux, percer de petites ouvertures au nord et rapprocher les façades pour qu’elles se blottissent les unes contre les autres. D’où ces ruelles étroites, fraîches l’été et bien abritées l’hiver. Les matériaux n’ont pas fait exception à la règle. Et même si les Romains, qui ont laissé une empreinte indélébile dans toute la Provence, n’hésitaient pas à importer des marbres exotiques pour décorer les intérieurs de leurs somptueuses demeures, ils ont toujours préféré la pierre locale pour en édifier les murs.

Les villages des Alpilles à la Camargue

Il existe, dans les Alpilles, deux types bien distincts d’habitats traditionnels. Il y a bien sûr ces fameux villages perchés, qui ont fait la réputation de la Provence, mais on trouve aussi un habitat de plaine, résolument différent.
Les villages perchés sont des villages de crèche qui n’ont, bien entendu, rien avoir avec la nativité. Ce sont de véritables forteresses inexpugnables bâties en des temps troublés pour préserver leurs habitants des invasions barbares. Certains ne sont plus, aujourd’hui, que champs de ruine, dont on devine encore, malgré tout, la force et la puissance passées, tandis que d’autres ont vécu une véritable renaissance et sont devenus des lieux touristiques. Les vieux villages perchés sont généralement ramassés sur eux-mêmes, tant à cause de l’exiguïté des plateaux rocheux sur lesquels ils sont construits que pour se protéger du Mistral. Ici, il faut faire avec ce vent qui peut être extrêmement tempétueux et glacial. Les ouvertures sont petites, voire exiguës, les façades tournées vers le Nord sont pratiquement borgnes.
L’un des plus beaux fleurons de ce type d’habitat est, sans conteste, le village des Baux-de-Provence. L'architecture des Baux est résolument médiévale avec de grands ouvrages défensifs, dont le château est un merveilleux exemple. Dans le village, les constructions qui s’inspirent largement du modèle romain.
Et puis il y a les villages de plaine, bâtis une fois le danger passé. Leur architecture n’a plus rien de défensif, mis à part contre les éléments. Les volumes changent, les ouvertures s’agrandissent, mais restent orientées au sud. Les ruelles sont toujours étroites, pour se protéger du soleil l’été et du vent d’hiver, bref on retrouve toute l’ambiance du monde de Mistral et de Daudet, un peu comme si le pays s’était figé au XIXe siècle. Quelques éléments sont récurrents. Il y a l’incontournable place du village où se réunissent toujours les habitants lors des grandes manifestations et qui accueillent également le marché hebdomadaire. On retrouve également, presque systématiquement, une fontaine à laquelle on venait puiser l’eau, avant l’arrivée de l’eau courante. Il y a souvent un lavoir où les femmes se réunissaient pour battre le linge en échangeant des nouvelles, c’était un peu un réseau social avant l’heure. Bref, l’architecture de ces communes est bâtie autour de l’intérêt public.
Mais dans nombre de ces villages, on trouve aussi des signes distinctifs de classe avec ces grands hôtels particuliers qui accueillaient les familles nobles. Des façades hautes, tout comme les plafonds à plus de trois mètres, de belles ouvertures… il fallait marquer sa différence.
À l’extérieur des villes et des villages, les fameux mas provençaux représentent des symboles forts de l’architecture locale. Ils sont ouverts, spacieux, accueillants, souvent constitués d’un seul bloc et presque toujours orientés vers le sud. À l’origine, il s’agissait de fermes à un étage où vivaient la famille, les ouvriers et même les animaux. On y trouve de nombreuses dépendances, granges et écuries, pour abriter les récoltes, le fourrage et les bêtes.
La Camargue, par ses spécificités géographiques, présente un visage architectural bien différent des Alpilles. En effet, le sol alluvionnaire et l’absence de forêts n’ont pas permis aux autochtones de développer un habitat à partir des ressources naturelles à leur disposition. Si les Romains avaient construit des habitations et des monuments qui perdurent aujourd’hui, ils l’ont fait à partir de matériaux importés. Les habitations traditionnelles se limitaient à des abris et des refuges pastoraux aux murs en terre et aux toitures de chaumes. Là encore, la nécessité de lutter contre les éléments a dicté les méthodes de construction. De ces habitations précaires, il ne reste bien entendu rien. On sait cependant qu’elles étaient basses, aux toitures fortement pentues et qu’elles étaient orientées dans le sens du Mistral. Le mur de prise au vent était arrondi pour offrir moins de résistance à ce dernier. Le XVIIIe siècle a vu apparaître des habitations plus durables, des mas qui peu à peu se sont agrandis et se sont entourés de murs blanchis à la chaux, un peu à l’image des haciendas mexicaines. Aujourd’hui, de nombreuses manades sont abritées dans de telles enceintes, pour le plus grand bonheur des visiteurs, totalement dépaysés.

L’architecture religieuse

Les édifices religieux sont nombreux dans les Alpilles. La chrétienté y a laissé de nombreuses traces : chapelles, églises, oratoires. Édifiés durant la période romane, ils sont généralement décorés de manière sobre et épurée, afin de ne resplendir que par leur stature et la puissance de leur architecture. Ce sont, en effet, des constructions d’une grande simplicité, mais particulièrement imposantes. On y trouve une entrée, surmontée d’un tympan et une organisation classique, nef, transept et chœur. Les chapiteaux et les bas-reliefs peuvent être ornés de sculptures effrayantes qui représentent des monstres et des démons. Ce bestiaire pour le moins curieux dans un lieu de culte vient du fait que ces églises ont été construites durant des périodes sombres où les épidémies et la peur de la fin des temps hantaient les esprits. Certaines de ces églises sont à visiter absolument, comme l’église Saint-Vincent, aux Baux-de-Provence ou encore Saint-Paul-de-Mausole, à Saint-Rémy-de-Provence.
La Camargue qui, de son côté, fut longtemps une région très peu peuplée, est de ce fait beaucoup moins riche en édifices religieux. Ceux que l’on trouve, aujourd’hui, datent du XVIIIe ou du XIXe siècle. L’église des Saintes-Maries-de-la-Mer fait toutefois exception. En effet, bien que les origines de sa construction restent un sujet de discussion, elle aurait été construite aux IXe et XIIe siècles. On l’aperçoit à une dizaine de kilomètres à l’intérieur des terres et son architecture est autant défensive que religieuse avec sa nef de quinze mètres dont le toit possède un chemin de ronde entouré de créneaux. Cette église servit d’ailleurs à plusieurs reprises de refuge à la population lors d’attaques de pillards venant de la mer.

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