Guide du Bade-Würtemberg : La Forêt-Noire en 10 mots-clés
Il y en a presque autant que de villes : chaque région, et même chaque localité, a sa spécialité. Et ses habitants la consomment largement, sans nécessairement d'excès, mais régulièrement et sûrement. Blonde (Pils), de blé (Weizen), à la levure (Hefe), brune (Dunkel), noire (Schwarz), blanche (Weiss), avec de la limonade (Radler), du Coca-Cola (Diesel), l'étendue des possibilités est immense... Dans l'ensemble, les bières allemandes sont relativement fortes, amères et très gazeuses. Mais, de la bière du prolétaire (Sternburg, Beck's) à toutes les formes traditionnelles (Gose - très fermentée, Hefeweizen - blanche à la levure, Kölsch - de fermentation haute et très peu amère, Helles - pâle, et une multitude de bières artisanales), les bières allemandes occupent un éventail très large de saveurs. La plupart des goûts seront satisfaits dans ce pays où cette boisson alcoolisée fait vraiment partie d'une esthétique du quotidien.
En Forêt-Noire, vous trouverez une multitude de ces fameuses et délicieuses bières. Et parmi elles, la Zäpfle de la brasserie d'Etat badoise Rothaus qui est devenue une bière culte dans toute l'Allemagne. On pourra également citer la Diplom-Pils, qualifiée de "meilleure Pils au monde" (!).
Bien avant la plupart des habitants des autres pays européens, le consommateur allemand " réfléchi " (et suffisamment à l'aise financièrement) avait mis une importance de taille sur l'origine bio de ses produits. Si la société allemande de masse est dominée par la malbouffe des chaînes de discount (Aldi, Lidl, Penny Market), une bonne partie des classes moyennes supérieures a une approche assez hygiéniste de l'alimentation et de la consommation en générale. Le bio est devenu un vrai marché, avec ses magasins, ses marques, même à présent au sein des magasins discount ! Dans la restauration, le bio est une étiquette également souvent affichée. On dira peut-être que cela n'a plus rien d'original, mais l'Allemagne fut précurseur en la matière et le bio est aujourd'hui une part intégrante de la culture germanique de consommation.
En Forêt-Noire, la question du bio est bien entendu au centre des préoccupations. Et ainsi, dans les nombreuses auberges qui jalonneront votre séjour en Forêt-Noire, vous mangerez principalement des plats cuisinés avec des fruits et légumes de saison et pour la plupart produits localement. Amis du bio, amis de la slow food, bienvenue !
Ils manquent cruellement ! L'Allemagne connaît une crise démographique sans précédent, et les experts rivalisent de pronostics sur la date prochaine où l'Allemagne, le pays d'Europe actuellement le plus peuplé (hors Russie), sera battue par la France, et obligée d'ouvrir ses frontières à l'immigration pour pouvoir faire tourner son économie ! Dans la société, ce phénomène se fait ressentir, et le baby-boom d'après-guerre, le troisième âge aujourd'hui, est LA classe dominante, les retraités sont rois, les jeunes se sentent écrasés et pas assez représentés... Pourtant ce sont eux qui ne veulent plus faire d'enfants. Et ceci n'est pas sans raison historique. Au vu de la politique de soutien des naissances qu'avaient les nazis, il est tabou pour les autorités allemandes d'envisager de nouveau une telle politique sans risquer de s'aligner sur de mauvais souvenirs. Ainsi, il est très difficile pour une femme d'avoir un enfant et de poursuivre une carrière, car elle n'aura quasiment pas de soutien, sans parler de la quasi-absence de congés de paternité ou d'aide donnée aux pères. Très peu de crèches, peu de pensions alimentaires... S'ensuit un climat général de société, où faire des enfants, de plus, entrave les plans de vie basés sur le travail et les loisirs. Pour certains sociologues, l'Allemagne vit une dépression collective, où l'enthousiasme national est tabou, car il risquerait de faire renaître de vieux fantômes. Quoi qu'il en soit, la situation est préoccupante, et les autorités tentent tant bien que mal de changer d'attitude, surtout à gauche. Car à droite, le sacro-saint modèle de l'homme au travail et de la femme au foyer prévaut, mais les temps sont durs et les femmes doivent tout de même travailler, alors c'est la descendance qui en pâtit...
En Forêt-Noire, mais surtout dans le land de Bade-Wurtemberg, la situation paraît moins frappante. En effet, vous apercevrez de nombreux jeunes enfants se baladant sur les sentiers de la Forêt-Noire au cours de votre séjour, mais surtout le land est l'un des plus dynamiques d'Allemagne économiquement parlant, et donc aussi démographiquement parlant.
Le fer de lance de l'économie allemande ! Car, phénomène incroyable vu la taille du pays à l'échelle mondiale, l'Allemagne est le n° 2 planétaire des exportations - après la Chine, qui ne l'a dépassée que depuis 2009 ! Une véritable machine de guerre économique pour un pays hautement industriel. L'économie allemande est bouillonnante, elle est peuplée de PME, produit des biens de consommation, de l'alimentaire, des voitures, des produits secondaires... Et les exporte.
Le land de Bade-Wurtemberg est ainsi l'une des régions les plus attractives d'Europe, en grande partie grâce à ses exportations, notamment liées à l'industrie automobile. En effet, le land est "couvert" d'usines automobiles des grands groupes allemands comme Daimler, Porsche, BMW ou encore Audi et Mercedes-Benz. Egalement, on notera la forte présence historique des industries textiles qui participent un peu plus à ces exportations.
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, l'Allemagne est un pays très patriarcal. Traditionnellement, les femmes sont assignées aux tâches ménagères et ne sont pas censées exercer des professions qualifiées - voire des professions tout court. Le modèle ouest-allemand de réussite, à son apogée dans les années 1960, était basé sur la femme au foyer et l'homme qui exerçait un métier lucratif. La RDA, avec l'idéologie socialiste, avait développé très tôt une parité institutionnelle qui a permis aux Allemandes de l'Est d'être plus indépendantes que leurs consoeurs occidentales, même si dans les faits, les attitudes machistes continuaient à primer, et elles devaient mener de front leur travail et les enfants à plein temps. Il reste qu'aujourd'hui encore, dans les länder de l'Est, les jardins d'enfants et les crèches sont beaucoup plus nombreux qu'à l'Ouest et permettent aux femmes de concilier famille et travail. L'aspect patriarcal de la culture allemande a logiquement, à l'Ouest, mené à des mouvements féministes radicaux et tenaces. Depuis les années 1970, les Allemandes ont, plus peut-être que les autres Européennes, lutté pour l'égalité, la parité, et créé un tissu associatif et institutionnel adressé aux femmes. Paradoxalement, malgré un patriarcat structurel, voire politique (la CDU prêche encore le soutien aux femmes au foyer, notamment pour faire diminuer le taux de chômage...), les Allemandes sont souvent combattives et individuellement attentives à ce que justice leur soit faite... Et l'on ne s'étonnera pas alors de voir une femme diriger le pays, alors qu'il émane de ce même parti une politique familiale conservatrice !
Voilà un concept bien allemand ! Qui se traduirait par " confort " ou " bien-être matériel "... Toute une façon d'envisager la vie. La Gemütlichkeit, c'est se créer un espace matériel suffisamment confortable pour que l'on puisse être épicurien. Au contraire de l'hédonisme débridé, il s'agit de faire attention à ce que les conditions soient réunies et maintenues pour que l'on puisse vivre agréablement et décontracté. Ce sont des auberges, bars ou restaurants spacieux, confortables et sans stress, ce sont des jardins ouvriers fleuris et équipés de chaises longues et de tout ce qu'il faut pour y passer une journée sans souci, ce sont des villes vertes et aérées avec suffisamment de commerces de proximité et un stand à saucisses à deux pas du travail, avec des pistes cyclables et de larges trottoirs. C'est tout ce que l'on appellerait " qualité de vie " pour s'adonner à un quotidien empli de plaisirs... aux antipodes d'être prêt à passer des heures dans un bouchon pour un week-end pittoresque... et c'est tout ce que vous trouverez ici en Forêt-Noire. Hospitalité dans les chambres d'hôtes, douceur des sentiers et plats typiques préparés par vos hôtes dans les auberges : voici une excellente façon d'expérimenter la Gemütlichkeit lors de votre séjour.
Cette idée bien germanique, à la fois la patrie, le chez-soi et le lieu des racines, est problématique depuis que le nazisme en a fait un culte. Les Allemands ont tendance à cultiver d'une manière romantique le " on est bien chez nous, avec notre folklore, nos traditions et nos autochtones ". Dans les villages, on aura souvent un " Heimat-Museum ", le musée local, exposant et chérissant la région et ses spécificités. Mais la génération post-1968, qui a rejeté en bloc l'héritage des aînés tant associé au nazisme, a pris en grippe le kitsch des racines qui pouvait si vite dévier sur la haine de l'étranger. Elle s'est détournée de ce bucolisme qui prévalait encore dans les Heimat-Filme des années 1950. Aujourd'hui, le pays est un peu partagé en deux, avec une population rurale et certaines classes populaires qui cultivent encore la bonne fleur de chez eux (le sud du pays, et particulièrement la Bavière et le Bade-Wurtemberg), et toute une classe urbaine et " post-moderne " (le nord, les régions urbaines et industrielles) qui honnit les relents de cette Allemagne suspecte à leurs yeux.
La Forêt-Noire, quant à elle, représente véritablement ce romantisme à l'allemande et est souvent associée à la notion d'Heimat. D'ailleurs, lors de votre séjour, vous ne manquerez pas de tomber sur une multitude de dépliants touristiques qui tous vous vanteront le romantisme à l'allemande en Forêt-Noire !
C'est la grande question nationale : comment oublier sans oublier. Depuis 50 ans, les historiens tentent, en tête, de gérer le traitement de la période nazie. Au coeur de l'attention internationale après l'holocauste, l'Allemagne a été contrainte de développer un mea culpa institutionnel, un professionnalisme du repentir et du devoir de mémoire. Se souvenir pour que jamais plus ça n'arrive. Mais les troisième et quatrième générations après les acteurs de l'époque nazie souhaiteraient aussi pouvoir vivre sans nourrir à chaque instant un immense sentiment de culpabilité face au monde entier, et ne pas payer pour les fautes de leurs arrière-grands-pères. Mais le sentiment est là, il est soutenu par une politique d'Etat. Quatre attitudes possibles : l'indifférence bon gré mal gré ; l'exercice consciencieux du devoir de mémoire et de culpabilité ; la haine de l'Allemagne, de ses origines, de ses ancêtres, ce que font les mouvements d'extrême gauche (notamment le parti des " anti-Allemands " !) ; enfin le rejet de l'idée de faute et la revalorisation du passé nazi, ce que font les mouvements néo-nazis. Une problématique qui devrait s'amenuiser à mesure que l'eau coule sous les ponts, mais qui reste un problème de choix et d'équilibre entre la mémoire et l'oubli.
Tout un slogan de l'Allemagne post-moderne issue de 1968 qui, aux antipodes du culte du " Heimat ", prône une Allemagne libérée de son nationalisme ethnique, multiculturelle, ouverte et fière des apports de cultures étrangères liés à l'immigration. La question se pose autrement qu'en France par exemple. Car l'idée d' " être Allemand " est au départ purement ethnique, ne se négocie pas, et n'est pas liée à des questions de citoyenneté ou de culture. Cette idée bien exclusive de la Nation - prête à succomber aux dérives racistes - est remise en question par une bonne partie du monde médiatique et intellectuel depuis 30 ans. On a développé alors en réaction l'idéologie du " Multikulti ". Cette affection pour la diversité est particulièrement répandue dans la scène urbaine forte de foyers " alternativ ". Radio Multi-Kulti à Berlin, apologie de la différence à Brême, Hambourg, Francfort ou Leipzig, cette belle idée, avec ce qu'elle a de généreux et de naïf, n'est pourtant pas socialement très opérante pour les populations immigrées qui vivent le plus souvent dans des communautés assez repliées sur elles-mêmes, et qui voient sans doute d'un oeil étonné ces Allemands venant vivre dans leurs quartiers pour cultiver la différence sur le sol allemand !
Dans le land du Bade-Wurtemberg, et spécialement en Forêt-Noire, on note ainsi une relative mise en valeur de la notion de "multikulti", notamment au travers d'une population immigrée bien intégrée qui représente environ 7 % de la population totale du land.
Les Allemands en sont férus ! Depuis le Moyen Age (et même avant), le pays s'est construit sur un savoir-faire incroyablement développé des artisans. Extraction minière, fabrication, métaux, construction, le développement industriel constitue le noyau de la société allemande depuis des siècles. Les Allemands ont aménagé leur territoire, comme peu de peuples, autour d'activités industrielles poussées. Pas étonnant que la technique soit aussi au coeur des identités et de la culture, des passions et des loisirs, donc du tourisme. Les Allemands raffolent de visites d'usines, de manufactures, de mines, ils veulent savoir comment ça fonctionne... Et le land de Bade-Wurtemberg n'échappe pas à la règle, lui qui est le siège de nombreuses industries automobiles de pointe. Ainsi, il n'est pas rare de voir les Allemands se précipiter vers une visite des usines (notamment celles de Daimler et de Porsche) ou même à la découverte des anciennes industries textiles de la région.
Découverte du pays
- Les plus de la Forêt-Noire
- La Forêt-Noire en 10 mots-clés
- Survol de la Forêt-Noire
- Cuisine locale
- Les personnalités célèbres : Allemagne
Histoire & culture
Autre
Galerie Photos