LOU CÀRRI

L'histoire de cet événement remonte à loin, bien avant la Révolution française. En ces temps-là, les notables se permettaient quelques privilèges outranciers au regard de dures famines et disettes que traversait la population. A voir ainsi les seigneurs et consuls, qui dirigeaient le village, profiter ainsi des deniers publics et afficher leurs frasques à la vue de tous, les villageois se révoltèrent. Un après-midi de 1^er mai, une poignée d'entre eux décidèrent de monter une farce qui mettrait en scène ces notables en les caricaturant. Le plus bavard devint le grand seigneur affublé d'une toque grotesque. Il fallait aussi singer ces deux fléaux de consuls. Qu'à cela ne tienne, fléau pour fléau, on les nomma Seigneur des Escargots et Seigneur des Hannetons, les pires ennemis des récoltes. On apprêta un chariot pour y installer les trois notables. Les autres villageois singèrent à leur tour les bourgeois et notables de la ville qui formaient une sorte de petite cour autour des principaux dirigeants. Assis sur des ânes, sur des charrettes vétustes et grotesques, ils se fabriquèrent ainsi un grand défouloir en forme de carnaval revendicateur. Le cortège s'arrêta sur la place du village où le faux seigneur dénonça à haute voix tout ce que les villageois avaient sur le cœur, une attaque directe au pouvoir en place. Fort habilement, ce dernier ne réprima pas les manifestants et leur permit même d'organiser cette mascarade chaque année, une soupape salutaire qui évitait la révolte et canalisait la rancœur populaire.
Ainsi est né le Càrri, dont la tradition perdure : tous les dix à vingt ans (les dernières éditions ont eu lieu en 2000 et 2010), des cortèges de chevaliers, de cavaliers et de charrettes envahissent le village pour une plongée de quelques siècles en arrière l'espace d'un dimanche.