Un trône de fer dans un écrin de pierre
En transformant la cité historique et ses vieux quartiers en une capitale médiévale-fantastique tantôt grandiose, tantôt putride, la série Game of Thrones (2011-2019), adaptée de l'œuvre de Georges R. R. Martin par David Benioff et D. B. Weiss, est peut-être l'une des raisons qui vous a poussé à visiter Dubrovnik, voire peut-être même la principale. Pour les non-initiés, la geste des sept royaumes est un récit de fantasy mêlant intrigues politiques, guerres familiales et batailles épiques dans un univers médiéval où la violence, le sexe et les assassinats sont monnaie courante. Ajoutez à cela un cocktail détonant de dragons et de zombies, et vous obtenez l'une des séries les plus vues de la dernière décennie. Des visites guidées institutionnalisées ou gérées par les locaux sillonnent la ville en permanence pour faire découvrir aux curieux l'Arboretum de Trsteno, la forteresse Minčeta ou la porte Pile, parmi les lieux les plus reconnaissables présentés dans la série. Mais vous pouvez tout à fait vous rendre au centre d'information et récupérer vous-même les brochures de la ville pour partir à la rencontre de ces lieux chargés d'images. De cette façon, vous foulerez les marches du Grand Septuaire de Baelor en descendant l'escalier jésuite baroque, ou vous grimperez les sentiers menant à la tour Bokar ou au fort Lovrijenac, tout en admirant la baie de Pile en contrebas, lieux régulièrement cités dans la série. Arrêtez-vous au palais du Recteur, que vous reconnaîtrez peut-être comme celui du roi des épices de Qarth, avec qui Daenerys Targaryen se voit contrainte de négocier. Enfin, terminez votre promenade par un coucher de soleil sur les remparts de la ville, et imaginez-vous en roi chevalier ou dans le rôle de la Mère des dragons, selon les limites de votre imagination. Les fans inconditionnels pousseront l'excursion au-delà des murs de la cité pour se rendre sur l'île de Lokrum, dont le monastère fait aussi partie des incontournables lieux de tournage à visiter lors de votre séjour. Depuis 2015, la chaîne HBO a fait don d'une réplique officielle du trône de fer, élément central de la série, au musée de l'île de Lokrum, lieu de tournage de la ville de Qarth. Vous aurez peut-être la chance de vous asseoir sur le siège tant convoité, à vos risques et périls…
Du théâtre à La Guerre des étoiles
Parmi les premiers tournages notables accueillis à Dubrovnik, citons l'adaptation au cinéma de La Dame aux tournesols (1918), d'un cinéaste juif hongrois alors méconnu en Occident Mihály Kertész. Quelques années plus tard, ce dernier émigre à Hollywood et prend le nom de Michael Curtiz, avant de réaliser ce qui est certainement l'un des plus grands chefs-d’œuvre du cinéma américain, Casablanca (1942). Après la Seconde Guerre mondiale, les tournages dans la Yougoslavie, penchant vers l'Est malgré son statut d'état non aligné, sont difficiles pour les productions internationales. À l'inverse, le cinéma yougoslave peine à s'exporter à l’Ouest. Les tournages notables à Dubrovnik sont donc peu nombreux, même si l'on peut citer la venue de Roger Corman, spécialiste du cinéma de série B et réalisateur du culte La Petite Boutique des horreurs (1986) pour le film de guerre L’Invasion secrète (1964). On y suit un commando de soldats américains peu recommandables devant s'infiltrer dans la forteresse de Dubrovnik pour libérer un officier italien allié. Ensuite, il faut attendre l'année 1990 pour qu'un autre tournage américain vienne poser sa caméra dans la cité, cette fois pour une adaptation de Captain America, héros de comics bien connu des amateurs du genre et des plus jeunes. Le film ne rencontre cependant pas le succès de son remake sorti en 2011, et la scène de combat final tournée sur les murs du fort Lovrijenac frôle le ridicule. Une étrangeté à découvrir.
Depuis la fin de la Yougoslavie et les accords de Dayton, la Croatie et Dubrovnik ont bien redynamisé l'industrie régionale du cinéma, poussant de nombreux tournages à choisir la cité comme décor de prédilection pour leur film ou leur série. Il en est ainsi de la mini-série britannique Casanova (2005), qui révélera David Tennant (Doctor Who, Jessica Jones), mais également du huitième épisode de la saga Star Wars, le Dernier Jedi, réalisé par Rian Johnson en 2017. La ville y tient le rôle de Canto Bight, une cité-casino spatiale où échouent Finn, Rose et BB-8 dans leur quête d'un soutien contre le Premier Ordre. Un an plus tard, c'est au tour de Robin des Bois de s'installer à Dubrovnik, sous les traits de Taron Egerton (Kingsman), accompagné de Jamie Foxx. Le film est cependant un échec commercial et critique.
À la même époque, la série Succession entre dans sa seconde saison sous les faveurs du public et des journalistes. Une saga qui n'a rien à envier à Game of Thrones en termes d'intrigues, si ce n'est cette fois que les batailles se livrent à coups d'opérations boursières, d'héritages et de harcèlement médiatique. Le yacht affrété par la famille Roy – un bâtiment allemand réel nommé Solandge, apparemment disponible à la location pour la modique somme de 950 000 € par semaine – croise au large des côtes croates, et l'on peut admirer en arrière-plan de ces intrigues les eaux bleutées des plages de Cavtat, Korčula, Mljet et Sipan, non loin de la ville.
Où voir du cinéma à Dubrovnik
Après avoir parcouru tous ces décors, vous serez peut-être tenté par une plongée dans l'écran. Deux complexes principaux s'offrent à vous, le CinéStar d'une part, et les salles du réseau Kinematografi de l'autre. Tous proposent des films nationaux et internationaux, et les cinémas du réseau Kinematografi disposent même de deux écrans plein air durant la période estivale. Par ailleurs, la salle du Kino Dvorane est bien à l'abri dans les sous-sols du couvent Sainte-Claire, lui donnant un cachet indéniable tout en étant basée au cœur de la ville. Côté festival, rendez-vous au festival du film de Dubrovnik (DUFF), une manifestation qui propose chaque année une large programmation de courts métrages à destination des enfants, autant en animation qu'en prises de vues réelles. De quoi régaler les pupilles et les imaginaires des petits et des grands, dans cette ville déjà si magique.