Guide de voyage Île De Mozambique

" Je viens d'une bulle de savon sur l'océan Indien ", écrivait Virgilio de Lemos, originaire de l'île. Une bulle avec un pont pour aller dessus. Enfin, disons un ponton, presque une digue, qui impressionne plus par sa longueur que par sa largeur - puisque deux voitures ne peuvent pas s'y croiser. Il y a le pont, avec les gens qui traversent à pied. L'île se fait désirer, on y entre progressivement. L'île est la veuve du Mozambique colonial. Le pays lui a laissé tellement de dettes qu'aujourd'hui elle est ruinée, mais, stoïque, elle se maintient. L'île est tombée dans l'oubli dès lors qu'elle a perdu son statut de capitale de pays (Lourenço Marques est devenu le chef-lieu du Mozambique en 1898, prenant le nom de Maputo), puis son statut de province (Nampula le lui vole en 1935). Alors elle s'abandonne, et ce ne sont pas les projets de l'Unesco qui vont y changer quelque chose. L'idée était bonne : la classer au patrimoine mondial de l'humanité (en 1991), tenter de redonner sa saveur et une jeunesse à une vieille dame, mais les investisseurs n'ont pas répondu présents au projet de restauration. Les quelques investissements dans l'architecture ont soit commencé avant l'arrivée du projet Unesco (musée), soit été faits par des compagnies mozambicaines privées. Quelques particuliers s'y mettent également - il y a encore de riches Européens amoureux des vieilles pierres -, appuyés par quelques architectes passionnés. Parfois les fonds de l'Unesco arrivent à bon port et se traduisent par quelques travaux... Dans les fonds sous-marins des environs, des vestiges de toutes ces batailles livrées pour sa conquête sont engloutis. Par dizaines, des navires anglais, néerlandais, arabes et portugais parcouraient la mer avec leur cargaison parfois précieuse (porcelaine, or, perles...) ; certains sont restés ici. Une entreprise privée a hérité des droits sur ce précieux butin, ce qui a suscité une polémique au Mozambique, lorsque les archéologues repêchent des vestiges qui sont confisqués. Le secteur du tourisme est contrarié par cette mise à l'écart de la manne, qui aurait pu être exposée dans des musées locaux pour attirer plus de visiteurs.

Aujourd'hui, ce sont surtout des investisseurs privés qui se lancent dans des projets de rénovation. La petite vie insulaire continue ici, avec ses bons restaurants, ses marchés nocturnes et ses cafés les pieds dans le sable. On prend plaisir à se promener dans les rues de la ville qui a gardé son charme suranné malgré la décrépitude de ses édifices. De nouvelles adresses ouvrent pour tous les budgets, d'autres ferment, d'autres restent là, immuables.