Les recettes du succès
Une politique de relance par la demande, confortée par une politique sociale : c’est ainsi qu’on pourrait le résumer.
Lors de sa prise de fonction en 2015, Antonio Costa s’est engagé à tourner la page de l’austérité qui s’est emparée du pays. Pour parvenir à sa promesse, il a relevé peu à peu le montant du salaire minimum, revu le problème de la rémunération des fonctionnaires et du régime des retraites, durement et directement impactés par la crise. Les ménages ont pu à nouveau consommer et davantage grâce à un programme de lutte contre la précarité et un nouveau dynamisme économique.
Un renouveau d'industries destinées à l'export telles que l'automobile, la chaussure ou encore le textile, secteurs porteurs qui avaient quasiment disparu du paysage économique, sont aussi venues soutenir la reprise, tandis que le Portugal a accueilli dans le même temps un nombre croissant de sociétés étrangères qui continuent à investir.
Ainsi, des groupes d’investissement chinois ont libéré plusieurs milliards d’euros et sont devenus actionnaires de la plus grosse compagnie d’assurances portugaise, du réseau électrique REN et de la Millennium Banco Comercial Português, principale banque privée du pays.
Ce qui profite le plus à l’Algarve en particulier, c’est l’arrivée en masse et continue de milliers de retraités européens, ce qui lui vaut le surnom de Côte d’Azur de l’Europe. En 2009, au plus fort de la crise, le pays avait accordé 10 ans d’exonération d'impôts. Les conditions évoluent doucement mais les avantages fiscaux demeurent toujours aussi attractifs. La revitalisation du tourisme est considérable dans la région et a aussi largement contribué à ce miracle économique grâce, entre autres, à des projets immobiliers haut de gamme. Le tourisme fait partie du secteur des services (68,3 % de la population active) qui poursuit son ascension et joue un rôle capital et décisif dans l’économie portugaise.Quels sont les nouveaux défis économiques ?
Reconduit dans ses fonctions, le socialiste Antonio Costa et son nouveau gouvernement (à 10 sièges de la majorité absolue au Parlement) auront plusieurs défis à relever. Tout d’abord, en traitant la question cruciale de la flambée des prix du secteur immobilier, résultat de plusieurs facteurs dont l’installation des expatriés étrangers, le succès des locations de type Airbnb, entre autres, qui ont contribué à favoriser une augmentation des prix. En 2019, des agents de la fonction publique entameront une série de grèves, manifestant leur insatisfaction et leur déception face aux attentes du gouvernement socialiste. Le pays sera aussi confronté à une autre épreuve, celle de sa démographie, une population locale vieillissante et le départ d’un nombre impressionnant de citoyens au cœur de la crise, poussés par les acteurs gouvernementaux de l’époque.
Confrontées à une pénurie de main-d’œuvre, les autorités cherchent à présent à les rapatrier. Selon les estimations officielles, environ les deux tiers auraient répondu à l’appel. Quant au nombre d’immigrés vivant au Portugal, d’après l’OCDE, le chiffre a bondi de 21 % en 2017.Le lithium, le nouvel « or blanc »
Et puis si ce boom général, économique et touristique ne suffisait pas, il y a maintenant le lithium (matière première qui entre dans la fabrication des batteries des voitures électriques et des téléphones). Le Portugal, qui détient le plus gros gisement de lithium d’Europe, ne veut plus se contenter de recevoir les royalties de l’activité d’extraction, mais développer des secteurs industriels liés à la transformation de ce minerai. L’idée est prometteuse, mais suscite des réactions mitigées. En effet, pour extraire le lithium du sous-sol, il est nécessaire de creuser des mines à ciel ouvert et de construire des usines pour le concentrer.
Des engagements écologiques
Sur le plan des énergies renouvelables, le Portugal vise la neutralité carbone d’ici une trentaine d’années et a décidé d’aller plus vite que ses voisins européens. Il investit, de manière constante, dans l’électricité propre, le solaire, le vent et l’eau. Plus de 250 parcs éoliens essaiment le pays et cette énergie représente à elle seule 25 % de la consommation ; 220 barrages viennent compléter le paysage énergétique. En Algarve, de nombreuses entreprises misent sur la préservation de la biodiversité unique de la région. Il s’agit, par exemple, de projets immobiliers écoresponsables dont les actions sont basées sur une architecture bioclimatique, des systèmes géothermiques ou une meilleure gestion de l’eau. Le pays tout entier, aux dires des observateurs, serait en passe de devenir l’un des plus verts de la planète.
Marcelo, un président « de l’affect »
Le président Marcelo Rebelo de Sousa, en fonction depuis mars 2016, réputé pour sa culture et l’acuité de son intelligence, cultive la proximité avec la population. On le voit nager au milieu des autres baigneurs sur la plage de Cascais ou encore, lors des catastrophes, prendre les gens dans ses bras pour les consoler. Mieux encore, en août 2020, alors qu’il se trouvait en vacances en Algarve, le président âgé de 71 ans, a sauvé deux petites filles de la noyade, un acte de bravoure qui a été particulièrement commenté sur les réseaux, et cela à juste titre. Une simplicité et une proximité qui lui valent le surnom de « président de l’affect ». Sa cote de popularité atteint 18 sur 20, de quoi faire pâlir d’envie n’importe quel leader politique.
Ça bouge au Parlement
Ce gouvernement de gauche est curieusement stable pourtant il rassemble étonnement le Parti communiste portugais, des écologistes et un bloc de gauche radicale. Le tout nouveau Parlement issu des urnes en octobre 2019 présente quelques nouveautés : l’entrée du tout nouveau parti IL Initiativa Liberal fondé en 2017, avec 1 député, qui prône la fin du service public dans l’éducation et la santé, et une ponction fiscale de 15 % à partir de 650 € de revenus par mois. Le PAN très actif, acronyme de Peuple Animaux Nature, pèse désormais dans le jeu politique et nourrit l’espoir d’être associé aux négociations avec le Parti socialiste, grand vainqueur de l’élection (106 députés sur 230). Enfin, l’élection d’une députée issue des anciennes colonies, présente à l’Assemblée nationale, apparaît comme un pied de nez au parti d’extrême-droite Chega ! : une vraie première !