Découvrez Espagne - Galice/Asturies/Cantabrie : Architecture (et design)

Galice, Asturies, Cantabrie, Castille-et-León… ces régions ne sauraient être plus différentes… Elles ont pourtant en commun de vous inviter à un voyage architectural à couper le souffle. Vous vous émerveillerez ainsi devant les premiers villages celtes et les grandioses réalisations romaines. Vous serez emporté dans un tourbillon médiéval entre splendeurs romanes, audaces gothiques, héritages maures et puissants châteaux. Vous découvrirez les décors ciselés de la Renaissance et resterez sans voix devant le foisonnement baroque. Vous vous laisserez charmer par l’architecture fin de siècle, entre l’excentrique liberté du Modernismo et les prouesses de l’architecture métallique… et vous ne pourrez qu’être étonné par la monumentalité de certaines réalisations d’après-guerre. Et n’oublions pas la pittoresque architecture vernaculaire et les superbes réalisations contemporaines signées des plus grands architectes. Alors, prêt pour le voyage ?

Aux origines

Véritables musées à ciel ouvert, les régions du Nord-Ouest de l’Espagne vous font remonter le temps. En Galice, menhirs et dolmens néolithiques revêtent, aujourd’hui encore, un caractère sacré. Passer sous les formations rocheuses de la Costa de la Muerte devrait ainsi vous porter chance ! Dans les Asturies, tout comme en Galice, vous pourrez également découvrir l’architecture très élaborée des premiers villages celtes : les castros. Regroupant plusieurs maisons circulaires, ils étaient protégés par de puissantes et massives enceintes. Le Castro de Coaña, fondé à l’âge du fer, est un des sites les mieux préservés des Asturies. Vous y observerez les fondations circulaires de plusieurs habitations, des fortifications, ainsi que les témoins d’un ingénieux urbanisme avec découpage en rues et système d’écoulement des eaux. Le village celte d’A Guarda est également un immanquable. Ces villages intéressèrent évidemment les Romains qui y imposèrent progressivement leur pouvoir. Dans ces régions, l’architecture romaine se fait pragmatique et monumentale, à l’image de l’impressionnant aqueduc de Ségovie qui domine la ville de sa silhouette de granit aux 163 arches dont les pierres ont été assemblées…sans mortier ! Parmi les autres très beaux témoins de la puissance romaine, notons : l’imposante enceinte de Lugo avec ses 6 m de large et 11 m de haut ; le pont romain de Salamanque enjambant le Tomes ; les thermes de Campo Valdès ; l’Arc de Triomphe de Medinaceli (que l’on retrouve sur les panneaux routiers indiquant un site antique !) ou bien encore la Villa Romaine de La Olmeda et ses superbes mosaïques. Ce sont ensuite les Wisigoths qui ont laissé leur empreinte via un art chrétien embryonnaire mêlant influences orientales (arcs outrepassés) et occidentales (plan basilical) dans des décors stylisés, à l’image de l’ermitage de Quintanilla de la Viňas et son église dont les chapiteaux des colonnes de l’arc triomphal sont richement décorés de motifs solaires et lunaires, ou de l’église San Pedro de la Nave et ses frises aux reliefs délicats.

Effervescence médiévale

Le haut Moyen Age dans le Nord-Ouest de l’Espagne revêt un double visage. La quasi-totalité de la péninsule se trouve sous domination maure et voit se développer l’art mozarabe, un art chrétien puisant aux sources de la tradition arabe. En Castille-et-León, les églises s’enrichissent ainsi de coupoles nervurées, d’arcs en fer à cheval ou polylobés et de riches effets chromatiques, à l’image de l’église Peñalba de Santiago ou de l’église San Miguel d’Escalada. Mais les Asturies, elles, n’ont jamais connu la domination arabe. C’est à partir de ce petit royaume qu’a démarré la reconquête et c’est là que s’est développé un art préroman unique, notamment à Oviedo, première capitale chrétienne de la péninsule. Ne manquez pas l’église Santa Maria del Naranco, encore très marquée par l’art wisigothique et possédant des traits asturiens typiques telles les colonnes sculptées en forme de cordes et l’église San Julian de los Prados avec ses superbes fresques. C’est à partir du XIe siècle que le roman va pleinement éclore autour de l’un de ses plus beaux sanctuaires : la cathédrale Saint-Jacques de Compostelle. Maintes fois remaniée, elle conserve quelques trésors romans comme les très richement décorés Puerta de la Plateria et Portico de Gloria. Non loin, le Palacio Gelmirez est l’un des rares exemples de roman civil. Ne manquez pas son salon synodal aux superbes voûtes nervurées. Partout sur les routes de la reconquête fleurissent églises, collégiales et monastères mêlant puissance, sobriété et décoration visant à instruire les fidèles. Parmi eux, notons : la Colegiata San Isidoro et le Panteon Real à Léon ; l’ancienne cathédrale de Salamanque ; l’église San Juan de los Caballeros à Ségovie et les monastères de Ribas de Sil et de Oseira en Galice. Le gothique qui suit, se fait flamboyant. Parmi les chefs-d’œuvre de cet art de la hauteur et de la légèreté, ne manquez pas la cathédrale de Léon à la nef majestueuse éclairée par pas moins de 1 800 m2 de vitraux et surtout la cathédrale de Burgos, 3e plus grande du pays ! Le gothique va trouver son apogée dans ce que l’on appelle le style isabélin tout entier voué à démontrer la puissance des Rois Catholiques dans une débauche décorative où se mêlent motifs héraldiques et formes libres et souples inspirées des découvertes du Nouveau-Monde. L’un des plus célèbres témoins de ce style est un édifice civil : la Casa de la Concha (la Maison aux Coquilles) de Salamanque ornée de près de 400 coquilles Saint-Jacques en pierre dorée. La maison possède également un patio, témoignant ainsi des apports du style mudéjar, art d’inspiration arabe exercé au sein d’un royaume chrétien. Disposition des maisons autour d’un rafraîchissant patio et murs extérieurs aveugles préservant l’intimité, plafonds à caissons, coupoles et décors d’azulejos comptent parmi les grands apports mudéjars. La Reconquête se fait aussi militaire avec la multiplication de châteaux, surtout en Castille-et-León (castillo signifie d’ailleurs… château !) Les plus anciens remontent aux Xe et XIe siècles, mais la plupart de ceux qui nous sont parvenus datent des XIVe et XVe siècles. Ils sont plus d’une centaine, difficile donc de tous les citer ! Mais parmi les plus célèbres, ne manquez pas le château de la Mota à Medina del Campo construit sur le site d’une ancienne forteresse arabe ou alcazar et dont la Torre de Homenaje (le donjon central) possède une impressionnante silhouette crénelée ; le château de Peňafiel ; le château de Ponferrada édifié par les Templiers ou bien encore l’étonnant Alcazar de Ségovie à la décoration arabo-gothique. En parallèle, les villes médiévales, protégées de puissantes enceintes comme à Llanes, se développent dans un enchevêtrement de ruelles pavées bordées de demeures seigneuriales ornées de blasons et armoiries, menant à la Plaza Mayor, le cœur de la cité concentrant les pouvoirs (hôtel de ville, église), bordée de galeries à arcades. A l’image de Covarrubiàs et Santillana del Mar, nombreux sont les villages à avoir conservé ce charme typiquement médiéval.

Renaissance et Baroque

Se poursuivant au XVIe siècle, le foisonnant style isabélin va largement inspirer ce que l’on appelle la Renaissance plateresque, ainsi nommée du fait de ses abondantes sculptures et décorations ciselées, tels des travaux d’orfèvrerie (platero en espagnol). L’Hostal de San Marcos à Léon, avec ses médaillons, ses colonnes et arcades sculptées, est un des plus beaux édifices plateresques d’Espagne. Mais c’est sans doute Salamanque qui en compte le plus grand nombre, le Couvent San Esteban en tête, dont la façade fait figure de manifeste plateresque avec ses frises, médaillons et grotesques ornant arc de triomphe, niches et consoles. L’un des grands architectes de l’époque, Rodrigo Gil de Hontanon, fait, lui, le choix de perpétuer la tradition gothique dans une recherche de clarté et de rigueur, comme avec son Palais Monterey de Salamanque inspiré des alcazars royaux, ou la Cathédrale de Ségovie, avec son haut vaisseau et ses voûtes nervurées. Ce rejet d’une trop grande exubérance décorative trouve son apogée dans le style herrerien  – du nom de son grand représentant, Juan Herrera –  tout en austérité et monumentalité. Ce style a durablement marqué l’Espagne, ce qui explique le double visage du baroque qui lui succède. D’un côté, le baroque va se faire foisonnant, exubérant, virevoltant. Art de la mise en scène et des effets visuels, il pare de sa richesse ornementale les façades des pazos, les grandes demeures patriciennes dominant parcs et jardins où la nature se met, elle aussi, en scène, comme au Pazo d’Oca de Compostelle. La façade principale de la cathédrale de la ville est un autre superbe exemple de ce décor baroque aux multiples sculptures, tout comme la façade baroque de l’Université de Valladolid. Elles sont les emblèmes d’un style que l’on appelle churrigueresque, du nom des Churriguera, célèbre dynastie d’architectes qui multiplièrent colonnes torses, pilastres en pyramides inversées et retables finement ciselés. De l’autre, le baroque va se faire plus modéré, cherchant clarté et harmonie. C’est notamment le cas au palais de La Granja de San Ildefonso que Philippe V voulait tout à la fois propice à la prière et grandiose à l’image du Château de Versailles. La superbe Plaza Mayor de Salamanque, chef-d’œuvre de symétrie et de clarté, a pourtant été réalisée… par un Churriguera ! La preuve qu’à partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle, le baroque laisse définitivement la place à un style classique.

Richesse vernaculaire

Les paysages de Galice et des Asturies sont jalonnés d’hórreos, des greniers traditionnels construits sur pilotis et souvent entourés de croix et autres symboles de protection. Carnota, en Galice, possède l’un des plus grands et plus anciens hórreos du pays. Depuis 1763, sa silhouette de 24 m domine le village ! De pierre en Galice, ils sont souvent en bois avec un toit de chaume et d’ardoise dans les Asturies. Dans les Asturies toujours, et notamment dans le Parc naturel de Somiedo, vous découvrirez également les teitos, d’anciennes maisons en pierre sèche et toit de chaume servant d’abris aux hommes… et aux bêtes. Tout comme les pallozas, que l’on retrouve aussi bien en Galice qu’en Castille-et-León. Ces cabanes circulaires au toit de chaume et aux murs bas abritant hommes et bêtes, séparés seulement par une cloison de planches, seraient d’origine… celte ! En Castille-et-León, vous ne trouverez que très rarement des fermes isolées… la plupart sont, en effet, rassemblées dans des hameaux de pierre aux silhouettes aplaties ponctuant les étendues arides de la Meseta ou s’accrochant aux pentes de la Sierra de Gredos. La région est aussi célèbre pour être l’une des seules à posséder des maisons à colombage, comme à Covarrubias. Protégées par un mortier de chaux et de sable, ces maisons se reconnaissent également à leurs toits en pente douce, leurs balcons de bois et leurs portiques à colonnes offrant un espace ombragé. Pour se prémunir contre l’humidité du climat tout en laissant entrer la lumière, les maisons de Cantabrie possèdent de grands balcons protégés par des avancées de toits soutenues par des piliers. Le rez-de-chaussée de ces demeures est généralement occupé par le bétail. Les pêcheurs ont également une architecture qui leur est propre, comme en témoignent leurs maisons asturiennes construites légèrement en retrait pour se protéger du vent et des intempéries et possédant de grandes fenêtres exposées vers le Sud pour faire sécher le poisson. La région regorge ainsi de petits villages de pêcheurs aux maisons de pierre et d’ardoise s’étageant vers la mer. Et toutes ces régions ont bien sûr en commun d’être protégées par une multitude d’ermitas, des autels et chapelles dédiés aux saints locaux !

Architecture moderne et contemporaine

Le tournant du XXe siècle est une période de grande effervescence architecturale, et ce, notamment sous l’impulsion des Indianos, ces Espagnols revenus d’Amérique du Sud et désireux d’exposer leurs nouvelles richesses. Leurs somptueuses demeures mêlent emprunts aux styles passés (tourelles gothiques, patios mudéjars, dentelles plateresques et décoration baroque) et apports de la modernité avec de très beaux balcons et verrières en métal et fer forgé. A LLanes, le quartier de la Concepción en possède de très beaux exemples. Cet éclectisme teinté de modernité se retrouve également dans les stations balnéaires qui se développent autour de nouveaux édifices phares que sont les hôtels et les casinos. Les Casinos de Llanes et de Santander en sont les fiers représentants. On retrouve l’architecture métallique dans des prouesses de génie civil, comme le Puente Internacional de Tui réalisé par Gustave Eiffel, tout comme dans des réalisations plus modestes, mais ô combien importantes : les marchés et galeries commerçantes qui se couvrent de verrières soutenues par de puissantes structures de métal. De très beaux exemples sont à voir à Santander. La Corogne doit son surnom de « ville de cristal » aux galerias qui ornent les façades de ses demeures. On parle d’ailleurs de façades « acristoladas ». Ces élégants bow-windows de verre sont à voir notamment le long de la Promenade de la Marina. Ce tournant du siècle est également marqué par l’insolite incursion du Modernismo catalan en pleines terres du Nord. A Astorga, Gaudi a réalisé pour un évêque catalan le Palacio Episcopal, étonnant édifice néogothique à la superbe décoration de céramique, qui effraya tant les autorités ecclésiastiques qu’aucun autre évêque ne l’habita ! C’est aussi à Gaudi que l’on doit la Casa Botines de Léon, sorte de pastiche de château médiéval, et le Capricho à Comillas, palais d’inspiration mauresque aux somptueux effets chromatiques. Cette effervescence architecturale va ensuite se tarir, étouffée par les guerres et le franquisme… même si ce dernier a donné naissance à l’un des édifices les plus étonnants d’Espagne : l’Université Laboral de Gijon, devenue centre d’art en 2005. Il s’agit d’un des plus grands édifices civils du pays (270 000 m² !) que l’architecte Luis Moya Blanco a imaginé comme une cité idéale. Organisés autour d’une immense cour de style herrerien, vous y trouverez ainsi un théâtre, l’une des plus grandes églises elliptiques au monde aux accents hispano-mauresque, un atrium aux colonnes corinthiennes surmontées d’une verrière, des palais d’inspiration Renaissance et une impressionnante tour de 130 m. Un véritable délire historicisant aux accents rationalistes. Depuis les années 2000, les régions du Nord-Ouest de l’Espagne ont retrouvé une effervescence créatrice sous l’impulsion de grands architectes. Avilés possède ainsi l’unique réalisation espagnole de l’architecte brésilien Oscar Niemeyer qui y a construit un centre portant son nom. Grimpez en haut de sa tour pour jouir d’une vue imprenable sur la ville ! A Santander, Renzo Piano a imaginé le Centre Botin dont les deux bâtiments semblent comme suspendus dans les airs. Richard Rogers, lui, a dessiné les nouvelles caves de la marque Protos à Peňafiel en forme d’arches paraboliques lamellées en bois et pensées pour réduire l’empreinte énergétique. Le MUSAC de Léon avec sa façade aux 3 351 panneaux de verre coloré imaginés comme un écho aux vitraux de la cathédrale ; le Musée de l’évolution humaine de Burgos avec ses grands volumes de verre et de lumière ; ou bien encore le lumineux Millemium Dome de Valladolid comptent également parmi les créations contemporaines à ne pas manquer. Vous avez beaucoup à découvrir !

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