Un peuple festif et chaleureux
C’est bien connu, les Espagnols vivent dehors ! Et même si le temps n’est pas aussi ensoleillé qu’en Andalousie, il en est de même en Galice, aux Asturies, en Cantabrie et en Castille-et-León. Tout est prétexte à se retrouver en famille ou entre amis, autour de tapas à partager ou autour d’une table bien garnie. On discute, souvent de manière vive, et on rigole dans une ambiance conviviale. Les jours fériés, qu’ils soient nationaux, régionaux ou locaux, sont aussi célébrés dans la bonne humeur. On se met sur son trente-et-un avant de sortir retrouver les siens et profiter au maximum de l’instant présent. En plus du calendrier national, chaque communauté dispose de ses propres festivités, à l’intérieur desquelles provinces et localités ont également leurs ferias et romerías, dédiées à la Vierge ou aux saints patrons locaux. Du matin, les festivités s’étendent jusqu’à tard dans la nuit pour parfois, continuer le lendemain voire le surlendemain ! Autant dire que la fête est partout en Espagne ! C’est aussi un peuple chaleureux qui sympathise facilement. Quand on croise une connaissance dans la rue, l’émotion est telle qu’on ne peut s’empêcher de lui donner un abrazo (étreinte), et puis si un ami présente une connaissance, cette dernière sera de suite traitée comme un ami. D’ailleurs, ici, le vouvoiement n’est que peu utilisé, en faveur du tutoiement, plus familier et intime.
Une vie indépendante plus tardive
En Galice, aux Asturies, en Cantabrie et en Castille-et-León, les jeunes vivent de plus en plus tard chez leurs parents, comme dans le reste de l'Espagne. Sur une partie de la génération des mileuristas (personnes qui débutent leur carrière avec un salaire mensuel de 1 000 €) et dont l'accès au logement est de plus en plus difficile. Ces régions ne faisant pas partie des plus chères d'Espagne, le problème du logement y est un peu moins compliqué et les jeunes disposent ici de villes plus accessibles. Cependant la Galice et les Asturies ont été touchées par la crise, un peu moins la Cantabrie et la Castille-et-León, et aujourd'hui, les jeunes diplômés peinent encore à y trouver du travail, ici aussi. Avec un taux de chômage autour des 11 %, certains tentent leur chance à Madrid ou dans d’autres grandes villes d’Espagne, d’autres partent à l’étranger, en France, au Royaume-Uni ou en Allemagne. C'est ce qui a fait naître le mouvement des #nimileuristas (pas même 1 000 €) qui s'est notamment fait connaître via les rassemblements d'indignados (indignés). Conséquence logique, les Espagnols se marient de plus en plus tard : autour de 30 ans chez les femmes et 35 chez les hommes. Et certains quadras, comme en France, retournent vivre chez leurs parents. Lorsqu'une femme se marie, elle conserve son nom de jeune fille, auquel elle ajoute celui de son mari. A la naissance, l'enfant est obligé de porter le nom du père et celui de la mère (il prend le premier nom de son père et le premier de sa mère). L'âge moyen des femmes qui ont leur premier enfant se situe autour de 30 ans.
Un pays progressiste
En même temps que la grande révolution politique et culturelle de l’après-dictature, la situation des femmes a beaucoup évolué. Avant la chute du franquisme, elles étaient plutôt assignées aux trois « C » : la cuisine, les chiquillos (les gosses) et le curé. Aujourd’hui, la plupart d’entre elles vivent relativement tard chez leurs parents, font bien plus d’études que leur mère et se marient donc plus tard (l’âge moyen du premier mariage est passé de 24 à 30 ans en une génération). Les moyens de garde et la politique d’aide à la famille étant quasi absents, la présence des femmes est beaucoup plus rare dans les postes les plus élevés. Cependant, le gouvernement espagnol de Zapatero a été un exemple de parité, avec un total de 7 femmes parmi les 15 ministres, dont Carme Chacón, occupant le poste de ministre de la Défense de 2008 à 2011, et nommée alors qu’elle était enceinte de sept mois ! Une parité qui n'était plus présente dans le gouvernement mis en place par Mariano Rajoy en 2011 avec 4 femmes ministres sur 13 membres, mais qui est aujourd'hui supérieure à ce que l'on attendait avec le gouvernement de coalition de gauche, dirigé par Pedro Sanchéz. Effectivement, depuis 2021, le gouvernement se compose de 14 ministres femmes et 8 ministres hommes, soit la plus forte présence féminine en Europe ! En nommant comme vice-présidente du gouvernement, Nadia Calviño en 2021, et comme ministre de l’Egalité hommes-femmes, Irene Montero, le président du gouvernement montre ainsi son intention d’améliorer les droits des femmes dans le pays. C’est ainsi qu’en octobre 2020, le gouvernement espagnol a durci les règles sur l’égalité salariale entre les deux sexes, en obligeant les entreprises à ce qu’elles révèlent les salaires de leurs employé(e)s en fonction du genre, sous peine de s’exposer à des amendes pouvant aller jusqu’à 187 000 € ! Pourtant traditionnellement catholique, l’Espagne se veut aujourd’hui plus à gauche, plus féministe et progressiste, faisant figure d’exemple en Europe. En 2005, elle est ainsi l’un des premiers pays au monde à avoir autorisé le mariage pour tous, l’adoption et l’accès à la fécondation in vitro pour les couples homosexuels. Ce sont alors près de 22 500 mariages du même sexe qui ont été célébrés les sept premières années, jusqu’en 2012. Cependant, certaines lois progressistes sont plus difficiles à être acceptées auprès de la population, notamment des catholiques conservateurs. Il en est ainsi pour la loi sur l’avortement, votée en 2010, dans laquelle il est autorisé jusqu’à 14 semaines de grossesse et 22 semaines, en cas de malformation du fœtus. Toutefois, quasiment un an avant, plus d’un million de personnes défilèrent dans les rues de la capitale contre la légalisation de l’avortement, et trois ans plus tard, elle fut sur le point d’être restreinte par un projet de loi, sous le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy. A la suite de nombreuses manifestations, il fut retiré en septembre 2014 pour être remplacé par une loi interdisant aux mineurs d’avorter sans le consentement de leurs parents, en 2015. Toutefois, la ministre de l’Egalité a annoncé prochainement l’abrogation de cette loi, montrant sa volonté de mener une Espagne plus sociale.