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Etonnant Moyen Age

A l’abri de remparts crénelés, chemins de ronde couverts et hautes tours de guet, nombreuses sont les cités à avoir conservé leur urbanisme typiquement médiéval fait de rues étroites et pavées desservant places et placettes et servant d’écrins à d’élégantes maisons souvent à colombages, aux pignons élevés le plus souvent à redents, et aux toits mansardés. Les hôtels de ville, grands témoins de la puissance grandissante des cités autonomes, sont les édifices phares de l’époque et font l’objet de toutes les attentions décoratives, gothiques en particulier. Arcades, voûtes en ogive, baies géminées comptent parmi les éléments que l’on retrouve fréquemment. Beaucoup de ces cités médiévales sont également surplombées par une forteresse, déployant, derrière de puissantes fortifications, une structure à plusieurs cours. Parmi les plus étonnantes forteresses de Bavière, ne manquez pas celle de Burghausen. Avec ses remparts s’étendant sur 1051 m, elle est l’une des plus longues d’Europe… et l’une des plus élaborées aussi. Voyez donc son enfilade de 6 cours intérieures séparées par 3 ponts-levis ! Dinkelsbühl aussi impressionne avec ses hautes murailles ponctuées d’immenses portes et d’une vingtaine de tours, et ses profondes douves. Bamberg et Rothenburg comptent parmi les cités médiévales les mieux préservées d’Europe. Rothenburg regorge notamment d’élégantes maisons médiévales dont les enseignes dorées rappellent qu’elles abritaient autrefois de grandes corporations d’artisans. Mais l’une des plus belles maisons médiévales est à découvrir à Nuremberg. Il s’agit de la Maison d’Albrecht Dürer dont on admire les élégants colombages et le généreux auvent ornant sa façade à pignon. La vieille ville de Landshut, qui possède l’une des plus belles et vastes places médiévales (600 m de long tout de même !), abrite également des maisons décorées d’intéressants sgraffites, décoration obtenue en imprégnant la surface de couleur, puis en l'enduisant d'un mortier blanc que l'on grattera et incisera pour faire apparaître la couleur sous-jacente suivant le dessin voulu. Ces cités médiévales abritent d’autres superbes témoins de cette époque : les édifices religieux. Le roman avec ses arcatures en plein-cintre et ses ornementations tout en sobriété fit ensuite place au gothique qui laissa exploser en Bavière toute sa flamboyance, contribuant notamment à repenser certains édifices romans à l’origine. C’est le cas du Mariendom d’Augsbourg, grande basilique romane à 5 nefs transformée en joyau gothique avec ses portails en bronze, son puissant clocher élancé et son cloître aux élégantes colonnades. Mais les plus belles représentantes de ce gothique bavarois sont sans conteste les Frauenkirche de Munich et Nuremberg. La première est un immense édifice de brique (109 m de long et 40 m de large) dont les tours élancées couronnées de bulbes surplombent la ville. La seconde étonne par le mouvement quasi pyramidal créé par sa façade à pignons multiples. Les églises-halles, composées de 3 nefs d’égale hauteur, sont également fréquentes en Bavière comme en témoigne la très belle église Saint-Georges de Nördlingen avec son clocher tutoyant les cieux du haut de ses 90 m. Autant d’éléments que l’on retrouve dans les églises de pèlerinages destinées à attirer et guider les fidèles, telle l’église Sainte-Marie de Laudenbach. Une puissance architecturale dont ne sont pas dénuées les abbayes qui jalonnent la Bavière, à l’image de l’abbaye de Kaishem qui passa de la rigueur cistercienne à la flamboyance gothique avant de goûter au décor baroque !

De la Renaissance au baroque

Face au gothique dominant, la Renaissance ne fut que modestement employée en Bavière. Augsbourg en abrite un superbe exemple : la résidence de la famille Fugger baptisée Fuggerhäuser et dont on admire la très belle cour à arcades inspirée des palais toscans. Mais c’est surtout le foisonnant baroque qui va contribuer à donner à la Bavière ce visage unique et grandiose. Le baroque illustre les liens puissants qui se sont créés entre l’Allemagne du Sud et la Haute-Italie, artistes et artisans traversant volontiers la frontière pour échanger techniques et savoir-faire. La Bavière entre donc dans une période de faste architectural où tout n’est que profusion d’ors, de stucs, de trompe-l’œil et de motifs convexes et concaves créant d’étonnants effets de mouvements. Un style qui sied à merveille à la mise en scène du pouvoir, comme en témoignent les somptueux palais de l’époque. Conservant encore les traits harmonieux d’une Renaissance teintée de palladianisme, le Château des Nymphes de Munich ouvre pourtant la voie à cette effervescence baroque dont la Résidence de Würzburg se fait l’un des joyaux. Voyez son escalier d’honneur à double révolution et les fresques du célèbre artiste italien Gian Battista Tiepolo ornant les voûtes de la salle impériale. La Résidence d’Ansbach avec son cabinet des miroirs et ses 2 800 carreaux de faïence est une autre fière représentante de cette effusion décorative, tout comme le Château de Schleissheim et son pavillon Lustheim au ciel de stuc. Sous la dynastie des Wittelsbach, alors à l’apogée de leur puissance, se développe une tradition artistique qui fait aujourd’hui encore la renommée de la Bavière : la Lüftmalerei, qui consiste à peindre et décorer les façades des maisons qui se transforment alors « en pages illustrées d’un grand livre de pierre » contant l’histoire religieuse, politique et culturelle de Bavière. Trompe-l’œil géant, enluminures et autres jeux de calligraphies habillent ainsi de manière somptueuse les maisons d’Oberammergau. Un art de la mise en scène qui va être porté à son apogée avec l’Opéra Margravial de Bayreuth, seul exemple entièrement conservé d’architecture d’opéra de cour. Sa façade en grès a été conçue comme un point central et focal de la ville, tandis qu’à l’intérieur se déploie une étonnante salle en forme de cloche à plusieurs étages de loges, dont la loge de cour avec sa structure à colombage très décorée. Une profusion décorative que le rococo va pousser encore un cran plus loin, comme le montrent bien la salle de bal aux incroyables lustres et dorures du Palais Schaezler à Augsbourg et la petite église Saint-Jean Népomucène à Munich. Parmi les grandes figures de la période, trois architectes ont particulièrement brillé : Dominikus Zimmermann qui a réalisé l’église paroissiale Notre-Dame de Günsburg et les décors de la façade de l’hôtel de ville de Landsberg-am-Lech (dont il fut maire !) ; Balthazar Neumann qui réalisa de nombreux châteaux en Franconie et qui imagina la grandiose église de l’abbaye de Neresfeld aux coupoles se faisant le théâtre d’étonnants jeux de couleurs ; et enfin Elias Holl, architecte visionnaire qui, avec l’hôtel de ville d’Augsbourg, réalisa l’un des premiers édifices à plus de 6 étages, que certains qualifient d’ailleurs de « gratte-ciel » baroque. C’est également à Holl que l’on doit l’un des premiers projets de « logements sociaux » à Augsbourg, la Fuggerei, quartier de petites maisons individuelles à 3 pièces (dont une salle de bains !) pour les employés des banques ayant financé l’élection de Charles Quint. Avec son ingénieux système de gestion de l’eau, créé dès le XIVe siècle et perfectionné aux siècles suivants, avec son réseau de canaux et de châteaux d’eau et ses 3 fontaines monumentales, Augsbourg était à la pointe de l’innovation !

Romantisme et éclectisme

C’est à partir du règne de Louis Ier de Bavière que la région va se parer de ses atours romantiques. Désireux de transformer Munich en véritable métropole européenne, il fait percer de nouvelles rues et avenues, dont la célèbre Ludwigstrasse qu’il borde d’un incroyable ensemble de bâtiments puisant aux sources du roman, du gothique et même des styles byzantin et hellénistique. Imitant l’Arc de Constantin à Rome, la Siegestor vient clore la perspective de cette voie triomphale, tandis que non loin la Feldernhall se dresse comme la réplique de la célèbre Loggia dei Lanzi de Florence. Une démonstration de pouvoir qui passe également par l’agrandissement du Palais Royal dont le souverain multiplie les volumes par 4 ! Louis Ier va également recourir aux emprunts à l’Antiquité, comme le montrent bien le Walhalla, près de Ratisbonne, réplique du Parthénon dédié aux grands hommes de la nation, ou bien encore la Place Royale avec le temple ionien et les propylées de la Glyptothèque. Son fils Maximilien II va perpétuer ces recours au passé, comme en témoignent la Maximilianstrasse et ses immeubles très néo-Tudor, le style médiéval venu d’Angleterre. Ce goût romantique va être poussé à son paroxysme par Louis II de Bavière. Avec ses célèbres châteaux, ce roi sans pouvoir a reconstitué le décor d’une grandeur qu’il aurait aimé incarner. Ce goût du romantisme, Louis II l’a aiguisé au Château d’Hohenschwangau, construit par son père, et où il passa 17 ans de sa vie. Entre romantisme médiéviste et influence de l’Angleterre Tudor, cette forteresse construite sur les ruines d’un burg va donner à Louis II l’envie d’ériger ses propres châteaux… dont il confia une partie de la réalisation à des décorateurs de théâtre ! Monumental château médiéval accroché à un éperon rocheux à plus de 1 000 m d’altitude, Neuschwanstein impressionne notamment par sa Salle des Maîtres-Chanteurs dont le plafond en bois d’épicéa permet une acoustique parfaite… Un lieu propice à l’écoute de la musique de Wagner dont Louis II était l’un des plus grands admirateurs (c’est d’ailleurs à sa demande que fut construit le Festspielhaus de Bayreuth avec sa fameuse scène avançant vers la salle, même si Louis II, face aux récriminations de ses banquiers, finit par renoncé à financer ce projet aux coûts pharaoniques !). Le Pont Marie non loin offre une perspective saisissante sur le château et prouve combien le souverain pensait à tout pour mettre en scène l’architecture. Linderhof est sans doute le château de Louis II au foisonnement décoratif le plus fou. Cette reproduction du Petit Trianon, folie tout en couleurs, stucs et dorures, s’inscrit dans un parc d’où surgissent la Grotte de Vénus et le Pavillon Mauresque avec son célèbre Trône des Paons. Enfin ne manquez pas Herrenchiemsee, dernier château de Louis II resté inachevé après sa mort. Édifié sur une île au milieu du Chiemsee, le château est une étonnante imitation de Versailles. Son bassin monumental et sa Galerie des Glaces (qui dépasse l’original de 5 m en longueur) sont des immanquables ! Ce romantisme très wagnérien, comprenez particulièrement théâtral, céda ensuite la place à un éclectisme un peu plus mesuré, qui s’ouvrit progressivement à la modernité, notamment celle de l’Art nouveau et de l’Art déco. A Munich, la Villa Stuck est un bon exemple du concept d’œuvre d’art totale prôné par l’Art nouveau. La villa est l’œuvre de l’artiste-peintre Franz Von Stuck, qui y mélangea inspirations antique, byzantine, Renaissance et influences du Jugendstil tout en courbes et voluptés. La Villa Wahnfried de Bayreuth et la synagogue d’Augsbourg se font, elles, trait d’union entre styles passés et lignes modernes et épurées de l’Art déco.

Architectures moderne et contemporaine

Nuremberg est une ville étonnante pour qui se passionne pour l’histoire du XXe siècle. La ville conserve, en effet, les vestiges du Reichsparteitagsgelände, le site de l’ancien Palais des Congrès nazi. Hitler en fit la commande à son célèbre architecte Albert Speer, qui imagina pour l’occasion un délire monumental de pierre, immense amphithéâtre de granit en forme de fer à cheval auquel menait une voie triomphale, et pour lequel l’architecte avait conçu un gigantesque toit suspendu. Mais pendant les travaux (qui ne furent d’ailleurs jamais achevés), les grands rassemblements se tenaient dans l’Espace Zeppelin où subsiste une partie du portique à colonnes qui bordait la vaste tribune centrale de 350 m de long. Hitler avait voulu faire de la ville le point central de son idéologie et par-là même entraîna sa quasi-destruction par les forces alliées. Là où certaines villes d’Allemagne ont choisi de faire table rase du passé et d’opter pour la modernité, les autorités ont décidé de redonner à Nuremberg son identité médiévale. Au total, ce sont près de 188 architectes allemands qui étudièrent en détail les plans de la ville médiévale pour en reconstituer le tracé fait de petites unités très morcelées. Des toits en pente raide à 2 ou 3 rangées de fenêtres mansardées et des encorbellements élégamment travaillés venaient orner les façades des maisons en grès et bois ou en brique et plâtre coloré pour celles entièrement reconstruites. A la voir ainsi patinée par le temps, nul ne pourrait dire que la ville n’a que 77 ans !

L’organisation des JO de 1972 a fait souffler sur Munich un vent d’innovation architecturale. Dans les faubourgs du nord est apparu un étonnant quartier bâti sur des collines boisées, la mise en forme par des paysagistes des terrils faits des déblais des bombardements et de la reconstruction. Au pied de ces collines, les architectes Frei Otto et Günter Behnisch ont imaginé l’incroyable complexe olympique dont les 3 bâtiments sont réunis sous un voile de verre accroché à des mâts métalliques. Avec ses 75 000 m2, il est l’un des plus grands toits du monde ! A la même époque, la plus célèbre des marques bavaroises, BMW, fait construire la tour de son siège social reconnaissable à ses 4 cylindres verticaux positionnés en carré et symbolisant les cylindres mécaniques d’un moteur à piston. Ont suivi des tours étonnantes comme celles du siège de la HypoVereinsBank, avec une structure comme arrimée à des piliers métalliques. Mais avec ses 146 m, c’est la Hoch Haus Uptown München qui détient le record de la plus haute tour de la ville ! Fidèle à sa réputation de centre culturel, Munich s’est dotée de musées aux silhouettes résolument contemporaines. Parmi ces trésors, ne manquez pas : la Nouvelle Pinacothèque et sa rotonde de verre ; le Brandhorst Museum recouvert de 36 000 lamelles en céramique de 23 couleurs différentes ; le Musée Juif de Munich, étonnant cube transparent supporté par un mur de tuf ; et bien sûr le nouveau complexe BMW comprenant le musée dont les lignes épurées s’inspire de la cinétique, et le Showroom BMW Welt dont le toit en forme de nuage de 180 m de long, 130 m de large et 28 m de haut, et couvert de 3660 panneaux photovoltaïques, a été conçu par la célèbre agence CoopHimmelb(l)au. Ce showroom avait été imaginé dans l’effervescence de la Coupe du Monde 2006 dont l’Allianz Arena aux allures de gigantesque pneumatique était la grande vedette. Aujourd’hui, c’est un autre projet d’arena qui va bientôt voir le jour, un lieu pensé pour organiser des événements neutres en émission carbone. Un projet écologique qui vient prolonger l’engagement d’une ville verte qui n’a jamais oublié son identité de petit hameau entouré de nature !