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Habitat autochtone

Les Sâmes ont su développer un habitat en parfaite adéquation avec la nature. Leurs habitats sont de deux sortes. D’un côté, ce peuple nomade utilise la tente dite lavvu. Cette dernière doit pouvoir être montée par une personne seule, d’où l’absence de câbles et cordages. Son volume et sa taille dépendent du nombre de perches en bois, généralement une dizaine, assemblées autour du sommet qui prend la forme d’un enchevêtrement de branchages. Un espace y est laissé ouvert afin de laisser échapper la fumée émanant de l’âtre central. L’ensemble de la structure est soutenue par un trépied réalisé à partir de longues branches fourchues. Les peaux de rennes recouvrant l’ossature de bois ont progressivement été remplacées par des textiles bon marché. En parallèle de cet habitat mobile, les Sâmes ont également développé un habitat en dur appelé kota ou goathi. Si les formes varient (circulaire, conique…), la structure est toujours la même : des poteaux de bois recourbé forment deux arches autour desquelles s’organisent l’habitation. À l’intérieur, les différents espaces sont délimités par des pierres et des bûches. Le revêtement de l’ensemble consiste en un chevauchement d’écorces de bouleau maintenues par d’épaisses couches de gazon ou de tourbe. L’ensemble de la structure repose généralement sur des pierres pour plus de stabilité et est maintenue à l’aide de piquets de bois chevillés. Dans toute la structure, seules des chevilles de bois sont utilisées. Vous ne verrez donc aucun clou pour maintenir l’ensemble ! À Utsjoki, en face de l’église, vous pourrez découvrir une hutte conique, ainsi qu’une hutte de tourbe au sol de terre battue ; tandis qu’à Inari, près de l’église des Terres Sauvages de Pielpajärvi subsistent les vestiges d’un ancien camp d’hiver sâme.

La tradition du bois

Présent en abondance sur tout le territoire, le bois est le matériau de construction phare en Finlande, et ce, depuis les origines. Les premières réalisations en bois ne nécessitaient pas d’autres outils que la hache. En effet, les rondins ou madriers y sont disposés horizontalement et maintenus ensemble via un système de taille permettant un emboîtement stable et solide. Ces habitations plutôt rurales disposent généralement d’un seul espace intérieur surmonté d’une toiture composée d’une base de lattes de bois recouvertes de plusieurs couches d’écorces et de longs poteaux en bois formant un colombage, remplacée ensuite par l’utilisation de bardeaux ou tuile de bois. Le musée de plein air de Seurasaari conserve de très beaux exemples de cet habitat traditionnel qui possède toujours un sauna aux allures de petit chalet. En parallèle se développent les églises de bois. L’originalité de ces structures repose sur la présence de mâts soutenant l’ensemble sur toute la hauteur de l’édifice. Ces mâts ou piliers de bois sont placés sur les côtés ou dans les angles de la nef principale. Clarté et transparence de l’ordonnancement caractérisent ces églises. L’autre originalité réside dans le fait que chaque espace (nef, déambulatoire…) possède sa propre toiture, ce qui donne un foisonnement de toitures à forte pente, couronnées de lanterneaux et ornées de détails sculptés en bois, créant d’étonnantes perspectives. Les premiers plans, souvent rectangulaires à la manière des habitations rurales, se complexifient progressivement. On voit ainsi apparaître des plans en croix grecque ou des plans à doubles croix. Si cette tradition des églises en bois remonte au XIe siècle, les exemples qui nous sont parvenus datent principalement du XVIIe siècle. Parmi les plus belles réalisations, notons la vieille église de Petäjävesi avec son plan en croix grecque surmonté d’un superbe dôme entièrement en pin, l’église luthérienne de Tornio avec son campanile à 4 pignons et 5 flèches ou bien encore l’église de Kerimäki, datant elle du XIXe siècle, et qui peut se targuer d’être la plus grande église en bois du monde ! Si une grande partie du patrimoine traditionnel en bois a disparu lors de l’expansion des grandes villes, certains cœurs urbains ont pu être préservés, à l’image de celui de Porvoo qui, en plus d’avoir conservé un superbe ensemble de maisons de bois à l’abri dans leurs petits jardinets, a également gardé son urbanisme médiéval avec son enchevêtrement de petites ruelles sinueuses. Atmosphère pittoresque garantie, tout comme à Rauma !

Forteresses de pierre

Après le bois, l’autre matériau phare de la Finlande est la pierre, et plus spécifiquement le granit. Son utilisation est, là encore, attestée dès les origines, comme le montre l’étonnant site funéraire de Sammallahdenmäki, regroupant des dizaines de cairns ou tumulus de pierre (ici des blocs de granit) recouvrant les tombes mégalithiques. C’est de cette même roche solide dont vont se servir les Suédois pour élaborer leur puissant système défensif, et ce, dès le XIIIe siècle. Parmi les plus belles forteresses, notons : le château de Turku, plus grand édifice médiéval de Finlande ; le château de Häme, au départ structure de bois qui sera ensuite reconstruit en brique rouge; ou bien encore le château d’Olavlinna, premier édifice à posséder des défenses contre l’artillerie à l’image de ses trois tours arrondies aux épais murs de granit. L’architecture militaire se fait également le reflet des courants architecturaux en vogue. Le château de Turku est ainsi réaménagé au goût de la Renaissance, tandis qu’au XVIIIe siècle, les idéaux baroques se développent, se retrouvant dans les schémas de nouvelles villes fortifiées telle Hamina dont les puissants remparts abritent désormais une ville circulaire, point de ralliement de huit routes organisées selon un plan radial où règnent clarté et symétrie. Quant à la forteresse de Suomenlinna, elle est un superbe exemple de réflexion militaire et urbanistique avec son square baroque, ses jardins à l’anglaise, ses superbes voûtes de pierre et de brique aux accents gothiques et son étonnante Maison du Commandant aux lignes classiques empruntées au style palladien. Ce style sobre et propre à souligner puissance et pouvoir se retrouve dans les manoirs, privilèges accordés par le roi de Suède, et donc apanage des riches familles. Les deux plus beaux sont le manoir de Louhisaari de style palladien, et le manoir de Suur-Sarvilahti au style classique hollandais. En parallèle, la pierre est également utilisée pour l’édification d’églises, à l’image de l’église Saint-Olaf de Jomala, sans doute l’une des plus anciennes du pays. Certains édifices originellement en bois sont progressivement agrandis et agrémentés d’éléments en pierre, à l’image de la cathédrale de Turku avec ses piliers et sa superbe voûte de pierre et de brique.

Du néoclassicisme au romantisme national

1812 marque un tournant majeur pour Helsinki qui devient capitale du Grand-Duché. Johan Albrecht Ehrenström est chargé d’élaborer un nouveau plan de la ville…Voilà comment les tortueuses ruelles médiévales font place au plan géométrique dont les grandes avenues convergent vers la place du Sénat. Les édifices entourant cette dernière portent la marque de Carl Ludwig Engel, architecte prussien et maître du style néoclassique. C’est à lui que l’on doit la puissante et blanche église luthérienne et le Palais du Conseil d’État avec ses frontons, corniches et colonnades. Le style très impérial d’Engel se retrouve dans de nombreux édifices publics à travers le pays, comme à Hamina dont il réalise le très bel hôtel de ville. À ces lignes classiques va succéder un étonnant foisonnement éclectique dont les premiers édifices se font néogothiques, à l’image de l’église allemande d’Helsinki ou de l’usine Verla, toutes deux de brique rouge, un matériau associé à la puissance et à la prospérité. D’autres courants suivront à l’image du style Renaissance néerlandaise employé dans la bibliothèque principale de Turku ou du style néo-byzantin de la cathédrale Ouspenski d’Helsinki. Mais la plus remarquable représentante de cet éclectisme est sans conteste la caserne de pompiers d’Erottaja à Helsinki, mêlant silhouette de forteresse gothique de brique rouge et tour (de 42 m !) aux allures de campanile Renaissance. Cet éclectisme est le point de départ d’une recherche d’identité nationale qui va triompher avec le romantisme national. Ce style, empruntant nombre de ses motifs à la mythologie finnoise, se rapproche également du Jugendstil ou Art nouveau germanique dans son souci apporté aux objets du quotidien considérés comme de l’artisanat d’art, tout en empruntant certains symboles à l’époque médiévale dont il réemploie tourelles et donjons de pierre. Le romantisme national utilise aussi les nouveautés formelles de l’époque, notamment à travers un superbe travail de ferronnerie venant réchauffer la pierre. Ce courant est représenté par le célèbre trio Gesellius-Lindgren-Saarinen à qui l’on doit le manoir de Hvitträsk, pittoresque construction de rondins de bois aux atours romantiques ; le bâtiment des Assurances Pohjola avec ses arches monumentales de granite et ses motifs végétaux sculptés ; ou bien encore le Musée national de Finlande avec ses différentes tourelles, quintessence de l’inspiration médiévale. Mais c’est Eliel Saarinen seul qui réalisera la gare d’Helsinki avec ses géants de pierre et son dôme cuivré. La cathédrale de Tampere avec ses motifs végétaux stylisés et ses moellons en façade créant des motifs géométriques est aussi un superbe exemple de ce style unique.

Laboratoire de la modernité

Le classicisme nordique exalte les traditions vernaculaires en les mêlant aux lignes néoclassiques, à l’image du Parlement finlandais avec son extérieur en granit de Kalvola, son ordonnancement symétrique et ses colonnes corinthiennes. En opposition à ces styles encore très historicisants, certains prônent une architecture plus rationnelle, davantage tournée vers les idéaux scientifiques. Cette démarche est amorcée par Sigurd Frosterus (grand concurrent de Saarinen !) avec le Grand Magasin Stockmann et se perpétue avec une architecture souvent qualifiée de « fonctionnalisme blanc ». Mais cette rationalité ne va pas sans une certaine recherche formelle comme le montrent les courbes aux accents Art déco de l’hôpital militaire de Tikka ; les bureaux et entrepôts de la Coopérative SOK à Rauma aux atours de style paquebot ; ou bien encore l’harmonie des matériaux de la chapelle de la Résurrection d’Erik Bryggman qui annonce l’émergence de l’architecture organique. Les deux grands représentants de cette nouvelle architecture sont Alvar Aalto et Reima Pietilä. Les réalisations d’Aalto associent toujours fonctionnalisme, humanisme, respect de l’environnement, valorisation des traditions et riche langage plastique. On y admire les envolées de courbes, le dialogue entre les matériaux, l’inscription dans la nature environnante avec une importance toute particulière donnée à la lumière et le travail du mobilier et des détails décoratifs…, car Aalto est également un grand designer (on vous en parle d’ailleurs dans un dossier spécial !) Parmi ses plus belles réalisations, ne manquez pas : la Villa Mairea à Noormakki, le Sanatorium de Paimo, la Villa Aalto d’Helsinki, l’église des Trois Croix à Hämelinna, ses nombreuses réalisations à Jyväskylä, son travail sur le campus d’Otaniemi et bien sûr l’étonnant Palais Finlandia d’Helsinki. Reima Pietilä se fait le maître d’une architecture plastique en osmose avec la nature, comme le montrent la bibliothèque municipale Metso-Pietilä avec sa structure rappelant une coquille d’escargot ; la très belle résidence présidentielle Mäntyniemi avec sa structure de granit percée de près de 300 fenêtres ; ou l’église de Lieksa avec sa coupole percée d’une ouverture en forme de croix laissant passer une lumière tamisée. Défenseurs d’une architecture organique, les deux hommes n’en utilisent pas moins les apports d’une industrialisation en plein essor, travaillant à l’élaboration de modèles standardisés de maisons préfabriquées en bois, que l’on produira en grand nombre après-guerre. Cette période de reconstruction est aussi celle de nouvelles expérimentations urbanistiques. Face à une population qui ne cesse de croître, les premiers logements sociaux apparaissent, dont le plus célèbre est le Käärmetalo ou l’immeuble serpentin conçu par Yrjö Lindegren. Sa forme sinueuse suit la topographie du lieu tout en créant des espaces communautaires et des petites cours individuelles. On retrouve cette importance donnée aux espaces de partage dans la cité-jardin de Tapiola à Espoo. Son nom fait référence à Tapio, dieu de la forêt; même les nouvelles formes urbaines ne peuvent faire l’impasse sur l’omniprésence de la nature ! Les décennies suivantes verront émerger quelques beaux exemples de brutalisme comme l’église de Hyvinkää d’Aarno Ruusuvuori mêlant béton, marbre et pin, et de postmodernisme, comme le très déstructuré Centre culturel d’Espoo.

Avenir durable

Le Kiasma, le musée d’Art contemporain d’Helsinki, est sans doute la création « étrangère » la plus célèbre de Finlande. C’est à Steven Holl que l’on doit cette étonnante structure incurvée de verre et de laiton. L’Agence espagnole Mendoza Partida a réalisé, elle, le pavillon en bois du musée d’Art contemporain Gösta Serlachius qui alterne surface vitrée et bandes de bois pour un superbe effet de transparence et de légèreté. Hormis ces quelques incontournables internationaux, la Finlande est surtout célèbre pour abriter d’étonnantes créations contemporaines réalisées par des Finlandais. Il faut dire que le pays est un intarissable vivier d’architectes et de designers ! Ces derniers misent sur une architecture durable, s’intégrant parfaitement à l’environnement et créant d’élégants traits d’union entre les époques. Parmi les créations à ne pas manquer: la Chapelle du Silence de Kampi avec sa structure de bois incurvée rappelant un vaisseau spatial ; la Maison de la Musique imaginée selon un projet intitulé « a mezzo vocce », c’est-à-dire respectant avec prudence le bâti environnant dont le Palais Finlandia d’Aalto ; la Bibliothèque centrale d’Helsinki Oodi recouverte de bois d’épicéa et baignée de lumière ; le Löyly, dont l’harmonieuse structure de bois suit les sinuosités du relief rocheux ; la Bibliothèque Apila de Seinäjoki dont la forme de trèfle emprunte aussi à la tradition des origamis ; ou bien encore le Centre culturel Sajos à Inari dont la structure forme les lettres du mot «sami» signifiant « camp de base ». Et ils sont encore nombreux les exemples de cette architecture qui sait marier comme aucune autre environnement, tradition et modernité. Alors à vous de les découvrir !