Généralités et habitudes alimentaires

La cuisine paraguayenne porte les marques de plusieurs influences. Celles en premier lieu des indiens guaranis, qui habitent le pays depuis des millénaires, mais également des colons espagnols arrivés là à partir du XVIe siècle, notamment les missionnaires jésuites qui s’installèrent durablement dans la région. S’y ajoutent d'autres influences marquées par l’immigration européenne telles que les cuisines italienne, allemande et portugaise, que l’on retrouve respectivement en Argentine et au Brésil.
Comme dans la plupart des pays d’Amérique latine, les féculents constituent une base importante de l’alimentation. La mandioca (manioc) est très largement consommées au Paraguay. Une fois dégagée de son écorce brune, la chair blanche est transformée en farine, amidon ou typyraty (résidu de la préparation de l’amidon), trois produits distincts servant de base à de nombreuses spécialités paraguayennes. Mais le manioc est le plus souvent cuit dans l’eau et consommé tel quel, en accompagnement de la viande, avec un peu de sel. Il peut aussi être frit et mangé en apéritif avec une sauce à l’ail. Quant au maïs, qu’il soit cuit ou bouilli, en farine ou en grains, il entre dans la préparation de nombreuses recettes. Les Paraguayens préparent aussi beaucoup de plats à base de batata (patate douce) et de poroto (haricot).

Une terre de carnivores

La viande paraguayenne est réputée et s’exporte même beaucoup. Les bêtes sont élevées dans de vastes pâturages naturels, la viande est peu grasse et délicieuse. On en mange presque à tous les repas. Au Paraguay, lorsqu'on parle de carne (littéralement « viande »), cela signifie forcément viande de bœuf (carne vacuna). Mais on trouve bien sûr du cochon (chancho), de la volaille et du mouton, tout aussi savoureux. A la campagne il est courant de manger du gibier fraîchement chassé (perdrix, canards, faisans, lapins ou cerfs), préparé a la olla (en ragoût). Pour ceux qui préfèrent le poisson, le surubí, un géant des fleuves, se trouve dans presque tous les restaurants.
Les viandes et poissons sont accompagnés de pommes de terre, de pâtes – les ñoquis (gnocchis) et les tagliatelles sont très appréciés – de riz, de chipa guazú (gratin de maïs) et presque toujours de manioc cuit à l’eau. Le pain ressemble ici plus à une brioche un peu sèche. Si vous êtes frustré dans ce domaine, cherchez une boulangerie allemande, où l’on trouve généralement de bons pains. Le kesú paraguái (queso paraguayo) est un fromage paraguayen issu de lait de vache. Il est à l'origine de nombreuses préparations. Son goût n’est pas fort et légèrement acide. On le mange souvent avec du miel.

Habitudes alimentaires

Côté habitudes alimentaires, les Paraguayens se lèvent tôt et petit-déjeunent rapidement. Le petit déjeuner (desayuno) est constitué généralement d’un café au lait, d’un cocido ou un maté, et de quelques tartines avec de la confiture de goyave ou du miel. En milieu de matinée, on mange toujours un en-cas avant de prendre le tereré. Le déjeuner (almuerzo) est pris entre midi et 14h. On mange une comida économique, type milanesa (escalope panée) avec du riz, des fideos (spaghettis) avec du poulet, ou un lomito (steak). Les cafeterias proposent souvent des buffets où l’on paye au poids de l'assiette (comida a kilo). On y trouve des viandes, salades et légumes. Les douceurs se règlent à part. Après le déjeuner, quand on peut, on fait la sieste (surtout à la campagne). Au réveil, un tereré s'impose ! Le goûter est souvent constitué d’un gâteau ou d’une chipa accompagné d’une boisson (café ou cocido). On dîne (cena) rarement avant 21h-22h, d'un repas assez léger, parfois juste une picada (charcuterie, fromage, manioc frit, etc.) accompagnée d'une bière.

Les essentiels de la cuisine paraguayenne

Comme dans le reste de l’Amérique latine on retrouve au Paraguay de nombreux en-cas souvent frits et consistants. Les plus connus sont sans doute les empanadas. Ces chaussons farcis de viande, de poisson, de fromage ou de légumes se trouve dans toute l’Amérique du Sud. Le pastel de mandi’ó est une variante locale à base de purée de manioc, de graisse, d’œuf et de farine de maïs. L’empanada est préparée au four ou frite dans l’huile. Elle est souvent servie avec des pancitos (petits pains). Le payaguá mascado ou lampreado est une spécialité qui consiste en des croquettes de manioc frites, agrémentées d’ail et d’oignons. Enfin, le mbeyú est une galette à base d’amidon de manioc, de farine de maïs, d’œuf, cuisinée avec de la graisse de porc et du fromage paraguayen. Un plat qui s’avère très consistant !
On sert également beaucoup de soupes, des plats peu chers et nourrissants, idéals pour les travailleurs dans ce pays très agricole. La plus connue est le borí-borí (ou vorí vorí), un bouillon épais de légumes (avec parfois du poulet), auquel on ajoute des boulettes faites de maïs et de fromage. La pira caldo est une soupe de poisson alors que le soyo est une soupe épaisse de viande hachée dans un mortier, assaisonnée de plusieurs épices et légumes. Enfin, le caldo de albóndigas ouso'o apu'a est un bouillon avec des boulettes de viande et des légumes.
Évidemment, la viande tient une place essentielle dans la cuisine paraguayenne. Le terme asado (grillé en français) désigne une viande braisée pendant plusieurs heures, sur un grill au-dessus des braises (a la parrilla) ou sur un pieu de bois (a la estaca). Contrairement à l’Europe et à l’Amérique du Nord où la tendance est à la viande saignante, en Amérique du Sud on la préfère bien cuite, ce qui demande une cuisine délicate et attentive, mais qui permet néanmoins d’avoir une viande délicieusement tendre et juteuse. Chacun se sert et mange sa viande avec un morceau de manioc ou de la salade. Les asaditos sont de petites brochettes. Tout se mange dans le bœuf, mais le veau (ternero) est assez peu consommé au Paraguay. Le chorizo (saucisse qui n’a rien à voir avec le chorizo espagnol et qui est constituée généralement d’un mélange épicé de porc et de bœuf) et la morcilla (boudin fait de sang de porc, d’oignons et de condiments) servent d’apéritifs en attendant le festin.
Les influences italiennes, arrivées par l'Argentine, sont fortes au Paraguay et la milanesa (escalope milanaise) est très appréciée. Ici, cependant, le terme est vague et elle désigne tout type d’escalope (bœuf, poulet ou poisson) panée, cuite au four ou frite dans l’huile. Il ne s’agit pas d’un plat typiquement paraguayen, mais il est servi partout. La milanesa de pan est un sandwich fourré d'une milanesa. Très populaire également, le locro est un ragoût à base de maïs blanc (locro), légumes et viande. Plus rare, l’akangue yvyguy peut rebuter au début. C’est une tête de bœuf marinée avec des herbes, des épices, du citron, de l’ail et des oignons, couverte de feuilles de bananes et cuite dans un four traditionnel creusé dans la terre, rempli de braises, où la viande cuit lentement.
Commun dans tout le pays, le lomito est un sandwich consistant très populaire préparé dans les carritos (petits camions équipés de planchas) que l’on dévore notamment le soir. Viande de bœuf, jambon cuit, œuf, fromage, salade, tomate, moutarde, mayonnaise, la garniture est plus que consistante. Le lomito árabe est l'équivalent du chawarma oriental. Environné de grands fleuves, le Paraguay ne boude pas les poissons. Le surubí, le pacú et le tilapia sont les poissons d’eau douce les plus courants dans les restaurants. On les mange à la plancha ou en caldo (soupe).
On retrouve aussi plusieurs spécialités à base de légumes ou de féculents, servis en accompagnement comme la sopa paraguaya qui n’a d’ailleurs rien d’une soupe. Ce plat très populaire est en fait une petite tarte de polenta élaborée à partir de farine de maïs, avec du fromage et parfois des oignons. Elle accompagne les anniversaires, les mariages ou les fêtes de fin d’année. Son invention remonterait à l’époque de Carlos Antonio López. La cuisinière du président aurait oublié de sortir du four cette soupe épaisse dénommée borí borí. Elle décida d’en faire une pâte et d’ajouter du lait et des œufs avant de le remettre au four. Quand le président goûta le résultat final, il s’extasia et demanda le nom du plat. La cuisinière aurait répondu « sopa » et le nom est resté. Autre plat assez proche, la chipa guasú (ou chipa guazú) est une recette consistante à base de maïs tendre (choclo), d’œufs et de fromage. Elle est souvent servie à l'asado.  En 2017, le Secrétariat national de la culture du Paraguay a déclaré « Patrimoine culturel immatériel national » la production et la fabrication traditionnelle de la sopa paraguaya, mais aussi de trois autres plats typiques paraguayens : le vori-vori, le locro et le jopara.
Attention, la chipa guazú (en guarani la « grande chipa ») ne doit pas être confondue avec la simple chipa (ou chipá), aliment emblématique du Paraguay, vendu partout, et notamment dans la rue par les chiperos ou chiperas. Ces derniers les portent de façon traditionnelle, dans de grands paniers posés sur leurs têtes, et se baladent en criant chipa chipa, chipita ! C’est en fait un petit pain élaboré avec de la farine de manioc, du lait, des œufs et du fromage (queso paraguayo). On y ajoute parfois des graines d’anis. Il ressemble au pão de queijo, sa variante brésilienne. La chipa peut être farcie à la viande, c’est la chipa so’ó. Comme le tereré, la chipa a sa journée nationale (el Día Nacional de la chipa), célébrée le deuxième vendredi du mois d’août. Ce pain a aussi une grande place dans la religion au Paraguay. Symbole de la fraternité, on en prépare à la maison pour les offrir à ses proches durant les fêtes religieuses, en particulier pour la Semaine sainte.
Enfin, le 1er octobre, il est de coutume de manger un jopará (« mélange » en guarani), une sorte de ragoût que l’on prépare avec des haricots et du maïs. Le mois d’octobre est une période difficile pour le paysan. Il reste peu de réserves d’aliments de la récolte passée et la nouvelle récolte n’a pas encore commencé. C’est à cette époque que peut apparaître Karaí Octubre, un paysan en loques, portant un sombrero pirí, qui pénètre dans les maisons pour vérifier si les familles se sont bien préparées pour affronter les jours difficiles. Ceux qui ne le sont pas seront punis, par une mauvaise récolte ou toute autre malédiction… Pour impressionner Karaí Octubre, on prépare un grand repas. Lorsque le paysan n'a pas de quoi montrer une certaine abondance, il prépare un mélange de haricots (porotos) et de maïs (locro) dans une grande marmite, en ajoutant ce qu’il peut. Cette tradition rurale s’est déplacée en ville. Le 1er octobre, tous les Paraguayens préparent le jopará, même ceux qui pourraient s’offrir un véritable festin !
Aussi surprenant, entre dessert et accompagnement, le kiveve (« rouge » en guarani) est une purée crémeuse à base d’andaí (calebasse), d'oignon, de lait, de sucre, de farine de maïs et de fromage frais.

Les desserts

Les desserts au Paraguay ressemblent généralement à ce que l’on peut trouver en Europe ou en Amérique du Nord avec quelques spécificités régionales. Avec son climat subtropical le pays peut se targuer d’une production de fruits délicieux. On ne les consomme pas comme desserts en fin de repas, mais plutôt en guise d’en-cas pendant la journée. Ananas (piña), papaye (mamón), pêche (durazno), raisin (uva), melon (melón), pastèque (sandía), prune (ciruela), mangue (mango), fruit de la passion (mburucuyá), orange (naranja), pamplemousse (pomelo), banane (banana), fraise (frutilla), pomme (manzana) comptent parmi les fruits les plus courants. On en fait de délicieux jus naturels, des gâteaux fourrés avec de la confiture, ou des mousses succulentes.
On observe au Paraguay beaucoup de gâteaux (pastel) classiques venant d’Europe. Cependant, certaines douceurs ont une origine plus ancienne comme le kaguyjy eírare ou mazamorra, une préparation qui remonte à l’ère précolombienne, à base de maïs frais moulu, d’eau et de miel. L’arró kamby est l’équivalent du riz au lait. Le mbaipy-he-é est un plat à dessert à base de lait, de mélasse et de maïs. En Amérique du Sud, il n’est pas rare de mélanger du fromage doux avec des fruits et notamment de la goyave. On retrouve ce mélange dit guayaba con queso dans diverses recettes de viennoiseries, de flan ou de gâteau ou même tel quel sous forme d’une pâte de goyave dite dulce de guayaba. Sinon, la papaye est également appréciée et confite en gros morceaux que l’on sert avec du fromage, sous le nom de dulce de mamón. La mélasse de canne à sucre appelée "miel negra" s’utilise dans certains desserts comme la torta de miel negra ou boquerón, un gâteau presque noir que l’on parfume également de zestes d’orange. Le modeste mais délicieux budín de pan est un pudding au pain parfumé à la vanille. Enfin les bollos sont de simples beignets au sucre, fourrés de crème vanille, une spécialité d’Areguá et de San Bernardino.
Emblématique des cuisines sud-américaines, le dulce de leche se traduit littéralement par "douceur de lait". On le prépare en faisant caraméliser du lait concentré sucré à feu très doux pendant plusieurs heures, donnant une sorte de caramel au lait incroyablement crémeux. Il est utilisé pour garnir les gâteaux ou viennoiseries, ou simplement pour être étalé sur du pain au petit-déjeuner. Le ka'í ladrillo ou dulce de mani est une confiserie à base de caramel et de cacahuètes, coupée en petits cubes. Le kosereva est un bonbon confectionné avec l’écorce de l'orange amer ("apepú", en langue guaranie), cuit dans de la mélasse noire.
Mais au Paraguay on ne produit pas que du sucre de canne. Un autre édulcorant venant de ce pays est devenu en quelques années un phénomène, alors qu’il est utilisé depuis des siècles par les Guaranis. La stévia ou ka'a he'ê (littéralement "herbe sucrée") ne contient pas de calories et a un pouvoir sucrant de 200 à 400 fois supérieur à celui du sucre ordinaire. Elle aurait par ailleurs des qualités curatives contre le diabète et l’hypertension. Longtemps interdite en France, son utilisation a finalement été autorisée en 2009 et commence à remplacer peu à peu les édulcorants artificiels, type aspartame, très décriés depuis des années. L’arbuste pousse en quantité au Paraguay et ses feuilles réduites en poudre sont vendues dans tous les magasins d’alimentation, généralement sous forme liquide, dans de petites bouteilles.

Les Paraguayens boivent assez peu de café ou de thé, ils préfèrent le maté, le tereré et le cocido, trois boissons à base des feuilles d’un arbuste appelé maté (Ylex paraguayensis), de la famille des houx. La yerba mate n’est donc pas une herbe, comme son nom pourrait le laisser croire, et on utilise les feuilles de l’arbre, torréfiées et pulvérisées, pour ces trois boissons typiques. Pour le maté et le tereré, tous les détails sont donnés dans le dossier spécifique (Le tereré, la boisson nationale). Quant au cocido, c’est une infusion obtenue en faisant caraméliser de la yerba mate avec du sucre, avec un charbon ardent, ou dans une marmite au-dessus du feu. On ajoute de l’eau et on mélange quand le sucre commence à caraméliser. Le cocido se boit nature ou avec du lait. On peut y ajouter du miel ou du citron.
Parmi les autres boissons, on peut citer le mosto, le jus de canne à sucre extrait à l’aide d’un moulin artisanal (trapiche). En faisant bouillir et décanter le mosto, on obtient ce qu’on appelle localement « la miel de caña » qui n’a rien à voir avec le miel comme on l’entend. A partir de la fermentation et distillation de la miel de caña on obtient un alcool dénommé caña (taguató resay). Le terme aloja désigne toute infusion rafraîchissante à laquelle on a ajouté de la miel de caña. Le 1er août, il est de coutume de boire un mélange de caña, de citron et d’une herbe appelée ruda (la Rue ou “herbe de grâce” en français).  Ce breuvage ancestral est censé purifier le sang et porter chance !
Les Paraguayens sont de grands consommateurs de bière. Traditionnellement blondes et légères, elles sont servies dans de grandes bouteilles placées dans des champañeras, pour les conserver ho’ysã porã (bien fraîches), voire glacées. Les microbrasseries ont envahi la capitale, et proposent des bières artisanales aux saveurs bien plus intéressantes que les bières industrielles. De plus en plus de pubs spécialisés les servent à la pression. Quant à la production viticole, elle est faible (concentrée du côté d’Independancia, dans le département de Guaira) et la qualité n’est pas comparable à celle des vins argentins et chiliens que l’on trouve facilement dans les supermarchés. Les Paraguayens préfèrent la bière, mais l’hiver, quand il fait frais, ils apprécient bien d'ouvrir une bouteille de vin. L’été, ils ajoutent souvent des glaçons dans leur verre ! Le bon compromis est le clérico. C'est une boisson à base de vin où macèrent des fruits coupés. Proche de la sangria, il se boit frais lors des événements festifs. Enfin le Fernet-Branca, un bitter italien à base d’herbes (gentiane, camomille, aloès, etc.) qui est importé d’Argentine, est très populaire.