Il y a 12 000 ans – Ve siècle

La période précolombienne

Les Lágido et Pámpido sont les premiers groupes amérindiens à s’installer sur le territoire actuel du Paraguay, il y a 8 000 ans. Les Guaranis présents dans le bassin amazonien depuis 12 000 ans, seraient arrivés au Ve siècle. À l’arrivée des premiers Européens, ils regroupaient un ensemble de peuples semi-sédentarisés, vivant de chasse, pêche, cueillette, mais aussi de la culture itinérante du manioc et du maïs.

1494

Le Traité de Tordesillas

Ce traité répartit les terres du Nouveau Monde entre l’Espagne (Castille) et le Portugal. Les terres portugaises se situaient à l’est d’une ligne verticale (passant vers l’actuelle São Paolo), les terres espagnoles, à l’ouest.

1524

Le Portugais Aleixo García sera le premier conquistador à traverser la région jusqu’aux contreforts de la cordillère des Andes. Il emprunte le Tapé Avirú, le chemin qui mène à Yvy marãe’y, la « Terre sans Mal » des Guaranis, où il y aurait une montagne d’argent dénommée Potojchi (Potosi).

1527

Le navigateur vénitien Sébastien Cabot remonte les fleuves Paraná et Paraguay, jusqu’à proximité de l’actuelle Asunción. Quatre ans plus tard, Hernando Pizarro découvre les richesses du Pérou. La conquête du continent devient urgente pour Charles Quint.

1536

Pedro de Mendoza est chargé par la Couronne de Castille de conquérir la « Province géante des Indes ». Il fonde le fort de Buen Ayre (Buenos Aires), puis envoie ses compagnons Juan de Ayolas et Domingo Martínez de Irala, conquérir les terres situées au nord du Río de la Plata. Ces derniers remontent le Río Paraguay et fondent le fort de Candelaria (au nord de l’actuel Fuerte Olimpo).

1537

La fondation d’Asunción

Juan de Salazar y Espinoza fonde Asunción (Assomption) le 15 août 1537, sur le territoire des Indiens Cario (Guaranis). Les Cario voient ces blancs barbus arrivés sur de grands bateaux, comme des alliés pour combattre les redoutables Guaycurú du Chaco. Ils leur octroient le statut de chefs militaires et offrent leurs femmes. La région est ainsi surnommée le « Paradis de Mahomet », les Espagnols vivant en concubinage avec de véritables harems. Une société métisse se forme : les Européens apprennent la langue et les mœurs indigènes, les Guaranis découvrent des techniques d’agriculture nouvelles. Les enfants métis, les mancebos de la tierra (« jeunes hommes de la terre »), parlent le guarani de leurs mères et l’espagnol de leurs pères.

1539-1541

Irala est nommé gouverneur de la province du Río de la Plata. Il rapatrie à Asunción les 400 habitants de Buenos Aires. Asunción se dote d’un Cabildo, en 1541, et devient le centre politique et militaire de la province. C’est de là que partiront les expéditions pour fonder les autres villes de la région : Villarrica, Santa Fé, Santa Cruz et plus tard la nouvelle Buenos Aires. Asunción fut ainsi surnommée la « Mère des villes ».

1542-1544

Álvar Núñez Cabeza de Vaca, le nouveau gouverneur, s’attaque à la polygamie, aux pillages de villages indiens et aux avantages fiscaux des officiers. Les conquistadors voient en lui un homme austère et trop respectueux des Indiens. Ils le capturent et le renvoient vers l’Espagne, sur une caravelle baptisée Comuneros (« du peuple »). Le message adressé à Charles Quint est clair : le pouvoir royal ne peut passer au-dessus de la volonté populaire !

1556

Asunción perd de son importance depuis la découverte de la Sierra de la Plata en 1545 par Gonzalo Pizarro, venu de Lima. Mais la région dispose de terres fertiles et d’une main-d’œuvre indienne abondante. Un système de pseudo-servage, l’encomienda, est mis en place. L’encomendero est chargé de « civiliser » et d’évangéliser les Indiens. Refusant le travail forcé, ces derniers prennent les armes, ou s’enfuient. La Couronne fait alors appel aux Franciscains et Jésuites pour regrouper les Guaranis, afin de les pacifier et de les évangéliser.

(1509-1556)

Domingo Martínez de Irala

Ce conquistador espagnol, gouverneur de la province du Río de la Plata (1539-1542, 1544-1548 et 1549-1556), est considéré comme le « Père du Paraguay », pour avoir facilité l’émergence d’une société métisse. Il aura lui-même de nombreux enfants, de diverses épouses indiennes. L’un d’eux, Ruy Díaz de Guzmán, sera l’auteur de la première histoire du Paraguay et du Río de la Plata, sous forme de prose.

1585

Les premières missions franciscaines sont fondées : Altos, Piribebuy, Tobatí, Atyrá, Caazapá… Les frères Alonso de San Buenaventura et Luis Bolaños seront les grandes figures de cette époque et auront un rôle primordial dans la conservation de la langue guaranie.

1609

Les missions jésuites vont prospérer indépendamment de l’administration coloniale, durant 160 ans, attirant les convoitises des encomenderos et des chasseurs d’esclaves.

1717

La Révolution des Comuneros

Ce fait marquant de l’histoire paraguayenne commença comme une révolte des encomenderos créoles, suite à la remise à des missionnaires jésuites d’un groupe d’Indiens qu’ils avaient capturés dans le Chaco. L’avocat José de Antequera est envoyé sur place par le vice-roi du Pérou pour enquêter. Contre toute attente, Antequera prend le parti des encomenderos, et même la place du gouverneur. Pour contenir le soulèvement, les troupes de Buenos Aires sont envoyées sur place, avec l’appui de l’armée guaranie des missions jésuites. Le conflit durera 18 ans. La défaite des Comuneros marque la fin de tout privilège politique accordé aux Paraguayens.

1750

Le Traité de Madrid

Ce dernier modifie les frontières entre l’Espagne et le Portugal. Sept missions jésuites se trouvent désormais en territoire portugais. C’est le début d’une guerre entre les Guaranis des missions ne voulant pas quitter leurs terres, et les troupes espagnoles et portugaises.

1810

En 1810, les créoles de Buenos Aires profitent de l’invasion de l’Espagne par Napoléon, pour destituer le vice-roi à Buenos Aires. La junte ambitionne d’administrer toute la province du Río de la Plata, y compris le territoire paraguayen. Les Paraguayens qui craignent de passer sous le joug de Buenos Aires, restent fidèles à l’Espagne et affrontent l’armée du général Manuel Belgrano. À Paraguarí, puis à Tacuarý, les Paraguayens mettent en déroute l’armée argentine. Ces victoires sont considérées comme les premiers germes du processus d’indépendance du Paraguay, car les autorités espagnoles s’enfuient dès les premiers combats, et seuls les créoles paraguayens défendent leurs terres.

1811

Face à la faiblesse du gouverneur espagnol Bernardo de Velasco, un groupe de soldats paraguayens va prendre le pouvoir, dans la nuit du 14 au 15 mai 1811. C’est la « Révolution de Mai ». Pedro Juan Caballero, Fulgencio Yegros, Fernando de la Mora, Francisco Xavier Bogarín, et José Gaspar Rodriguez de Francia forment une junte pour diriger le pays désormais libéré de l’Espagne.

1814-1840

Francia est nommé « Dictateur suprême de la République » par le Congrès. Durant son régime, il va instaurer un État laïc, autocratique et répressif. Les frontières se ferment et les terres sont transformées en fermes d’État (estancias de la patria), pour produire viande, céréales, coton… À la mort du « Suprême » en 1840, le pays est stable, riche et puissant.

(1766-1840)

José Gaspar Rodríguez de Francia

Né à Asunción, il étudie la théologie, puis la profession d’avocat. Unique civil de la junte indépendantiste, il sait tempérer l’empressement des officiers rebelles. Admirateur de Robespierre et Napoléon, c’est un dictateur tyrannique et populaire. Il parvient à isoler le pays des guerres intestines qui suivent l’indépendance de l’Argentine, instaure l’école primaire obligatoire, lutte contre la corruption et parvient à ce que tout un pays puisse manger à sa faim. Cette personnalité solitaire, austère, paranoïaque et cruelle, mais d’une honnêteté absolue, sera le personnage central de Moi, le Suprême, le célèbre roman d’Augusto Roa Bastos.

1844-1862

Après l’instabilité qui suit la mort de Francia, son neveu Carlos Antonio López conserve un régime autocratique, en ouvrant toutefois son pays vers l’extérieur. Il autorise la presse, envoie des étudiants en Europe et fait venir des ingénieurs étrangers pour développer les infrastructures de son pays (voie ferrée, chantier naval, aciérie…).

1862-1870

À la mort de Carlos Antonio López, son fils Francisco lui succède. Il poursuit le travail de modernisation du pays (télégraphe, construction du palais présidentiel, du théâtre national…) et renforce une armée déjà puissante.

(1827-1870)

Francisco Solano López

Il grandit à Asunción dans une famille aristocratique et entre très jeune dans l’armée. Cultivé et polyglotte, il voyage dans toute l’Europe. Lors de ses études à Saint-Cyr, il achète des armes et navires pour son pays. Il fait aussi la connaissance d’une belle Irlandaise, Elisa Alicia Lynch (Madame Lynch), qu’il emmènera au Paraguay. Ils auront sept enfants (en plus des trois illégitimes qu’il aura avec son premier amour, Juanita Pesoa). En 1862, il succède à son père au pouvoir et se lance dans une guerre insensée qui anéantira le pays.

1864-70

La Guerre de la Triple Alliance.

1870

Après la Grande Guerre, l’Argentine et le Brésil occupent le pays jusqu’en 1876. Ils se répartissent 40 % du territoire paraguayen. Seules les dissensions entre les anciens alliés empêchent la disparition totale du pays. Le Paraguay désoccupé va brader les biens et les terres de l’État pour financer la reconstruction.

1887

Naissance des deux grands partis politiques du Paraguay

Le Parti Colorado, conservateur et nationaliste, et le Parti Libéral, porté sur le libre-échange, voient le jour. Tout au long des décennies suivantes, les deux formations proposeront des programmes assez similaires, portant les intérêts de l’oligarchie.

1932-1935

La Guerre du Chaco contre la Bolivie, sera le deuxième conflit le plus meurtrier du Paraguay. Les limites frontalières dans le Chaco Boreal ont toujours été incertaines, générant des conflits passagers, mais sans grande importance, vu le caractère inhospitalier de la région. La rumeur de la présence de pétrole dans le Chaco ravive les tensions, attisées par de nouveaux acteurs : la Standard Oil (compagnie états-unienne appuyant la Bolivie) et la Royal Dutch Shell (compagnie anglo-néerlandaise soutenant le Paraguay). Le conflit fera 100 000 morts en 3 ans. Dans l’environnement hostile du Chaco, on attaquait les fortins adverses pour leurs maigres points d’eau. La reprise du Fortín Boquerón aux Boliviens en 1932 est célébrée chaque année le 29 septembre (jour férié). La « Guerre de la soif » prendra fin le 12 juillet 1935, mais la situation des frontières ne sera réglée qu’en 1938 (les trois quarts du territoire disputé reviendront au Paraguay).

1936

La Révolution du 17 février 1936

Un mouvement progressiste prend le pouvoir. Les Fébreristes, emmenés par le colonel Rafael Franco, entendent organiser le pays selon le modèle socialiste.

1939

Franco est renversé par Felix Paiva, lui-même remplacé par le général José Felix Estigarribia, héros de la Guerre du Chaco, qui instaure une nouvelle constitution.

1940

Higinio Moríñigo, met en place une dictature de type fasciste. Les partis politiques sont interdits.

1947

Rafael Franco réunit les libéraux et communistes dans un nouveau mouvement révolutionnaire, qui reçoit l’appui de la marine et de l’infanterie. C’est la Revolución de los pynandí (« Révolution des pieds-nus »). Concepción, la ville où a pris forme la révolution, est bombardée par les forces aériennes, restées fidèles à Moríñigo. Les rebelles sont écrasés en quelques mois. Cette guerre civile fera entre mars et août des milliers de morts et de nombreux exilés.

1948

Le Paraguay connaît plusieurs coups d’État et une grande instabilité politique jusqu’en 1954.

1954-1989

Coup d’État du général Alfredo Stroessner qui gardera le pouvoir durant 35 ans. Soutenu par les États-Unis, il participe activement à l’opération Condor durant la guerre froide. Échanges d’informations sur les groupes « subversifs », disparitions et tortures de masse marqueront ce régime de terreur. La répression est féroce contre les artistes, intellectuels et paysans (ces derniers résistent dans les Ligas Agrarias Cristianas et le Movimiento 14 de Mayo). Les « archives de la terreur », retrouvées en 1992 et exposées dans le Museo de la Memoria, apporteront les preuves de la cruauté de la dictature. Pour financer son régime, la contrebande et les trafics en tous genres sont encouragés. La corruption s’institutionnalise et la coíma devint la règle pour obtenir un permis, ou des faux papiers pour sa voiture volée au Brésil. Stroessner et ses proches s’enrichissent également grâce aux chantiers de construction des barrages d’Itaipú et Yacyretá, et à la vente de millions d’hectares de terres nationales à des compagnies brésiliennes.

1989

Coup d’État du général Andrés Rodríguez, gendre et bras droit de Stroessner. Le dictateur se réfugie au Brésil, où il résidera sans être inquiété jusqu’à sa mort en 2006.

1992

La nouvelle constitution limite à un seul mandat les fonctions présidentielles et reconnaît le guarani comme langue officielle à côté de l’espagnol (le guarani était banni sous Stroessner).

1993

Juan Carlos Wasmosy est le premier président civil depuis 1954. Il réforme la justice et l’armée, et mène une politique économique néolibérale.

1996

Tentative de putsch contre Wasmosy par le général Lino Oviedo, qui sera condamné à 10 ans de prison.

1999

El Marzo Paraguayo

Raúl Cubas, président fantoche, accorde l’amnistie à Oviedo contre l’avis de la Cour Suprême. Une procédure de destitution est lancée contre Cubas. Au même moment, Luis María Argaña, le vice-président qui devait prendre sa place, est assassiné. Cubas et Oviedo sont directement impliqués. Des milliers de personnes se réunissent devant le Congrès pour manifester leur désir de justice et de démocratie. Les francs-tireurs d’Oviedo tirent sur la foule, faisant 8 morts et des dizaines de blessés. Cubas s’enfuit au Brésil, Oviedo en Argentine.

1999

Luis González Macchi dirige le pays qui connaît une grave crise économique et financière. Son gouvernement est particulièrement corrompu. Il s’avéra même que la BMW présidentielle était une voiture volée au Brésil, roulant avec de faux papiers !

2000

Tentative de coup d’État de fidèles du général Oviedo contre Macchi.

2003

La politique du nouveau président, Nicanor Duarte Frutos, est dans la lignée des précédentes, sans réelle ambition pour réduire les inégalités sociales, mais l’économie reprend le chemin de la croissance.

2004

Incendie du supermarché Ycuá Bolaños à Asunción le 1er août. La plus grave catastrophe civile de l’histoire du pays, 369 morts et 500 brûlés.

2008

L’élection de Fernando Lugo à la présidence de la République

Cet ancien évêque, issu d’une famille persécutée par la dictature, met fin à 61 années de pouvoir du Parti Colorado. À la tête d’une coalition de centre-gauche, Lugo obtient des avancées importantes dans la santé et l’éducation, et parvient à renégocier le traité d’Itaipú avec le Brésil de Lula.

2012

Lugo est destitué par le Parlement, suite à une alliance entre le Parti Colorado et le Parti Libéral, emmenée par le vice-président, Federico Franco. Le prétexte : un affrontement à Curuguaty entre paysans sans terre et policiers, qui a fait 17 morts. Un complot politico-agro-industriel de l’opposition pour décrédibiliser la tentative de réforme agraire de Lugo serait derrière cette sinistre affaire. Les gouvernements de la région et l’Union européenne qualifient la destitution de « coup d’État parlementaire ». Le Paraguay est exclu temporairement du Mercosur et de l’Union des nations sud-américaines. Franco prend la présidence par intérim.

2013

Le retour au pouvoir du Parti Colorado

Horacio Cartes, le nouveau président, est à la tête d’un empire (banque, maisons de change, club de football, médias, boissons gazeuses, tabac…) et a un passé sulfureux, révélé par les câbles de WikiLeaks (escroqueries bancaires, blanchiment d’argent, contrebande de cigarettes…). Le « Berlusconi paraguayen » engage d’importants travaux d’infrastructures pour moderniser le pays, mais sa politique économique ultralibérale génère la première grève générale depuis 20 ans. Pour se représenter en fin de mandat, il tente de faire modifier la constitution, mais doit faire face à des protestations massives, au cours desquelles le bâtiment du Congrès est incendié.

2015

Visite au Paraguay du pape François, chaleureusement accueilli par des millions de fidèles.

2018

Le colorado Mario Abdo Benítez, remporte les élections de 2018 face au libéral Efraín Alegre, représentant de GANAR, une coalition réunissant les partis de l’opposition. « Marito » sera élu malgré les liens historiques de son père (secrétaire personnel du dictateur Alfredo Stroessner). Il reste dans la lignée colorada, avec une politique agro-exportatrice et des positions ultra conservatrices sur les thèmes de société.

2019

En août, Mario Abdo échappe à une procédure de destitution pour haute trahison. Un accord énergétique avait été signé en secret en mai avec le Brésil, au sujet de la tarification de l’énergie hydroélectrique d’Itaipú. Le traité est annulé suite au scandale. Au même moment, le Paraguay est touché par les plus graves incendies de son histoire. Le président tombe au plus bas de sa popularité.