Guide de SETOUCHI : Arts et culture
Les serpents dragons du Iwami Kagura.
Style T'ang. Il s'agit d'une volonté de symétrie des bâtiments. Les Japonais l'ont particulièrement développée pendant la période Heian. Les sanctuaires Heian et le Byōdō-in en sont les répliques.
Style Shinden (Shinden zukuri). Pendant la période Heian, c'est le style ouvert qui permet la circulation des flux dans les demeures aristocratiques. Il n'en reste plus d'exemple authentique.
Style Shoin (Shoin zukuri). C'est une version plus élaborée et plus épurée du style shinden. On l'appelle aussi sukiya.
Style Sōan. Le style Sōan met en valeur les principes de la cérémonie du thé et une espèce d'espace à la fois magique et vide où règnent la précision et l'asymétrie.
La plupart des matériaux de construction sont d'origine végétale. Pour de grosses oeuvres, le matériau le plus utilisé pour les édifices traditionnels ou les maisons, est le bois de résineux : pin, sapin, cyprès, cèdre. Les feuillus (châtaignier, noisetier, chêne) sont utilisés pour les meubles. Les remplissages des panneaux coulissants sont constitués de feuilles de mûrier. Enfin, le bambou sert pour les lattis de bois, qu'on enduit ensuite d'un mélange d'argile, de sable et de paille hachée, pour réaliser les murs de la maison. Parfois, on a recours à de la chaux hydratée à partir de coquilles d'huîtres. Les tatamis sont constitués de paille de riz battue et pressée, recouverte d'une natte d'herbe tissée. La dimension du tatami est fixée dans l'espace par deux colonnes, le ken, soit en moyenne 1,86 m x 0,93 m.
Deux tatamis constituent un carré d'une surface d'un tsubo soit 3,46 m². Le travail du bois a entraîné l'innovation de la technique de l'ossature. Les murs ne sont pas porteurs et servent à distribuer l'espace en fonction des besoins. Les panneaux sont coulissants ou carrément amovibles. À partir de l'époque Muromachi, on voit apparaître une standardisation qui non seulement va modifier la conception de l'espace, mais aussi lui donner le fondement même de son esthétique et de son originalité. Il s'agit du tatami qui, de dimension à peu près semblable dans tout le Japon, va permettre la modulation de l'espace. On construit sur pilotis, généralement sur une terrasse préalablement préparée. Le bâtiment est horizontal pour s'immiscer dans la nature et permettre, grâce à l'usage des panneaux coulissants et des coursives, un rapport dedans-dehors, et surtout la captation et la diffusion de la lumière. Cette distribution met en valeur les matériaux naturels, les expose aux intempéries et leur accorde une patine pure. Si l'architecture japonaise a emprunté largement au système chinois par l'adoption des principes de toiture, elle s'en est détournée dans la mesure où elle a abandonné la rigueur des éléments de la géomancie chinoise.
C'est vraisemblablement le syncrétisme shintō-bouddhique qui permet aux Japonais de s'évader et de créer leur propre architecture. Toute la subtilité japonaise se concentrera sur le refus du monumental et un équilibre particulier entre les espaces et les volumes.
Les transformations ultérieures utilisent une dissymétrie de la section transversale afin d'aménager un espace à des fins rituelles pour les fidèles. On aménage alors une structure indépendante de la structure primitive pour dégager un nouvel espace devant l'image sainte. Pour conserver la construction symétrique du toit, on eut recours à deux innovations.
Un double système de poutres. Les poutres inférieures reposent sur des colonnes qui sont à présent libres de ne pas se conformer à une symétrie par rapport à l'axe longitudinal. Plus haut, les poutres sont supportées par des poteaux qui reposent sur les poutres inférieures disposées sans tenir compte de la position des colonnes.
La liaison entre les colonnes repose sur la taille des poutres et des poteaux jusqu'à l'ajustement de ceux-ci. De même, on utilise cette méthode empirique pour la façon des corbeaux calés qui soutiennent les avant-toits. Pour mener à bien ces charpentes tri-directionnelles, il fallait renforcer les colonnes. Les poutres joignent les colonnes dans les deux directions. Si les pannes sont soutenues par des poteaux régulièrement espacés, les trames de points d'appui sont libres. Par un système qui fait appel à trois solives déployées sur la longueur du bâtiment et par des poutres qui relient les colonnes dans les deux directions, la charpente japonaise s'affranchit de la charpente chinoise.
Plus tard, les procédés d'assemblage permirent de mettre au point des encorbellements par gestion de corbeaux et de cales et ainsi de construire d'une manière juste et rationnelle les angles des toits. Les dimensions des sanctuaires, des temples et des maisons obéissent aux mêmes lois : le kendōnt. La dimension locale varie entre 1,80 m et 1,90 m. L'espace intérieur est calculé en ken au carré qui, si on applique le tatami à 1,85 m, fait 3,45 m² environ. Le bois est pratiquement toujours laissé naturel, ce qui lui permet de se patiner avec les intempéries et de résister aux changements de température et à l'humidité. D'ailleurs, les Japonais utilisent le jeu du bois à des fins positives : ils fendent les piliers afin qu'en gonflant ceux-ci ne se déforment pas et puissent épouser les mouvements du sol lors des tremblements de terre.
La codification des éléments architecturaux s'intensifie à partir de l'époque Nara, puis de l'époque Heian (Kyōto). Elle prend le nom de Shinden ou Shinden-zukuri.
La résidence, réservée aux grandes familles nobles, comprend un bâtiment principal (shinden) entouré sur trois côtés de bâtiments annexes (taï no ya) reliés au bâtiment principal par des coursives ou des corridors.
Devant la résidence se trouve un étang avec des îlots réunis un à un par des ponts. Toutes ces constructions obéissent à la géomancie chinoise, et les ruisseaux d'eau pure qui alimentent l'étang doivent être orientés selon un axe immuable nord-ouest sud-est. Les planchers de ces bâtiments sont en bois et les murs sont constitués de vantaux (shitomido) qu'on place ou déplace à volonté selon les saisons. La superficie totale de ces aménagements pouvait atteindre un hectare ou plus. En plus des bâtiments principaux, il y avait des pavillons reliés par des galeries couvertes et des postes de garde.
L'ensemble était entièrement clos et percé de plusieurs portes disposées aux points cardinaux, dont celle du sud faisait office de porte principale. Ces résidences ont aujourd'hui totalement disparu. Il ne nous en reste que des témoignages sur les rouleaux (emakimono) qui datent de l'époque Heian. Sur ces rouleaux enluminés, dessins et textes s'alternent. A l'époque Kamakura se développe un style particulier pour les résidences de samouraïs, dans le style des auberges de campagne avec un bâtiment principal situé sur un terrain clos.
De part et d'autre, se trouvent des appentis pour la cuisine et les chevaux. Derrière s'étend un jardin dont le style reprend les grandes lignes du style shinden, mais qui, peu à peu, s'inspire des jardins Zen favorables à la contemplation et la méditation.
Style shoin-zukuri. A partir de l'époque Muromachi, des modifications d'une grande importance surviennent : l'apparition du tokonoma comme alcôve symbolique et la standardisation des tatamis. Apparaît également l'architecture si caractéristique des maisons de thé (sukiya). Le style shoin-zukuri, d'inspiration chinoise, s'applique aux résidences aristocratiques de la fin du XVIe siècle.
Le plan carré est orienté nord sud avec l'entrée principale au sud. La porte (chū-mon) ouvre sur le bâtiment principal par une véranda qui entoure cette construction. Autrefois, le volume du pavillon central était divisé par des paravents.
A présent, il est divisé en plusieurs pièces par des panneaux coulissants. A la place des portes suspendues en bois, sont installés les shōji (panneaux coulissants en bois léger quadrillé et dont les vides sont recouverts de papier blanc translucide afin de tamiser la lumière et de provoquer un effet de contre-jour), protégés des éléments par des volets réticulés en bambou fin. Les tatamis recouvrent les planchers.
C'est à la Corée que le Japon emprunte les différents éléments de l'architecture des temples. D'abord, un pavillon où sont installées les images et les sculptures pieuses, le kondō, puis un pavillon à destination didactique, le kōdō, réservé à l'enseignement des religieux et aux sermons, une pagode, et généralement des quartiers monastiques qui font figure d'enceinte.
Le plus vieux temple bouddhique japonais est le Hōryū-ji, à Ikaruga, près de Nara. Il représente aujourd'hui la plus vieille structure en bois du monde. Les Japonais changent l'axe primitif nord-sud sino-coréen, tout en gardant leur système de construction.
Par la suite, que ce soit pour la construction du Tōshodaïji ou du Tōdaïji, une scrupuleuse orthodoxie est respectée dans l'agencement des bâtiments par rapport à l'axe sino-coréen. C'est pour établir les édifices des sectes Tendaï et Shingon que l'architecture va s'affranchir de ses modèles : utilisation des courbes de niveau dans les montagnes, nouveaux axes de symétrie et nouvelles perspectives. Avec la nouvelle capitale (Kyōto), et le développement du culte d'Amida, plusieurs temples sont orientés vers l'est pour faire face au paradis de l'ouest. Les styles de construction des temples bouddhiques relèvent de trois tendances : le wa-yō (japonais), le kara-yō (chinois) et enfin le tenjiku-yō.
Le style wa-yō concerne plutôt la période Kamakura : pente faible des toitures et solives alignées horizontalement, fenêtres carrées et utilisation des étais pour consolider la fixation des poutres entre les piliers.
Pendant les périodes Kamakura et Muromachi, le plan des temples évolue vers une dissymétrie organisée autour d'une volonté de souligner la pratique liturgique des nouvelles sectes bouddhiques. Cette dissymétrie, marquée par l'espacement des colonnes, laisse entrevoir une autre architecture qui allait tirer parti de la structure du toit et des effets dus à l'empilage des consoles standardisées. En 1199, les Japonais construisent le nandaimon du Tōdaï-ji. Les supports des encorbellements traversent les piliers principaux, les solives supportant les auvents sont utilisées en éventail pour répartir les forces, et les dés des entablements sont tous de même taille. Cette standardisation devient habituelle pendant l'époque Kamakura. Ce style dépouillé et rapide de construction prend le nom de tenjiku-yō.
Quant au kara-yō, ou style chinois, il est utilisé surtout dans l'édification des temples Zen en combinaison avec le style wa-yō. Les angles des toits sont plus accentués, les solives également utilisées en éventail, et les poutres reliant les piliers adoptent la forme ebi-koryō, ou " écrevisse ". On galbe la partie lintale des fenêtres.
Les premiers fondements de son architecture naissent pendant la période Yayoi avec la construction d'un certain type de grenier. On enfonce les piliers profondément, les toitures sont à double pente, et les cloisons faites de planches juxtaposées. Ce style d'architecture employé pour les kura (greniers) sera transformé plus tard en procédé azekura-zukuri afin de bâtir de grands sanctuaires, comme Ise et Izumo.
Par la suite, onze styles différents marquent une progression dans la maîtrise de l'espace, fortement influencés par les procédés de construction bouddhiques.
Les styles Taisha pour le sanctuaire d'Izumo, avec une entrée sur le côté accessible par un escalier.
Le style Shimmei, avec une entrée sur un des grands côtés comme à Ise.
Le style Ōtori, avec l'entrée dans le pignon de face.
Les styles Kasuga et Nagare avec des toits et auvents au-dessus de l'entrée du pignon et toits incurvés.
Le style Hachiman, qui accole deux salles reliées par leurs toits incurvés avec une gouttière commune.
Le style Gongen, qui prend toute sa force au XVIIe siècle et dont le représentant le plus prestigieux reste le sanctuaire d'Iyeasu Tokugawa, le Tōshōgū, à Nikkō.
Le Japon adopte l'écriture chinoise dès le VIe siècle vraisemblablement, en même temps que le bouddhisme. Du VIe au IXe siècle, la technique consiste à copier et essayer de maîtriser le savoir des artistes de la cour des Sui et des T'ang.
Jusqu'au IXe siècle, la tradition imite le style et l'adresse de Wang Xijin (307-365). Lorsque Kūkaï revient de Chine pour créer la secte Shingon, il invente un nouveau syllabaire kana qui séduit l'empereur Saga. En recevant la direction du temple Tō-ji à Kyōto, Kūkaï crée des ateliers de calligraphes qui s'affranchissent de l'art chinois et assouplissent la technique du geste en fonction des kanas.
La transcription d'un certain nombre de kanas d'un seul coup de pinceau permit aux calligraphes d'avoir la vitesse qui correspondait si bien à la fugacité des waka, ces fameux poèmes japonais.
La calligraphie joue un rôle prépondérant dans l'initiation des femmes à l'écriture, qui contrôlent alors mal les kanjis. La poétique des moeurs, les intrigues amoureuses ainsi que la retranscription des premiers romans, comme le Genji monogatari, vont permettre à la calligraphie de devenir le support et le geste d'une nouvelle sensibilité. La cour demande à des artistes confirmés d'agrémenter les paravents et de parer les peintures par des ashide (écriture de roseau) d'une grande fluidité, représentant la nature (roseaux, cours d'eau...).
Au premier style calligraphique du début de la période Heian qu'on appelle jōdai-yō, se substituèrent d'autres qui caractérisent l'architecture, comme le wa-yō et le kara-yō. Puis la calligraphie est alors inspirée par le Zen. Elle reproduit à nouveau le style chinois des Song, puis des Ming. Le style kara-yō prédomina pendant les deux siècles et demi de la période Edo (Tōkyō). La calligraphie devint peu à peu un trait important de la culture japonaise. Elle est à présent un objet de concours qui a lieu chaque année dans les écoles. Il est tout à fait possible de prendre des cours dans la capitale nippone.
En déambulant dans les quartiers populaires, ou en prêtant un peu attention à la décoration des couloirs ou des halls de certains hôtels, les belles poteries nippones et autres céramiques n'ont aucun mal à se distinguer. La grande antiquité du Japon est assez mal connue, mais le paradoxe de cette méconnaissance tient dans le fait que les plus vieilles poteries du monde y ont été découvertes. Elles datent de 12700 av. J.-C. et elles attestent d'une culture, là où l'on parle encore souvent de préhistoire. Les spécialistes distinguent plusieurs périodes correspondant à différentes techniques : période Jōmon, période Yayoi, période dite des Kofun, période Nara, époque Heian, époque Kamakura et époque Muromachi. Les céramiques de Hagi, Hagi-yaki sont particulièrement appréciées.
Le dépaysement matériel au Japon est tel pour un Occidental, qu'il n'est pas très difficile de trouver des idées d'objets à ramener dans les valises. Reste à savoir quelle utilité auront ces produits achetés une fois de retour. Par exemple, rapporter un kimono peut sembler logique, à condition qu'il ne reste pas au fond d'un tiroir. La bonne idée peut venir des choses consommables, tels que des pâtisseries, le saké, du whisky, des gâteaux, des sucreries et le thé japonais, le thé vert notamment. Pour la maison, de nombreux objets traditionnels peuvent être rapportés, à condition d'y mettre le prix : couteau de cuisine, vaisselle, vase, baguettes, peintures, objets de décoration...
Le cinéma japonais est fort ancien, puisqu'il remonte à 1896. Il est d'abord diffusé dans les salles de théâtre avec des présentateurs de marionnettes. Les premières séances ont lieu à Ōsaka (à l'époque les salles s'appellent katsudō-shashin, " photos actives "). Le premier film japonais tourné en 1899 prend pour thème une pièce de kabuki (momijigari). De nombreux films muets des Etats-Unis animent alors les grands écrans.
Ce n'est qu'en 1912 que naît la première société de production de films japonais, Nikkatsu. En 1920, Shōchiku, à Tōkyō commence à produire des films commerciaux, mais le grand tremblement de terre de 1923 incite les studios à se fixer à Kyōto. En 1926, Teinosuke Kinugasa sort le magnifique Une page folle, chef-d'oeuvre du cinéma muet. Peu à peu, la technique des acteurs japonais s'affirme en s'affranchissant du théâtre.
A partir de 1931, date du premier film parlant, le cinéma va prendre son essor. Les Japonais se concentrent sur les adaptations d'oeuvres littéraires japonaises, et c'est sans doute la raison pour laquelle le cinéma est peu exportable. C'est l'époque des premiers films de Yasujirō Ozu : Le coeur de Tōkyō, Après notre séparation et Bonjour, anciennement Gosses de Tōkyō (1933). Puis le cinéma tombe entre les mains de la propagande entre 1937 et 1945. Le cinéma de guerre devient l'écran de la technique. En 1953, Ozu raconte l'histoire d'un couple de retraités qui vient rendre visite à leurs enfants vivant à Tōkyō. Reçus avec les égards dans un premier temps, ils deviennent très vite dérangeants dans leur vie quotidienne. Ozu met en scène la désintégration du système familial japonais pour la première fois à l'écran. Ce film devient un monument du cinéma japonais.
C'est en 1946 qu'Akira Kurosawa commence sa carrière avec le film Je ne regrette pas mes années de jeunesse. En 1951, il reçoit le Lion d'Or de Venise pour Rashōmon. Les Sept Samouraïs deviennent un immense succès en 1954. Entre 1950 et 1970, le cinéma japonais vit son premier âge d'or.
Le nombre de films japonais chute dans les années 1970-1980 en raison de la disparition progressive des majors, les grandes firmes nationales de production. Seule la persévérance de réalisateurs indépendants permet au cinéma nippon de sortir la tête de l'eau. A retenir entre autres, L'Empire des sens d'Ōshima Nagisa, en 1975, ou Furyō du même réalisateur avec David Bowie (1982).
S'en suit un cinéma de l'ombre dans les années 1980-1990, qui ne s'exporte pas et auquel les Japonais préfèrent le cinéma hollywoodien. Une exception tout de même, Akira, sorti en 1988, qui deviendra la référence ultime de tous les films du genre post-apocalyptique. A noter également que quelques réalisateurs tirent leur épingle du jeu en cette période de déclin : La Ballade de Narayama de Shōhei Imamura gagne la Palme d'Or en 1983 (il l'obtiendra à nouveau en 1997 avec L'Anguille). Des réalisateurs de la nouvelle génération, à partir des années 2000, tels que Naomi Kawase ou Kore-Eda Hirokaku, se mêlent aux plus anciens comme Ōshima Nagisa ou Imamura, pour offrir un panorama bigarré et précurseur d'un nouveau souffle, ses jeunes réalisateurs se sont affirmés de film en film au point de compter parmi les grands réalisateurs internationaux bénéficiant d'un succès d'estime et d'un succès en salle en témoignent leurs derniers films, salués unanimement, Les délices de Tōkyō pour Kawase (2015) et Tel père, tel fils (2013) et Notre petite soeur (2015) pour Kore-Eda Hirokaku. A la fin des années 1990, les recettes générées par la production cinématographique sont de nouveau encourageantes. Après l'ère de la sécurité et de la croissance économique, le jeune cinéma japonais se fait le porte-parole des No Future et offre le spectacle d'une société décadente avec très souvent en toile de fond, l'ultra violence physique et sexuelle, comme en témoignent les premiers films de Takeshi Kitano, A wind named amnesia de Kazuo Yamazaki (1993), Neon genesis evangelion d'Hideki Anno (1995) ou le Battle Royale de Kinji Fukasaku (2001). Ces films reçoivent un écho grandissant à l'étranger et surtout en Europe.
S'ensuivent au cours de ces dernières années un style nippon reconnaissable qui s'affine et qui s'impose en Occident, les gros succès sont : Le Voyage de Chihiro de Hayao Miyazaki (2001), L'été de Kikujiro de Takeshi Kitano (1999) ou The Ring de Hideo Nakata (2002), repris par Gore Verbinski en 2003. À noter également que la culture nippone intéresse les réalisateurs occidentaux. Ainsi est-ce le cas dans Le dernier samouraï (2002), un drame épique se déroulant dans le Japon des années 1870 dans lequel Tom Cruise découvre le Bushidō. La même année, le metteur en scène Yōji Yamada sort Seibei à la tombée du jour (Tasogare no seibei).
A noter également le film en deux volumes de Quentin Tarantino, Kill Bill. Et encore Lost in Translation de Sofia Coppola, où tout ce qu'il y a de plus pittoresque et folklorique (mais aussi un peu cliché) dans la culture japonaise sert de décor à une chaste histoire d'amour entre Bill Murray et Scarlett Johansson.
L'univers de Hayao Miyazaki. En marge des productions cinématographiques, s'est développé, dans les années 1990, un cinéma d'animation de grande qualité, concurrençant sérieusement les productions américaines. Maître incontesté de la discipline, Hayao Miyazaki est le réalisateur japonais le plus connu à l'étranger. Le Château dans le ciel, Princesse Mononoké, Le Voyage de Chihiro ont fait des millions d'entrées dans le monde, sans parler de leur immense succès au Japon. Né à Tōkyō en 1941, il débute sa carrière comme intervalliste dans les célèbres studios d'animation Tôei, d'où sortent les plus grands mangas japonais. Il y fait la connaissance d'Isao Takahata avec lequel il quitte Tôei pour A Production. Peu de temps après, il signe son premier long-métrage, Le Château de Cagliostro (1979). Non seulement ce film rencontre un grand succès à sa sortie mais demeure encore aujourd'hui l'un des classiques du genre. Les fonds dégagés offrent à Miyazaki et Takahata la possibilité de monter leurs propres studios en 1985 : les studios Ghibli, un laboratoire d'idées où est produit ce qui se fait de mieux en matière de mangas ou de films d'animation - à noter, sous la direction de Takahata, les épatants Tombeau des Lucioles et Mes voisins les Yamada. En 1986, Miyazaki explore un peu plus son monde merveilleux et fantastique, où l'on retrouve l'omniprésence du ciel, de l'enfance, de la nature, de l'écologie, avec Le Château dans le ciel. Ce film est sorti près de 15 ans plus tard en France. Viennent ensuite Princesse Mononoké (1997), un film d'animation écolo où chaque être vivant cherche sa place, et, surtout, Le Voyage de Chihiro (2001), un périple initiatique durant lequel Chihiro, 10 ans, va grandir. En 2014, Miyazaki sort un nouveau chef-d'oeuvre, Le vent se lève, qui raconte l'histoire d'un jeune ingénieur créateur des fameux Zéros, les avions de chasse japonais de la Seconde Guerre mondiale. Miyazaki s'est inspiré de nombreux lieux réels situés dans la région de Sétouchi, Ponyo, Chihiro, pour raconter ses histoires.
L'univers des films d'animation ne se limite pas à celui de Miyazaki. En 1945, Momotarō, le soldat divin de la mer est le premier véritable film d'animation japonais de l'histoire, suivi 13 ans plus tard par Le Serpent Blanc de Taiji Yabushita. Mais on s'accorde à dire que ce genre débute véritablement avec Osamu Tezuka, le créateur d'Asto boy, Tetsuwan Atom en japonais. Tezuka est l'initiateur des techniques qui deviendront les bases dès les années 60 de la société Mushi Production. C'est dans les années 80 que l'animation prend véritablement son envol avec l'éclosion de réalisateurs tels que Makoto Shinkai, Satoshi Kon Isao Takahata, Mamoru Hosoda, Mamoru Oshii ou encore Kore-eda. Voici une liste de films d'animations que nous avons aimé : Akira de Katsuhiro Ôtomo (1988), Perfect Blue de Satoshi Kon (1997), Cowboy Bebop Knockin' on Heaven's Door de Shinichirô Watanabe (2001), Innocence : Ghost in the Shell de Mamoru Oshii (2004), Les enfants loups de Mamoru Hosoda (2012), Le Conte de la princesse Kaguya de Isao Takahata (2013), Souvenirs de Marnie de Hiromasa Yonebayashi (2014).
L'univers post-apocalyptique japonais. Le Japon est le seul pays au monde à avoir subi deux explosions atomiques. Les générations de réalisateurs et de dessinateurs de mangas d'après-guerre ont vécu avec ce traumatisme et ont exprimé de façon très diverses ces angoisses. Cela a commencé avec Le Godzilla de Ishirō Honda sorti en 1954 racontant l'histoire d'un monstre réveillé à la suite d'essais nucléaires, suivent les années 60 et The final war de Shigeaki Hidaka, où la quasi-totalité de l'humanité disparait. The drifting classroom, une adaptation du manga l'Ecole emportée, elle-même adaptée du livre Sa majesté des mouches, raconte l'histoire d'une classe d'écoliers qui se retrouve transportés dans un Tōkyō détruit par une troisième bombe atomique. La fin de la décennie 70 est marquée par Conan, le fils du futur, une série de Miyazaki. Le jeune garçon vit seul avec son grand-père dans un monde apocalyptique. Akira d'Otomo, en 1988, devient un véritable tournant dans l'art cinématographique post-apo. Les ruines de Néo-Tōkyō voient s'affronter des gangs de motards qui survivent dans un monde dévasté et où des savants fous jouent aux apprentis sorciers. Ce film sera le premier film japonais d'animation diffusé dans des salles françaises et reste un monument et une source d'inspiration pour de nombreux réalisateurs occidentaux. James Cameron (Terminator), Alex Proyas (Dark City), les soeurs Wachowski (Matrix), Albert Hugues (Le livre d'Eli), George Miller (Mad Max), n'en sont que quelques exemples.
Chants modulés du grand cygne noir ou de la grue blanche, chants rythmés dans les claquements secs d'une peau de tambour ou maquillage et costumes somptueux, le théâtre japonais renvoie aux grands mythes shintō et aux légendes séculaires. Il mêle souvent la parole, le chant et des mouvements ritualisés ou dansés. Le théâtre, tel que le nō, n'est pas un spectacle au départ. Son origine est un rituel religieux kami.
Au début, les spectateurs n'applaudissaient pas devant une représentation de nō ou dans une rencontre de sumō, ni devant les danses de Kagura. Les techniques se sont perpétuées par la rigueur des écoles et par l'écrit. Les danses rituelles, livrées à la mémoire collective et à la transmission du savoir gestuel et verbal, ont conservé leur fraîcheur originelle.
" Kagura " désigne les danses et musiques du culte shintō. Shintō, ou kami-nagara no michi, signifie " la voie du lieu de passage kami ". Le kagura est généralement reconnu comme étant la forme la plus ancienne des rituels dansés d'origine japonaise. Le sens initial de " kagura " est une contraction entre kami et kura (kura : nuance de lieu) et kami. Comme kami vient en tout lieu saint, il peut être ritualisé sous forme d'une cérémonie partout où le lieu le permet. Kagura a donc le sens de " ritualisation sacrée d'un lieu ". Les spectacles de kagura sont joués à l'occasion des matsuri (fêtes), ou des rites saisonniers. Ils mettent en scène des mythes ou des événements historiques, et chaque sanctuaire, local ou national, possède son propre kagura. Leur nombre reste difficile à évaluer. Ainsi existent les kagura impériaux, ou mi-kagura, datés du IXe siècle, sans doute initiés par le kagura offert au dieu de la guerre et du bien-être, Hachiman, dénommé aussi dieu des huit bannières Yawata, et divinité tutélaire de la famille Minamoto. Les danses édulcorées des servantes de temples, dites miko-kagura ou miko-mai, les danses rustiques ou agraires, appelées sato-kagura ou ta-mai, ou encore les spectacles influencés par les nō des XIVe et XVe siècles, sont représentatifs du kagura.
Les kagura rustiques, ou sato-kagura, consistent en imitations, mono mane, de travaux agraires ayant un but propitiatoire comme les semailles (tanemaki). Les kagura sont des rituels dansés propitiatoires et de purification. Ils sont exécutés pour éloigner les épidémies et le feu, et assurer de bonnes récoltes lors des fêtes des prémices.
Dès le VIIe siècle, avec l'introduction du bouddhisme et de l'écriture chinoise, le gigaku, affublé de masques immenses qui couvrent les visages démesurés des divinités, disparaît peu à peu, ne laissant, dans les temples de Nara, que 223 pièces en testament.
Il semblerait que le gigaku ait été introduit au Japon en 612, pendant la période Asuka, par Mimashi, du royaume de Paekche en Corée. Cet art accompagnait les rites bouddhiques. Mimashi fut envoyé comme professeur à Sakuraï, dans la région du Yamato (Kansaï) afin d'enseigner la musique dans un institut appelé Gakkō. Y étaient enseignées la musique et la danse, comme à l'origine dans le Yunan. Certains font même remonter son origine à l'antiquité grecque. Il s'agissait d'un gyōdōgei, composé d'un défilé de danseurs portant d'immenses masques lors de danses rituelles exécutées au temple. Les masques représentaient le shishi (lion), le shishiko (lionceau) et le chidō (guide), puis le gokō (l'aristocrate), le kongō et le rikishi (divinités bouddhiques), le karura (oiseau), le konro (esprit chassant le mal), le baramon (bonze), le taïko et le taïkoji (vieillards) et enfin suiko-jū (le buveur de saké).
Cette sarabande, masquée et délicatement vêtue de tissus somptueux, amusait le public par de petits sketches comiques en mettant en valeur la polychromie des masques et l'effet de leur démesure. C'est sans doute la volonté de l'empereur de s'affranchir du poids politique et culturel des moines et bonzes chinois qui eut raison du gigaku. Il disparut progressivement et s'évanouit lors de l'émergence de la nouvelle capitale, Kyōto. Parallèlement, le gyōdō, lui aussi, défilait dans les temples avec des masques du Bouddha. Le message devenait plus prosélytique et plus didactique, un évangile masqué apportant la bonne parole du sage dans un monde égaré.
Au XIIIe siècle, des noronji (envoûteurs ou récitants de psalmodies magiques) déjà organisés en troupes, s'étaient introduits habilement au sein de celles reconnues de sarugaku et de dengaku, ainsi qu'au sein des yamabushi, encore emprunts de quelques savoirs chamaniques.
Cette époque, qui couvre environ cinq siècles, fut prolifique car, pendant que le gigaku et le gyōdō défilaient masqués dans les temples, le bugaku, syncrétisme shintō-bouddhique, investissait non seulement les temples, mais aussi les sanctuaires et la cour impériale. Il se composait de danses, de chants traditionnels et de musique, à la fois d'inspiration chinoise et japonaise que le shintō avait su véhiculer pendant des siècles. On appelle le spectacle bugaku lorsqu'il est accompagné de danse (bu). Il prend le nom de gagaku lorsqu'il s'agit uniquement de musique.
Le gagaku a emprunté deux voies distinctes : l'une d'origine chinoise de la dynastie des Tang, l'autre japonaise, fut élaborée entre le VIIIe et le XIIe siècle selon les canons chinois. Le spectacle du bugaku se déroule sur une scène d'une cinquantaine de mètres carrés et surélevée de 90 centimètres. Des marches à l'avant et à l'arrière de la scène permettent l'entrée et la sortie des danseurs. Au centre, une plate-forme de 30 centimètres de haut et de 30 m² est réservée aux danseurs, qui se tiennent dans des sortes de loges situées de part et d'autre.
Les sangaku, ou " divertissements variés " ne sont pas des danses sacrées, mais participent aux cérémonies religieuses et ont subi ou, au contraire, influencé les danses rituelles des kagura. Elles se rapprochent plutôt des spectacles de foire en mettant en valeur les acrobaties et les pantomimes qui ont eu une influence considérable sur le théâtre japonais. A partir du Xe siècle, la prononciation du nom sangaku s'altéra pour devenir en japonais sarugaku, c'est-à-dire des " singeries " ou des " pitreries ".
Ce serait une étymologie populaire qui aurait fortuitement relié le sarugaku à une divinité shintō, Saruda-hiko (divinité de la fertilité et de la fécondité, souvent représentée sous la forme d'un singe), et qui en aurait fait l'expression des danses sacrées et rituelles du shintō primitif. Les sarugaku gardaient des similitudes avec les dengaku, danses rituelles autrefois exécutées essentiellement lors du repiquage du riz.
Ce n'est qu'au XIIIe siècle que des moines se spécialisèrent dans le sarugaku-no-nō comme d'autres l'avaient déjà fait à la cour avec les dengaku-no-nō. Le premier demeura cependant plus populaire et resta sous le patronage des temples ou des sanctuaires shintō.
Bien que le nō ait gardé de lointains liens avec la religion bouddhique et les rites shintō, il est avant tout une danse profane. Le nō est devenu peu à peu un objet de recherche et un sujet de polémiques. Certains ont pu y voir des racines étrangères et ont cru y déceler des origines tibétaines ou chinoises. Pourtant, il semble que les origines du nō remontent au kagura. Lors de représentations solennelles de début d'année, dans la " danse du vieillard " est utilisé un masque à mâchoire mobile très proche de ceux des danseurs de kagura.
En 1374, Kan'ami, âgé de 42 ans, est invité par le jeune shōgun avec son fils, Zeami, à la cour, ce qui fait grincer quelques dents. Ces deux prodigieux danseurs, acteurs et auteurs, étaient les fondateurs de l'école des Kanze qui existe encore aujourd'hui.
Kan'ami apprit son art d'un maître de dengaku, Itchū, alors maître d'une troupe de Sarugaku qui venait du Yamato. Chef de la confrérie Yūzaki, Kan'ami sut s'imposer en éliminant peu à peu les autres confréries du Yamato et de la région d'Ōmi qui restèrent confinées à une trop grande affectation ou préciosité.
Il sut faire la synthèse du yūgen (mystère, perception d'un autre monde éloigné) du dengaku et des sources shintō du sarugaku. Le savoir de Kan'ami fut traduit dans les préceptes rédigés par Zeami au début du XVe siècle. Ce fut l'âge d'or du nō. Après le fils de Zeami, Motomasa, mort prématurément, c'est son beau-frère, Zenchiku, qui reprit le flambeau en assurant à la lignée des Kanze, la transmission intégrale du savoir.
Répertoire et structure du nō. Il existe plus de 250 pièces à l'heure actuelle, reconnues et jouées par les cinq écoles qui se distinguent par le choix du répertoire. Toutefois, une unité apparaît dans le choix stratégique et dramatique de ce qui constitue la journée de nō. Il s'agit généralement de cinq pièces, dans lesquelles sont intercalées quatre kyōgen, ou farces. Celles-ci vont intervenir avec une attention et une concentration ascendantes pendant la première moitié du spectacle et viendront se glisser dans une attention décroissante au cours de la deuxième partie. Un tel spectacle dure une bonne dizaine d'heures. Les préceptes de Kan'ami et de Zeami doivent être suivis dans le choix des différentes pièces et dans celui des kyōgen.
Il faut, en effet, que la première pièce ne soit pas trop profonde, afin que le spectateur venu du dehors garde encore l'image du monde quotidien. Il faudra user de subterfuges et de parfums pour le subjuguer, c'est-à-dire lui ouvrir les yeux et les sens par les costumes, la musique, le chant, bref, en l'attirant dans un monde enjoué. Ces pièces font partie des kami-mono sur lesquelles planent des personnages surnaturels censés proférer des paroles de bon augure.
Dans la deuxième pièce, la nature de l'émotion change. On fait appel à des réminiscences, hallucinations fantomatiques de guerriers qui reviennent sans cesse pour affronter des ennemis. Ce seront surtout les otoko-mono (passages masculins), ou des shura-mono (passages infernaux). Ces deuxièmes pièces mettent en scène la passion des fantômes et rien n'est plus fascinant que de voir et d'entendre un fantôme.
La troisième emprunte généralement au répertoire des onna-mono ou des nō de femmes. Des esprits d'héroïnes ou des fées, ou de plantes qui ondulent dans les pensées oniriques peuvent y être vus.
La quatrième pièce appartient au répertoire du nō du monde des réalités, le genzaï-mono. Ce monde s'oppose aux apparitions, fantômes et esprits rôdant dans l'imagination ou surgissant dans le rêve d'un moine. Les héros sont des personnages vivants et se distinguent des esprits et des spectres parce que le protagoniste ne porte plus de masque. Se dévoile alors un monde réaliste, si ce mot a encore un sens ici, car les personnages ont souvent perdu la raison. L'environnement bascule donc d'un monde évanescent, à des situations pathétiques de gens persécutés ou sous l'empire d'une passion et de sentiments exacerbés.
Les spectres et divinités qui peuvent intervenir sont à présent des vraies hallucinations, des montages de déchirements humains et non plus le sombre carnage de vieux rêves vivaces et oubliés, tels qu'ils peuvent être perçus dans les deuxièmes pièces.
Si les sarugaku signifient singeries, les kyōgen veulent dire bouffonneries ou farces. Ce sont des intermèdes qui permettent de tirer le spectateur de l'espèce de transe immobile dans laquelle le nō l'a plongé. Il est de bon ton, pour les spécialistes, de dénigrer le kyōgen et de le ranger dans le registre des arts mineurs. Ils considèrent que les qualités des acteurs de nō ne peuvent être développées chez un acteur de kyōgen. Pourtant, il semblerait que les acteurs aient été au début les mêmes.
La plupart des kyōgen furent sans doute joués pour mettre en valeur les situations burlesques de la vie quotidienne.
Mais le style s'appliquait aussi à se moquer des moines ou des maîtres, ou des domestiques et des paysans. Quelques parodies des grandes pièces classiques font intervenir des spectres masqués, mais la bouffonnerie reste légère, afin de ne pas froisser les grands acteurs.
Les kyōgen obéissent également à une stratégie dans le répertoire. S'y observe le même principe de concentration ascendante et descendante. Pourtant, certaines pièces donnent à penser que quelque chose de plus angoissé pouvait nourrir le kyōgen. Les démons sont moqués, les esprits ridiculisés et la dimension de courage sont perceptibles. C'est peut-être dans le kyōgen qu'il est le plus possible de remonter aux kagura.
L'année même où Ieyasu Tokugawa est nommé shōgun et transporte son bakufu (fief) à Edo, naît le kabuki à Kyōto. La danseuse Okuni exécute en 1603 une danse d'invocation à Bouddha, Nenbutsu Odori. Or, elle porte des pantalons à la portugaise et arbore rosaire et croix chrétienne. En outre, explique Sieffert (spécialiste français de la littérature japonaise), elle revient sur scène, en deuxième partie, en interprétant un rôle de travesti avec des chants et danses kabuki, c'est-à-dire extravagants ou excentriques. Le mot populaire kabuki signifie " exubérant et marginal ". C'est après avoir formé un jeu de mots sur la lecture chinoise des kanjis, qu'il signifia " chanteuses et danseuses ". Puis, après le bannissement des femmes de la scène pour prostitution, le mot prit le sens des kanjis qui le recouvrent, " technique de chant et de danse ".
Le spectacle d'Okuni avait de quoi réveiller quelques ardeurs. Travestie en homme, elle cherchait à négocier les faveurs d'une prostituée dans une maison de plaisir et sortait ensuite d'un établissement de bain à peine vêtue. Personne ne sait si elle était réellement prêtresse d'un sanctuaire, car on avait vu des prêtresses itinérantes, aruki miko, qui se produisaient dans des spectacles de danse et se livraient à la prostitution. Déjà au Moyen Âge, des shira-byōshi, c'est-à-dire des femmes travesties en homme qui, à la faveur des kyōgen ou sarugaku pour femmes, se travestissaient tout en vendant leurs charmes.
Les premières pièces de kabuki subirent également l'influence d'un acteur de kyōgen nommé Sanjūrō. L'amant d'Okuni, le samouraï Sanzaburō Nagoya, serait, selon la légende, l'initiateur des scènes osées ou licencieuses dans lesquelles les travestis interviennent. Si le personnage demeure sujet à caution, la légende raconte qu'après sa mort, en 1604, son fantôme apparut sur scène, comme dans les meilleures pièces de nō, pour danser avec Okuni. Cette apparition entraîna une petite révolution, les deux acteurs se mêlaient aux spectateurs pour assister au spectacle et même répondre à leurs questions, prouvant ici l'étroitesse des liens entre les spectateurs et le kabuki.
Le kabuki s'imposa peu à peu comme le théâtre urbain de la ville basse, tout en introduisant un élément dramatique nouveau et essentiel : le shamisen. Cet instrument de musique, provenant de l'archipel des Ryūkyū est apparenté à la famille des luths. Ce nouvel instrument parvint à la fois à séduire les courtisanes et à ajouter à la parade une touche d'exotisme dont les quartiers de plaisir étaient friands. Les spectacles tenaient de l'invite. Les actrices apparaissaient en tenue suggestive et invitaient les spectateurs à venir les rejoindre après la représentation.
L'attitude du gouvernement shōgunal devant cette nouvelle débauche fut ambiguë, car son objectif n'était pas de réprimer ce comportement, mais au contraire de juguler une nouveauté politique : le mélange des marchands, des guerriers et des aristocrates. Il prétexta des querelles entre ces derniers pour interdire le kabuki féminin en 1629.
Si le kabuki avait toujours été une entreprise de séduction, la venue des mignons sur le devant de la scène provoqua une surdétermination des critères de beauté et de séduction féminins. L'onnagata, c'est-à-dire le rôle de femme assuré par un homme, devint le lieu de la théâtralité du kabuki. Les traits du jeune éphèbe, sa douceur et l'ambiguïté de la finesse de son visage étaient le critère de la féminité. Puis la théâtralité du kabuki s'imposa dans la suggestion et l'effet dramatiques.
La scène subit également de nombreuses transformations et innovations. La récurrence des incendies obligea les architectes et artisans à privilégier la préfabrication des éléments de structure, leur légèreté et leur mobilité. Les éléments éphémères (palissades de bambou, rideau en textile) furent remplacés par des décors en bois, suffisamment rigides pour supporter une charpente, c'est-à-dire un toit qui devint un abri pour les spectateurs de plus en plus nombreux.
De plus, la scène évolua pour souligner ce qui faisait dès le début la spécificité du kabuki, c'est-à-dire l'interpénétration des espaces. Plus tard, cette pénétration fut encore plus mise en valeur par l'hanamichi (le chemin des fleurs) qui traversait la salle en entier, afin de mêler acteurs et spectateurs. C'est également à cette époque que fut inventé le rideau comme élément dramatique et suspensif de la scène.
Le bunraku s'appelle en fait le ningyō-jōruri. Lorsque les Sangaku arrivent au Japon via la Chine et la Corée au VIIe siècle, il devait y avoir dans les troupes nomades des kugutsu-mawashi, ou montreurs de kugutsu (marionnettes). Ils manipulaient à l'aide de fils, des poupées faites en bois ou en terre cuite.
C'est pendant la période Kamakura que les kugutsu-mawashi sont utilisés afin d'illustrer les propagandes religieuses. Ces marionnettes servent à raconter la vie du Bouddha, mais également des récits de miracles. Cette nouvelle technique est le soutien essentiel à l'amidisme (forme de bouddhisme qui s'appuie sur la présence d'Amida). Par la suite, les poupées ont servi pour illustrer des récits profanes et épiques, déjà diffusés depuis le XIIIe siècle par des conteurs accompagnés du biwa (luth à quatre cordes). Les récitants sont pour la plupart des aveugles habillés en moine. Les spectateurs réclamant de nouvelles histoires, les récitants imaginent alors de nouveaux épisodes, éloignés de la réalité, mais qui ont le don de captiver le spectateur.
Au XVIe siècle, est écrite une compilation historique, sorte de roman épique, intitulée Histoire en 12 parties de la demoiselle Jōruri, qui raconte la préparation de la vengeance des Minamoto envers les Taïra. Le roman connaît un tel succès que, par la suite, tout drame épique prend le nom de jōruri. Les récitants décident alors de soumettre la marionnette aux fantasmes de l'histoire. Les marionnettes à gaines font leur apparition, et le shamisen accompagne ces nouveaux spectacles. La grande particularité du ningyō-jōruri tient à une innovation : Bunzaburō Yoshida décide, vers 1730, de faire animer les marionnettes par trois personnes.
Au milieu, le maître (sensei) est juché sur des geta et actionne par le bras gauche la tête, les yeux, la bouche et même les cils de la poupée par un axe en bois sur lequel se fixent des leviers. Du bras droit, il manipule le bras droit de la poupée. Le premier assistant manipule la main gauche et le second les jambes et les pieds de la poupée. L'art de la synchronisation dans le jeu des manipulateurs et dans l'art de la suggestion, est fort appréciable. Le répertoire implique que les manipulateurs portent une cagoule dans les pièces dites de moeurs alors qu'ils officient tête nue dans les pièces historiques.
Les pièces sont souvent des récits dialogués et entrecoupés de parties musicales, tantôt jouées au shamisen, tantôt au koto (instrument de musique à cordes pincées).
Depuis plus d'un siècle, le Japon se distingue pour la qualité de ses auteurs, souvent primés, et des textes d'une grande beauté. En matière de littérature moderne, le Japon est l'un des pays les plus productifs, et encore de nos jours, les auteurs japonais connaissent un immense et mérité succès international. Un voyage au Japon est une excellente occasion de découvrir les innombrables auteurs, et de découvrir les univers qu'ils décrivent.
C'est à la fin du XIXe siècle que Shōyō Tsubouchi (1859-1935) écrit un essai sur la nature du roman. Il tente de définir un art du roman à partir des grandes oeuvres littéraires européennes des XVIIIe et XIXe siècles. Il choisit de mettre l'accent sur l'écrivain en soulignant son implication dans le monde des désirs et des sentiments. C'est la première tentative de théorie du roman. Pendant ce temps, le Japon découvre les grands écrivains européens grâce à l'essor de la traduction. Peu à peu, une littérature bourgeoise et une littérature sociale avec des romans noirs prennent place. Les écrivains subissent l'influence de plusieurs écoles, dont le naturalisme français, et, entre 1900 et 1920, on assiste à l'explosion de récits autobiographiques et à l'affirmation d'une écriture fondée sur l'expérience du sujet.
Deux écrivains marquèrent cette période : Shimei Futabatei et Ōgaï Mori. Sono omokage (Son ombre), et Heibon (Quelconque), datent de 1906. S'y détachent la maîtrise d'une nouvelle langue. Ogaï Mori publie Vita sexualis en 1909, Seinen (Le jeune homme) en 1911, et, en 1915, Oie sauvage. Il achève son oeuvre en publiant des récits historiques de l'époque Edo. Natsume Soseki se distingue également avec Je suis un chat (1905) et son très populaire roman Botchan (1906) dans lequel il dépeint une société partagée entre traditions et modernité. Encore de nos jours, ce roman est l'un des plus lus au Japon, et la magnifique adaptation en manga de Jiro Taniguchi Au temps de Botchan (5 volumes) a également connu un immense succès.
Créé en 1925, ce mouvement attire un certain nombre d'écrivains qui reçoivent à la fois la vision du cinéma et la violence des idées. Yasunari Kawabata publie les Romans miniatures alors que Toshikazu Koshimitsu écrit Machines. Il faut rappeler que Yasunari Kawabata, mort en 1972, a reçu le prix Nobel de littérature, et ses oeuvres se distinguent par les descriptions de Kyōto. Son ultime roman publié en 1965, Tristesse et beauté, est un chef-d'oeuvre, au même titre que Pays de neige, Le grondement de la montagne ou Les belles endormies. Sa correspondance avec Yukio Mishima est aussi une oeuvre majeure. Parmi les auteurs de cette période, on note également Junichiro Tanizaki (mort en 1965) et ses descriptions à la fois ironiques et cruelles de la société, comme dans Svastika, Le chat, son maître et ses deux maîtresses, La confession impudique, ou encore Eloge de l'ombre.
C'est dans le contexte de la crise de 1929 et de la montée du nationalisme japonais que la littérature prolétarienne surgit avec les romans de Sunao Tokunaga, Taiyō no nai machi (Le quartier sans soleil) racontant l'histoire d'une grève qui tourne court dans la ville de Tōkyō.
Se développent alors le sentiment de l'injustice et la dénonciation des conditions de travail dans les usines. La répression se fait aussi plus forte à l'encontre des écrivains. Plusieurs sont emprisonnés.
Masuji Ibuse relate avec une grande précision, en mêlant subtilement la réalité et la fiction, le naufrage de la vie moderne déguisé dans son roman Usaburō (Le Naufragé), édité en 1955. Les années de guerre et leur fin tragique ont bouleversé le paysage littéraire et la société japonaise, et le roman d'Osamu Dazai La déchéance d'un homme (1948) décrit parfaitement cette période. Alors que les Américains occupent le pays, quelques romanciers se tournent vers la modernité. Pièces de théâtre, radio et médias deviennent incontournables pour mettre en valeur l'espoir et la tourmente de ces années.
Yukio Mishima apparaît vite comme l'écrivain de la nouvelle génération d'après-guerre. Les romans Confession d'un masque et Le Pavillon d'or le portent sur le devant de la scène alors qu'il crée un mouvement extrémiste de droite, une sorte de secte militariste qui promeut les valeurs d'un Japon éternel dicté par la voie des bushi (chevaliers en armure). Il se fera seppuku (suicide rituel) le 25 novembre 1970, publiquement, en demandant à son amant de lui décoller la tête, ce que ce dernier réalisera dans un acte manqué d'une étonnante boucherie. Le jour de sa mort, Mishima posta à son éditeur son roman L'ange en décomposition, qui clôture sa tétralogie La mer de la fertilité, réflexion admirable sur le Japon moderne. L'hommage de Marguerite Yourcenar à l'écrivain, Mishima ou la vision du vide, est également un texte magnifique.
Ces quarante et quelques dernières années ont vu l'émergence de quelques écrivains historiques, comme Ryōtarō Shiba avec de nombreux romans très précis qui retracent le parcours du Japon depuis Meiji (Saka no ue no kumo, Nuage au-dessus de la montée, pour le conflit nippo-russe par exemple), poétiques comme Machi Tawara avec Salada kinenbi (Jour anniversaire de la salade, publié en 1987, ce recueil de poèmes tanka en langue contemporaine se vend à deux millions d'exemplaires) ou des romans qui ramènent à une certaine nostalgie du coeur des choses par Hiroyuki Itsuki (une multitude d'oeuvres qui décrivent les problèmes des Japonais dans leurs attitudes mentales). Suite à une émission de la Compagnie de diffusion du Japon (NHK) sur la route de la soie, tout ce qui touche à ce sujet a eu ses heures de gloire durant cette période.
Prix Nobel de littérature en 1994, Kenzaburo Oe est l'un des auteurs récents les plus célèbres dans le monde. Ses descriptions de la vie à la campagne et de l'éducation d'un enfant handicapé (son propre fils) sont omniprésentes dans ses oeuvres, dont on retient Dites-nous comment survivre à notre folie, Le jeu du siècle ou Une existence tranquille. Son recueil d'essais Notes d'Hiroshima, sur les survivants de la bombe atomique, est également une des oeuvres majeures de ce militant de la démocratie et de l'abandon du nucléaire. On remarque également l'univers mystérieux d'Abe Kobo, notamment La femme des sables (1962).
Parmi les auteurs actuels, on remarque une tendance à un style incisif, qu'on retrouve chez Banana Yoshimoto (Kitchen), ou Ryu Murakami et son univers inquiétant dans Les bébés de la consigne automatique, Miso soup ou Parasites. Né en 1949, Haruki Murakami, souvent cité comme nobélisable, a publié des oeuvres à grand succès comme La ballade de l'impossible, Kafka sur le rivage ou le best-seller international 1Q84 (hommage à Orwell, 1984 et 1Q84 se prononçant de la même manière en japonais). Ses descriptions de la société ne sont pas sans rappeler les romans de Soseki.
A noter bien entendu dans un tout autre style, les autres formes d'expression comme les mangas qui prennent une ampleur accrue avec des techniques de plus en plus évoluées, ainsi que les dessins animés. Le manga, équivalent de la bande dessinée, est trop souvent considéré comme un art mineur, où violence et sexualité sont exacerbées au service d'un public adolescent. Il n'en est rien. L'immense production de mangas recèle des trésors, désormais traduits en français, et qui sont des incontournables. Osamu Tezuka (mort en 1981) est le véritable père du manga. Médecin de formation, ce travailleur acharné et admirateur de Disney a laissé derrière lui une oeuvre impressionnante d'ouvrages pour jeunes (notamment Astro Boy) mais aussi pour adultes, avec des chefs-d'oeuvre tels que Histoire des trois Adolf, Barbara, ou son immense Histoire de Bouddha en huit volumes. On retient également de lui Black Jack, le médecin génial et atypique, et une multitude d'autres oeuvres qui ont marqué plusieurs générations et furent en partie adaptées en dessins animés par Tezuka lui-même. De nos jours, le festival d'Angoulême est l'occasion de découvrir les artistes japonais, souvent primés, comme Yoshiharu Tsuge (L'homme sans talent), Naoki Urasawa (Monster) et surtout le très populaire Jiro Taniguchi (notamment Le sommet des dieux, Au temps de Botchan, Quartier lointain). Loin des clichés du manga, ces oeuvres sont majeures. L'ouvrage de Jean-Marie Bouissou, Manga, histoire et univers de la bande dessinée japonaise (ed. Philippe Picquier) et une mine d'informations sur cet art trop longtemps sous-estimé, est son impact sur la société japonaise.
Tout à l'ouest de la préfecture de Tottori, la ville de Sakaiminato pour honorer son plus illustre citoyen, Shigeru Mizuki, créateur de Kitarō et des yōkais, ces esprits naturels issus du folklore japonais, a paré ses plus belles artères de statues représentant les étranges créatures du manga. Les taxis arborent fièrement sur leurs toits le gros oeil à patte, (c'est le père de Kitarō), les produits dérivés les plus improbables garnissent les étals de nombreuses échoppes, l'aéroport de Yonago a lui-même été rebaptisé officieusement aéroport Kitarō, et il n'est pas rare de tomber nez à nez, au coin d'une rue, sur un de ces héros en personne. Hokuei, ville plus à l'ouest, a elle aussi son mangaka illustre, en la personne de Yoshimasa Aoyama, papa du petit Conan. Tout comme Sakaiminato, la petite cité possède de nombreux bronzes de personnages de la bd disséminés un peu partout, une gare et des trains décorés aux couleurs du célèbre détective, un musée, le Gosho Aoyama Manga Factory, pendant du Mizuki Shigeru Museum, dédié à Kitarō... Et si vous n'êtes pas rassasié, une autre destination, Kurayoshi, tout aussi pittoresque vous attend plus au sud. Les lecteurs de Quartier lointain du dessinateur Jirō Taniguchi, primé au Festival d'Angoulême, reconnaitront sans peine les rues médiévales et les sites les plus emblématiques de la saga. Ces trois villes organisent des parcours ludiques qui raviront petits et grands !
Les instruments de musique anciens sont nombreux : la longue cithare couchée à cinq cordes (koto), la flûte sphérique en pierre (okarina), le tambour à caisse cylindrique (tsuzumi), la cloche et la crécelle (suzu) et la cloche de bronze (nuride). Du VIIe au Xe siècle, un stade d'organisation supérieur de la société est instauré et contrôlé par un gouvernement qui établit des liens avec ses voisins géants. La musique en est influencée. A l'époque Asuka (592-628) est introduit le bouddhisme associé aux danses rituelles avec masques (gagaku). Véhicule de la transmission d'une sagesse, la musique est reine. L'empereur Mommu (697-707) crée un ministère de la Musique, Gagaku-ryō. L'acculturation se poursuit à l'époque Nara (710-793). Par la musique chinoise de la dynastie T'ang, les musiques de l'Inde, de la Perse, de l'Asie centrale pénètrent le Japon.
On appelait Gagaku, la musique rituelle chinoise liée au confucianisme. Elle assimile vite la musique japonaise liée au shintō. La musique Gagaku est pratiquée à la cour et dans les temples. Les 75 instruments qui sont utilisés lors de la cérémonie pour l'érection de la statue colossale de Bouddha (752) dans le temple Tōdaï-ji sont conservés dans le trésor impérial du Shō-sō-in, à Nara : six sortes de cithares, trois sortes de luths, harpes angulaires, flûtes droites, flûtes traversières, flûtes de Pan, deux sortes d'orgues de poche, deux sortes de tambourins sabliers et des carillons de gong.
Cette musique gagne la faveur des aristocrates et des fonctionnaires par l'introduction de la psalmodie bouddhiste shōmyō, originaire de l'Inde. C'est dans le shōmyō, chant et liturgie bouddhiques, que se constitue une unité fondamentale, la cellule mélodique.
Ces différents emprunts ont conduit la musique japonaise à une simplification et une harmonisation. Il existe deux modes : le majeur (sempo) et le mineur (insempo). La musique du Gagaku utilise six intervalles et suit la gamme pentatonique chinoise.
Pendant la période Heian, la culture musicale joue un rôle aussi important que la calligraphie et la poésie. A la flûte répond le koto féminin. La période Kamakura voit alors se développer l'art du biwa (luth) en même temps que les chants bouddhiques, renforcés par le développement des sectes Shingon et Tendaï.
Au haut Moyen Age (XIe-XVIe siècle) s'épanouirent des musiques dites rustiques (Dengaku, composée principalement de musique et de danse) et dites éparses (Sangaku, beaucoup plus ludique avec farces, imitations, effets hallucinatoires, marionnettes).
La vraie musique japonaise doit attendre l'époque Edo pour prendre toute sa dimension, avec l'arrivée du shamisen (instrument à cordes pincées) en 1562. Une certaine unité des instruments se développe avec le koto, la harpe horizontale, le luth biwa et la flûte de bambou shakuhachi, d'origine chinoise. Tandis que se développent les musiques de koto dites sōkyoku dans le Kyūshū, dans le Kansaï s'épanouissaient les chants accompagnés du shamisen ou ji-uta qui va suivre la prodigieuse aventure du kabuki. Celui-ci prend peu à peu le pas sur le théâtre de marionnettes bunraku (ningyō jōruri) et lui emprunte sa musique, désormais composée d'un corps de shamisen et de tambours.
Ces shamisens ont sans doute été imposés par la dimension de la scène et le volume de la salle. Le jeu instrumental a accentué le caractère binaire du rythme.
Tous les genres musicaux de l'époque moderne ont conservé les tempi élastiques de l'époque médiévale.
Musique actuelle. A Tōkyō aujourd'hui, tous les styles occidentaux modernes semblent avoir trouvé leur traduction au pays du Soleil Levant. Rap, rock, pop, variété... beaucoup de genres sont copiés. La musique est très présente dans le quotidien des Tokyoïtes. Elle se fait entendre partout, que ce soit dans les halls d'hôtels, les centres commerciaux, les taxis et bien entendu, dans les immenses karaokés de la capitale nippone... Pour l'étranger, la musique de la rue se confondra peut-être avec les publicités omniprésentes.
Les peintres vont illustrer non seulement la vie des religieux mais aussi celle des grands personnages, ainsi que les romans de la cour impériale. Des familles de peintres qui gardent leur propre style se démarquent. Un nouveau style de peinture monochrome, fondée sur le lavis, voit le jour. Elle prendra réellement son élan durant la période Muromachi.
Sous le régime des Ashikaga, le portrait prend de l'importance. Le visage est privilégié tandis que le vêtement est traité d'une manière plus sommaire. Puis, le demi corps est choisi selon la technique Zen.
Enfin, la représentation du paysage s'impose alors que la plupart des peintres sont en même temps calligraphes. Les supports de soie ou de papier impliquent à la fois une grande sûreté du trait et la maîtrise du geste des calligraphes, qui connaissent la technique d'absorption du papier.
Le moine Sesshū parvient à utiliser le mouvement lyrique des Song en lui donnant un style proprement japonais. La composition, souvent de droite à gauche et de bas en haut, met en valeur les masses noires et la dilution progressive des noirs. Cette époque voit également la prédominance de l'école Kanō. Le plus influent, Motonobu, mêle habilement des lavis légers et transparents à de larges lavis d'encre.
C'est une période où le pouvoir est puissant. L'école Kanō continue à décorer les résidences et les palais, notamment Eitoku Kanō, qui entreprend la décoration de la résidence de Hideyoshi Toyotomi. Les Ming chinois sont aussi très influents. C'est à cette époque que les Japonais découvrent la peinture à l'huile, avec une Vierge apportée par François-Xavier.
Les Kanō sont assurés de la protection officielle shōgunale. Le maître Tan-yu décore les sépultures de Nikkō et les mausolées du parc Shiba, à Edo, pour le compte des Tokugawa. Il décore également le palais impérial à Kyōto. La célèbre peinture du Tigre dans les bambous se trouve au Nan Zen-ji, à Kyōto.
Le peintre Kōetsu Honami tire parti de l'influence des Kanō et des Tosa pour entreprendre la peinture de paravents aux fleurs, à la fois simples, stylisés et hauts en couleurs. On utilise maintenant les lavis de couleur. C'est également pendant la période Edo que se développe l'estampe. Une école de peintres se forme autour de l'ukiyo-e ou peinture du monde flottant, qui signifie à la fois peinture du monde éphémère et peinture à la mode. Ces peintres deviennent peu à peu graveurs. Ces gravures sur bois permettaient de produire à petits prix la représentation des plaisirs de la ville par une nouvelle classe sociale. On peint et grave les courtisanes, les scènes de la vie quotidienne, les acteurs de kabuki. Peu à peu, les sujets se multiplient et on voit des paysages, des animaux, des fleurs, etc. Matabei Iwasa fut l'un des plus grands du genre. A partir de 1765 apparaît l'estampe polychrome avec ses grands maîtres : Harunobu Suzuki et Kiyonaga Torii, puis Utamaro Kitagawa, et enfin Hokusaï Katsushika et Hiroshige Andō, ces deux derniers étant des maîtres paysagistes.
La naissance de la peinture, dite contemporaine, au Japon, date du XVIIIe siècle. Elle fait appel, curieusement pour un pays jusqu'alors isolé, aux influences étrangères, et tout particulièrement chinoise, qui atteignent le Japon d'alors, par les îles Ryūkyū et Nagasaki. L'espace pictural est bouleversé par la présence des Hollandais à Nagasaki, qui introduisent les lois de la perspective. Alors que la découverte de ces différentes techniques ne joue qu'un rôle encore superficiel, la peinture est partagée entre deux tendances : l'une réaliste et l'autre plus idéaliste. La première, qu'on désigne souvent comme l'école Shijō-Maruyama, à cause d'un artiste nommé Ōkyo Maruyama (1733-1795), applique aux paysages chinois des procédés venus de l'Occident. Il oscille entre un style très méticuleux, qu'il applique aux oeuvres de petites dimensions, et un style décoratif sur des toiles plus importantes. Quant à Goshun (Gekkei Matsumura, 1752-1811), fondateur de l'école Shijō, il subit l'influence de Buson Yusa pour l'art des haïkus. On distingue deux périodes distinctes chez Goshun. La première directement issue de la domination du style de Buson Yusa, la seconde marquée par un retour vers Ōkyo Maruyama. Dans le Héron bleu avec hibiscus, se laissent admirer les caractéristiques de Buson, et dans ses dernières oeuvres, comme les Pruniers en fleurs, un retour vers la technique monochrome chère à Ōkyo. La tendance plus réaliste se développe dans l'école des bunjin (lettrés). Ce sont des intellectuels qui subirent l'influence confucianiste. La peinture imite l'art chinois avec une touche spécifiquement Zen. Cette école, plus connue sous le nom d'école Nanga, fait appel aux qualités d'une peinture aristocratique plus qu'à un style particulier. Il s'agit d'affirmer la noblesse des sentiments, les états d'âme et la position sociale. Savants, hommes d'affaires ou médecins vont rivaliser pour exprimer leur culture et leurs sentiments. Ils emploient alors une calligraphie précieuse et essaient d'imposer une poésie délicate et silencieuse.
L'ouverture sur l'Occident à partir de 1868 provoque un engouement pour les méthodes européennes, et particulièrement pour la peinture à l'huile. Si le style évolue, il peine à s'affranchir des maîtres qu'il imite. C'est pour tenter une nouvelle voie, entre la technique occidentale et la tradition japonaise, que se dessine une nouvelle peinture, dite nihonga ou peinture japonaise, dans laquelle se glissent diverses influences, notamment celle des Kanō, Tosa, Kōrin, etc. C'est grâce à Ernest Fenellosa (1853-1908) ou Fenerōsa, sociologue américain élève des Beaux-Arts à Boston, que fut créée l'Université des Beaux-Arts de Tōkyō.
L'huile devient la technique la plus importante. Les recherches se multiplient. Certains reviennent au yamato-e (images du Yamato = Japon), d'autres aux sources chinoises, d'autres au style du suiboku-ga. De ces différentes voies n'émerge aucun style particulier.
La peinture reste, jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, attachée aux courants littéraires. Les peintres les plus représentatifs de cette période sont Tsuguharu Fujita, Meiji Hashimoto, ou Kokei Kobayashi. Beaucoup de peintres japonais du XXe siècle viennent chercher l'inspiration en Europe et aux Etats-Unis.
Si l'art abstrait s'impose, il reste néanmoins encore sous l'influence directe de Paris et de New York.
Il serait plus exact de parler de xylographie, qui permet de reproduire à la fois les images et les textes. Ce que les Occidentaux appellent communément " estampes ", n'est qu'une partie de la xylographie qui se développe surtout à l'époque Edo et qui se nomme ukiyo-e, ou images du monde flottant.
Le dessin est d'abord gravé sur un bloc de bois, avant d'être imprimé sur une feuille de papier. Une sélection rigoureuse du bois est nécessaire. Jusqu'à la période Edo, le catalpa (azusa) et le cyprès (hinoki), sont essentiellement choisis pour être représentés, mais pendant cette période, les graveurs préférèrent le cerisier (yamazakura), mieux adapté à la gravure.
Une fois les blocs poncés, ils sont mis sous presse afin de leur garantir une parfaite horizontalité. Le graveur prend ensuite le papier sur lequel est dessiné le motif, le portrait ou le paysage, puis l'imprègne de colle de riz et pose le verso sur le bloc de bois. Afin de le rendre transparent, il le badigeonne d'huile de chanvre et le tracé apparaît nettement. Il peut alors commencer la gravure à même le bois.
Quant à l'imprimeur, il humidifie les feuilles de papier et les enduit de colle de riz. Ensuite, il étale l'encre avec un tampon (baren) et presse la feuille sur le bois gravé afin d'obtenir l'image encrée (sumizuri-e) en noir et blanc. Plus tard, les exigences de la vie urbaine entraînent la technique de l'estampe vers la couleur. Jusqu'au XVIIIe siècle, des poudres semblables à celles des laques (or, argent, cuivre) sont utilisées. Elles garantissent un résultat d'une grande beauté, mais qui coûtaient fort cher pour le tirage de masse souhaité par les imprimeurs et éditeurs. Les plus célèbres des artistes de l'ukiyo-e sont Utamaro, Hokusaï, Hiroshige, Sharaku, Eisen, Eishi ou encore Kiyonaga.
Les amateurs d'estampes japonaises en Europe font souvent référence aux estampes érotiques, qui ont eu la gloire de venir en bonne place dans l'histoire de la séduction. Il faut alors se souvenir de la fameuse phrase du séducteur impénitent qui demande à la personne convoitée : " Venez chez moi, je vous montrerai mes estampes japonaises. " Il s'agit des shunga, ce qui signifie " images du printemps ", les estampes à sujet érotique. On les appelle également makura-e, " images sous l'oreiller ", ou higa, " images secrètes ".
Ces estampes furent l'expression d'une nouvelle culture urbaine qui se développa tout d'abord dans le Kansaï, à Kyōto et Ōsaka, puis à Edo (aujourd'hui Tōkyō), et qui intéressait à la fois les commerçants et les artisans, les samouraïs en mal de guerre et les artistes, acteurs et peintres, d'où le nom de chōnin bunka, ou " culture bourgeoise ". Cette culture fait référence à l'ukiyo-e, qui rappelle la fragilité de toute chose et la volonté de jouir des choses de la vie.
L'art des estampes érotiques, ou shunga, suit d'ailleurs la littérature dite sensuelle de cette époque, allégrement représentée par les romans de Saikaku Ihara ou de Kiseki Ejima. Les shunga illustrent les romans un peu lestes et les guides du monde flottant en mettant en situation telle maison de plaisir et telle prostituée plutôt qu'une autre. Les origines des shunga restent empreintes de la volonté d'exprimer le naturel de la relation physique selon les croyances shintō, dégagées de toute pudeur de type judéo-chrétien. Les shunga participent d'une certaine façon à l'éducation sexuelle des amants et des futurs mariés. Les principaux artistes furent Settei Tsukioka, Harunobu Suzuki, Kyosen Kikurensha, Koryūsaï Isoda, Shigemasa Kitao et, bien sûr, Utamaro Kitagawa, Kunisada Utagawa et son élève Kunimarō, enfin Hiroshige Andō.
La matière urushi est tirée de la sève d'un arbre (Rhus vernicifera). Le laque, c'est-à-dire l'art de préparer et d'utiliser la laque, est connu dans toute l'Asie, mais c'est au Japon que cet art s'est épanoui depuis plus de 2 000 ans. Des objets en laque de la période Jōmon tardif et des peignes dans les kofun (monuments funéraires), ont été retrouvés.
De nombreux décors bouddhiques sont recouverts d'une laque colorée, et les sanctuaires portatifs sont souvent peints de laque noire. L'époque Heian a vu s'épanouir l'art de la laque. La cour encourageait alors chaque famille à entretenir et planter un arbre dans chaque parcelle de terrain. La technique du maki-e, qui consiste à saupoudrer d'or, d'argent ou de cuivre la laque liquide, prévalut et s'affranchit des techniques ancestrales. Jusqu'au Xe siècle, si la technique était largement autochtone, les motifs empruntaient les formes et dessins chinois. À la fin de l'époque Heian, le laque décorait paravents et objets usuels, mais également certains éléments de structure des temples (piliers et poutres).
A l'époque Kamakura, avec la décoration d'objets de plus grande taille et des incrustations de nacre apparues depuis longtemps, le travail du laque en relief se développa. Les shōguns portaient une grande admiration aux produits et objets d'art venus de Chine. La période Kamakura vit donc s'épanouir de nouvelles techniques mâtinées de savoir-faire des dynasties Song et Ming. Les laques s'exportaient fort bien vers la Corée et la Chine. L'arrivée des Portugais au XVIe siècle fournit un nouveau marché. On se mit à laquer des coffres de voyage, des boîtes à hosties et de la vaisselle.
Parmi tous les arts majeurs, la sculpture est probablement celui qui aura le moins influencé la tradition japonaise. Au pays du Soleil Levant, la plus grande partie des sculptures est très liée à la tradition bouddhique. Il faut cependant distinguer les artistes de l'école Unkei à la fin du XIIe siècle. Ils contribuèrent beaucoup à l'élévation de cet art au Japon, affinant largement les traits des oeuvres, par rapport à ce qui pouvait se faire avant eux. Leurs plus belles représentations se trouvent à Nara.
Dans le Japon moderne et tout particulièrement à Tōkyō de nombreuses statues ou autres monuments sculptés ont dessiné le paysage urbain. Ils restent très largement influencés par des techniques occidentales.
Jardin de style shinden. Jardin avec lac, pavillons de pêche et de printemps pour le seul plaisir des divertissements de l'aristocratie. Il n'en reste que peu d'authentiques exemples.
Jardin de paradis. Le style des jardins de la fin de la période Heian et de celle de Kamakura. Le pavillon représente le palais d'Amida et le lac, l'océan de l'Ouest.
Jardin Zen. Ce sont des jardins dessinés pour la pratique de la méditation. Les premiers styles mettent l'accent sur le terrain et les rochers proprement dits. Puis les jardins secs (karesansui) offrent une plus grande détermination en choisissant les rochers et le gravier comme des représentations de l'encre de la calligraphie, comme si le jardin était une description mentale de la méditation. Il s'agit généralement d'un jardin prisonnier d'un rectangle fermé par un mur sur trois côtés, le quatrième donnant sur une véranda.
Jardin de thé (roji). Il s'agit plutôt de l'aménagement du chemin qui mène au pavillon de thé, le roji.
L'art des jardins reste l'une des techniques les plus étonnantes de la sensibilité esthétique japonaise. Bien qu'importé de la Chine via la Corée, certainement en même temps que le bouddhisme et l'écriture chinoise, l'art des jardins a évolué au cours des siècles. En aucun cas, il ne s'agit d'un jardin comme il peut être conçu en Europe. C'est plutôt le fruit d'une perception de la (pré-) nature.
Il s'agit d'une mise à l'échelle de la nature environnante, ou d'un monde religieux où flotterait l'harmonie des choses. Cette technique se développe durant la période Heian mais à part quelques vestiges, dont le célèbre Jōruri-ji à Nara, le Byōdō-in à Uji près de Kyōto, ou encore le Mōtsū-ji à Hiraizumi, le style shinden et les jardins du paradis amidistes n'ont pas vraiment survécu au temps. Les plans du jardin s'intègrent au plan de masse et aux demeures construites dans l'environnement immédiat. Un certain nombre de lois, comme la présence d'un étang et des collines artificielles, doit être respecté, le tout correspondant à une miniaturisation de la nature. Le bâtiment principal est orienté vers le sud, et entre celui-ci et le jardin se trouve un espace dégagé et situé au sud de la propriété, planté de pruniers, de cerisiers, de mûriers, de saules, d'érables et de pins devant vraisemblablement impliquer un symbolisme des saisons. Le jardin, selon les règles de la géomancie chinoise (ommyōdō), doit être traversé par un ruisseau qui coule du nord-ouest au sud-est. Il alimente en eau pure un petit étang dans lequel sont immergés quelques rochers reliés par des ponts en bois ou en pierre. Il prend alors une valeur poétique, puisque sur ses bords sont construits des pavillons de contemplation ou de pêche. La surface calme et virtuelle de l'eau permet la réflexion de la lune comme si elle venait de l'intérieur. Ces différents pavillons sont reliés au bâtiment principal par des corridors (tai no ya). Les seules images qui soient parvenues à atteindre le XXIe siècle, sont dessinées sur des emakimono. Tout est codifié : le nombre, l'implantation des pierres, leur éventuel axe de symétrie, et surtout les formes dégagées comme représentations bénéfiques ou maléfiques de l'espace.
C'est à partir de l'époque Kamakura et durant la période Muromachi que l'art du jardin se modifia au contact de la philosophie Zen. Le jardin devient un lieu de méditation. L'exemple du jardin du Saihō-ji à Kyōto, créé au XIVe siècle par Kokushi Muso (1276-1351), est révélateur. On assiste à une sorte de renversement vertical symbolique. Le bas du jardin est composé d'arbres, de mousses, d'un étang et d'un pavillon, alors que le haut, le monde éthéré de la méditation, est représenté par un jardin sec. C'est à l'époque Muromachi que le jardin va prendre toute son ampleur.
L'architecture est épurée avec les constructions du Kinkaku-ji, du Ginkaku-ji et du Daitoku-ji. La vision du jardin est rendue plus mobile, ce qui paraît être un paradoxe, que relève l'enseignement du Zen. C'est en multipliant les points de vue, les kōan (énigmes du Zen), que le satori peut être atteint.
Au cours de la période Momoyama, s'affrontent deux types de jardins. Les premiers, aristocratiques, sont conçus comme symbole du pouvoir. Ils trahissent l'ambition, la force et l'abondance. Les seconds, au contraire, mobilisent une esthétique du détachement, et permettent d'envisager une esthétique bâtie sur la rareté et la justesse du geste.
Le jardin de Katsura inaugure une nouvelle conception, il devient un jardin conçu selon une progression de la découverte des essences et des sensations. Il devient jardin de promenade. Les participants marchent le long de plusieurs sentiers et découvrent, au hasard des pavillons, des nouveaux points d'observation ou des impressions. L'architecture moderne fait largement appel aux conceptions de l'art du jardin. Compte tenu de la raréfaction de l'espace, les petits jardins trouvent tout naturellement leur place dans le gigantisme urbain, tout particulièrement à Tōkyō.
L'ikebana, ou l'art de l'arrangement floral, est certainement d'origine bouddhique. Il est également appelé le ka-dō, ou " voie des fleurs ". Son essor date de la période Muromachi (1333-1573), mais l'art d'offrir des fleurs aux divinités remonte aux cultes indiens. Lors du développement du bouddhisme au Japon, les fleurs faisaient déjà l'objet d'une pratique rituelle, mais c'est l'épanouissement du bouddhisme Zen qui a soumis l'ikebana aux codes stricts des maîtres de thé. Pendant la période Muromachi, les maîtres de thé créent des écoles pour codifier cet art et le soumettre à une discipline esthétique. Il s'agit de mettre en harmonie la simplicité et la rusticité des supports (vases et plats) avec la nature profonde des matériaux et des textures. Si dans le tokonoma (petite alcôve), un vase accueille un ikebana savamment disposé, on évitera de mettre en valeur sur le mur de l'alcôve un rouleau représentant des fleurs. L'une des écoles les plus anciennes fut celle de l'ikenobō, dont il est dit qu'elle remonte au VIIe siècle, lorsque le moine Ono no Imoko revint de Chine. La fondation d'un véritable art codé date de 1462, date à laquelle Sengy aurait fondé le style rikka. Il s'agit de faire renaître l'élan vital des fleurs en les arrangeant et suivant un plan triangulaire qui permette aux tiges de longueur inégale, toujours en nombre impair, de garder un rythme qui rappelle ou évoque la nature. La plus haute représente le ciel, celle du milieu symbolise l'humain, tandis que la plus basse incarne la terre. La symétrie et le croisement de branches ne sont pas tolérés. Dans le style rikka, cinq ou sept branches, dont le sommet garde un nom différent selon sa position spatiale, sont choisies. Le sommet (ryō) se nomme shin à droite et yō à gauche. Les autres tiges prendront le nom de colline à droite ou de vallée à gauche. Des systèmes de proportions mettent en harmonie la hauteur des tiges, celle du vase et le diamètre du plat. La branche rikka s'impose dès le XVe siècle, mais de nombreuses écoles rivalisent par la suite. Ainsi le nage-ire s'impose-t-il pour la cérémonie du thé au XVIe siècle. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, des styles fleurissent dans le monde flottant, plus directement bourgeois, et se soumettent aux nouveaux codes esthétiques de l'urbanité naissante. Ainsi le style shōka, qui séduit tout particulièrement les marchands, ou style chōnin, prend son essor à Kyōto comme à Edo. La technique, une paire de ciseaux à lames courtes munis de longues poignées, un couteau et parfois une scie pour les branchages. Les pique-fleurs, qui permettent de fixer les tiges et d'animer la pureté des lignes, sont utilisés. Durant l'ère Meiji, un nouveau style, le moribana, créé par Unshin Ohara, fait appel à la technique des fleurs jonchées sur des plats, en utilisant des fleurs venant de pays étrangers qui permettent ainsi un plus grand jeu de couleurs. Naissent alors les écoles Teshigahara et Sōgetsu, et l'essor des styles dits libres. Plus de 3 000 écoles d'arrangement floral sont recensées, et cet art s'exporte dans tous les pays du monde.
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