Guide de DAKAR : Arts et culture
Festival mondial des arts nègres, biennale d'art contemporain devenue très classique, Saint-Louis Jazz Festival, Rencontres cinématographiques de Dakar (RECIDAK)...
On a toujours eu les idées larges, l'esprit ouvert, l'oeil vif, la main habile du côté de chez monsieur l'artiste sénégalais.
Un plongeon dans l'histoire remet en question l'évidence. A l'inverse de ses voisins, le pays est bien pauvre en art figuratif, islam oblige. Au moment où le pays dogon (Mali) imaginait ses plus beaux masques, où le Bénin s'immergeait dans le vaudou et ses représentations mystiques, le Sénégal s'évertuait tant bien que mal à convertir à coups de sabre : une fois vers l'islam, une autre vers l'animisme. L'art premier (ou la copie d'art premier) des étals de Soumbédioune, de Sandaga ou des galeries est tout sauf d'inspiration sénégalaise. Il faut attendre le XIXe siècle pour qu'on ose se représenter à plat sur " souwèr " (" sous-verre "). On se demande alors d'où viennent ces sculptures issues d'objets de tous les jours retravaillés, les mélanges de matières, de genres artistiques. La recette est simple : on expérimente. Puis la mode suit ce qui marche. Le mercantile est moteur et la copie légion. Des plagiaires, les artistes sénégalais ? Oui, non, pas tous, bien sûr, que les " artidéalistes " se rassurent. Des courants naissent chaque jour ; de toute façon, il existe les " hors normes ", les inclassables, marginaux compris. En retour, le public est fanatique. Exemple : le mbalax (ou mbalakh), le son très percussif et dit " traditionnel wolof " qui déchaîne les passions d'une majorité au pays. Aujourd'hui, Dakar est en pleine " mbalaxmania " : salsa-mbalax, rock-mbalax, reggae-mbalax, jazz-mbalax, mbalax-mbalax. Pourtant, avant que Youssou Ndour ne se lance dans ce créneau qui s'est révélé si porteur, les années 1970 avaient plutôt glorifié le jazz. Qui s'en souvient ? Parlez-en à de vieux Dakarois et vous verrez à quel point leur culture jazz est étoffée.
Un public passionné, des créateurs à l'imagination débordante (ou aux reflexes commerciaux rapides), c'est finalement un bon et particulier équilibre qui s'est installé dans ce milieu riche qu'est l'art sénégalais.
Par Xavier Ricou
En matière d'architecture, le Sénégal est une exception. Pas de souverain bâtisseur ni de château luxueux, pas de palais royal comme au Bénin ni d'empire tout puissant comme au Mali, pas de vestiges monumentaux comme au Zimbabwe, ni même de pyramides devant lesquelles les touristes prennent la pose et s'extasient. Non, au Sénégal, qu'elle soit vernaculaire, métisse, coloniale ou contemporaine, l'architecture est modeste. Pourtant, le visiteur pourra constater que cette modestie ne limite pas son intérêt, bien au contraire.
L'architecture vernaculaire. Etouffées par la puissance coloniale et les rivalités intestines, les sociétés traditionnelles n'ont jamais utilisé ni considéré l'architecture comme une marque de pouvoir. Néanmoins, le génie et l'intelligence indigènes se sont manifestés à travers un habitat strictement fonctionnel, admirablement beau par sa sobriété et privilégiant l'usage des matériaux locaux : la pierre, la terre, le bois et la paille principalement. Ce génie s'est manifesté indistinctement dans toutes les régions du Sénégal, depuis les cases de terre du Sénégal oriental, naturellement climatisées et parfaitement adaptées aux rigueurs du climat, jusqu'aux magnifiques cases à impluvium casamançaises, dont les toitures en forme d'entonnoir permettent de recueillir l'eau de pluie, en passant par les étonnantes cases à étages de cette même région, sans oublier les cases peules sahéliennes, dont la légèreté et la facilité de montage conviennent au mode de vie nomade de leurs constructeurs. Chez les peuples d'agriculteurs, les greniers à grains qui accompagnent les maisons sont une constante, quels que soient les matériaux avec lesquels ils sont fabriqués ; on les retrouve toujours surélevés par rapport au sol, afin de préserver leur précieux contenu des rongeurs. Cependant, au-delà des apparences, l'architecture vernaculaire peut être savante.
Elle répond dans tous ses détails, à l'instar de la cosmogonie dogon, à des impératifs mystiques et ancestraux, que l'on peut deviner dans l'organisation fractale de l'habitat et la forme organique des concessions.
L'architecture métisse et coloniale. Les îles de Gorée et de Saint-Louis, classées toutes deux au patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco, sont considérées comme des chefs-d'oeuvre de l'architecture coloniale. Si elle n'est pas totalement inexacte, cette appréciation doit être nuancée. Il convient, en effet, de distinguer l'architecture " métisse " de l'architecture coloniale. En effet, si elles se sont bien développées à l'époque coloniale, ces deux villes ont été bâties par la bourgeoisie métisse qui a monopolisé le pouvoir économique et politique au Sénégal pendant près de trois siècles. Cet habitat si caractéristique, avec ses arcades, ses vérandas et ses cours ombragées, a été conçu et construit par les signares et leurs descendants, qui s'opposaient souvent violemment à l'autorité coloniale. Mais, entre elles, ces villes se distinguent également : Saint-Louis a été édifié en brique de terre cuite, Gorée en pierre de basalte et Rufisque en pierre de Rufisque. Quelques matériaux importés complètent le tableau : poutrelles métalliques, tuiles de Marseille et pitchpins du Canada. Leurs fonctions d'origine ont également façonné leur physionomie et les différencient : fonctions commerciales des quais de Saint-Louis sur le fleuve, fonctions défensives qui expliquent les meurtrières des maisons goréennes construites sur la ligne des anciens remparts. Pour leur part, les colons produisaient dans ces villes une architecture monumentale destinée à impressionner les indigènes et à marquer leur pouvoir, militaire tout d'abord, administratif par la suite. Ainsi, alors que s'apaisaient les rivalités entre les nations, l'ancien fort de Saint-Louis, fondé en 1659, est-il devenu palais du gouverneur au cours du XIXe siècle. Celui édifié plus tard à Dakar par le gouverneur Roume inspirera toute une série d'ouvrages surchargés au style néoclassique, tels que la Chambre de commerce ou la mairie. Heureusement, celui-ci sera plus tard remanié et revêtira des lignes plus épurées. Quelques édifices dakarois se distinguent par leur originalité, comme la cathédrale, construite en 1931, synthèse des styles soudanien et byzantin, la gare des voyageurs et le marché Kermel, en métal et entièrement reconstruit en 1997 à la suite d'un incendie, ou le marché Sandaga, dentelle de béton armé, aujourd'hui menacé de démolition.
L'architecture moderne. Considérons comme " moderne " l'architecture qui débute dans les années 1960, à l'indépendance du Sénégal. Le président Senghor souhaite un renouveau esthétique de l'architecture, qui puiserait son inspiration dans la tradition africaine. Il définit les canons du style soudano-sahélien et invente le " parallélisme asymétrique ", dont l'obligation d'utilisation par les architectes figure encore aujourd'hui dans la loi. Le concept s'exprimera essentiellement dans les programmes immobiliers de la périphérie destinés aux classes moyennes.
En centre-ville, quelques grands buildings tenteront de reproduire la forme du baobab ou s'inspireront en façade de la forme et des couleurs des masques africains ou des tissages traditionnels.
L'apparition de la climatisation électrique marque l'abandon de la prise en compte des critères climatiques dans le vocabulaire architectural et la disparition des grandes hauteurs sous plafond, des vérandas, des persiennes, des claustras et des brise-soleil. Cela se remarque particulièrement dans les faubourgs de Dakar, où le modèle architectural dominant s'apparente à un cube entièrement recouvert de carrelage, flanqué de loggias aux formes improbables. Pour sa part, Dakar, la vieille ville blanche sur son Cap-Vert, est désormais en pleine mutation. Si elle a bien conservé ses larges avenues ombragées, les chantiers se multiplient à tous les angles de rues. La corniche en bordure de l'océan se densifie à mesure que les terrains prennent de la valeur.
D'élégants immeubles modernes à l'architecture " internationale " répondent aux édifices au style épuré des décennies précédentes. Les petites villas aux lambrequins ouvragés et aux épis de faîtage, choisies sur catalogue par les colons, disparaissent progressivement, victimes de la spéculation foncière et de la pression urbaine. Quelques-unes résistent encore, témoins anachroniques d'une autre époque.
Un patrimoine architectural en péril. Mal protégé par des règlements inadaptés, l'absence de crédits et une insuffisante prise de conscience, c'est l'ensemble du patrimoine architectural sénégalais qui est menacé de disparition. Partout, avec l'exode rural, l'occidentalisation des modes de vie et les facilités de circulation, la perte des valeurs traditionnelles est tangible. La tôle ondulée remplace progressivement la paille et le parpaing de ciment se substitue à la brique de terre crue. Autant d'hérésies architecturales, pourtant considérées comme des progrès de la civilisation. En bordure du désert, les bergers peuls se sédentarisent dans des maisons au confort incertain mais assurément moderne, tandis qu'en Casamance, les cases à impluvium se comptent désormais sur les doigts d'une seule main. Les atteintes au patrimoine sont irréversibles et les architectes, " hommes de l'art " chers au coeur de Senghor, en sont, parfois, les principaux acteurs. Au reste, l'école d'architecture de Dakar a fermé ses portes en 1991. La protection de l'Unesco, quant à elle, reste dérisoire et il est désormais fortement question de placer Saint-Louis sur la liste du patrimoine mondial en péril.
Le marché. Une femme passe. Sur elle, une étoffe aux mille feux. Exactement celle que vous voulez. Impossible d'abord de la dénicher dans l'étalage de boubous voisin. Vous finirez peut-être par la trouver, sur le stand voisin, mais ce sera pour vous rendre compte que le tissu n'a rien de plus extraordinaire que celui d'à côté.
Peut-être alors étaient-ce ses colliers de coquillages superposés ou alors ses boucles d'oreilles en pierre qui donnaient à cette femme son port de reine ? Devant le comptoir à bijoux, c'est-à-dire des nattes posées à même le sol sur lesquelles s'exposent au soleil et aux regards chaînes, colliers, bracelets, or, argent, toc ou pierres, il faut bien se rendre à l'évidence : tout cela n'est qu'artifice. L'aura des femmes ne résulte pas tant de leur coquetterie que d'une certaine dignité, d'un charisme naturel qu'il sera difficile de mettre dans vos bagages.
Il est cependant vrai que les tissus africains redynamisent les décors intérieurs, qu'on est vraiment bien assis sur ces chaises traditionnelles, deux morceaux de bois qui s'encastrent et se ramènent si facilement !
Comment ne pas être séduit par les djembés, koras et autres instruments aux sons et à la forme si beaux, et ne parlons pas des poteries, tissages et bijoux qui sont légion. Mais les éclats et la magie se perdent toujours un peu, peut-être à cause de la différence entre les soleils africain et européen.
Aussi, quel que soit le nombre de souvenirs que vous rameniez, essayez de profiter un maximum du Sénégal... au Sénégal.
Septième art en péril ? Le cinéma sénégalais avait pourtant bien commencé. Pas le cinéma des Français au Sénégal des années 1930 qui, de La Cérémonie du 2 novembre aux Travaux du port de Dakar, n'avait finalement rien proposé de précieux. Une exception toutefois : mention spéciale pour Bouboule Ier, Roi nègre qui, outre la production, impliquait une poignée de Sénégalais dans le lot des techniciens et aides (manoeuvres) et mettait en scène un singulier acteur principal, G. Milton, Blanc au visage peint en noir pour jouer le Nègre.
Les origines. L'écran et les acteurs ne se sont réellement teintés du noir d'Afrique qu'en 1955, lorsqu'un collectif de cinéastes africains dirigés par les Sénégalais Paulin Soumanou Vieyra et Mamadou Sarr a réalisé Afrique-sur-Seine. Un petit succès, qui commence avec des images d'enfants insouciants, des " petits Noirs " qui jouent et s'ébrouent dans le fleuve avant de transporter les spectateurs à Paris, les y promenant en bus ou à Vespa, sur de grandes artères reconnaissables sur les cartes postales. On prend un verre à la terrasse d'un café, on finit la soirée en dansant la salsa, tout en s'interrogeant et en commentant la vie des Africains dans cette " capitale du monde, de l'Afrique noire ", comme le commentait Vieyra lui-même. Deux ans plus tard, le groupe récidivait en signant Un homme, une vie, un idéal. Les jalons étaient posés, les envies ciné-sénégalaises provoquées.
Restait tout de même à faire du cinéma africain sur l'Afrique. Le bouillon de production des années 1960, celui qui donna au pays nouvellement indépendant son titre de Saint-Germain du continent, y a pourvu. Chantres du 7e art, Paulin Soumanou Vieyra et d'autres futures figures tels Abacar Samb Makharam, Yves Badara Diagne et Momar Thiam allaient progressivement entrer dans la danse. Blaise Senghor, fondateur de l'Union cinématographique africaine (UCINA), coproduisit, entre autres, Grand Magal à Touba, récit du pèlerinage annuel dû par tout bon mouride, un film qui obtint l'Ours d'argent à Berlin. Ces brillantes années 1960, c'est quand même aussi et surtout la révélation du talent cinématographique de l'écrivain Ousmane Sembène. Sembène et sa Noire de... marquent incontestablement cette décennie des débuts, et son " meyotage " (la débrouille du réalisateur pour financer ses films) fut le lot de nombreux amateurs qui commençaient à se faire un nom.
Des années 1970 à nos jours. Les années 1970 marquèrent un tournant. L'école Sembène céda le pas à des visions nouvelles, comme celle de Djibril Diop Mambéty, dont Touki Bouki laissa une forte empreinte. Des structures sont apparues. Le petit monde des réalisateurs s'organisa : naquirent les Cinéastes sénégalais associés (CINESEAS) et le Bureau de la cinématographie. Et enfin, l'Etat lui-même lança un certain nombre d'élans visant à booster les productions nationales. La Société nationale de la cinématographie (SNC) vit le jour en 1972 ; puis vint le tour de la Société d'importation, de distribution et d'exploitation cinématographique (SIDEC, 1973).
Autant de noms reflétant une volonté de bien faire, mais qui n'ont pas directement mené au paradis. Dans la durée, toutes ces institutions ont péché et fini par rendre l'âme. En 1978, le Fonds de soutien à l'industrie cinématographique (FOSIC) veut remplacer la SNC, puis, en 1984, c'est au tour de la Société nouvelle de production cinématographique (SNPC) de tenter de prendre le relais, en vain.
L'Etat se désengage en 1990, propose un plan de relance en 1994, et le motif semble se reproduire une fois encore. Les cinémas de la périphérie de Dakar, jadis empanachés, ont progressivement mis la clef sous la porte. Le Plaza et Le Paris, qui avaient tenu tête à la vague de transformation de salles obscures en salles dévouées au négoce jusqu'à l'aube de l'an 2000, ont fini par céder : Le Plaza a baissé le rideau puis a été détruit dans un incendie, Le Paris a été rasé. A en croire le panneau adossé à la barrière de tôle qui soustrait l'espace des regards, c'est un hôtel avec salle de cinéma qui sera construit sur ses ruines. A Dakar, où le cinéphile avait le choix entre une quarantaine de sites au début des années 1980, il ne resterait plus que cinq salles, selon la direction de la cinématographie. Environ le triple pour l'ensemble du pays.
Les temps sont durs, donc, mais la page ne semble pas être définitivement tournée. Quelques signes semblent annonciateurs de la fin de la léthargie. De plus en plus de jeunes remettent le cinéma à l'emploi de leur temps scolaire (il existe notamment à Dakar un " Média Centre " qui forme aux métiers de l'audiovisuel et du cinéma) ainsi qu'au menu de leur soirée. En plus, le secteur attend l'exécution de décrets signés en juin 2004 pour l'application d'une loi régissant " les activités de production, d'exploitation et de promotion cinématographique ".
Sans compter que, malgré la mauvaise mine des années 1980, des noms ont émergé : Moussa Sène Absa, Mansour Sora Wade, Moussa Touré, Joseph Gaï Ramaka... La bobine sénégalaise continue de projeter les réalités sénégalaises, et ces films continuent d'être primés dans la majorité des festivals africains. Mais on est loin des aspirations nobles du début, des espoirs d'un Ousmane Sembène nommé membre du jury du festival de Cannes en 1967 et qui a abandonné définitivement son inséparable pipe sur un coin de son lit. Malade, alité depuis près de six mois, l' " aîné des anciens " du cinéma africain - comme il aimait à se faire appeler - est décédé le 9 juin 2007 à Dakar.
Lorsqu'on nous dit " danse sénégalaise ", on pense sans conteste au " sabar ", nom qui désigne à la fois la danse, l'instrument et la fête organisée à l'occasion d'un mariage ou d'un baptême. Le déroulement des danses et des gestes y est alors extrêmement codifié et donne un ensemble spectaculaire, fascinant.
Le répertoire traditionnel du sabar, ses lieux de représentation et ses fonctions évoluent. La danse, comme la musique, a ses modes, ses nouveautés. Certains rythmes disparaissent peu à peu et laissent place à de nouvelles danses chaque année. Un exemple : la danse Thiéboudiène, du nom du plat national sénégalais ! Impossible de quitter le pays sans avoir assisté à une de ces fêtes ou soirées !
Mais n'oublions pas la danse contemporaine en route. La 4e édition du festival Duo Solo Danse qui s'est tenue à Saint-Louis en juin 2011 est à l'image du dynamisme de la jeune création sénégalaise, extrêmement ouverte sur la scène artistique internationale. La danse contemporaine au Sénégal, c'est aussi l'Ecole des Sables, à Toubab Dialaw, petit village situé à une soixantaine de kilomètres au sud de Dakar. Aussi appelée Centre international en danses traditionnelles et contemporaines africaines, l'école est dirigée par Germaine Acogny et a pour objectif principal la formation professionnelle des danseurs/chorégraphes de toute l'Afrique. Une référence incontournable au niveau continental et international.
La " technique Acogny " (" une synthèse des danses traditionnelles d'Afrique de l'Ouest et des danses classique et moderne occidentales ") a formé toute une génération de danseurs au Sénégal et ailleurs. Ils tissent aujourd'hui de nouveaux liens avec l'espace, questionnant les identités, interrogeant le monde contemporain, dialoguant avec l'histoire, à travers ces lignes et courbes corporelles... entre tradition et modernité.
La littérature sénégalaise est pleine d'auteurs talentueux. Parmi eux, bien entendu, Léopold Sédar Senghor, dont L'Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française a fait le tour du monde (mot de passe : négritude). Birago Diop, autre nom célébrissime, a, lui aussi, publié un livre de poèmes, Leurres et lueurs, et surtout ses fameux Contes d'Amadou Koumba. On retiendra également, entre autres : Aminata Sow Fall, auteur de La Grève des Bàttu, Le Revenant et Douceurs du bercail ; Mariama Bâ, qui a écrit Une si longue lettre et Un chant écarlate ; Cheikh Aliou Ndao, auteur des Mogariennes, de L'Exil d'Alboury ; Abdoulaye Sadji, dont Nini, mulâtresse du Sénégal et Maïmouna ne sont pas passés inaperçus ; Ousmane Sembène, auteur du très bon livre Les Bouts de bois de Dieu et Boubacar Boris Diop, qui a signé notamment Le Temps de Tamango, Les Tambours de la mémoire et Murambi, le livre des ossements. Ousmane Sembène, écrivain-cinéaste, a passé une bonne partie de sa vie à adapter ses romans au cinéma. Le Docker, Xalat ou Le Mandat se trouvent aussi écrits, noir sur blanc.
Léopold Sédar Senghor, poète avant d'être président. La poésie senghorienne est marquée par un dualisme qui découle de la double appartenance du poète, son origine sénégalaise et sa formation française. Esprit modelé par la puissance coloniale française, Léopold Sédar Senghor garde cependant des rapports profonds avec ses racines africaines.
Elles sont plutôt comme une intimité sensuelle et mythique que le poète communique au lecteur à travers des notations concernant sa flore, sa faune, sa toponymie, son coloris, et par des allusions historiques et ethnologiques, comme si le lecteur partageait avec l'auteur la connaissance de l'objet, dans une connivence d'un savoir préalable de la réalité africaine.
Les Contes d'Amadou Koumba, Birago Diop, Ed. Présence africaine. Voyage dans le temps, dans les thèmes, dans les mots. Thèmes traditionnels et originaux, bestiaire cruel et tendre aux multiples aventures, univers des hommes, immuable.
Amadou Koumba, griot, conteur, chanteur, celui qui transmet la parole, le message au fil des générations. C'est lui qui relate à Birago Diop des histoires, des contes et des légendes, rythmés par le tam-tam ou la calebasse. Une profusion de sentiments saisit le lecteur : la frayeur, la gaieté, l'émotion se relaient. Golo, le singe, est à l'origine de la réputation de Koumba qui, avec son ancien mari, ira à Maka-Kouli pour entendre la sentence du marabout. Sagesse, humour et réalisme : " On ne connaît l'utilité des fesses que quand vient l'heure de s'asseoir ! " Jeux des souvenirs, poésie des saisons, nostalgie des retours au pays, interventions de génies malicieux... Les bêtes donnent parfois des leçons aux humains, mais souvent la cruauté des hommes prend le pas sur l'innocence de l'animal. Les défauts ne sont pas l'apanage de l'homme, et les animaux - acteurs, personnages - apparaissent avec leurs travers, ruse, paresse, débauche ; tel Golo le singe, encore lui, mauvais sujet, querelleur, malicieux, menteur. Au fil des récits, Amadou Koumba, conteur, magicien, poète, nous emmène dans un monde proche et lointain à la fois, celui de l'histoire des hommes et des bêtes, toujours recommencée... S'il ne faut en lire qu'un avant de partir, c'est celui-là.
Télévision. La chaîne publique s'appelle la RTS, pour Radiodiffusion télévision sénégalaise. Mais les Sénégalais l'ont rebaptisée " Rien tous les soirs ! ". Selon eux, tous les programmes ne tournent plus autour que d'un homme et de sa famille : le président Wade. Les discours de monsieur, les bonnes oeuvres de madame, les derniers faits et gestes des enfants... Pour ceux qui ne veulent rien perdre de l'actualité française et internationale, TV5 Monde (ou TV5 Afrique) est accessible dans tous les hôtels qui proposent la télévision. Cette chaîne reprend les journaux télévisés des principales chaînes du monde francophone avec une demi-heure de décalage : le JT de France 2 est diffusé à 20h30, heure de Paris. Il faut ensuite tenir compte, bien sûr, du décalage horaire (21h30 ou 22h30 au Sénégal selon la période). Il y a de grandes chances pour les accros de télévision que cette chaîne reprenne également votre feuilleton favori. Mais un voyage au Sénégal, c'est aussi l'occasion de découvrir d'autres programmes, et notamment les émissions locales. L'Etat sénégalais a depuis quelques temps perdu sa position de monopole du petit écran national, et plutôt rapidement. 2STV, lancée en 2003 comme chaîne semi-publique, semi-privée, est devenue aujourd'hui privée, avec un penchant affiché pour la culture. En mai 2006, un Sénégalais dirigeant une agence d'informations télévisées, Ibrahima Soumaré, a lancé sa télévision sur Internet - Ouest TV (www.ouest-tv.com) -, ce qui permet de suivre souvent des informations nationales sur lesquelles la télévision publique, elle, fait le black-out. Autres télévisions nées récemment : Canal Info (informations), RDV (musique, cinéma), Net Box TV (sur Internet). Au total, une demi-douzaine de chaînes télévisées privées, en comptant celles qui émettent " traditionnellement " (par voie hertzienne), par satellite ou par Internet.
Presse. La presse est pour ainsi dire libre au Sénégal, même si Reporters sans frontières (RSF) relève chaque année quelques manquements. Outre les télévisions évoquées plus haut, le paysage médiatique se compose d'une floraison de titres, avec une vingtaine de quotidiens, des dizaines d'hebdomadaires et de mensuels ainsi qu'une centaine de radios privées commerciales et communautaires, sans compter les médias électroniques. Dakar est une des capitales africaines où la presse écrite est très dynamique et foisonne, et où l'on peut se procurer la plupart des journaux et magazines internationaux (certains avec quelques jours de retard), consultables dans les Instituts culturels français présents dans le pays (ex-centres culturels français, CCF).
Principaux quotidiens, pour ceux qui voudraient avoir une vue d'ensemble de la qualité de la plume sénégalaise (et il y en a, de bonnes plumes) sans se ruiner, voici une petite liste des principaux journaux : Le Soleil (pro-gouvernemental), Sud Quotidien, Walfadjri, Le Matin, Le Quotidien, L'Observateur, Le Populaire.
Les articles peuvent être dithyrambiques ou très critiques sur les discours du président et les actions qu'il entreprend. La politique a une place prédominante. La déontologie n'est pas toujours de rigueur et il arrive parfois de trouver dans ces journaux des reprises complètes de certains sites Internet comme afrik.com ou rfi.fr ! Le Cafard Libéré, journal satirique qui a longtemps griffé l'orgueil et la fierté des dirigeants, s'est fait ces dernières années moins régulier et il a été rejoint, en mai 2007, par un " petit frère ", Cocorico. Non, ce n'est pas français, c'est bien fait par des Sénégalais (le même groupe qui édite Le Quotidien et Week-End).
L'hebdomadaire panafricain Jeune Afrique est également très prisé ici, de même que quelques mensuels réalisés depuis Paris avec des correspondants locaux dans tous les pays du continent : Continental pour la politique, l'économie et la culture, Afrique Magazine, plus people ou encore le féminin Amina.
En outre, les Sénégalais les plus aisés se tournent aussi vers la presse internationale, française en général (Le Monde, Le Figaro, Les Echos) et même anglo-saxonne (Herald Tribune, New York Times, The Guardian).
Dernière petite chose à signaler : le premier roman-photo " made in Senegal " de A à Z s'appelle Coeurs d'Afrique et il paraît chaque mois, régulièrement, depuis la Saint-Valentin 2006. Autour de ce mensuel est en train de se constituer une niche d'auteurs-scénaristes de bluettes (et autres histoires) avec les réalités, le langage, les vêtements, les visages qui leur sont familiers. On trouve le magazine dans la plupart des kiosques.
Tradition et modernité, l'éternelle diagonale : difficile d'établir une frontière. L'art est un reflet de la société contemporaine. Dans le même temps, les inspirations sont souvent puisées dans l'héritage, ce qui donne à l'art son caractère afro-sénégalais. La musique est un exemple particulièrement représentatif. Les instruments traditionnels et une certaine sonorité ont été gardés et mélangés avec des styles plus modernes. Le résultat est le plus souvent un métissage de genre ; ainsi Seven Seconds, le tube que Youssou Ndour a enregistré avec Neneh Cherry en wolof et en anglais. En matière de modernité, le mbalax (mbalakh) assure le lien entre hier et aujourd'hui. La pointe du goût du jour est incontestablement le rap, mouvement qui modifie et codifie les sonorités dans le monde entier. La jeunesse du Sénégal s'y est convertie. On retrouve dans ce genre des mélodies en wolof, bien construites chez des figures de la scène dakaroise. Parmi les pionniers de ce style, Didier Awadi qui continue avec le groupe PBS Radikal une aventure musicale commencée avec un autre précurseur du hip-hop, Amadou Barry alias Doug-E-Tee (ou Duggy Tee) au sein du groupe PBS (Positive Black Soul). Doug-E-Tee évolue aujourd'hui en solo. Toujours dans le même créneau et installé de longue date, le trio Daara-J, un groupe dont les concerts sont de vrais rendez-vous d'affluence. Chants en wolof, français ou anglais, succession de jeux de mots puisés dans la sagesse populaire ou dénonciation virulente des torts, tares et travers de la société et de ses dirigeants.
Aux mots et aux rythmes se sont greffés ces dernières années plusieurs aspects de la culture urbaine : slam, breakdance, rolleurs, graffiti... Les amateurs de ces styles et tendances ne seront pas déçus.
Le tam-tam servait à communiquer. Aujourd'hui, c'est un ingrédient des cérémonies. Son rythme, qu'on a souvent qualifié de " monotone ", est basé sur la répétition des sons. En s'y accordant, la danse devient transe (c'est d'ailleurs le principe de la musique techno). Notez en passant que l'instrument de percussion le plus traditionnel du Sénégal n'est pas le djembé, qui se retrouve partout ailleurs, mais le sabar, plus fin, plus en longueur, qui se joue à la main et avec une baguette. Une troupe complète de sabars ne comprend pas moins de sept musiciens jouant de sabars différents s'accordant tous sur le nder, le sabar leader. Parmi les grands instrumentistes de la percussion, retenez avant tout Doudou Ndiaye Rose, qui n'a pas son pareil pour mettre le feu à une soirée. Sa réputation est sans bornes. Ce serait lui qui aurait créé le gorong yéguel, un sabar dont on joue assis, caractéristique non négligeable quand il est question de jouer pendant plusieurs heures.
La kora est un cordophone du monde mandingue à 21 cordes, dont l'on retrouve les premières traces dès la fin du XVe siècle en Afrique sahélienne. Depuis quelques années, elle devient un instrument soliste n'hésitant pas à se confronter à différents genres musicaux. La facture de l'instrument se constitue d'une calebasse, caisse de résonance sur laquelle est fixé un manche central cylindrique en bois de santal ou en acajou. Les 21 cordes de nylon sont réparties en deux rangées parallèles sur un chevalet perpendiculaire à la table d'harmonie en peau de vache. Deux baguettes situées de part et d'autre du manche permettent au musicien de tenir l'instrument dont les cordes sont jouées avec le pouce et l'index de chaque main. Un trou, jouant le même rôle que l'ouïe du violon, est percé dans la caisse de résonance souvent décorée de petits clous ou de tatouages.
L'abbaye (ou monastère) de Keur Moussa, dans les environs de Dakar, a un atelier de fabrication de kora, qui produit depuis le début des années 1970 des instruments respectant les traditions de la confection tout en portant les améliorations de la modernité. L'abbaye est célèbre pour les instruments africains de musique utilisés pour les messes et ses moines réputés à travers le monde pour leur musique, avec près d'une vingtaine de CD dans leur discographie et des distinctions internationales (prix de musique Albert Schweitzer 2003, prix des Académies pontificales 2004) - www.abbaye-keur-moussa.org
Le balafon est un xylophone composé d'un support en bois ou en bambou, sur lequel sont disposées des calebasses (caisse de résonance) surmontées de lattes de bois de tailles croissantes. Les calebasses, de tailles croissantes également, sont percées d'un ou plusieurs trous recouverts traditionnellement d'une toile d'araignée ou plus couramment d'un petit film plastique ou de papier à cigarettes.
Le nombre de lattes du balafon varie en fonction de la région où il est joué, et de l'accord qu'on veut lui donner. Il est généralement accordé en pentatonique (une gamme de 5 notes), mais il peut l'être aussi bien en diatonique (une gamme de 7 notes). Concernant l'accord pentatonique, il existe le " dioula bala " (le modèle le plus couramment joué) et le " bamanagame ". Les lattes de bois du balafon diatonique sont plus épaisses mais moins larges que celles du balafon pentatonique, la note devant être plus haute. En Afrique de l'Ouest, plus particulièrement au pays mandingue d'où il est originaire, le balafon est joué par des griots.
Le tam-tam est un idiophone à son indéterminé, contrairement au gong. Depuis l'époque coloniale, le vocable tam-tam est abusivement utilisé pour désigner n'importe quel tambour, surtout s'il vient ou est censé venir d'Afrique. Cet instrument de percussion d'origine asiatique a été apprécié par les compositeurs occidentaux en raison de l'effet mélodramatique produit par sa sonorité profonde et métallique. Il a été introduit parmi les percussions de l'orchestre symphonique au XIXe siècle. Ce que l'on appelle tam-tam en Afrique est en fait un djembé.
Orchestra Baobab (rumba). Il arrive parfois que certaines décisions politiques prises pour assouvir un désir personnel servent l'intérêt collectif. Dans les années 1960, certains membres du gouvernement sénégalais décident de créer un club, " Le Baobab ", afin d'y reposer leurs oreilles et se détendre après leurs journées de dur labeur. Un groupe vient les distraire, l'Orchestra Baobab. C'est ainsi que naît la formation qui deviendra très vite le groupe officiel de tout un pays. Ses membres viennent d'ethnies différentes et se portent en étendard de l'unification du pays. Orchestra Baobab se fait connaître dans toute l'Afrique de l'Ouest, mais les années 1980 arrivent. De nouvelles icônes apparaissent. Youssou Ndour, Xalam, la vague du mbalax modernisé emporte tout sur son passage.
La formation risquait de disparaître à jamais, mais c'était sans compter sur un certain Nick Gold, directeur de World Circuit, spécialisé dans le retour sur le devant de la scène de papys musiciens. Il part à leur recherche et les retrouve non sans difficultés ; certains sont griots, d'autres avocats. Il organise leur retour en 2001, comme il l'a déjà fait avec succès pour le Buena Vista Social Club. Nick Gold écoute de vieux enregistrements et réédite l'album Pirates Choice.
Puis le groupe reconstitué part en tournée et enregistre, cette fois avec l'aide de Youssou Ndour, le live Specialist in All Styles. La musique de l'Orchestra Baobab est incroyablement chaloupée et métissée, les chants sont en wolof, en français ou en espagnol et les influences latines y sont flagrantes. Rythmes de pachanga ou encore de cha-cha-cha se mêlent à l'essence de la musique africaine.
Youssou N'Dour (mbalax). La star toutes catégories confondues de la musique sénégalaise a surtout été lancée par sa collaboration avec des stars internationales. Jacques Higelin d'abord, puis Peter Gabriel et Neneh Cherry. La consécration universelle est récente : en 1998, il est choisi pour chanter le mondial de football à la planète.
Au Sénégal, montez dans un taxi et vous l'entendrez sortir de l'autoradio. Youssou N'Dour est une idole. Ayant débuté la scène du temps des Etoiles de Dakar, il fonde ensuite Le Super Etoile, groupe dont il est le leader et avec lequel il continue de jouer.
L'intelligence de " You " - comme on le surnomme dans le pays - est d'avoir su gérer à la fois sa musique et sa carrière. Il est aujourd'hui à la tête d'un véritable empire. Maison de production, lancement des jeunes talents sénégalais, le studio le plus performant du pays, il possède un portfolio d'actions dans tout ce qui est musical, y compris un groupe de presse. Il a reçu le 11 décembre 2002 le prix Prince Claus à La Haye (Pays-Bas) des mains de Son Altesse royale, le prince d'Orange. Cette distinction récompense tous les ans, et ce depuis 1966, une personnalité issue d'un pays émergent ayant oeuvré dans le domaine artistique ou intellectuel. C'est le deuxième Sénégalais à recevoir ce prix (la styliste-costumière Oumou Sy est une autre récipiendaire). En 2010, il sort un nouvel album : Dakar-Kingston, en partie enregistré en Jamaïque. Il a aussi ouvert une chaîne culturelle de télévision.
Doudou N'diaye Rose (percussions). Un dieu vivant au Sénégal. Peut-être moins connu sur la scène internationale que Youssou N'Dour, il transporte les foules sénégalaises avec son sabar (tam-tam traditionnel) et à la tête de son orchestre. Fondateur de la première école de percussion à Dakar, du premier orchestre de batteurs féminin, il s'est fréquemment produit en France et a joué aux côtés de grandes vedettes internationales : Miles Davis, les Stones, Alan Stivell...
Baaba Maal (folk mbalax). Voilà un artiste que vous pourriez voir dans une salle de Paname-sur-Seine, place payée au prix fort, sans le regretter un seul instant. Le qualificatif d'international prend toute sa dimension quand il s'agit de Baaba Maal.
Au Sénégal, on le surnomme " roi du yéla ", le yéla étant une musique de l'ethnie toucouleur dont il est membre, ou " le prince du Fouta ", région de la vallée du Sénégal (nord) dont il est originaire (il est né à Podor, ce qui lui vaut aussi quelque fois le surnom de " fils de Podor "). Il est adulé tant au sein du public que dans le milieu des professionnels de la musique. La panoplie de ses surnoms comprend aussi " le musicien intellectuel ", parce que le petit garçon qui a commencé à chanter à l'âge de 6 ans est passé par la case enseignement. Il a été professeur d'histoire et de géographie avant de devenir ce qu'il est aujourd'hui : un professionnel confirmé de la musique.
PBS Radikal (rap). A l'origine était le Positive Black Soul, PBS, formé par deux ex-leaders de groupes : Didier Awadi, qui se fait appeler DJ Awadi, et Amadou Barry, qui choisit le pseudonyme Doug-E-Tee. Avec des amis danseurs, ils organisent des animations dans les quartiers dits " SICAP ", du nom de la Société immobilière du Cap-Vert qui a bâti en plusieurs endroits des cités de maisons modestes.
Le PBS prend racine à SICAP Amitié 2, et de soirées de rap en clôtures de tournois sportifs en passant par des tournées internationales, des soirées en boîte de nuit et des premières parties d'artistes de renom, ils n'ont pas chômé (le rappeur français d'origine tchadienne MC Solaar, de passage à Dakar en 1992, les a remarqués et invités à partager sa scène à l'Olympia). Le temps a passé, le groupe n'a pas résisté, Doug-E-Tee (maintenant Duggy Tee) évolue en solo, Awadi continue avec une partie de l'équipe devenue aujourd'hui une pépinière de talents : Carlou D (Carlou Di), Baye Soulèye, Noumoucounda Sissoko, Thaïs Diarra... Le PBS Radikal, c'est ainsi que cela s'appelle désormais, est resté à SICAP Amitié 2, où Didier Awadi a par ailleurs créé Studio Sankara, société de production phonographique et audiovisuelle. Les derniers albums solo des deux ex-compères du micro : Présidents d'Afrique (Didier Awadi) et Fit (Duggy Tee).
Ismaël Lô (folk, mbalax, rythm'n'blues). On ose à peine présenter Ismaël Lô. Il est un véritable coup de griffe à la musique africaine, et certainement parmi les musiciens les plus médiatisés d'Afrique de ces dernières années. Son style épuré et sensible séduit. Le cocktail fait recette aussi.
Né sur les rives du fleuve Niger, de père sénégalais et de mère nigérienne, il grandit à Rufisque, près de Dakar. Versé dans la peinture, il quitte les beaux-arts pour la musique, un choix qui lui a, somme toute, porté chance. Ses concerts au Sénégal sont une bouffée d'énergie. Sur ses scènes, il invite régulièrement d'autres artistes. Une formule tout compris, en quelque sorte. Il a reçu en 2002 l'insigne de chevalier de la Légion d'honneur de la France. Parmi les albums qu'on aime : Dabah (2002) et Sénégal (2006).
Ablaye Cissoko (jazz). Ablaye Cissoko se définit lui-même comme " un jeune griot mandingue "...
Ce qu'il est effectivement. Mais il est aussi un chanteur-musicien reconnu comme jazzman, qui fait résonner sa kora d'accents du monde entier, à condition qu'il les " sente ". La kora, il la " taquine " depuis l'âge de 2 ou 3 ans entre des jeux d'enfants à Kolda, en Casamance (sud) où il est né sous le nom de Kimitang Mohamadou Cissoko.
Aujourd'hui, il est une célébrité à Saint-Louis (nord) où il s'est installé vers mi-1980 et où il dirige la formation de jazz de la région, le Saint-Louis Jazz Orchestra.
Sa réputation à l'extérieur du pays dépasse malheureusement sa renommée au plan national, malgré deux albums solo (Diam La Paix, Le Griot rouge) et plusieurs collaborations. Beaucoup de Sénégalais l'ont (re) découvert à l'occasion du Saint-Louis Jazz Festival 2007, lors duquel il a séduit un des aînés dans le style, et pas n'importe lequel : Randy Weston.
Et les autres... Les grands de la musique sénégalaise ne se résument pas à une dizaine de noms. Tous styles confondus, citons pêle-mêle Omar Pène, Ceddo, Alioune Kassé, Coumba Gawlo Seck, Cheikh Lô, Alioune Mbaye Nder, Pape Niang, Thione Ballago Seck, Wasis Diop, Yandé Codou Sène, Touré Kunda, Viviane Ndour, Waflash (un groupe que certains mélomanes réduisent souvent à sa chanteuse, Ma Sané), Xuman, Gaston, Abdou Guité Seck...
Années 1960, renaissance à la sénégalaise : Dakar est affublée du surnom de Saint-Germain de l'Afrique.
Le premier festival des arts nègres s'y déroule en 1966, mettant en scène l'ébauche d'une plastique à la sénégalaise avec des acteurs comme Mor Faye ou Moussa Babacar Sy. Le courant est porteur, et de l'ébauche s'échafaudent en une vingtaine d'hivernages une peinture et une sculpture contemporaines. Les noms apparaissent au fil des années, entre 1970 et 1980 : Amadou Bâ et ses vaches peules, la Gorée de Souleymane Keïta et de Moustapha Dimé, les géants d'Ousmane Sow, avec un petit faible pour l'abstrait, celui de Serigne Mbaye Camara, de Viyé Diba, de Seyni Gadiaga ou de Djibril Ndiaye : quatre révolutionnaires en leur temps, devenus fers de lance, aujourd'hui professeurs aux Beaux-Arts de Dakar. La constante est dans le ton, chaud, celui des rouges, des ocres sahéliens et du bleu fertilité, femme ou eau. Une peinture qui s'exporte vers l'Europe froide, celle du nord, et aux Etats-Unis où la nostalgie des racines noires oubliées fait recette.
Un style qui fait autorité dans le " créer " africain et une biennale contemporaine des arts de Dakar (Dak'Art) souffle le chaud et le froid sur le continent. Plus récemment, une nouvelle vague a quelque peu remis en question l'héritage de ses pères-professeurs, une vague plus urbaine, plus graphique, toujours aussi abstraite et qui se démarque tant dans la peinture (Ndoye Douts, Soly Cissé, Modou Dieng) que dans la sculpture (Ndary Lô). Encore un coup des avant-gardistes ! La peinture contemporaine sénégalaise mourra certainement avec le troisième millénaire. Vive la nouvelle peinture contemporaine sénégalaise !
Les galeries se trouvent principalement à Dakar. Que ce soit à la Galerie nationale des arts, au musée d'Art africain de l'Institut fondamental d'Afrique noire (IFAN) ou dans les espaces privés, il est possible d'avoir un aperçu de la création du pays. Si vous êtes un grand amateur, la meilleure solution reste de rendre visite aux peintres directement dans leur atelier.
De la peinture partout et pour tout. Depuis les devantures des boutiques jusqu'aux placards qui annoncent les programmes, en passant par les bus, les affiches publicitaires, au Sénégal, tout est peint, et beaucoup s'improvisent artistes. Le dessin naïf est partout. Là sur un salon de coiffure, une femme aux très belles nattes, ici, sur un garage, une voiture, des essieux, des boulons. Plus loin un troquet arbore fièrement une belle Gazelle, la bière locale. Par souci d'esthétisme ? Pas seulement. De nombreux Sénégalais et Sénégalaises sont aujourd'hui encore illettrés. Et ces peintures sur les façades permettent de contourner le problème.
L'art de la récup'. Les artistes africains, mais peut-être encore plus les Sénégalais, ont l'art et la manière de faire revivre les objets dans leurs oeuvres. Et à tous les niveaux. Des artisans qui proposent au marché Sandaga des miniatures de cars rapides, minibus de transport bariolé reproduit avec de la tôle récupérée sur une décharge, aux artistes les plus reconnus sur la scène nationale, continentale, voire internationale. Dans les galeries, comme dans la rue, partout l'on trouve des toiles et des statues, représentant souvent des personnages, et entièrement réalisées en matériaux de récupération. Des réalisations qui dégagent une force hallucinante.
Due au fait que les pièces assemblées n'en sont pas à leur première vie ? Les artistes en sont en tout cas certains.
Stylisme. Les Sénégalaises sont d'une coquetterie remarquable. La mode concerne la coupe des boubous, les tresses, les bijoux et le maquillage, bref, toutes ces " choses de bonne femme ", comme les appellent de nombreux hommes.
Mais il existe aussi un réseau de créateurs de couture, loin du prêt-à-porter, qui façonne des modèles originaux, d'inspiration souvent africaine, exposés lors de défilés à Dakar ou dans d'autres festivals de mode du continent.
Si les représentations religieuses (masques compris) ont souvent posé un problème eu égard à l'islam, depuis le XIXe siècle, les artistes sénégalais ont connu un engouement pour les images naïves de la vie quotidienne figées sur une matrice en verre, qui se trouvent toujours sur les marchés, les " souwèr " (sous-verre) ou fixés.
Le principe de la peinture sous-verre demande d'étaler les couches dans l'ordre inverse de la hiérarchie temporelle classique d'une toile. Ainsi l'artiste commence par signer, continue par les personnages et termine par le fond ou le décor.
Les fixés ont longtemps joué le rôle de photographie à moindre coût, et nombreux sont ceux à s'être fait tirer le portrait de cette façon-là. Cherchez la griffe du défunt Gora Mbengue, parmi les plus populaires des " souwéristes " traditionnels. Ou alors, dans la catégorie des générations montantes, celle de Serigne Diagne et de Germaine Anta Gaye, qui proposent des oeuvres plus abstraites apportant, aux dires des connaisseurs, un réel changement dans la conception naïve du souwèr classique. Ce n'est très généralement pas dans la rue que vous trouverez les oeuvres des artistes connus, mais plutôt dans le cadre d'expositions dans des galeries.
Les tableaux en sous-verre sont particulièrement visibles à Dakar le long des avenues André-Peytavin et Georges-Pompidou, dans le centre-ville. Ce sont généralement des copies faites au calque, puis reproduites au Rotring sur le verre, mais le prix des fixés de qualité peut paraître prohibitif si vous ne pensez qu'à un cadeau de voyage. Vous changerez sûrement d'avis (sur le prix et la destination de l'objet) lorsque vous verrez des sous-verre version " Naaj ". La Française Véronique Janvier, fondatrice du label, en fait de l'art de la table, et ses personnages aux couleurs d'été illuminent la vaisselle et lui donnent un air de fête.
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