Guide de DRESDEN : Arts et culture
L'artisanat allemand le plus remarquable concerne les décorations de Noël, jeux et objets en bois, souvent axés sur des mécanismes, ou encore figurines de crèche. La Saxe est justement l'une des régions les plus célèbres pour son artisanat de Noël, fabriqué en grande partie dans l'Erzgebirge (Monts métallifères proches de la frontière tchèque). En dehors des périodes de fêtes, les reliques de la RDA et les objets vintage en général sont les souvenirs les plus prisés. On peut les trouver dans les boutiques et fripperies ou encore mieux, sur les marchés aux puces. A Noël encore, le Christstollen, gâteau de Noël traditionnel à base d'amandes et de raisins de Corinthe, se conserve plusieurs jours et est facile à rapporter dans vos bagages.
Façade du Frauenkirche.
Si l'architecture de Dresde a été malmenée par l'Histoire et en particulier par les bombardements de 1945, il est aujourd'hui difficile pour le novice de faire la différence entre la ville d'origine et la ville reconstruite à partir de 1946. Pourtant, pendant de longues décennies, les Dresdois ont déambulé entre chantiers, ruines et terrains vagues, avant de retrouver leur cité comme née de ses cendres. Sous le régime de la République démocratique d'Allemagne, la reconstruction de la vieille ville put commencer mais l'architecture communiste, évidemment, laissa quelques traces à Dresde. Si l'architecture médiévale n'a pas pu être conservée, pendant quarante ans, la splendeur baroque de la capitale saxonne fut reconstruite presque pierre par pierre. Aujourd'hui, l'illusion est absolument stupéfiante dans l'Altstadt et dans le quartier baroque de la Neustadt. L'architecture moderne d'avant-guerre sut aussi trouver sa place à Dresde ; vous en trouverez quelques très beaux exemples lors de vos promenades. Aujourd'hui, Dresde est une ville prospère et en pleine expansion urbaine. Des bâtiments ultramodernes et de nombreux projets immobiliers voient le jour, destinés à accueillir une population croissante et à asseoir la réputation de Dresde comme capitale culturelle. L'architecture dresdoise est marquée, surtout dans l'Altstadt, par l'utilisation du grès de Saxe (Sandstein), qui s'oxyde lorsqu'elle est exposée. Si Dresde paraît donc noire... ce n'est pas parce qu'elle est polluée, mais parce qu'elle utilise une pierre locale !
Avant les bombardements de 1945, les racines médiévales de l'architecture dresdoise étaient encore visibles. Il n'en reste plus rien, ou presque. Altendresden, l'ancien coeur de la ville autrefois situé sur la rive de la Neustadt, était entièrement construit de maisons en bois. Il faut noter que la célèbre Frauenkirche, aujourd'hui un exemple fameux du baroque protestant, trouve ses origines au Moyen Age et fut, à l'origine, construite elle aussi en bois, au XIe siècle. Elle fut convertie en église de style roman au XIIe siècle, avant de devenir une église gothique au XIVe siècle. La Kreuzkirche, qui se trouve toujours dans l'Altstadt, fut une église de style roman lors de sa construction en 1401 et devint gothique quelques décennies plus tard. Enfin, la Sophienkirche, aujourd'hui disparue, était à Dresde un exemple typique d'architecture religieuse du Moyen Age, construite dans le style des couvents des ordres mendiants.
1530 marque le début de la Renaissance à Dresde et par là même, l'avènement d'une architecture dresdoise unique. La Georgentor, que l'on peut admirer sur la place du château dans la vieille ville, fut le premier bâtiment de la Renaissance dresdoise. Il est marqué par des influences italiennes. Sous le règne du duc Moritz, à partir de 1541, fut construit le superbe Residenzschloss, dont la chapelle, bâtie sous le régime d'Auguste de Saxe à la fin du XVIe siècle, est un exemple majeur de l'architecture Renaissance à Dresde. Cette époque est marquée par le génie d'un grand architecte, Paul Buchner, auteur de la Dresdner Zeughaus (aujourd'hui le musée Albertinum), de la Pirnaische Tor, une porte de la ville aujourd'hui disparue et de la Stallhof, superbe cour intérieure qui servait aux tournois de chevalerie, située derrière le Cortège des Princes et rattachée au Residenzschloss. Le ravissant petit palais du Grand Jardin de Dresde date lui aussi de la Renaissance.
L'architecture baroque, née en Italie au début du XVIIe siècle, doit incarner la puissance de l'Eglise et de l'Etat absolutiste à travers une architecture opulente et théâtrale. Avec 65 édifices de ce style, Dresde incarne le baroque allemand. Aucune autre ville d'Allemagne ne présente une telle profusion de bâtiments baroques ; gardez cependant à l'esprit que la plupart sont des reconstructions, même si celles-ci ont été faites avec un soin extraordinaire. Il est quasiment impossible de faire la différence avec un bâtiment baroque original ! L'ère baroque porte le sceau d'Auguste le Fort, prince électeur de Saxe amoureux des arts qui fut à l'initiative de nombreuses constructions : la Frauenkirche, le château du Zwinger, le Taschenbergpalais (de nos jours un hôtel de luxe), le Palais japonais ou encore la conversion du quartier de l'Altendresden, brûlé en 1687, en quartier intégralement baroque. Une promenade dans l'Innere Neustadt, où les maisons bourgeoises le disputent au Palais japonais et à la Dreikönigskirche, permet de se rendre compte de ce à quoi pouvait ressembler la vie dans un environnement exclusivement baroque. Le grand architecte du baroque à Dresde fut Matthias Pöppelmann, qui attaqua la construction du Zwinger, ce château en centre-ville à la taille des rêves d'esthète d'Auguste le Fort, en 1710. Sous Frédéric Auguste II fut élevée la Hofkirche, autre exemple majeur du baroque à Dresde, dont l'architecte est l'Italien Gaetano Chiaveri. Le style rococo est représenté notamment par le Palais Brühl.
L'architecture classique est caractérisée par l'admiration vouée au style pur et clair de l'Antiquité. L'architecte Zacharias Longuelune influença de son classicisme français la physionomie de Dresde à partir de 1715. C'est lui qui donna à la Frauenkirche sa coupole moins ronde, plus ovale, afin qu'elle s'élève mieux dans les hauteurs. AU XVIIIe siècle, ses élèves travaillèrent le style classique français sur des structures baroques, ajoutant des détails typiques comme des colonnes ou des lisières. La plupart des bâtiments classiques de cette époque, comme le Prinz-Max-Palais dans la Ostra-Allee ou le Palais de James Ogilvy, furent détruits pendant les bombardements alliés. On peut admirer cependant un exemple superbe d'architecture classique à la française en se rendant à la Landhaus, qui abrite aujourd'hui le Stadtmuseum Dresden et la Städtische Galerie. L'escalier, conçu par Krubsacius, élève de Longuelune, est un modèle du genre. Le XIXe siècle voit l'avènement d'une nouvelle génération d'architectes de style classique. Friedrich Thormeyer est l'un des plus prolifiques ; il est l'un des représentants du style dit " dorique de Dresde ". On peut voir un exemple de son oeuvre constuit en 1820 dans la Antonstrasse, au numéro 8, où loge l'actuel bar-restaurant branché Altes Wettbüro. L'Altstädter Wache, sur la place du Théâtre, rappelle quant à elle l'architecture classique berlinoise : rien d'étonnant à cela, puisqu'elle fut exécutée en 1833 selon les plans de Friedrich Schinkel, qui donna au vieux Berlin sa silhouette caractéristique.
Dans la veine du classicisme qui puise son inspiration dans l'architecture antique, l'historicisme cherche ses sources dans le passé, mais dans un passé multiple. Le néo-gothique à Dresde est représenté entre autres par la Fontaine du Choléra (Cholerabrunnen) bâtie en 1843 par l'architecte qui dessina l'Opéra de Dresde, Gottfried Semper. La fontaine se trouve aujourd'hui près du Taschenbergpalais, face au Zwinger. Les façades de nombreuses demeures du quartier chic de Loschwitz furent " gothicisées " dans le style gothique anglais des Tudor, comme vous pouvez le voir à la Villa Orlando (Schillerstrasse 4). Semper ne s'adonna également au style néo-roman en construisant l'Alte Synagoge, aujourd'hui détruite et remplacée par la Neue Synagoge de style contemporain. Mais c'est dans le style néo-renaissance qu'il excellera en dessinant les plans de son opéra, le Semperoper, sur la Place du Théâtre. Le néo-orientalisme eut aussi son heure de gloire à Dresde, avec le bain turc du château Albrechtsberg construit en 1855 par Carl von Diebitsch sur le modèle de l'Alhambra et la fabrique de cigarettes Yenidze, en forme de mosquée, bâtie en 1909 par Martin Hammitzsch. Mais, parallèlement, un nouveau style décoratif vient bouleverser les codes architecturaux du XXe siècle naissant.
A partir de 1896, le Jugendstil (Art nouveau) se propage en Allemagne. A Dresde, il est d'abord réservé aux maisons bourgeoises, l'architecture en vogue pour les bâtiments publics étant l'historicisme. Quand la Kreuzkirche brûle en 1897, la reconstruction intérieure est cependant confiée aux architectes Schilling & Graebner qui redécorent l'église dans le style Art nouveau. Le Jugendstil démode aussitôt l'historicisme et devient un style architectural en vogue. Conséquence des bombardements de 1945, très peu d'édifices subsistent de cette période. Un bon exemple d'Art nouveau à Dresde est la Maison des artistes de Dresden-Loschwitz, construite en 1897. Beaucoup d'architectes rejettent cependant l'Art nouveau, considéré comme trop ornemental, comme un véritable style architectural capable de défaire l'historicisme. Ils recherchent une nouvelle façon d'organiser l'habitat. Ce renouveau urbain porte le nom de Reformarchitektur et il devient immédiatement très populaire. Les bâtiments doivent respecter le style régional traditionnel, ils doivent être pratiques, fonctionnels. Les plus beaux exemples de ce style sont la Sächsisches Ständehaus, conçue pour abriter à l'époque le Parlement de Saxe, sur la Terrasse Brülsch, la Festspielhaus Hellerau et la gare de Dresden-Neustadt. Le style Reformarchitektur fut très populaire au début du XXe siècle à Dresde, ce qui explique, outre les ravages de 1945, le peu de bâtiments Art nouveau dans la capitale de la Saxe.
L'expressionnisme, un courant artistique qui se propagea d'Allemagne au reste de l'Europe du Nord de 1910 à 1924 environ, gagna aussi l'architecture. En ces temps d'agitation politique extrême, les architectes expressionnistes cherchaient à répondre aux émotions des citoyens par une architecture appropriée, soit, selon leurs termes, " décorative, bizarre et à angle aigu ". La cité Reick, dans le quartier excentré de Reick à Dresde, est un exemple de ce style, dans une version très modérée. Les artistes de l'Expressionnisme se tournent cependant bientôt vers la Nouvelle Objectivité (Neue Sachlichkeit). Prenant le contrepied de l'expressionnisme, les architectes font passer le détail au second plan et préfèrent l'abstraction des formes, qui deviennent planes et nettes. Dès l'arrivée au pouvoir des nazis en 1933, ce style architectural (comme l'expressionnisme) fut condamné comme " non allemande, étrangère et bolchévique ". Malgré les bombardements de 1945, il reste quelques traces de la Nouvelle Objectivité à Dresde, comme la maison Bischof-Wienken au numéro 74 de la Tiergarten Strasse, dans le quartier de Strehlen, construite par Albin Müller en 1925, et l'ancienne agence pour l'emploi allemande de la Maternistrasse 17, tout près du centre-ville, bâtie par Karl Paul Andrae en 1926.
Les années 1920 et 1930 voient aussi la naissance d'un " conservatisme moderne " qui récupère le monumentalisme et le minimalisme décoratif de la Reformarchitektur d'avant-guerre. L'exemple de néoclassicisme le plus frappant aujourd'hui à Dresde est le Musée de l'hygiène allemande (Deutsche Hygiene-Museum) construit entre 1929 et 1930 dans le centre-ville. Après les bombardements alliés qui détruisirent le coeur de Dresde, réduisant l'Altstadt en cendres, le gouvernement communiste décide de reconstruire selon un style néoclassique socialiste, qui cite des éléments de l'architecture baroque de Dresde en les combinant à des bâtiments néoclassiques. La rénovation de la Kreuzkirche suivit ces règles, tout comme la construction de l'ensemble de bâtiments de l'Altmarkt 21-25/Seestrasse 2-16 dans la vieille ville.
Après la mort de Staline en 1953, la politique d'urbanisation de la RDA prend un tournant important. Elle souhaite un retour à la Nouvelle Objectivité allemande avec peu de décorations et encourage l'industrialisation du secteur du bâtiment. Des éléments de tradition culturelle locale doivent être intégrés. Ainsi, l'immeuble de la Wilsdruffer Straße 3, construit en 1960, utilise la pierre de grès locale. A partir de 1958, des bâtiments de type " international " sortent de terre : Dresde construit ses premières superstructures. La maison de la presse (Ostra-Allee 20) est un exemple de gratte-ciel datant de 1966 et le Kulturpalast (1969) est, à l'inverse, un bâtiment plat typique du style dit international. Les années 1960 sont aussi les années, célèbres dans toute l'Allemagne de l'Est, de la construction des Plattenbau. Ces bâtiments voulus par le gouvernement communiste pour loger les masses sont recouverts de dalles préfabriquées et évoquent, en pleine ville, les HLM des banlieues françaises. La construction de la Prager Strasse, aujourd'hui une allée commerçante à l'orée de la vieille ville, est typique de ce style architectural destiné à reconstruire le plus vite possible une Allemagne de l'Est encore en ruines.
Des années 1980 aux années 1990, l'architecture est-allemande cherche à s'émanciper des règles architecturales imposées par l'URSS et à réparer les erreurs commises pendant l'après-guerre. Elle cherche à rendre un visage plus humain à la ville en s'écartant de la " construction de masse ". Parallèlement, un nouveau style historicisant voit le jour, qui tend à respecter l'environnement architectural déjà présent à Dresde : l'hôtel Bellevue, par exemple, évoque le baroque.
Depuis les années 1990, Dresde s'attache à reconstruire son patrimoine historique. La reconstruction intégrale de la Frauenkirche, commencée en 1994 et achevée en 2005, est le résultat éclatant de la réussite de cet effort. Parallèlement, une architecture monumentale fondée sur l'utilisation de façades en verre est en vogue, comme en témoigne par exemple la Gläserne Manufaktur élevée en 2002 par Gunter Henn, qui abrite l'usine de luxe de Volkswagen. Les façades transparentes et les squelettes de béton volontairement visibles sont aussi à la mode, comme c'est le cas avec le Parlement saxon ou le Kongresszentrum, deux bâtiments côte à côte, au bord de l'Elbe et tout près de la vieille ville. L'architecture cubique, typique du XXIe siècle, se développe quant à elle dans le domaine des bâtiments publics : la Nouvelle Synagogue et la Bibliothèque universitaire de la Saxe en sont des modèles. Aujourd'hui, la ville de Dresde poursuit sa reconstruction en centre-ville avec un nouveau plan d'urbanisation pour le Neumarkt et des bâtiments publics destinés à une offre culturelle d'envergure, comme le Kraftwerk Mitte Dresden, une usine convertie en centre culturel, et la transformation du Kulturpalast pour lui permettre d'accueillir la Philarmonie de Dresde.
L'artisanat allemand le plus remarquable concerne les décorations de Noël, jeux et objets en bois, souvent axés sur des mécanismes, ou encore des figurines de crèche. A Dresde, la tradition des marchés de Noël est longue et riche et vous trouverez des merveilles fabriquées par des artisans des monts de l'Erzgebirge : casse-noisettes décoratifs, pyramides de Noël, décorations de sapin... En dehors des périodes de fête, vous trouverez un artisanat moderne très en vogue dans la Neustadt, en particulier dans les magasins des Kunsthofpassage, ces petites cours pleines d'ateliers d'artistes. Céramique et poterie sont à l'honneur à Dresde. Et si vous pouvez casser votre tirelire, n'oubliez pas que Dresde est la ville de la plus fine porcelaine européenne !
La Szene alternative de Dresde a installé ses quartiers dans la Neustadt autrefois malfamée : c'est là qu'on trouve le street art de Dresde et des galeries et ateliers destinés à la création contemporaine. Pour qui s'aventure au nord de l'Äussere Neustadt, des complexes industriels désaffectés ont été transformés pour accueillir des artistes en résidence (musiciens, peintres, sculpteurs, performeurs)... Hellerau, plus excentrée mais dynamisée par sa Festpielhaus (salle de spectacles, aujourd'hui le lieu d'événements pointus), commence à s'imposer aussi comme nouveau centre nerveux de l'avant-garde dresdoise.
L'histoire du cinéma allemand est ponctuée de périodes fastes (les années 1920, les années 1970) mais aussi de passages à vide. Cependant, avec la Berlinale, le festival annuel du film allemand, et des nouvelles oeuvres de jeunes réalisateurs remarqués ces dernières années, on peut estimer que le cinéma occupe aujourd'hui à nouveau une place importante en Allemagne. Quoi qu'il en soit, Dresde n'est pas un lieu de production du cinéma allemand et ne compte que 17 cinémas, soit 54 salles pouvant accueillir 10 703 spectateurs. Cependant, la ville organise chaque année, en avril, un festival international de court-métrages qui jouit d'une bonne réputation, le Filmfest Dresden International Short Film Festival.
Les années 1920, sous l'égide de l'Universum Film Aktiengesellschaft (UFA) à Berlin, constituent le premier âge d'or du cinéma allemand. Issus d'un courant que l'on a qualifié d'expressionniste, Le Cabinet du docteur Caligari (1919) de Robert Wiene, Nosferatu le Vampire (1922) de Friedrich Wilhelm Murnau, Le Docteur Mabuse (1922) et bien sûr Metropolis (1925), le chef-d'oeuvre de Fritz Lang, illustrent de manière éclatante la richesse du cinéma de cette époque. La veine expressionniste se tarissant, elle sera remplacée par un courant réaliste, caractérisé notamment par les films de Georg Wilhelm Pabst (Loulou en 1929) et de Joseph von Sternberg (L'Ange bleu en 1930). L'avènement de Hitler en 1933 provoque l'exil de l'élite culturelle. Le cinéma n'est pas épargné et seuls les films qui, d'une manière ou d'une autre, font l'apologie du régime ont droit de cité. Les deux exemples les plus significatifs en sont Le Juif Süss de Veit Harlan en 1940 et Les Dieux du stade de Leni Riefenstahl en 1938, film tourné au moment des Jeux olympiques de Berlin. Après la Seconde Guerre mondiale, il faudra attendre le milieu des années 1960 et les réalisations de Volker Schlöndorff et de Werner Herzog - souvent des adaptations de textes littéraires célèbres - pour que le cinéma allemand atteigne de nouveau une renommée internationale. Dans une veine plus sociale et militante, plus provocante également, Werner Rainer Fassbinder (1945-1982) réhabilita Berlin comme ville du cinéma et livra des chefs-d'oeuvre comme Le Marchand des quatre saisons en 1971, Tous les autres s'appellent Ali en 1973 et Le Mariage de Maria Braun en 1978, sans oublier la dizaine d'épisodes télévisés inspirés du célèbre roman d'Alfred Döblin, Berlin Alexanderplatz.
Du côté est-allemand, la DEFA, la société de production nationale, a coordonné la réalisation de plus de 700 films. Parmi les plus remarqués, Der Geteilte Himmel de Konrad Wolf en 1964, La Légende de Paul et Paula de Heiner Warow en 1972 et Jacob le Menteur de Frank Beyer en 1974. Elle fut dissoute après la réunification, et les studios de Babelsberg de la DEFA sont aujourd'hui la propriété d'Universal. De grands films continuent d'y être tournés, dont Stalingrad de Jean-Jacques Annaud et le plus récent Ghost Writer de Polanski. Aujourd'hui, des réalisateurs comme Angela Shannelec, Doris Dörrie, Benjamin Heisenberg ou Edgard Reitz représentent la nouvelle génération du cinéma allemand. Wim Wenders, auteur de Paris Texas (1984), reste une référence incontournable. Parmi les films récents remarqués, Berlin Calling (Hannes Stöhr, 2008), Barbara (Christian Petzold, 2012), Oh Boy (Jan-Ole Gerster, 2012) ou encore Victoria (Sebastian Schipper, 2015) qui raconte l'histoire d'une jeune expatriée à Berlin embringuée dans un braquage de banques avec ses amis turcs. Les années est-allemandes sont peu à peu abordées dans des films, de manière humoristique, avec Sonnenallee (Leander Haußman, 1999) ou dans le grand succès Good bye Lenin ! (Wolfgang Becker, 2003), mais aussi de manière sérieuse et tragique à travers les activités de la Stasi dans La vie des autres (Das Leben der Anderen) de Florian Henckel von Donnersmarck (2006).
Fritz Lang, cinéaste autrichien (1890- 1976). Il fut à l'origine de nombreux chefs-d'oeuvre du cinéma allemand des années 1920. A l'arrivée du nazisme, Goebbels souhaite le voir à la direction du cinéma allemand, mais il préfère partir pour les Etats-Unis.
Ernst Lubitsch, cinéaste allemand (1892- 1947). Fils d'un tailleur juif de Berlin, il se fait remarquer au cinéma par ses comédies satiriques, ses drames mondains et ses reconstitutions historiques. Exilé en 1922 aux Etats-Unis, il excelle dans la comédie derrière laquelle se cache une lucidité politique. On parle de son style comme de la Lubitsch Touch.
Volker Schlöndorff, cinéaste allemand (né en 1939). Il étudie le cinéma en France, où il devient l'assistant de Jean-Pierre Melville et d'Alain Resnais, puis se fait spécialiste de l'adaptation à l'écran d'oeuvres romanesques. Codirecteur de 1992 à 1997 des légendaires studios de Babelsberg près de Berlin, il traite de l'Occupation nazie à Paris dans son film Diplomatie (2013).
Billy Wilder, scénariste autrichien (1906- 2002). Il commence sa carrière en écrivant des scénarios pour les studios UFA de Berlin. Il fuit ensuite l'Allemagne avec l'arrivée des nazis au pouvoir, réalise un premier film en France puis reprend son métier de scénariste aux Etats-Unis. Il devient un des maîtres les plus reconnus d'Hollywood dans les années 1940 et 1950 (Sunset Boulevard, Certains l'aiment chaud...).
En 2006, la chaîne ZDF décide de produire un film de fiction pour 12 millions d'euros, relatant une histoire d'amour entre un pilote anglais et une infirmière allemande, pendant les bombardements alliés à Dresde en 1945. A cette date, il s'agit de la production télévisée la plus chère d'Allemagne. Le film fut adapté du livre Der Brand (L'incendie) de l'historien Jörg Friedrich et fit un tollé après de la critique. Celle-ci considère le film comme obscène, notamment pour une scène de sexe dans un hôpital bondés de blessés et de mourants pendant des attaques aériennes qui firent plus de 35 000 morts, et anachronique (beaucoup de détails historiques ont été traités par-dessus la jambe dans le scénario). Toutefois, Dresden fut un succès de télévision foudroyant. 12 millions de spectateurs allemands se sont passionnés pour les deux épisodes de 90 minutes du film.
L'Opéra de Dresde, logé au Semperoper, possède une compagnie de très haute qualité. Dirigée par Aaron S. Watkin, elle s'enorgueillit de solistes internationaux de grand talent, comme l'Irlandaise Melissa Hamilton, médaille d'or du 8e concours international de danse de Séoul en 2011. Les productions de ballet du Semperoper sont à la hauteur de celles de Berlin ou de grandes villes au rayonnement mondial. Pendant dix ans, de 2005 à 2015, la ville de Dresde soutint la Forsythe Company, la compagnie de danse de l'un des plus grands chorégraphes de danse contemporaine, William Forsythe, qui dirigea par la même occasion le Festpielhaus Hellerau à Dresde. En 2015, William Forsythe a décidé de se retirer, mais la compagnie subsiste. Dirigée aujourd'hui par Jacopo Godani, elle est rebaptisée Dresden Frankfurt Dance Company et se produit entre Francfort et Dresde.
Deux oeuvres majeures sont à l'origine de la littérature allemande. Il s'agit du Chant de Hildebrand (IXe siècle) et de L'Epopée des Niebelungen (fin du XIIe siècle). Mais il faut attendre la Réforme, plus précisément 1534, pour lire le premier texte rédigé en allemand moderne : la traduction de la Bible par Luther. En raison d'une guerre de Trente Ans incroyablement dévastatrice, le XVIIe siècle est peu prolixe en littérature, mis à part le roman picaresque de Grimmelshausen, intitulé Les Aventures de Simplicius Simplicissimus.
En revanche, le XVIIIe siècle illumine l'Europe. Deux mouvements se partagent alors la vie intellectuelle : l'Aufklärung (les Lumières) avec le monstre sacré de la philosophie Emmanuel Kant (1724-1804) et le Sturm und Drang, en réaction au premier et dont les jeunes Goethe et Schiller se font les porte-parole. La révolte et la liberté sont mises en avant, ainsi qu'un rappel aux exigences de la sensibilité, si souvent délaissée par le siècle des Lumières. Issu du Sturm und Drang, le romantisme (Romantik) devient à la fin du XVIIIe siècle le courant privilégié de la jeunesse allemande. Il s'agit d'un mouvement philosophique, religieux, littéraire, où lyrisme et quête d'infini ont ici libre cours et qui oppose la raison à une perception intuitive et sentimentale du réel. On privilégie le passé, la nostalgie, l'esprit enfantin et la rêverie plutôt que la réalité fade de ce monde. Les très inspirés August et Wilhelm Schlegel, Friedrich Hölderlin et Novalis deviennent les premiers théoriciens de cette nouvelle façon de percevoir la réalite. Avec Jena, Heidelberg et Berlin, Dresde devient un important foyer du romantisme, avec des auteurs comme Friedrich Schiller ou Ludwig Tieck. Le Musée de la vie romantique de Dresde (Museum der Dresdner Romantik), installé dans la Kügelgenhaus qui appartenait au peintre romantique Gerhard von Kügelgen, rend hommage aux artistes de ce mouvement qui vécurent et travaillèrent à Dresde. Le grand philosophe Arthur Schopenhauer (1788-1860), fréquente régulièrement la ville de Dresde depuis ses jeunes années et lui voue un réelle passion. Il s'y installa en 1814, après ses études à Göttingen et à Berlin. Entre 1814 et 1818, il y rédigea son oeuvre majeure, Le monde en tant que représentation et d'après le principe de raison, l'un des écrits philosophiques les plus importants du XIXe siècle. En développement surtout depuis le milieu du XVIIIe siècle avec des auteurs comme Kleist, le théâtre allemand connaît une de ses meilleures périodes jusqu'en 1814. A Dresde, le poète romantique Tieck travaille comme dramaturge. Sous le régime du Gouverneur russe Renin-Wolkonski, qui demeure à Dresde depuis la défaite de Napoléon Bonaparte et par conséquent, du Royaume de Saxe, la vie théâtrale prend son essor. Le Gouverneur transforme le Théâtre de la Cour saxonne (Hoftheater) en Théâtre National (Staatstheater). On y donne les pièces de Goethe, Schiller, Lessing, Grillparzer, Kleist et Calderón, célébrant ainsi le génie littéraire allemand.
De 1868 à 1875, le dramaturge suédois Henrik Ibsen vécut à Dresde, tout comme les écrivains Ivan Tourgenïev et Fiodor Dostoïevski, jusqu'en 1871. Après la période faste du Sturm und Drang des années 1840, la ville était considérée comme un lieu de résidence pour les privilégiés, les retraités et les touristes. Parallèlement, la littérature allemande de la seconde moitié du XIXe siècle est marquée par un intérêt croissant pour la forme réaliste, qui se développe sous la plume d'Heinrich Heine et Wilhelm Busch. Plus tard, sous l'influence des écrits philosophiques de Karl Marx et d'Arthur Schopenhauer, le courant naturaliste connaît son heure de gloire avec Gerhart Hauptmann (Les Tisserands).
La littérature du début du XXe siècle est d'une prodigieuse richesse. Dans toutes les contrées de l'espace germanophone, des écrivains tels Thomas Mann (Docteur Faustus et La Montagne magique), Stefan Zweig (Amok, La Confusion des sentiments, Le Joueur d'échecs) ou Robert Musil (L'Homme sans qualité) sont de plain-pied dans leur époque où la psychanalyse freudienne élargit considérablement les champs d'interprétation. De nombreux autres auteurs connaissent le succès. Parmi les plus brillants, on peut citer Arthur Schnitzler (La Ronde), Léo Perutz (La Neige de Saint-Pierre, Le Cavalier suédois), les expressionnistes, Hermann Hesse (Le Loup des steppes) ou encore la troublante et émouvante Anna Seghers (Les morts restent jeunes). La littérature pour enfants s'enrichit de deux auteurs dresdois à succès : C'est à Radebeul près de Dresde que Karl May écrit ses romans d'aventure situés dans des contrées exotiques. Il meurt en 1912, laissant derrière lui une oeuvre prolifique, dont la série Winnetou, l'histoire d'un Amérindien qui fera l'objet d'une adaptation télévisée très populaire dans les années 1960. Plus tard, à la fin des années 1920, c'est Erich Kästner qui enchante le monde avec Emile et les détectives et d'autres histoires pour la jeunesse, écrites avec un regard amusé, lucide et observateur sur la société dresdoise contemporaine. Cet écrivain, dont l'oeuvre ne se limite pas à la littérature pour enfants, fut une figure majeure du pacifisme allemand jusqu'à sa mort, en 1974. Au lendemain de la guerre, une nouvelle génération d'auteurs, ayant à gérer l'après-Auschwitz et la reconstruction, se constitue autour du Groupe 47. Ceux qui figurent aujourd'hui parmi les piliers de la littérature allemande en font partie, comme Heinrich Böll (L'Honneur perdu de Katharina Blum), Günter Grass (Le Tambour), Hans Magnus Enzensberger (Le Bref Eté de l'anarchie) et Martin Walser (Mi-temps). Le poète Paul Celan (Pavot et Mémoire), qui passa la dernière partie de sa vie à Paris, est aujourd'hui considéré comme le plus grand poète de langue allemande de la fin du XXe siècle. De leur côté, Peter Handke (La Femme gauchère et Le Poids du monde) et Arno Schmidt (Soir bordé d'or) s'attachent à travailler davantage le langage, comme objet formel et parfois ludique.
En sa qualité de capitale du Land de la Saxe, Dresde dispose d'un nombre relativement important de médias. On compte deux grands quotidiens d'information traditionnels, le Sächsischen Zeitung (SZ) et le Dresdner Neuesten Nachrichten (DNN), à côté desquels le Dresdner Morgenpost et l'édition locale du tabloïd Bild-Zeitung sont également très lus. Dans la vallée de l'Elbe, la plupart des programmes nationaux étaient difficiles à capter, aussi le gouvernement est-allemand fit-il construire, en 1969, une antenne de télévision de 252 mètres à Dresde. La Mitteldeutsche Rundfunk (MDR) est la télévision régionale du Land de la Saxe, de la Thuringe et de la Saxe-Anhalt. Les radios Hitradio RTL, Radio PSR, Radio Energy (NRJ), Radio Dresden et R.SA, sont représentées dans la Saxe avec des programmes régionaux. Tous les blogs sur Dresde sont en allemand.
La tradition musicale à Dresde est riche et sa réputation a franchi depuis longtemps les frontières de l'Allemagne. Heinrich Schütz, Carl Maria von Weber, Richard Wagner et Richard Strauss font partie des noms célèbres du classique qui ont participé au rayonnement de la musique dresdoise. Cette tradition musicale reste florissante de nos jours, grâce à la présence de quatre institutions de poids : le Semperoper (Opéra de Semper), la Staatskapelle, la Philarmonie de Dresde et le Kreuzchor (Choeur de Sainte-Croix).
C'est sous l'impulsion du prince électeur Moritz de Saxe que commence l'histoire musicale de Dresde. En 1548, il crée l'Ordre de la maîtrise (Cantorei Ordnung), sur les fondations de laquelle la Sächsische Hofkapelle (Orchestre royal de Saxe) et les Sächsische Kapellknaben (Choeur de garçons de la Saxe) pourront émerger. Lorsque, cinquante ans plus tard, le prince électeur Jean-Georges Ier de Saxe fit appeler l'organiste Heinrich Schütz, alors à la Cour de Hesse, celui-ci, attiré par l'excellente réputation de la musique dresdoise, déménagea sans tarder à Dresde. Schütz (1585-1672) est un compositeur né en Thuringe dans une famille modeste, déjà doué de talents musicaux exceptionnels dans son enfance. Devenu chef d'orchestre à la Cour de Saxe, il devient rapidement le musicien le plus important de l'histoire de la musique baroque en Allemagne. Sa réputation retentit dans toute l'Europe. Pendant cinquante ans, Schütz influencera le style musical dresdois et s'attacha à relever sans cesse le niveau d'exigence de son orchestre. Ses oeuvres comptent de nombreuses compositions religieuses et profanes, dont trois Passions célèbres composées entre 1664 et 1668. Après sa mort, la Hofkapelle restera une institution musicale de haut niveau. Au XVIIIe siècle, Auguste le Fort, suivi par son fils Frédéric Auguste II de Saxe, encouragent l'excellence dans le domaine des arts. Johann Georg Pisendel, Johann David Heinichen, Jan Disma Zelenka et Johann Gottlieb Naumann, tous élèves de Vivaldi, dirigèrent la Hofkapelle en développant un répertoire baroque d'une grande originalité.
Carl Maria von Weber, Richard Wagner et Robert Schumann
Le musicien Carl Maria von Weber, né à Lübeck en 1786, reprend la direction musicale de Dresde en 1816. Dans sa maison près de Pillnitz, il écrit son célèbre Freischütz en 1821, l'un des premiers opéras romantiques au monde et l'un des plus célèbres opéras du répertoire allemand. C'est aussi à Dresde qu'il compose ses opéras Euryanthe (1823) et Oberon (1826), représentés dans toute l'Europe. Richard Wagner, né à Leipzig mais Dresdois depuis l'enfance, prendra sa suite à la tête de l'orchestre de Saxe en 1843. Grand admirateur de Carl Maria von Weber, il racontait que c'est ce dernier qui lui a inspiré sa carrière de compositeur. Son Vaisseau fantôme sera monté la même année à Dresde au Semperoper, suivi de Tannhäuser en 1845. Comme Weber, son maître, il s'installe à Pillnitz et y compose son opéra Lohengrin à partir de 1846. Lorsque des révoltes éclatent en mai 1849 à Dresde, dans la lignée de la révolution de mars qui appelle à plus de liberté et à l'unité allemande, Richard Wagner se joint à la colère populaire et monte sur les barricades. Lorsque la révolte est écrasée, Wagner doit fuir la ville et passera le restant de ses jours en exil. Robert Schumann, grand compositeur romantique né en 1810 à Zwickau et auteur notamment de nombreuses pièces de musique de chambre et de célèbres Lieder, dirige depuis 1844 le Choeur de Dresde. Mêlé à la Révolution de mars lui aussi, il ne choisira pas l'exil mais se retirera dans un quartier calme, au sud de Dresde.
Si Richard Strauss ne vécut pas à Dresde, c'est au Semperoper que furent présentés pour la première fois ses oeuvres, faisant de lui l'un des plus grands compositeurs d'opéra du monde. Le Semperoper est dirigé depuis 1872 par le chef d'orchestre autrichien Ernst Edler von Schuch. En 1901, il présente Feuersnot de Strauss, Elektra en 1909 et Le chevalier à la rose en 1911. Aujourd'hui, les oeuvres de Strauss font toujours partie du répertoire de la Staatskapelle.
Le choeur de la Sainte-Croix (Kreuzchor) fondé en 1300 pour accompagner la messe de la Kreuzkirche est aujourd'hui l'un des choeurs de garçons les plus renommés d'Europe. La Philarmonie de Dresde fut créée en 1870 et jouit toujours d'une excellente réputation. La vie culturelle dresdoise est rythmée par les événements musicaux, que ce soit les Dresdener Musikfestspiele, un festival fondé en 1978, le Festival de Musique de chambre de Moritzburg dans les environs de Dresde ou les innombrables concerts donnés dans toute la ville au Semperoper et dans les églises comme la Frauenkirche. En 2017, l'ancien Kulturpalast bâti par le gouvernement communiste aura terminé sa transformation et pourra accueillir la Philarmonie de Dresde dans un écrin digne de sa réputation.
Le compositeur est né à Leipzig le 22 mai 1813. Six mois après la mort de son père, sa famille emménage à Dresde. Wagner y passera une partie de son enfance nomade, brinquebalé au gré des engagements de sa soeur Rosalie, actrice de théâtre. A partir de 1831, il étudie la musique à l'université de Leipzig et achève son premier opéra, Les Fées, en 1833. Après avoir vécu, criblé de dettes, à Riga et à Paris avec son épouse, Minna, Richard Wagner retourne à Dresde en 1840 pour y donner son opéra Rienzi, le dernier des Tribuns. Dresde marque le début d'une carrière au succès fulgurant. Il devient chef d'orchestre au grand théâtre de la ville et ses premiers chefs-d'oeuvre, Le Vaisseau fantôme et Tannhäuser et le tournoi des chanteurs à la Wartburg, sont plébiscités par la critique comme par le public. Lors de la révolution écrasée par Frédéric Auguste II, cependant, les accointances du compositeur avec le milieu anarchiste le forcent à fuir Dresde. Il aura tout juste le temps d'y terminer son Lohengrin, l'un de ses plus grands opéras. Il passera ensuite douze ans en exil, produisant chef-d'oeuvre sur chef-d'oeuvre : Tristan et Isolde, Les Maîtres Chanteurs de Nuremberg, L'Anneau du Nibelung et Parsifal et menant une vie sentimentale scandaleuse. Ami des plus grands, adulé et soutenu par Louis II de Bavière, Wagner ne verra plus jamais sa terre natale saxonne et mourra à Venise en 1883, emporté par une fluxion de poitrine. Il est enterré à Bayreuth.
Avec sa silhouette baroque unique au monde, son large fleuve, ses forêts profondes et ses cieux extraordinaires, Dresde fut un modèle de choix pour les peintres paysagistes.
Le baroque. Un événement marquant de l'histoire artistique de Dresde est la constitution d'une importante collection de peintures par le prince électeur Auguste le Fort, commencée en 1722, à partir des trésors éparpillés dans plusieurs châteaux saxons. Le successeur d'Auguste le Fort, son fils Frédéric Auguste II de Saxe, enrichit fortement sous son règne (1733-1763) cette collection en achetant des toiles en Allemagne et à l'étranger. La collection de Saxe devint ainsi dès le XVIIIe siècle, l'une des plus importantes en Europe avec des toiles des plus grands maîtres. La célèbre Madone Sixtine de Raphaël fait partie de la Gemäldegalerie depuis 1754. On peut encore l'y admirer aujourd'hui. En 1746, l'Italien Bernardo Belletto (1721-1780), qui se fait appeler Canaletto comme son oncle, quitte Venise pour s'installer à Dresde, où il travaille comme peintre officiel à la cour. Il y exécute vingt-cinq toiles, dont la plupart sont des vues, devenues célèbres dans le monde entier, de la ville de Dresde. Son amour des détails lui vaut d'être considéré comme l'un des principaux représentants du védutisme, un genre pictural en vogue au XVIIIe siècle, qui consiste à représenter des paysages urbains. En 1764, Christian Ludwig von Hagedorn fonde l'Académie Royale des arts graphiques de Saxe sur les bases de l'Ecole de dessin et de l'Académie de peinture fondées en 1680. Parmi les premiers professeurs, les peintres suisses Anton Graff (1736-1813) et Adrian Zingg (1734-1816). C'est à leurs paysages de montagnes autour de la ville de Dresde que l'on doit le terme de Suisse saxonne, toujours employé aujourd'hui. A partir de 1766, Anton Graff devint peintre officiel de la Cour de Saxe. L'Académie devint rapidement le centre de la vie artistique de Dresde.
Le Romantisme. Au début du XIXe siècle, le Romantisme gagne Dresde et s'impose comme un courant artistique majeur. Sous l'influence de poètes romantiques comme Ludwig Tieck, qui vit lui aussi à Dresde, le peintre Philipp Otto Runge (1777-1810) développe son style dans la veine romantique. Il deviendra l'un des plus grands peintres romantiques allemands. Mais c'est surtout de Caspar David Friedrich (1774-1840) que l'on se souvient aujourd'hui, génie de la peinture romantique à qui l'on doit des toiles de nature tourmentée comme Le Voyageur contemplant une mer de nuages (1818) ou La mer de glace (1824). Ses discussions passionnées à l'Académie de Dresde au sujet du Romantisme en peinture et en littérature ont fait date. Plus tard, de 1836 à 1877, le peintre du Romantisme tardif (Spätromantik) Adrian Ludwig Richter (1803-1884) deviendra professeur à l'Académie des Arts de Dresde.
L'inventivité du tournant du siècle. La grande frise de porcelaine peinte du Cortège des Princes (Fürstenzug) est commencée en 1872 par Wilhelm Walther et achevée en 1876. En 1894, la Kunstakademie déménage dans ses nouveaux locaux sur la Terrasse Brühl, où se trouve aujourd'hui l'école des Beaux-Arts. Son directeur, le peintre impressionniste Gotthardt Kuehl, initie la tradition des Expositions internationales à Dresde en 1897. Le peintre Robert Sterl, un impressionniste d'importance majeure, lui succède en 1915. Vers 1900, la vie culturelle dresdoise est en ébullition. En 1905, de jeunes artistes sans formation académique fondent un atelier collectif en opposition à la Kunstakademie. Ce groupe d'artistes sera bientôt connu mondialement sous le nom de Die Brücke (Le Pont). Il réunit les peintres Ernst Ludwig Kirchner, Karl Schmitt-Rottluff, Emil Nolde, Erich Heckel, Fritz Bleyl puis, plus tard, Max Pechstein. Leur toiles expressionnistes, usant souvent de couleurs vives, esquissent une orientation toute nouvelle pour la peinture moderne. En 1919, les peintres Otto Dix et Conrad Felixmüller fondent le groupe dresdois de la Nouvelle Sécession. Dresde est alors, comme Munich, épicentre de la Nouvelle Sécession, dominée par la Nouvelle Objectivité (Neuen Sachlichkeit) qui critique la société allemande et réclame plus de conscience politique. C'est le cas des peintres Hans Grundig, Otto Griebel et Wilhelm Lachnit. Avec son tryptique La guerre (Der Krieg), Otto Dix réalise, en 1932, une oeuvre majeure et tragique de la Nouvelle Objectivité.
L'art dresdois et la guerre. Après la prise du pouvoir par les nazis en 1933, nombre d'artistes perdent leur travail et leur statut social. C'est le cas justement d'Otto Dix, qui perd sa chaire de professeur à la Kunstakademie, où il officie depuis 1926. Considérant les oeuvres qui contredisent leur idéologie comme un " art dégénéré ", les nazis retirent aux expressionnistes et aux artistes de la Nouvelle Objectivité le droit de travailler et d'exposer. La guerre meurtrit ensuite le patrimoine pictural de Dresde : les attaques aériennes de février 1945 détruisent de nombreux musées et galeries. En 1946, les trésors artistiques de Dresde sont envoyés en Union Soviétique comme butin de guerre, sous le prétexte que l'Allemagne d'après-guerre n'a pas les moyens de les conserver. Après la guerre, les écoles d'art se remettent lentement mais sûrement à fonctionner et les collections réouvrent, dont la célèbre Gemäldegalerie Alte Meister, en 1956. Les oeuvres confisquées par L'URSS reviennent à Dresde en 1958.
L'art contemporain. Aujourd'hui, la peinture contemporaine allemande perpétue une tradition d'innovation. Ainsi, Georg Baselitz, Sigmar Polke ou Gerhard Richter, artiste peintre né à Dresde, figurent parmi les artistes les plus cotés du marché.
L'un des plus grands peintres contemporains est né à Dresde le 9 février 1932. Il étudia à l'Académie des Beaux-arts de Dresde, mais quitta l'Allemagne de l'Est au début des années 1960 pour travailler à Düsseldorf. Sa peinture, qui oscille entre l'abstraction et le figuratif, est caractérisée par des lignes de couleurs très étroites et des personnages fantomatiques. L'une de ses toiles les plus célèbres est sans doute Ema - Akt auf einer Treppe (Ema - Nu dans un escalier, 1986) dans lequel figure sa première femme, dans un hommage énigmatique au Nu descendant l'escalier de Marcel Duchamp. Depuis 2007, Richter travaille la technique du vitrail dans des compositions abstraites qui évoquent l'ère numérique. Bardé de prix, c'est l'artiste vivant le plus cher au monde - en 2015, sa toile Abstraktes Bild (1986) fut vendue pour plus de 41 millions de dollars chez Sotheby's à Londres. Richter n'a cependant jamais oublié sa ville natale et a été l'un des plus généreux donateurs lors de la rénovation de l'Albertinum après les inondations de 2002. Le musée lui consacre d'ailleurs deux somptueuses salles au premier étage, qu'aucun esthète ne devrait manquer lors d'une visite à Dresde.
Morte bien trop jeune, à l'âge de 31 ans, et presque inconnue en dehors des frontières de l'Allemagne, Paula Modersohn-Becker est pourtant l'une des figures les plus importantes de la peinture expressionniste en Allemagne. Née le 8 février 1876 à Dresde, elle déménagea dans le village de Worpswede, près de la ville Brême, pour y rejoindre des artistes indépendants réunis qui prônaient un retour à la nature et aux valeurs simples de la paysannerie. Elle y épousa le peintre Otto Modersohn. Son oeuvre prolifique (des milliers de toiles, estampes et dessins) compte de très nombreux portraits à l'expressivité hors du commun, évoquant le fauvisme, le cubisme et la Renaissance allemande. Elle mourut à la suite d'un accouchement, le 21 novembre 1907.
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