Guide d'ORAN : Histoire

L'émir Abdelkader

Abdelkader est né en 1807 dans le village d'EI-Qaïtana, près de Mascara. Fils de Mahdi Ed-Din, un chef soufi influent, il apprend dès son plus jeune âge le Coran, la langue arabe, l'histoire et la géographie au contact des hôtes de la zaouïa de son père. A 18 ans, il suit son père en pèlerinage à La Mecque, à Médine et à travers le Moyen-Orient.

En 1830, à l'arrivée des Français, il participe à la défense d'Oran. Son père le fait proclamer émir (chef) le 21 novembre 1832 par les tribus de l'ouest. Combattant autant les Français que les derniers Turcs établis à Tlemcen et à Mostaghanem, il accepte de signer le 26 février 1834 un traité avec le général Desmichels qui lui accorde, entre autres, le titre de Commandeur des Croyants (Emir El-Moumenin) ce qui lui permet d'étendre son influence jusque dans la région d'Alger. En 1835, Trézel, le successeur de Desmichels, s'emploie à dénoncer l'accord de l'année précédente, ce qui relance les hostilités. Mais les défaites de Mascara et de Tlemcen font douter les alliés de l'émir qui appelle à la guerre sainte (djihad). En appelant les musulmans à combattre les infidèles, il réussit à réunir de nouvelles troupes et à infliger quelques défaites aux Français, notamment au camp de la Tafna. En juillet, on le croit enfin écrasé à Sikkak. Mais en gênant le ravitaillement des troupes françaises par les tribus locales, il parvient à restaurer son prestige, suffisamment pour que le futur maréchal Bugeaud soit envoyé par le gouvernement de Louis-Philippe pour négocier. Devant la menace grandissante d'Abdelkader à l'ouest et suite à l'échec de la première expédition contre Constantine (1836), on propose à l'émir le traité de la Tafna qui sera signé le 30 mai 1837. Par ce traité, l'émir Abdelkader obtint la reconnaissance de son autorité sur d'importants territoires et en profita pour organiser un Etat (impôts, justice, instruction et commerce) et renforcer son armée. Il fit même construire des manufactures d'armes à Médéa, Miliana et Mascara. Mais, en novembre 1839, alors qu'il doutait encore de la sincérité des Français, il prit comme prétexte le passage de la colonne du duc d'Orléans par le défilé des portes de fer pour relancer les hostilités et appeler au djihad.

Bugeaud, nommé gouverneur général de l'Algérie en 1840, choisit la manière forte en prenant systématiquement en tenaille les positions des partisans d'Abdelkader et en leur ôtant tout soutien logistique. " Anéantir tout ce qui ne rampera pas à nos pieds comme des chiens " écrit en mars 1843 de Montagnac.

Cette terrible politique de terre brûlée devant conduire à la défaite totale de l'émir, le duc d'Aumale, quatrième fils de Louis-Philippe, et le général Yusuf sont envoyés en mai 1843 à la poursuite de la Smala, l'ensemble des campements partisans de l'émir. Abdelkader se réfugie au Maroc et revient en 1845 à la faveur d'une insurrection algérienne préparée depuis son exil. Il écrase la colonne de de Montagnac à Sidi-Brahim mais, après la défaite d'Isly face à Bugeaud, il doit retourner au Maroc qui supporte de plus en plus mal sa présence dangereuse pour le sultanat. Acculé, l'émir Abdelkader se rend au général Lamoricière le 23 décembre 1847.

En février 1848, la chute de la monarchie de Juillet entraîne la création d'un gouvernement provisoire républicain. L'émir Abdelkader est emmené prisonnier en France. Après quatre ans de captivité à Toulon puis au château d'Amboise, sa liberté lui est rendue en octobre 1852 par le nouveau prince-président Louis-Napoléon qui lui propose de partir pour Brousse en Turquie tout en rendant " justice à [son] courage, à [son] caractère, à [sa] résignation dans le malheur. [... ] ayant pleine foi dans [sa] parole ".

De Brousse puis de Damas où il vivra jusqu'à sa mort, il a plusieurs fois l'occasion de tenir sa promesse de fidélité à la France, comme pendant les émeutes antichrétiennes qui agitent Damas en 1860. Appelant à l'aide les anciens fidèles qui l'avaient suivi, il aurait réussi à sauver plus de 12 000 chrétiens dont des dignitaires français en poste en Syrie. Au cours d'un voyage en France en 1865, il reçoit le grand cordon de la Légion d'honneur. Pendant la guerre de 1870, il appelle les Algériens qui osent encore se rebeller contre la France, à mettre fin à leurs exactions et à soutenir l'effort de guerre.

Après sa mort survenue le 26 mai 1883, son image a très rapidement été exploitée par les autorités françaises qui tenaient sa " conversion " pour l'exemple à suivre par les populations d'Afrique du Nord. Mais plus qu'un homme politique, chef militaire et religieux intègre, l'émir Abdelkader était aussi un homme de lettres, un philosophe et un poète idéaliste vers la fin de sa vie marquée par une grande piété proche de l'ascétisme. " Si les musulmans et les chrétiens me prêtaient l'oreille, je ferais cesser leurs divergences et ils deviendraient frères à l'extérieur et à l'intérieur "...

Chronologie
Chronologie d'Oran

902-903 > Fondation de la ville par des marins andalous sous l'égide des Omeyyades de Cordoue.

911 > Oran devient fatimide et plus tard la capitale de leur province. La ville va alterner entre domination omeyyade et fatimide pendant plus d'un siècle.

1016 > Oran redevient omeyyade.

1081 > Oran est almoravide (dynastie des Mourabitines fondée par Youssef ibn Tachfin).

1145 > Oran est almohade et dirigée par Ali ibn Abdelmoumen.

1228 > Oran est zianide sous Yaghmorassen, chef des Zianides.

1347 > Abu el Hassen el Merini s'installe à Oran devenue mérinide.

1492 > Chute de Grenade, le dernier royaume musulman d'Andalousie.

1505 > Mers-el-Kébir devient espagnole.

1509 > Oran est prise par les Espagnols.

1708 > Oran est libéré par le Bey Mustapha Ben Youssef el Mesrati dit Bouchelaghem.

1732 > Oran retombe sous le joug des Espagnols.

1790 > Un tremblement de terre ravage la ville d'Oran causant la mort de 2 000 personnes.

1792 > Le bey Mohamed el Kébir el Akhal ben Othman libère Oran des Espagnols définitivement. Oran devient chef-lieu du beylicat de l'Ouest. Sept beys vont alors s'y succéder.

1830 > Début de la colonisation française.

1831-1962 > L'armée française occupe Oran.

1954 à 1962 > Guerre d'Indépendance.

1962 à 1989 > Parti unique.

1990-2000 > Guerre civile et décennie noire.

Depuis 1999 > Présidence de Bouteflika.

2016 > Adoption d'une nouvelle constitution et organisation d'une réunion informelle de l'OPEP à Alger.

2021 > Jeux méditerranéens à Oran.

Des origines à nos jours
Préhistoire

Des fouilles archéologiques ont mis évidence des éléments datant d'au moins 100 000 ans dans la région d'Oran. On a notamment découvert des grottes du paléolithique et du néolithique : les grottes du Cuartel, de Kouchet el-Djir et celles des carrières d'Eckmühl. Ces découvertes sont le résultat de fouilles entreprises par François Doumergue et Paul Pallary dès 1892.

Beaucoup d'outils retrouvés à l'époque (haches polies, lamelles, couteaux...) sont aujourd'hui exposés au musée Zabana d'Oran. Malheureusement la plupart de ces sites préhistoriques ont disparu aujourd'hui... Ils ont été détruits par une urbanisation galopante.

Antiquité

Plusieurs sites datant de l'Antiquité ont été recensés dans les environs d'Oran. Ils révèlent clairement une présence punique (du VIe au Ier siècle av. J.-C.) comme l'atteste la nécropole des Andalouses et de nombreux objets d'artisanat (vases, lampes à huile, coupes...) retrouvés lors des travaux d'agrandissement de la plage des Andalouses, à 30 km à l'ouest d'Oran. On retrouve encore de nos jours ce type d'objets à l'occasion de fouilles réalisées dans les communes voisines de Bousfer et el Ançor.

La région à l'est d'Oran est en revanche plutôt romaine comme le montrent les ruines de Portus Magnus à Béthioua. On a retrouvé dans cette zone beaucoup de mosaïques et statues (Hercule, Bacchus, Apollon...) et on peut en admirer au musée Zabana. Non loin de ce site romain de Bethioua, un petit musée présente quelques objets de l'époque romaine retrouvés sur place (presse à huile, pierres tombales...).

De la fondation d'Oran à la domination espagnole

Oran, fut fondée au début du Xe siècle par des Omeyyades de Cordoue, avec l'assentiment des tribus berbères qui peuplaient la région. Les marins venus de l'Andalousie avaient à leur tête Mohamed Ibn Aoun, qui fut le premier gouverneur.

Dès sa création, la ville fut l'objet de convoitises de la part des tribus et dynasties de l'Afrique du Nord et de la Méditerranée et plusieurs fois elle fut saccagée, incendiée, détruite.

Elle va être tour à tour : omeyade, fatimide, almoravide, almohade, mérinide, Zianide etc. Il faut dire que son port d'alors Mers El Kebir, une rade naturelle exceptionnelle, permettait de dominer une partie de la Méditerranée : " Le port d'Oran est tellement sûr et bien abrité contre tous les vents que je ne pense pas qu'il ait son pareil dans tout le pays des berbères. La ville est entourée d'un mur et arrosée par un ruisseau venant du dehors : les bords du vallon où coule ce ruisseau sont couronnés de jardins produisant toutes sortes de fruits. C'est au port d'Oran que se fait le commerce avec l'Espagne " (Ibn Hawqel, géographe arabe).

Après la prise de Grenade en 1492, les conquistadors espagnols s'attaquèrent à Mers el Kébir et l'occupèrent en 1505. Quatre ans, après vint le tour d'Oran. C'est le cardinal Ximenes de Cisneros qui initia et finança l'expédition menée par Pedro de Navarro, l'officier marin, conquérant du Peñon du Velez marocain, de Bougie et Tripoli.

Oran l'Espagnole

La présence espagnole fut singulièrement longue puisqu'elle dura près de trois siècles. Les envahisseurs ibériques édifièrent pour se maintenir un système défensif fait d'une vingtaine de fortifications bastionnées : Mers el Kébir, Santa Cruz, St Grégoire, La Mona, San Pedro, Santiago, Castillo Viejo, Rozalcasar, San Andreas, San Felipe, San Fernando, Nascimiento, Santa Barbara, santa Teresa etc.

Le fort Santa Cruz, qui surplombe la ville, dont il est devenu un des symboles, fait partie de ces fortifications construites par les Espagnols. Malgré ce système défensif exceptionnel, les Espagnols vont être défaits par l'armée algéro-ottomane en 1708. Le bey bouchelaghem, libérateur de la ville va gouverner la ville jusqu'en 1732, quand elle tombe pour la seconde fois aux mains des Espagnols.

Durant la seconde période espagnole (1732-1792), les Ibériques vont améliorer, renforcer et élargir le système défensif. Dans un rapport sur " l'état et la valeur des places d'Oran et de Mers el Kébir " rédigé en 1734 et adressé au Roi d'Espagne, Don José Vallejo, Commandant général de la place d'Oran et de Mers el Kébir, décrit le château fort du Rozalcasar comme " le meilleur de tous les châteaux forts d'Oran ; ses dimensions régulières et ses fortifications solides le rendent imprenable et je doute même qu'on en trouve un plus beau dans une nation européenne ". Un système de tunnels reliait l'essentiel de ces fortifications. Le tout faisant d'Oran, une des villes les plus fortifiées de la Méditerranée ! Les plus grands architectes espagnols et italiens des XVIIe et XVIIIe siècles y ont travaillé, faisant d'Oran un " Présidio Mayor ".

Des Ottomans à la colonisation française

Les Ottomans vont libérer la ville définitivement en 1792. Le Bey Mohamed El Kébir, en urbaniste avisé reconstruit la ville plus loin du centre historique en raison d'un tremblement de terre qui la frappa en 1790.

La ville va se repeupler et connaître la construction de Palais du bey, de mosquées (Ben Othmane. du Pacha, de la Perle et de Sidi el Houari), de nouveaux quartiers et retrouver un port florissant. Comme sous les Espagnols, Oran va vivre deux périodes ottomanes pour une durée de 63 ans (Alger a été ottomane pendant plus de quatre siècles).

Oran, va demeurer capitale du beylicat de l'ouest et de l'Oranie, jusqu'à ce qu'elle tombe aux mains de l'armée française en janvier 1831.

Oran pendant la colonisation française

La France garde et restaure les fortifications espagnoles et réaménage la ville de fond en comble. Elle fait sauter la muraille en 1865 après la visite de Napoléon III et étale la ville sur le plateau avec la construction de l'Hôtel de ville sur la place d'armes (1886) et l'édification de beaux immeubles de gabarit haussmannien et néo-classique comme l'hôpital (1886), le lycée (1887), la cour (1889)... Tous les courants architecturaux en vogue en France vont s'exprimer à Oran avec en plus du néo-mauresque dont la coquette gare d'Oran est l'exemple le plus accompli. Les riches viticulteurs vont commanditer de grandes bâtisses Art nouveau et Art déco. C'est après la Seconde Guerre mondiale que la tendance moderne et fonctionnaliste s'impose.

Oran deviendra un grand centre d'affaires. Le journal L'Echo d'Oran va lui donner encore plus de visibilité et d'influence. On entame la construction d'un port à Oran même, en plus de celui de Mers el Kébir, qui va avoir de plus en plus une vocation militaire. Son port va se hisser au premier rang dans l'exportation du vin et autres produits agricoles.

La population oranaise est alors composée de deux tiers d'Oranais de souche européenne et un tiers indigène. La séparation était alors plutôt nette. Seuls quelques quartiers présentaient une relative mixité sociale : le vieil Oran en particulier les bas quartiers, le quartier israélite, Carteaux et quelques faubourgs.

A Oran, on parlait donc couramment espagnol, français et arabe.

De l'indépendance à nos jours

La période coloniale française prit fin en 1962. La population d'origine européenne quitta brutalement et massivement Oran et les autres villes algériennes. Les deux tiers d'Oran se vident alors...

Oran ne connaîtra de crise de logement que vers les années 1970. Des nouveaux quartiers vont naître à la périphérie reliés au centre par de nouvelles routes et dernièrement le tramway.

La population d'Oran a décuplé. Cette ville jadis orientée vers l'exportation du vin et des agrumes va devenir un grand pôle universitaire et industriel avec son grand port commercial et celui gigantesque de la ville voisine d'Arzew dont l'activité est liée au pétrole et au gaz.

Si en 1962, on parlait de deux boulevards périphériques, actuellement on réalise le cinquième périphérique qui ceinture le groupent d'Oran en englobant les communes voisines de Bir el Djir, Sidi Chami et Es Senia. Un vaste programme de réhabilitation d'immeubles de la période coloniale est en cours. 600 immeubles sont concernés principalement des rues Khemisti, Larbi Ben M'hidi, Emir Abdelkader, Mâata el Habib et boulevard Stalingrad.

Un nouvel aéroport de standard international viendra renforcer celui d'Es-Senia (aéroport Ahmed Ben Bella) déjà totalement reconstruit et agrandi au début des années 80.

Oran reste, malgré les vicissitudes historiques et économiques, une ville à l'échelle humaine ou il fait bon vivre.

En 2021, elle accueillera les Jeux méditerranéens, un challenge de taille pour la ville qui s'y prépare dès à présent avec l'augmentation de son parc hôtelier, l'amélioration de ses infrastructures routières et la construction d'un tout nouveau stade de 40 000 places, d'un village olympique (avec les annexes) qui devrait être livrés fin 2018.

C'est une occasion en or pour Oran de rayonner un peu plus encore sur la scène internationale et elle a toutes les chances de réussir son pari !


Récapitulatif sur l'histoire d'Oran réalisé avec l'aide de Kouider Metaïr, président de l'Association Bel Horizon.

Petite bibliographie sur l'histoire d'Oran

La plupart de ces livres ont été édités après les années 2000.

Oran, la mémoire (2004) et Oran patrimoine (2017) édités par Bel Horizon. Ouvrages collectifs.

Guide des monuments historiques (2007) et Oran ville de fortifications (2012) de K. Metair. Ed Bel Horizon.

Raconte moi Oran de Fatéma Bakhaï (2003) ; Ed Petit lecteur.

Oran une ville d'Algérie, collectif f. Ed CRASC (2004).

Oran, étude de géographie et d'histoire urbaines de René Lespes (1938). Réédité en 2017 par Bel Horizon.

Oran, une ville réputée pour ses fortifications

Le système de fortifications de la ville d'Oran est complexe et fait partie des mieux élaborés aux XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles. Léon l'Africain en a témoigné à travers une fresque qui décore la cathédrale de Tolède en Espagne et où on voit les hautes murailles de la ville. Preuve qu'Oran était donc déjà fortifiée, bien avant la conquête des Espagnols.

Les écussons

Oran compte de nombreux écussons disséminés dans sa vieille ville. Le plus connu est celui qui porte des inscriptions relatives à Philippe V sur la muraille du Rozalcasar et la date de 1701. Mais la ville compte d'autres écussons répartis un peu partout dans la vieille ville sur des façades et des portes de monuments. Sur la porte d'Espagne, vous pourrez notamment admirer plusieurs armoiries, on y retrouve tous les symboles des nations occidentales de l'époque : armes de Leon, d'Aragon, de Castille, d'Autriche, du Portugal... En faisant une visite avec un guide de l'association Bel Horizon, spécialiste du patrimoine oranais, vous êtes assuré de voir tous les écussons ou presque de la ville, à condition de le demander à votre guide au préalable bien sûr.

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